go [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [30 juillet 1791.] M. Polverel plutôt innocent que coupable ; mais pour la dignité de l’Assemblée nationale il faut maintenir son décret. Vous l’avez suspendu hier de ses fonctions ; et si vous ordonnez le rapport du décret, ce sera une leçon bien terrible pour l’Assemblée nationale. (Murmures.) Plusieurs membres : Aux voix, le rapport du décret 1 M. Darnaudat. Je suis autant et plus que ces Messieurs porté à justifier M. Polverel ; mais je déclare que cette manière de le justifier ne lui convient même pas, et encore moins à la dignité de l’Assemblée. (Murmures.) Aucun des faits avancés par M. Camus ne se trouve contrarié par la défense de M. Polverel, c’est sur le récit de ces faits que vous l’avez suspendu. Ces faits existent encore, et afin que Je même empressement qui vous a porté hier à Je suspendre, ne vous fasse pas mal juger aujourd’hui, je demande que, par le comité des rapports ou par un membre pris dans l’Assemblée, il soit rendu compte dans l’instant à l’Assemblée et de la défense de M. Polverel et des faits qui sont avancés. M. Regnaud (de Saint-Jean-d'Angèly) . Vous avez suspendu provisoirement hier, l'accusateur public, parce que vous ne saviez pas quel emploi il avait fait de son temps qu’il devait tout entier à la chose publique, et parce que la lettre qu’il vous a écrite ne vous donnait pas le détail qu’il vous a donné lui-même aujourd’hui. Maintenant que vous avez entendu M. Polverel, qu’il vous a rendu compte de sa conduite, l’affaire a changé de face : vous ne pouvez vous dispenser de lever la suspension prononcée contre lui, mais je crois intéressant que le décret que vous allez rendre contienne vos motifs. Je proposerais donc de le motiver ainsi : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu l’accusateur public du tribunal du premier arrondissement, et sur le compte qu’il lui a rendu de l’emploi de son temps, des diligences qu’il a faites dans l’affaire des faux assignats, et dans plusieurs autres qui ont occupé ses moments, notamment dans la recherche des faits relatifs au départ du roi, décrète que la suspension prononcée contre l’accusateur public du premier arrondissement est levée, d’après les nouveaux éclaircissements qui opèrent sa justification. » (Ce décret est mis aux voix et adopté.) M. Camus. Je demande que dans le plan que doit vous présenter le comité de Constitution sur la manière de poursuivre les accusateurs publics qui se rendraient coupables de négligence dans l’exercice de leurs fonctions, on comprenne une disposition donnant aux accusés et aux parties intéressées les moyens de faire cesser les lenteurs dont ils auraient à se plaindre de la part de la justice. Je crois que cela est nécessaire; voici le projet de décret que je propose: « L’Assemblée nationale décrète que dans le projet de loi que le comité de Constitution présentera sur la manière de forcer l’accusateur public, le comité présentera également les moyens qui seront ouverts aux accusés et aux parties intéressées, pour faire cesser les lenteurs et les négligences dont ils auraient à se plaindre contre les accusateurs publics et contre les juges. » (Ce décret est mis aux voix et adopté.) M. Buzot. Messieurs, je viens de voir dans le tableau de l’ordre du jour la lecture d’une instruction pour l’envoi de commissaires de V Assemblée nationale dans les départements. Je ne crois pas qu’on doive en ce moment-ci dégarnir l’Assemblée de 30 ou 40 patriotes. Je crois d’ailleurs que cette mesure est parfaitement inutile, alors surtout que nous recevons de tous les départements les nouvelles les plus satisfaisantes ; elle serait même, à mes yeux dangereuse, en ce que la présence des commissaires dans les départements affaiblirait nécessairement, anéantirait même la responsabilité des ministres. Mais une raison déterminante, selon moi, c’est que nous approchons du moment où nous allons nous occuper de la révision des décrets et qu’il est important que tous les députés patriotes, tous les membres de cette Assemblée, qui ont montré le plus de zèle à maintenir et à perfectionner les principes de l’acte constitutionnel, soient ici à leur poste. Je veux dire que cette révision ne présenterait pas d’inconvénients sans les bruits qu’on se plait a répandre ; 290 membres surtout peuvent nous donner à ce sujet des inquiétudes. Il est nécessaire que tout le monde soit ici lorsqu’il s’agira, par exemple, de déterminer si le décret sur la noblesse sera constitutionnel ou réglementaire.... (Murmures.) M. Martineau. A l’ordre, Monsieur Buzot! M. d’André. Il ne sera jamais question de cela: ce sont des calomnies dont on se sert depuis longtemps pour troubler l’ordre. M. Buzot. J’avais des inquiétudes que les murmures de l’Assemblée tranquillisent ; mais il est essentiel que la séparation des articles constitutionnels et réglementaires soit parfaitement faite. C’est là où l’on reconnaîtra si l’Assemblée était digne de la confiance de la nation ( Murmures ) : je n’en doute pas, Messieurs, si les députés patriotes sont ici. Je conclus, Messieurs, et je demande l’ajournement de l’instruction et de l’envoi des commissaires jusqu’après la Constitution et la révision consommées. M. d’André. Le préopinant aurait bien pu se dispenser de sa motion et s’épargner la peine de jeter des doutes sur les intentions de l’Assemblée, car il était déjà convenu et toute l’Assemblée sait que le décret dont il est question, concernant l’instruction et l’envoi de commissaires, devait être ajourné après la fin de la Constitution. Je remarque que nous devons tous être réunis pour la révision et qu’on devrait bien cesser de jeter la trouble et la désunion dans l’Assemblée en supposant toujours qu’il s’élèvera des réclamations contre les décrets constitutionnels. Non! nous ne le souffrirons pas. (Fi/s applaudissements.) 11 y a assez longtemps que l’on se sert de ces moyens-là, que l’on publie qu’il y a parmi les membres de cette Assemblée, qui n’ont signé aucune protestation, des gens qui cherchent à revenir contre ce décret sur la noblesse. Eh bien! Messieurs, l’Assemblée a assez fortement prouvé qu’elle ne permettait point qu’on parlât contre les décrets constitutionnels ; et nous prenons tous ici l’engagement, ou du moins je le prends pour moi... [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES» (30 juillet 1791.1 33 A gauche : Tous! tous! M. d’André... de m'v opposer de tout mon pouvoir. ( Applaudissements répétés.) Je souhaite ardemment que tous les patriotes de cette Assemblée soient aussi scrupuleux que moi : alors on n’attaquera aucun des décrets constitutionnels. Ainsi, je demande que d’après ces motifs, d’après ce que je viens d’avoir l’honneur de dire et dont l’assentiment de tous les membres patriotes de cette Assemblée prouve assez la grande vérité, je demande, dis-je, qu’on ne jette plus parmi nous des soupçons et des méfiances continuelles et que nous marchions dans ce moment d’un commun accord à l’achèvement de la Constitution. {Vifs applaudissements.) Ainsi, je demande avec le préopinant que l’envoi des commissaires soit ajourné jusqu’après la révision. (L’Assemblée, consultée, décrète que l’instruction et l’envoi des commissaires dans les départements seront ajournés jusqu’après la Constitution et la révision consommées.) M. de Champagny, au nom des comités militaire , des colonies et de la marine. Messieurs, les trois comités militaire, de marine et des colonies se sont occupés des troupes coloniales nouvellement arrivées en France , et de la nécessité de prendre à leur égard une détermination provisoire. Trois régiments coloniaux viennent d’arriver en France : la Martinique, la Guadeloupe et le Port-au-Prince. Tous les trois ont été renvoyés, accusés de délits graves, et d’une insubordination qui rendait leur service inutile et leur présence dangereuse. Je ne vous rappellerai pas tous les torts dont on les accuse. 11 vous en a été rendu compte dans plusieurs circonstances. Vous n’avez pas oubné que le régiment de la Martinique, après avoir méconnu l’autorité du gouverneur, de ses officiers, après avoir emprisonné son colonel, s’était emparé du fort Bourbon, et y était devenu le principal instrument de la guerre civile qui a désolé cette malheureuse colonie. Quant au régiment de la Guadeloupe, vous savez qu’un détachement très considérable de ce régiment était passé de la Guadeloupe, d’après un ordre du comité colonial, et sur un ordre arraché àM. Fleury, gouverneur, alors en prison et sur le point de perdre la vie, à la Martinique, avait pris la part la plus active aux troubles ; que l’autre partie du régiment de la Guadeloupe était venu le rejoindre sans aucun ordre ; que lorsque l’Assemblée coloniale de la Guadeloupe a commandé à ce régiment de revenir à son poste, lorsque le gouverneur, devenu libre, lui a donné le même ordre, il a refusé d’obéir à cette réquisition. Vous savez aussi que le régiment du Port-au-Prince, longtemps fidèle à la voix de son chef, avait servi utilement la chose; mais un faux décret, de fausses nouvelles l'avaient jeté dans une erreur bien cruelle, puisque son colonel en a été la victime, et vous avez entendu à cette barre les officiers de ce régiment accuser leurs soldats d’avoir été les principaux auteurs de l'assassinat de leur colonel. Les deux régiments, de la Martinique et de la Guadeloupe sont renvoyés en France, d’après une délibération de 3 commissaires envoyés dans la colonie. Le régiment du Port-au-Prince a été renvoyé en France, et par la municipalité du lre Série. T. XXIX. Port-au-Prince, et par le concours des troupes et des gardes nationales de Saint-Domingue. Dans un tel état de choses, lorsque 3 régiments accusés de délits graves rentrent en France, les comités m’ont chargé de vous proposer, non pas de les faire juger dans ce moment, parce qu’ils n’ont point encore réuni tous les renseignements nécessaires à leur égard, mais de les tenir dans un état de suspension qui annonce l’intention où vous êtes de faire examiner leur conduite, et les condamner, s’il y a lieu. Voici le projet de décret qu’ils ont agréé à l’unanimité. « L’Assemblée nationale, ouï le rapport de ses comités militaire, des colonies et de marine, décrète ce qui suit ; Art. 1er. « Il sera sursis à l’organisation des troupes coloniales actuellement en France, et toute promotion sera suspendue parmi elles, dans quelque grade que ce soit. Art. 2. « Les soldats de ces troupes seront tenus en état de subsistance et assujettis au service ordinaire des places dans les lieux où ils seront cantonnés. Art. 3. « Les officiers de ces corps qui en sont séparés pourront être autorisés à ne pas les rejoindre, en conservant leurs appointements. Art. 4. « Le ministre de la guerre pourvoira, par les moyens convenables, au maintien de la police et de la discipline parmi les troupes coloniales actuellement en France. » (Ce décret est mis aux voix et adopté.) M. de Champagny, au nom du comité de la marine. Messieurs, par les articles 1 et 2 du titre 1er du nécret relatif aux écoles de mathématiques el d'hydrographie de la marine, vous avez décrété que l’examinateur des aspirants et les 2 examinateurs hydrographes seraient remboursés en sus de leur traitement des frais de poste de leurs tournées (1). Le comité de la marine a pensé, après un calcul précis des frais de voyage auxquels sont assujettis ces examinateurs, qu’il y avait lieu d’accorder à chacun d’eux une somme de 4,800 livres. Nous vous proposons donc de modifier dans ce sens les articles dont il s’agit et d’ajouter au décret une disposition ainsi conçue : « Les frais de voyage de l’examinateur des aspirants et de ceux des examinateurs hydrographes seront évalués à 4,800 livres par année.» (Cette motion est adoptée.) En conséquence, les articles 1 et 2 du titre I0r des décrets sur les écoles de mathématique et d’hydographie de la marine, sont modifiés comme suit : Art. 1er. « Il y aura un examinateur des aspirants de la marine, dont les fonctions seront d’être juge des concours qui seront ouverts, chaque année, dans les principales villes maritimes, tant pour les places d’aspirants de la marine, que pour celles (1) Voy .Archives parlementaires , tome XXVIII, séance du 21 juillet 1791, page 477. 3