[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 119 février 1791.J 349 a tou? les caractères d’un projet de justifier les nouveaux crimes q ,e l’on prépare, afin de persuader que Pou n’aura fait qu’user de représailles ; Que Froment , réfugié à Turin, ajoute à ses fureurs précédentes le mensonge impudent de promettre aux ligueurs le secours d’un prince expatrié, circonstance en laquelle il s’accorde, ainsi qu’en plusieurs autres, avec M. de Galonné, qui, jadis ennemi déc aré du clergé, ne parle maintenant que de religion, et invile ce prince à en prendre la défense; qui justifie les délibérations incendiaires de Nîmes et d’Uzès, que toute la France a détestées et dénoncées; et qui, après avoir lâché son verbeux commentaire des Actes des apôtres, s’est rendu à Turin. Nous ayons exposé les circonstances précises des faits; nous déclarons que le détail en est appuyé sur des preuves légales qui sont aux comités des recherches et des rapports. Froment a consiruitun roman incendiaire, tiré de son cœur vindicatif et ulcéré. Et son mémoire, qui accuse formellement l’Assemblée nationale d’avoir excité les protestants de Nîmes à massacrer les catholiques, a prouvé aux moins clairvoyants que les protestants n’étaient qu’un pretexte pour arriver à une guerr-' civile. Les municipaux de Nîmes accusés, mandé? à labarredans la personne du sieur de Marguerittes, leur maire, susp ndus de la fonction de requérir la force publiq e, n’accumulent leurs inculpations que sur l< s procès-verbaux qu’eux-mêmes ont faits et qu’ils ont toujours refusé de communiquer aux intéressés. Ils citent les témoins qu’eux-mêmes ont fournis; ces témoins sont les houppes rouges, les capitaines ligueurs, les conspirateurs décrétés. Pour nous, nous n’attestons rien que sur des pièces authentiques, sur les procédures et sur cette information tant redoutée, des municipaux, parce qu’elle doit mettre au jour des vérités importantes. Des romans justificatifs ont été répandus dans touie la France; les libelles calomnieux sont venus au secours; mais la calomnie n’a qu’un terme, et il faut que la vérité paraisse dans tout son jour. Le comble du forfait, mais heureusement aussi de l’absurdité, a été d’attribuer aux protestants les manœuvres abominables qui ont produit tant de malheurs, et dont ils étaient eux-mèmes destinés à être les victimes; les protestants qui ne forment que le plus petit nombre; les protestants qui attendent tout de la paix et qui perdaient tout dans la guerre; les protestants qui ne demandent rien, car, en obtenant le droit de cité et en participant à la déclaration des droits, ils ont tout obtenu; les piotesiants dunt la patience est la vertu coutumière et à laquelle ils ont été façonnés par une longue habitude. Mais nous déclarons formellement, et sur les preuves que nous en avons reçues, que les gardes nationales, qui ont battu Froment et ses satellites agresseurs, ne sont pas des protestants seulement, mais les catholiques et les protestants du pays, mais les patriotes; Que le club des amis de la Constitution, vigoureux aniagonisie de la municipalité, le club composé de cinq cents citoyens, l’élite de la ville, est composé de catholiques et de protestants; Que les gardes nationales étaient également mixtes; qu’elles le sont encoie, malgré tout ce qu’on tente pour en détacher journellement des catholiques; Que l’état-major de la garde nationale est catholique; Que le procureur du roi qui a porté plainte, que les juges qui l’ont reçue sont tous catholiques; que les directoires, les municipalités qui ont dénoncé ou blâmé les ligueurs et les municipaux sont, pour la plus grande partie, catholiques; Qu’en un mot, les catholiques du Languedoc ne le cèdent en patriotisme à aucun des autres citoyens et hommes libres du royaume; qu’ils ont de quoi s’indigner de l’outrage qui leur est fait dans toute la France par une troupe de ligueurs dont l’hypocrisie ne sert qu’à couvrir les regrets vindicatifs de l’aristocratie au désespoir; Qn’ils cessent d’espérer, ceux qui voulaient une guerre religieuse ! les Français connaissent leurs pièges ; deux ans d’exercice les ont prodigieusement éclaires. Non, les Français du dix-huitième siècle n’auront pas la folie de s’égorger pour des intérêts particuliers et d’exposer leur Constitution au choc d’une guerre civile. Le comble de la scélératesse est d’en avoir formé l’abominable complot; le comble de la démence est de penser qu’ils nous feront rétrograder avec eux au seizième siècle. Jean-François-Mathieu Soustelle, citoyen d’Alais; Jean-Mi« hel Chambon, citoyen d’ÎJzès; Jean-Henry Voülland, citoyen d’Uzès, députés du département du Gard. SIXIÈME ANNEXE. RÉPONSE GÉNÉRALE A TOUS LES FAUX-FUYANTS DE LA MUNICIPALITÉ DE NIMES, par Chambon , Voülland , Soustelle, Meynier, députés du Gard. AVERTISSEMENT. La municipalité de Nîmes, instruite que la procédure ordonnée par le décret de l’Assemblée nationale du 17 juin est concluante contre la municipalité et contre les autpurs des malheureux désordres commis dans cette ville, a fait répandre « que l’information demeure comme nou avenue et qu’elle soit renvoyée à un tribunal hors do département », moyen peu usité, mais qui lui offre l’espoir d’obscurcir les lumières qu’on trouverait trop aisément sur les lieux. Après avoir récusé les juges « que l’esprit de prévention ou de crainte a dirigés», elle inculpe le procureur du roi, dont le ministère l’incommode; die l’accuse de partialité. Le comité des recherche? est prêt à faire son rapport; elle demande « que les pièces déposées au comité des recherches soient incessamment adressées à la partie pub ique d’un tribunal hors du département ». Le club patriotique de Nîmes l’a dénoncée à l’Assemblée nationale; elle dit que c’est par haine de sa religion, quoique le club soit composé de catholiquesetde protestants, elle -u b-titue toujours le mot protestants au mot patriotes. Les électeurs du département, assemblés pour la nomination des membres de l’administration, ne lui ont pas rendu des tém lignages favorables : elle uit qu’on les a circonvenus, qu’on l’a calomniée auprès d’eux. Le directoire se plaint à i’A --semblée nationale 360 [Assemblée nationale.] que la municipalité l'arrête dans ses opérations; un roman anonyme, que sa clandestinité condamne au mépris, »t qu’on répand actuellement dans le public, inculpe le directoire. Les commissaires du roi ont rendu à la municipalité des témoignages peu avantageux; le roman inculpe les commissaires du roi; il dit que de trois, il y en a deux protestants, et cependant il n’y en a qu’un. Il est prouvé, par |a procéçjpre, qqe des hypocrites, jo ant le zèle, ont égaré une partie du peuple catholique, et l’ont engagé � s’armer contre les proiesjants; elle dit que les protestants ont formé et qxecüié le projet de massacrer les catholiques. 1 Une foule de témoins ont déposé d’une manière effrayante pour elle ; elle dit que l’ esprit de par ti les a désignés : elle, oppose à la procédure juridique l'iiiforniatiuii qu’elle assure avoir fait elle-même, et qui est évuipipniept én sa laveur. Ainsi, tout le monde calomnie cette’ municipalité; cjtby ns, procuieur du poi, juges, témoins administrateurs, élecleùrs, co ippjssairè� ilu roi, municipalités voisines, gardes nationales, tous sont ses ennemis, tous sont prévenus, tous atla-ueut son innocence. Cependant, oo nous pressa? e répondre à s-s romans ; nous n’y ferons pas d’autre réponse que de publier un extrait des informations laites à raison des troubles survenus à Nîmes, et nous observerons qu’il y aurait encore piès de 200 témoins à entendre, ce qui lait peut-être une des craintes d la municipalité, et qui lui fait demander naïvement que la procédure demeure comme non avenue . Signé : Jean-Michel Cliambon ; Jean-Henri Voul-land, citoyens d’Uzèsj Sousteile, citoyen d’Âlais : 'Jean-Paul Rai aut ; Ftienne Meÿnier, citoyens de Nîmes, députés du département du Gard. - RÉPONSE puisée dans les différentes informations faites à raison des troubles survenus à Nîmes. Sommaire des événements arrivés à Nîmes, depuis le décret de l’Assembién nationale du 2 novembre f7 «9, qui decPielcs biens ecclesiusiiqu» s à la disposition de la nation ; extrait des preuves écrites, notamment des informations fa tes à la requête du procureur du roi au sénéchal de Nimes, à la suite des plaintes par lui portées les 31 mars, 10 mai et 7 juillet 1790, et encore des informations sur les événements du mois de juin. Le 8 décembre 1789, assemblée nocturne dans l’église des pénitents; M. Ctémenceuu, vicaire général de M. l’évêquq de Nîmes, et curé de la paroisse Suint-Casior, munie en chaire, et lait convenir les personnes assemblées, de celles à nommer pour presidents, secrétaires et scrutateurs dans les prochaines assemblées, pour la formation de la municipalité (1). Dans le courant du mois de décembre, autre assemblée nocturne chez M. le curé Clemenceau; elle est formée, entre autres, des sieurs Froment, (1) y oyez; la déposition de l’abbé de Rochemaure, vicaire gçnéraf, 99e témoin de l'information sur la plainte àr addition, du "I juillet, laite par déepet de i’Assem-lee nationale du 17 juin, et la 68° de ladite information. (19 février 1791.} Folacher, Vidal (procureur de la commune), Vigne, Michel, conseiller (commissaires de la délibération du 20 avril) Durant, Pouilhache, Cambacérès, l’abbé Lapierre, théologal (notables), et l’abbé de Ruphemaure. il y estconvenu desmoyens à prendre pour composer la municipalité, et cUen exclure les non-catholiques (1). Dès je mommt de l’avis de la convocation des citoyens pour procéder à la nomination de la mutiL i alité, il se forma clive' s comités, pour fabriquer des listes, rhez l’abbé Cabanel, l’abbé Lapierre et Michel, conseiller. Le-curés de Bouil-largues, Rodi la i et Gourbessàc (ce sont trois paroisses dépendantes de la municipalité de Nîmes) montent eu chaire, exhortent leurs paroissiens à se rendre à Nimes pour voter dàns leur section, et y mettre les listes qu’on leur remettra, en leur payant leurs journées. Ces listes sont en elfet distrinuées avec le salaire de chaque volant, par MM. Madon, curé de Bouil-largues ; Boyer, curé de Rpri-més, quels qu’ils fussent. La municipalité de Nîmes répondit que le bon ordre et .a fratérnité régnaient dans la cité, que s’il survenait du trouble, elle comptait sur les secours de ses yoi-sius, et surtout de la ville d’Arles et de celles de la côte du Rhône; ce q i signifiait qu’on opposerait les catholiques aux Cévenols, la plupart protestants. Ainsi la municipalité de Nîmes se livrait au doux espoir d’une uuerre de religion (5). Dans le même morne < t, il se tenait des assemblées secrètes dans l’église des Pénitents; à l’une il fut dit par l’orateur : « Les Parisu-tis sont les maîires de disposer de leurs biens et de leurs corps, mais non pas des nôtns; il est convenu que nous devons faire (les catholiques de Nîmes) (1) Voyez les dépositions des f5 et 16* témoins de ladite informalion sur la plainte du 3l mars. (2) Voyez les dépositions des 157, 158 et 168* témoins de l’information faite à la suite de la plainte par addition du 7 juillet. (3) Voyez les dépositions des 153, 161 et 167* témoins de ladite information. (4) Le journal et le désaveu du père Bouchon ont été envoyés au comité des recherches de l’Assemblée nationale. (5) Les lettres furent insérées dans le journaj du substitut du procureur de la commune. ' * *' r” 352 [Assemblée nationale.] le premier pas; qu’aussitôt les principales villes du royaume en feroot de même. » Ce premier pas ne pouvait être que la tentative d’une coûtre-révolution (1). Le 20 avril, nouvelle assemblée dans l’église des Pénitents; les ) citoyens sont sollicités de s’y rendre, pour y signer une délibération devenue fameuse; les curés de Bouillargues, Rodillan et Courbessac montent en chaire, pourexhorter leurs paroissiens à signer cette délibération (2). Un dimanche du mois d’avril, l’abbé Tempié, notable, momé sur le marchepied de l’autel de lachapelle du Saint-Sacrement, dans l’église cathédrale, exhorte vivement les c> mgréganistes, assemblés, de signer la délibération des Pénitents, observant qu’elle avait pour but de procurer au roi sa liberté, et ajoutant ces mots incendiaires : « L’Epltre du jour annonce aux catholiques qu’ils doivent se soutenir jusqu’à la dernière goutte de leur sang (3). »> Les commissaires nommés par cette délibération la présentent à la municipalité, pour qu’elle y donne son adhésion ; ce qui allait être fait, sans les vives représentations du sieur Vincent Vais, officier municipal ;il l’a lui-même déposée ainsi que fi n des secrétaires-greffiers; ils sont les 95* et 167° témoins de l’information sur la plainte du 7 juillet. Des cris de : vivent le roi et la croix ! à bas la nation ! ee font entendre dans toutes les rues; les protestants y sont publiquement qualifiés de gorges-noires; des écrits incendiaires sont distribués, des placards menaçants affichés ; les catholiques antipatriotes arborent une cocarde blanche; Umt cela est autorisé parle silence de la municipalité, qui prend une délibération ie 22 avi il, par laquelle elle assure quq les citoyens n’ont pas cessé de vivre en f i ères, tandis que le sang avait coulé, que le vengeur public en avait rendu plainte et fait informer depuis le 31 mars. Le 27 avril, le club des Amis de la Constitution dénonce à la municipalité les dangeis qui mena-c nt les bons citoyens; ils lui remettent une foule d’éciits incendiaires, notamment celui intitu é : Avis à l’armée française ; i s lui demandent une proclamation pour eclairer le peuple, lui faire connaître les bienfaits de l’Assemblée nationale, faire ce.'Ser toute distinction ei qualification odieuses, et prévenir de nouveaux malheurs. Cette pétition fut remise à la municipalité, qui déclara n’y avoir pas lieu à délibérer (4). Sur la fin d’avril, M° Chevalier, procureur, ayant occasion d’aller chez Froment, receveur du chapitre, il y voit des fourches, et que Froment fournissait des habits, des armes et de l’argent pour sa compagnie, et pour d’autres. Me Chevalier en fait part à M. le maire, par une lettre, ainsi que des ouvrages incendiaires qui s’imprimaient chez Baume. Le maire a la lâchem de remettre cette lettre à Froment, qui dès lors menace Me Chevalier de lui ravir la vie (5). (1) Voyez les dépositions des 103 et 104° témoins de l’information sur la plainte par addition du 7 juillet. (2) Voyez les dépositions des 13, 16, 17, 20, 21, 22, 23, 26, 27, 29, 30, 33, 43, 44, 45, 49, 51, 90 et 169“ témoins de la même information. Nota. — Les 43, 44 et 90' sont celles des curés de Bouillargues, Rodillan et Courbessac. (3) Voyez fis dépositions des 131, 132 et 133e témoins de ladite information. (4) La pétition et le certificat de remise ont cté renvoyés au comité des recherches. (5) Voyez les dépositions des 47 et 63* témoins de l’information sur la plainte du 10 mai , et celle du [19 février 1791.] La municipalité autorise expressément, pour signe de ralliement, la cocarde blanche. Le sieur Vincent Vais, officier municipal, propose au maire de les prohiber ; il répond que cela n’est pas nécessaire; et s’adressant à des gens qui étaient décorés, et qui étaient dans la grande salle de l’hôtel de ville, il leur dit, en présence de plusieurs officiers municipaux : « Mes amis, c’est vous qui nous avez mis en place, il faut nous soutenir, car nous vous soutiendrons,» elles travailleurs crient: vive M. le maire (1)1 Le samedi, 1er mai, des légionnaires à cocarde blanche élèvent uu mai devant la porte du maire (2). Le dimanche 2 mai, au matin, un officier et plusieurs volontaires en cocarde blanche vont aux casernes pour emprunter du régiment de Guyenne des sabres et baudriers; ils leur sont refusés, parce qu’ils sont en cocarde blanche. L’officier dit que c’est la cocarde royale ; un sergent de Guyenne répond, « que le roi porte la cocarde nationale, qu’il l’a prescrite à toutes tes troupes de ligne, qu’il ne peut y avoir que de mauvais citoyens qui arborent la cocarde blanche», et le refus d’adhérer à la demande des légionnaires est confirmé (3). Le même jour dimanche 2 «mai, au matin, les légionnaires à cocarde blanche, qui la veille avaient planté le mai , vont déjeuner chez le maire; ils s’y rendent en armes et décorés de la cocarde blanche ; après le déjeuner ils sortent en criant tantôt ; vivent le roi et la croix! à bas les gorges-noires , à bas la nation , nous y chions dessus ; tantôt; qici nous fera quitter la cocarde blanche'! Nous ne la quitterons que lorsqu’ elle sera rougie du sang des protestants. Sur le soir ils attaquent les protestants, et les soldats de Guyenne qui passent devant la maison du maire; un soldat est arrêté, traîné et maltraité ; Saint-Louis, cocher du maire, est l’un de ceux qui se livrent aux excès (4) . Encore le même jour dimanche 2 mai, des légionnaires en cucarde blanch , répandus sur le cours, provoquent les sous-officiers, soldats et grenadiers du régiment de Guyenne. Un bas-officier, s’adressant au nommé Vampère, lui dit honnêtement de quitter la cocarde blanche, Vampère répond : « Je ne la quitterai pas, je suis aristocrate .» Le bas-officier la lui arrache, il est applaudi (5). Les sous-officiers, soldats et grenadiers de Guyenne arrachent encore quelques cocardes bioùches ; mais bientôt, tous ceux qui l’ont ar-145® témoin de l’information sur la plainte par addition du 7 juillet. (1) Voyez les dépositions des 95 et 119e témoins de l’information sur la plainte par addition du 7 juillet. (2) Voyez les dépositions des 53, 54, 55, 100 et 101e témoins de ladite information. (3) Voyez les dépositions des 139, 140, 141' témoins de l’information sur la plainte du 7 juillet. (4) Ces divers faits sont victorieusement prouvés par les informations sur la plainte du 10 mai aux dépositions 18, 78, 80, 81, 83 et 84e, et par les 53, 54, 55, 100, 101, 123, 126, 127, 128 et 129* dépositions de l’information sur la plainte par addition du 7 juillet. Nota. — Les 55, 126, 127, 128 et 129e ajoutent que les compagnies des Froment , Folacher et Melquiond, venant de faire visite au maire, celui-ci les accompagnant, criaient en sortant : Vive le roi et la croix ! A bas la nation ! (5) Voyez la déposition de Vampère et celle do Turion, greffier; le procureur de la commune, sur la lainte portée par le procureur du roi, d’après la déli-ération de la municipalité, du 13 mai. ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 358 (Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [19 lévrier 1791.] borée, s’attroupent; plusieurs étant armés de fusils et de sabres, ils attaquent les sous-officiers et soldats de Guyenne, qui pour se défendre mettent le sabre à la main ; mais ils sont poursuivis à coups de pierre, et dispersés ; des légionnaires patriotes surviennent, ils sont attaqués, plusieurs blessés et obligés de s’enfermer dans la maison du sieur Lacoste : aussitôt la maison est attaquée à coups de pierre, les fenêtres brisées, et la porte allait être enfoncée lorsqu’il arriva une patrouille de la compagnie n° 25 qui était en garde à l’hôtel de ville; elle arrêta l’attaque de la maison Lacoste (1). Dans le moment de l’attroupement des gens à cocarde blanche, deux ecclésiastiques furent vus sur le cours, les excitant par ces mots : zou, zou (2) I Parmi les attroupés jetant des pierres sont reconnus le domestique de l’abbé de Belmont, vicaire général et officier municipal, et celui du curé Ciémenceau, jetant des pierres et distribuant de l’argent (3). Le maire, le procureur de la commune, plusieurs officiers municipaux et Descombiés, notables, surviennent enfin, escortés des légionnaires de la compagnie n° 25, qui était de garde à l’hôtel de ville, le maire harangua le peu pie avec une extrême douceur; le sieur Fleury, légionnaire patriote, attaqué et excédé en leur présence, un homme à cocarde blanche ayant cassé, en le frappant, la crosse de son fusil, Fleury est couché par terre, le maire le relève, le livre aux valets de ville et leur ordonne de le conduire en prison: les assaillants sont laissés tranquilles; ils veulent faire la garde du maire, qui y consent et ils l’accompagnent (4). 15 ou 20 bas-officiers, grenadiers ou soldats de Guyenne, uns en fuite, vont se réfugier chez Roux, savonnier ; ils y trouvent 20 hommes armés de fusils, 7 à 8 les couchent en joue, les autres les dé?arment de leurs sabres, et ils ne parviennent à s’échapper qu’à force de prières ; ils virent sur une table de la poudre et des balles eu quantité (5). Le soir du même jour 2 mai, le maire requit la compagnie n° 31, capitaine Gelse Melquiond, pour taire des patrouilles pendant la nuit ; cette compagnie composée des travailleurs en cocarde blanche, qui avaient planté le mai , déjeuné chtz le maire, attaqué les pas-ants devant la maison de celui-ci, et formé la majeure partie de l’attroupement sur le cours (6). (1) Voyez les dépositions 1, 4, 5, 18, 19, 21, 22, 23, 34, 33, 36, 39, 41, 49, SI, 53 , 64, 65 et 67* témoins de l’information sur la plainte par addition du 7 juillet. (2) Voyez les dépositions des 22, 41 et 67* témoins de l’information sur la plainte du 10 mai. (3) Voyez les dépositions des 48, 69 et 70e témoins de ladite information, et les 130 et 139* de celle faite sur la plainte par addition. (4) Voyez les dépositions des 64 et 75* témoins de l’information sur la plainte du 10 mai, et les 98, 122 et 124* de celle par addition. Nota. — Le 64* témoin dépose que, parmi les travailleurs armés, étaient ceux qui avaient planté le mai devant la maison du maire ; qu’il les dénonça à ce maire pour les avoir vu fondre sur les soldats de Guyenne ; que le maire lui dit qu’ils étaient de garde; le témoin lui ayant dit : non ils ne sont pas de garde, le maire répliqua : retirez-vous , et aussitôt les travailleurs crièrent : Vive monsieur le maire ! (5) Voyez les dépositions des 1, 35, 36 et 39* témoins de l’information sur la plainte du 10 mai. (6) Voyez les dépositions des 5 et 18* témoins de l’information sur la plainte dudit jour 10 mai, et les 64 et 160e de celle par l’addition du 7 juillet. lro Série. T. XXIII. Le lendemain 3 mai, au matin, Descombiés, notable, capitaine d’une compagnie de soldats de la Croix (il est maintenant prisonnier et décrété au corps), arriva avec sa compagnie sur la place du Puits de la grarid’table ; il lui proposa de faire serment de fidelité, au roi et à la croix, ajoutant merde à la nation , et chaque volontaire répéta ce serment et le jura par acclamation (1). Le même jour, au matin, dans l’église cathédrale, des prêtres disaient : « Hier ce coquin de Barry excitait à crier vive la nation, il mériterait d’être rompu ; il faut s’assembler ce soir et tomber sur les protestants en commençant par les mauvais catholiques, et les mauvais prêtres. » Ges propos furent entendus par l’abbé Boucarut au moment même où il se préparait pour aller dire la messe ; il l’a ainsi déposé : il est le 71® témoin de l’information sur la plainte du 10 mai. Le même jour, 3 mai au matin, il se forma dans l’hôtel de ville et sur la place un attroupement de gens à cocarde blanche : la municipalité était assemblée, et recevait les dépositions de ces attroupés sur les événements de la veille ; les protestants qui y surviennent ainsi que les soldats de Guyenne, sont hautement qualifiés de gorges-noires, excédés, poursuivis et mis dehors de l’hôtel de ville ; le maire, les officiers municipaux, le procureur de la commune, le voient ou l’entendent et ne disent rien ; et tandis que l’attroupement le plus dangereux subsiste dans l’hôtel de ville, ils font proclamer une défense aux citoyens de s’attrouper ; à midi ou fait fermer les boutiques (2). Dans l’hôtel de ville, et en présence du maire, les attroupements crient : vivent le roi et la croix (3). Sur la place, un travailleur, disant : faisons-nous feu? une femme l’entendit, et dit : vous devriez avoir au moins du respect pour M. le maire qui vous entend : aussitôt celui-ci se tourna vers elle et dit : Faites retirer cette femme , ce qui fut exécuté à l’instant (4). Sur les deux heures l’après-midi, les officiers de la légion devaient s’assembler au collège ; ils en furent empêchés par les patriotes qui passaient ; le sieur Agier fut poursuivi à coups de pierre, s’étant réfugié dans la maison où habite Me Valadier, avocat, qui le fit évader par le toit, tandis que les mêmes travailleurs fouillaient la maison et voulaient même enfoncer les armoires (5). Sur le soir, à six heures, un autre attroupement se forma sur le cours, les soldats de Guyenne venant à passer sont arrêtés ; on veut leur faire crier : Vivent le roi et la croix ! à bas la nation ; les soldats patriotes crient : Vivent la nation et le roi ! Aussitôt ils sont poursuivis et excédés à coups de pierre, obligés de fuir : un grenadier du régiment de Guyenne fut tué d’un coup de fusil, tiré par un Froment, surnommé Tapage , (1) Voyez les dépositions des 34 et 35® témoins do ladite information sur la plainte du 10 mai. (2) Voyez les dépositions des 38, 73, 74 et 77e témoins de l’informaiion sur la plainte susdite du 10 mai, et les 58, 60, 62, 80, 86, 162, 167* de celle en addition en juillet. (3) Voyez 60* témoin de ladite information en mai ; 167, 169 et 170® de celle par addition en juillet. (4) Voyez la déposition du 58° témoin déjà cité. (5) Voyez les dépositions des 24, 47, 52 et 68e témoins de l’information sur la plainte du 10 mai. Nota. — Le 68® témoin ajoute que Descombiés excitait les attroupés. 23 ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [19 février 479i.j 354 [Assemblée nationale.] frère du receveur du chapitre, aujourd’hui retiré à Turin (1). À la même heure, un autre attroupement se forma sur la place des Récollets ; les attroupés étaient en cocarde blanche et plusieurs avec des fusils, des pistolets et des sabres; Chalvidan, les Talagrand et Durand étaient les chefs de cet attroupement ; tous ceux qui paraissaient, reconnus pour être non catholiques, étaient excédés; des coups de fusil furent même tirés ; le sieur Arnassan fut arrêté par Chalvidan, qui lui mit le pistolet sur l'estomac, appela la troupe et le fit mutiler à coups de pierre, de sabre et de baïonnette; il eut le poignet coupé, et il ne dut son salut qu’à la fuite (2). Le même jonr 3 mai, sur le soir, le sieur Laporte, ofticier municipal, en écharpe, fut rencontré dans la rue, escorté de 7 ou 8 travailleurs, le sabre nu à la main ; des patriotes lui demandèrent s’il n’y avait pas du danger à passer, il répondit brusquement :je n'en sais rien( 3). Dans toutes les rues, places et carrefours, il existait des groupes d’hommes à cocarde blanche, armés; les bons citoyens et les soldats de Guyenne étaient attaqués s’ils paraissaient; plus de 20 personnes furent poursuivies à coups de pierre et blessées; certains furent même couchés en joue (4). Le lendemain 4 mai, au matin, la tranquillité régnait dans la ville et M. le maire publia la loi martiale. Le même jour la municipalité passa bail d’un terrain vacant à Froment et à Folacher, chefs des complots, à l’effet de les rendre éligibles pour Je département. Ledit jour 4 mai, sur les 8 à 9 heures du soir, le maire étant chez le juge Mage, on parla des événements arrivés le dimanche, on témoigne au maire les craintes qu’on avait eues pour lui, (1) Voyez les dépositions des 3, i, 7, 17, 21 22, 2 6, 27, 29, 30, 41, 45, 46, 50, 60 et 67* de la dite information en mai. (2) Yojez les dépositions des 11, 12, 14, 16, 17, 57 et 96e témoins de l’information sur la plainte du 10 mai, et les 96, 97, 107, 162, et 164* de celle par addition du 7 juillet. Remarque. — Le 16e témoin est le sieur Aubary, négociant et catholique ; il dépose qu’un travailleur disait en s’adressant aux officiers : C’est nous qui vous avons fait , c'est à nous que vous en avez l'obligation ; si vous ne nous rendez justice, c’est à nous que vous aurez affaire. A quoi le maire répondit: Mes amis, soyez tranquilles ; retirez-vous, nous vous rendrons justice. (3) Voyez les dépositions des 96 et 107“ témoins de l’information par addition. (4) Voyez les dépositions des 9, 10, 13, 14, 15, 16, 48, 19, 22, 24, 47, 49, 51, 57, 58, 61, 66, 68, 73, 74, 75, 76, 77, 78, 80, 81, 83, 84 et 85e témoins sur la plainte du 10 mai. Remarque. — Le 19“ témoin est le sieur Chabanel, commissionnaire et capitaine d’une compagnie patriote ; il fut attaqué près la porte Saint-Antoine, des coups de sabre lui furent portés, il les para avec son parapluie qui fut haché ; secouru par le sieur Paulhan, aide-major de la aide nationale, il se sauva en prenant la fuite ; arrivé evant la maison commune, il trouva eur la porte M. le maire, et lui rendit sa plainte ; le maire lui dit : Je recevrai votre plainte, mais je la recevrai aussi contre ceux de vos volontaires qui ont tiré des coups de fusil. Un travailleur présent appuya, et dit : « cela est vrai, car on m’a tiré. » Va, mon enfant, je te rendrai justice, répliqua ie maire. Le sieur Chabanel observe que cela est faux ; que les fusils de sa compagnie ne sont pas sortis de sa maison; sur quoi il fut invité par le maire d’entrer dans l’hôtel de ville, en lui disant qu’il allait s’y rendre : le sieur Chabanel attendit longtemps, mais en vain: M. le maire ne reparut plus. il répond : Si j’avais reçu la moindre égratignure , 100 des plus riches et des plus notables de la ville auraient été tués. On répond que* dans une guerre générale, il pouvait en périr 1,000 comme 2,000; et il réplique, non, 100 des plus riches (1). Le mercredi 5 mai, au matin, la municipalité devait se transporter au couvent des capucins, pour faire l’inventaire du mobilier; pour l’éviter il fut formé un attroupement de femmes, devant la porte de ce couvent, et l’inventaire ne fut pas fait (2). Le même jour, le maire et le sieur Descombiés, notable, font une descente chez Marignan, vendeur de vin, inculpé d’avoir des armes; on fouilla sa maison, rien n’est trouvé; Marignan veut se plaindre de ce que la veille on lui avait tiré un coup de fusil, on lui impose silence, et le lendemain le sieur Descombiés lui fait défense de vendre du vin (3). Sur les 10 à 11 heures du soir dudit jour 5 mai, le sieur Vidal, procureur de la commune, introduisit furtivement dans sa maison un nombre considérable de gens armés de fusils et de sabres ; ils y passèrent la nuit (4). Ce même Vidal, procureur de la commune, cherche à exciter le peuple contre les opérations de l’Assemblée nationale; il dit que les milices nationales avaient été formées pour repousser les brigands; que c’était un prétexte de l’Assem-blée nationale pour faire soutenir ses décrets « que les vrais brigands sont les représentants de la nation» ; il dit aux huissiers, dans leur bureau, afin qu’ils le répètent dans les lieux où leur ministère les appelle, « que l’Assemblée nationale fait beaucoup de mal, que tout le monde perdra dans la Révolution ». Rabanis, concierge, créancier de M. Vidal, oncle du nommé Gas, son clerc, dit à qui veut l’entendre, que MM. Necker et S. Etienne, sout des monstres, qu’ils mériteraient d’être écartelés; que la majorité de l’Assemblée nationale est une troupe de brigands; que, s’il y avait 1,000 hommes comme lui, ils iraient les massacrer tous; que les protestants les soutiennent; mais que bientôt ils en seront dupes, qu’il n’eu échappera pas un seul; que cela fait, l’Assemblée nationale sera dissipée (5). Le dimanche 9 mai, nn frère capucin (nommé Modeste) distribuait, au sortir de la messe, un imprimé : deux particuliers de Redessan lui en demandèrent un, il le leur donna, il a été joint à la procédure. Cet imprimé intitulé : Nouvelles de Paris , est incendiaire; les membres de l’Assemblée nationale y sont désignés, un repaire de brigands. MM. Necker et La Fayette y sont diffamés (6). Il se forma, à la même époque, une société (1) Voyez les dépositions des 24, 25, 31 et 71e témoins de l’information sur la plainte par addition. (2) Voyez les dépositions des 117, 118 et 121“ témoins de l’information sur ladite plainte par additioü du 7 juillet. (3) Voyez la déposition du 16* témoin de ladite information. (4) Voyez les dépositions des 85, 124, 133, 154, 155 et 156e témoins de ladite information sur la plainte du 7 juillet. i5) Ces divers faits concernant Vidal, procureur de la commune, et Rabanis, concierge, résultent des dépositions des 59, 97, 134, 135, 136, et 138* témoins de ladite information sur la dite plainte par addition. (6) Voyez l’imprimé annexé à la procédure, et les dépositions des 122, 146, 165, 166 et 171* témoins dé l’information sur ladite plainte par addition. [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES» {19 février 1791.) dans la maison et jardin du sieur Cabrit. Les associés étaient entre autres, MM. Tehsier de Marguerittes, maire; Vidal, piocureur de la commune; Boyer Brun, substitut-, Ferrand Demissol, de LaBaulme, Du Doure, Lieutier, Ferrand, Àigon, Laure s, Grelleau, l’abbé de Belmont, etc., etc., officiers municipaux; Descombiés, Durand, Pouil-lache, l’abbé Cabanel, Soubeiran, etc., notables; Lasaumès, chanoine; La pierre, théologal; La-pierre, président; Michel, Folacher, Froment, Melquion et Goussard, avocat, commissaires de la délibération du 20 avril et capitaines des compagnies à cocarde blanche, et ensuite à pouf rouge; Lami, Bazile, Ravei, Bosquier, etc., etc., autres capitaines à pouf rouge (1). Instruite que le procureur nu roi a porté plainte en raison des attroupements des 2 et 3 mai, voulant y faire diversion, la municipalité informe; des bas officiers, ou soldats de Guyenne, sont administrés en témoins, le procureur de la commune et le sieur de LaBaulme les interrogent, et veulent leur faire déclarer qu’ils avaient reçu de l’argent pour arracher les cocardes blanches; ils dénient le fait, on les menace de la prison ; ils persistent, et on les renvoie, sans recevoir leur déposition. Le sieur Salaville, fils, est aussi appelé en témoin; il dépose contre le désir du procureur de la commune, qui lui dit, vous êtes partial, et le renvoie sans écrire sa déposition (2). Sans doute que cette forme inquisitoriale ne fut pas heureuse. Le procureur de la commune assembla le conseil général le 13 mai; il fit un exposé artificieux, inculpant les bons citoyens de Nîmes, et les bas officiers et soldats de Guyenne, de séduction, et d’être les auteurs des événements arrivés les 2 et 3 mai; et, sur cet exposé, le conseil général délibéra de dénoncer l’accusation au procureur du roi. Ën conséquence, le sieur Vidal te présenta chez ce magistrat, pour faire recevoir la dénonce; elle fut couchée dans son registre; mais le sieur Vidal refusa de la signer, parce qu’elle contenait promesse de garantie : il en lut écrit à M. le garde des sceaux, qui décida que ta dénonce devait être admise, et que les dénonciateurs étaient garants de droit, quoique non soumis. D’après cette décision, la dénonce fut reçue, et la plainte portée le 7 juin, les témoins administrés par le procureur de la commune, assignés pour déposer le fi; et ce jour même le sieur Vidal, craignant avec raison la sui e de sa dénonce, fit prendre une délibération, ar laquelle le conseil général de la commune éclare qu’il n’a jamais entendu s’ériger en plaignant, mais seulement faire connaître au ministère public un délit. Le procureur du roi, instruit de cutie démarché, et la considérant comme un désistement de la dénonce, ht discontinuer l’information; il y avait déjà deux témoins d'ouïs (3). (4) Voyez la déposition du 137” témoin de ladite information, et celle du 50" de l’information sur les événements du mois de juin. (2) Voyez les dépositions des 413, 114, 115, 169 et 170" témoins de l’information sur la plainte par addition. (3) Ces faits sont justifiés par les pièces rappelées et jointes à la procédure. Remarques.... Parmi les témoins administrés par le procureur de la commune, suivant l’état de lui signé et joint aux charges, étaient Melquion, commissaire de la délibération des pénitents, Ceise, son frère, Castan et Charles, tous les quatre capitaines à pouf rouge ; Cœsset, serrurier, fabriquant des fourches, décrété au corps dans la procedure relative aux événements du 13 juin, et autres personnages également suspects. 355 La proclamation du roi du 28 mai, concernant la cocarde nationale, ayant été publiée, la municipalité en donna une à chacun des Gebets qui avaient ci-devant arboré la cocarde blanche; ils allèrent la prendre à l’hôte! de ville, Vidal, procureur de la commune, Descombiés, notable, et Froment, receveur du chapitre, les distribuaient, Froment recommandant à chacun de prendre un pouf rouge chez leurs capitaines, chargés de leur en remettre. Le lendemain de cette distribution, le pouf rouge fut arboré par les compagnies de la Croix, et l’on voyait à chaque heure du jour de ces soldats et officiers antipatriotiques dans l’hôtel de ville, s’y renfermant même avec les municipaux (1). Des conciliabules se tiennent au jardin de Cabrit; le sieur de La Baulme y parle de moyens de conciliation avec le club des amis de la Constitution : Folacher déclare qu’il faut la guerre, et l’officier municipal répond : « Si vous la voulez, « soit; je vous promets que je remplirai mon « rôle comme le plus vaillant Cebet. » Ce fait est établi par la déposition du sieur Canonge, électeur, l’un des associés au jardin de Cabrit, il est le cent soixante et onzième témoin. Froment cherche à augmenter sa compagnie; il fait solliciter et offrir à ceux qui voudraient y entrer, un habit complet, des armes et de l’argent. Pierre Froment, son frère, et Folacher, son beau-frère, disent que leurs compagnies brûlent de se battre; que chacun de leurs volontaires est dans la meilleure disposition (2). Le 4 juin est le premier jour de l’assemblée élertorale; les gens à pouf rouge, armés de sabres, s’attroupent en entourant les avenues du palais où se tenait l’assemblée : des patriotes en sont inquiets; ils vont en prévenir la municipalité : le sieur Ferrand Demissol, l’un des membres, leur dit que cela ne les regarde point (3). Sur la réquisition de MM. les commissaires du roi pour la formation du département du Gard, des patrouilles du régiment de Guyenne et de dragons nationaux furent faites, et les attroupements dissipés; les Gebets à pouf rouge, digues soutiens de la municipalité, dociles à leurs réclamations, ordonna que les dragons ne feraient plus de patrouilles; cela résulte du procès-verbal du corps électoral, séance du 11 juin, portant des éloges au service des dragons, et réquisition à la municipalité d’en placer un piquet près du palais, pour être employé en cas de besoin; malgré cette réquisition, le piquet ne fut point ordonné : il resta toujours au poste de l'évêché. Dans l’intervalle des séances du corps électoral, il y eut plusieurs soupers de personnes formant la société du jardin de Cabrit ; il y fut admis des gens à pouf rougo (4). Le dimanche 13 juin, il y eut assemblée à deux heures après midi, dans l’église des Jacobins; elle était formée des légionnaires à pouf rouge : on y prononça un discours contenant l’éloge de M. de Marguerittes, maire. À l’issue de cette assemblée, Pierre Froment, ayant auprès de lui une dame-jeanne de vin, versait à boire aux Gebets; ensuite il leur prescrivit d’aller de trois en trois (1) Voyez les dépositions des 167 et 169* témoins do l’information sur la plainte par addition. (2) Voyez les dépositions des 125 et 160" témoins de l’in formation sur la plainte par addition. (3) Voyez les dépositions des 153 et 154* témoins de l’information des événements du mois de juin. (4) Voyez les dépositions du 50* témoin de l’information susdite du mois de juin. [Assemblée nationale. J ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [19 février 1791 .J 356 dans la ville, et de désarmer les dragons qu’ils rencontreront hors de leur poste. Trois dragons en unifurme, sabre t t baudrier, allant à la comédie, lurent arrêtés par on homme à pouf rouge, qui leur demanda s’ils étaient de service; ils répondit eut: Oui. L’homme à pouf rouge répliqua : Vous n’avez pas le droit de porter vos sabres, nous vous les ferons bientôt quitter (1). Le même jour 13 juin, sur les 4 à 5 heures après-midi, le sieur Pélatan, ancien procureur, interdit pour crime de faux et prévarication , était au milieu d’un groupe de Gebets à houppe rouge, sur la place de l’esplanade, près la salle du club des amis de la Constitution, qui éi aient alors assemblés, et où étaient plus de 200 électeurs : Pélatan disait aux Cebeis : « Mes amis , c’est au club par où il faut commencer , et ne pas laisser échapper un de ceux qui y sont. » Ce propos fut entendu; le club fut instruit, et sa séance levée (2). A peu près au même instant, un membre de la société du jardin de Cubrit ordonna au concierge d’en fermer la porte de bonneheure;5ou6hommes à pouf rouge y étant survenus, restèrent environ trois quarts d’heure ; étant sortis avec Thomas Froment, le nommé grand Delon, Cebet à pouf rouge, tenait un papier roulé dans la main, marchant avi c précipitation; froment lui disait de ne pas al er si vite, c’est ce qu’a déposé le cinquantième témoin de ladite information, ajout mt qu’un moment a rès un dragon parut, criant qu’on attaquait les dragons : U parla d’une lettre qu’on leur avait portée, le témoin ayant cru que c’était le papier qu’il avait vu entre les mains du grand Delon. Et en effet, environ les 5 à 6 heures du soir, un volontaire à pouf rouge se présenta à la porte de l'évêché; il demanda d’entrer, ou qu’on lit sortir les dragons ; le portier refusa : le volontaire se retira, et revint 2 minutes ap?ès, avec 2 camarades à pouf rouge ; il remit au suisse un billet qui fut porté au sieur Paris, aîné, lieutenant de-dragons; ce billet était ainsi conçu ; « Le suisse de l’évêché est averti de ne plus « laisser entrer aucun dragon à pied ni à cheval, « passé ce soir, sous peine de la vie, ce 13 juin »... Le lieutenant des dragons s’approcha du porteur de ce bdlet, lui fit des représentations pour le faire é oigner, ou l’engager à se rendre à la municipalité. Dans l’intervalle, le nombre des houppes rouges s’accrut; les dragons les invitèrent à la paix ; mais en vain : les gens à pouf rouge jettent des pierres, ils crient aux armes ; d’autres, qui étaient postés dans les rues voisines, arrivent sur la place de l’évêché, armés de fusils et de sabres; il n’y avait dans ce moment que 12 dragons. Le lieutenant commande au trompette de sonner pour rassembler ceux qui s’etaient éloignés du poste; les légionnaires à pouf rouge enlèvent la trompette et la mettent en pièces : des coups de fusils sont par eux tirés aux dragons ; l’un d’eux riposte par un coup de mousquet; le feu devient respectif, le combat s’engage ; un dragon est envoyé à l’hôtel de ville pour aviser les officiers municipaux ; ceux-ci sont immobiles, et bientôt ils vont se cacher (3), (1) Voyez les dépositions des 15, 21, 22, 24, 35, 111* témoins de ladite information. (2) Voyez les dépositions des 58, 59, 63, 83, 97, 113, 120, 121 et 135e témoins de l’information sur les affaires du mois de juin. (3) Ce récit est victorieusement prouvé par les dépositions des 2, 19, 25, 36, 48, 63, 76, 71, 100, 105, 152 et 153* témoins de ladite information. M. Saint -Pons, major de la légion, instruit qu’on a-sassine les dragons à l’évêché, ramasse 12 ou 15 volontaires patriotes sans armes; il rencontre le sieur Vidal, procureur de la commune, le prie et le presse de se joindre à lui pour i’aiuer à dissiper les assassins; Vidai se rend avec répugnance à l’hôtel de ville, d’où il disparait : c’est ce qu’a déposé le major ; il est le soixante-troisième témoin. M. Saint-Pons et autres ayant trouvé 2 officiers municipaux, les engagèrent de se rendre à la place de l’évêché, escortés d’un détachement de la compagnie n° 1, de garde à l’hôtel de ville ; chemin faisant, on tira sur eux. Arrivés à la pace, les Cebets firent une décharge sur cette escorte ; personne ne fut atteint : les houppes rouges se rendaient en foule à la place, par les 3 rues qm y aboutissent ; la compagnie n° 1 les repoussa, s’empara des avenues, eu recevant et rendant le feu. Un volontaire de cette compagnie fut tué d’un coup de fusil tiré d’une fenêtre de la cure ; plusieurs furent blessés (1). Un Cebet à pouf rouge, blessé au bras dans le premier moment du combat, s’était rendu au quartier général (les tours du château, près la inaisou de Froment et le couvent des jacobins), et avait donné avis de ce qui se passait à la place. Les Froment, Folaeher et Descombiès, capitaines et chefs du complot, avaient disposé leurs volontaires, et s’étaient emparés de divers postes, notamment de la porte des Carmes, attenant à l’église des jacobins, de la maLon de Froment, de la partie des remparts sur lesquels celte maison communique, et des tours du château, dominant sur les Calquières, et où l’on arrivait de la maison de Froment (2). Pendant ces entrefaites, l’alarme, la désolation et la terreur étaient répandues dans toute la ville; aux Calquières, le nommé Ànci, maçon, volontaire de la compagnie Lami, à pouf rouge, coucha en joue un légionnaire de la compagnie n° 1, déjà blessé à la première action ; on i’em (lécha de tirer (3). Trois autres volontaires de la compagnie Lami tirèrent chacun un coup de fusil à un légionnaire sanspouf et sans armes (4). A la rue Notre-Dame, près les Calquières, d’autres volontaires de la même compagnie Lami assiégèrent la maison du sieur Alison, capitaine d’une compagnie patriote ; des coups de fusil furent tirés : le sieur Alison fut privé de sortir, et ses volontaires ne purent se rendre chez lui pour s’armer (5). A la porte de la Madeleine, la porte d’entrée de la maison du sieur Jalabert, droguiste, père de famille, septuagénaire et protestant, est enfoncée ; on l’arrache de sa maisou; on le traîne à la rue; 15 hommes à pouf rouge le mutilent à coups de sabre : il mourut 2 jours après de ses blessures (6). Un autre vieillard, nommé Astruc, les cheveux blancs et courbé sous le poids des aimées, marchant de la porte de la Couronne à celle des Carmes, reconnu pour être non catholique, reçoit (1) Voyez les dépositions des 5, 11, 53, 63, 70, 116, 152 et 153* témoins de la même information. (2) Voyez les dépositions des 3, 9, 12, 16, 17, 18, 19, 35, 36, 66, 70, 74, 79, 85, 88 et 93« témoins de ladite information. (3) Voyez les dépositions des 16, 51, 64 et 83* témoins de ladite information. (4) Voyez les dépositions des 16 et 83» témoins. (5) Témoins 16, 51, 62 et 64. (6) Témoins 57, 78, 150 et 151. [Assemblée nationaIe.| divers coups de fourches fabriquées par Cœsset : les Cébets à pouf rouge le jettent dans les foss 's, le massacrent a coups de pierre; ils finissent par lui tirer un coup de fusil, et il meurt (1). Trois électeurs, les sieurs Massador, du district de Beaucaire, le sieur Viala, du canton de la Salle, et le sieur Puech, du même canton, furent assassinés par des gens à pouf rouge, et grièvement blessés en se retirant chez eux : cela résulte du verbal du corps électoral du 14 juin au matin. Le capitaine qui avait commandé le détachement de garde à l’assemblée électorale, se retirant avec un sergent et 3 volontaires de sa compagnie, arrivé sur le petit cours, Froment, dit Dainblay, frère du capitaine, receveur du chapitre, les arrête; et s’adressant au capitaine, en fui mettant le pistolet sur l’estomac, lui dit : Halte là coquin, rends les armes : des Cébe ts à pouf ronge saisissent le capitaine par les cheveux, le font culbuter eu arrière. Froment lui tire le coup de pistolet et le manque; il est désarmé de son épée, et blessé de celle de Froment : il sort un pistolet de sa poche, écarte les assassins, tire sur Froment et le manque ; l’un de ses volontaires est blessé et désarmé (2). Une patrouille du régiment de Guyenne, à la suite de laquelle était le sieur Boudon, dragon, passait aux Calquières; le sieur Boudon est attaqué par une troupe de gens à pouf rouge ; on lui enlève son casque et son mousquet, plusieurs coups de fusil lui sont tirés ; ils ratent, et il reço t deux coups de baïonnette; la patrouille l’enveloppe pour le sauver, mais, doué d’un caractère impétueux et rempli de bravoure, le sieur Boudon s’élance pour reprendre son mousquet; il est à l'instant massacré par les Cebets; on lui coupe le doigt pour avoir un diamant dont il était orné; on le dépouille de ses montres, et on le jette dans le fossé (3). Le drapeau rouge qui, dès le premier instant de l’avis donné aux officiers municipaux, aurait dû sortir, est vivement réclamé; on presse, on force même l’abbé de Belmont, chanoine, vicaire général et officier municipal, à le porter, « comme le plus propre, par son caractère, àen imposer aux malveillants: » il accepte; le drapeau rouge est par lui pris; il soit enfin, escorté d’une patrouille de Guyenne, de quelques légionnaires, et de trois ou quaire dragons; arrivés aux Calquières, les assiégeants, qui étaient postés aux remparts et aux tours, font une décharge sur l’escorle, qui rétrograde à l’instant; l’abbé de Belmont s’avance seul avec le drapeau rouge; les assaillants, ayant à leur tête Descombiès, courent à lui et l’enlèvent avec le drapeau (4). Le sieur Paris, lieutenant de dragons, était réuni à l’escorte du drapeau rouge : s’étant arrêté avec le sieur Laurens, officier municipal, qui venait de la société Cabrit, il fut arrête par quatre Gebets a pouf rouge ; trois le couchèrent en joue; le quatrième le pointa avec sa fourche; le sieur Laurens le sauva par ses prières, et fut lui-même blessé d’un coup de sabre à la main. Un instant après le sieur Dupontet, dragon, passant à pied, Descombiès cria : les fourches à Dupontet: aussitôt quatre de ses volontaires le pointèrent, l’excèdèrent de coups, et le jetèrent dans le fossé, lecroyaut mort (5). (1) Témoins 19, 20 et 79. (2) Témoins 67, 70, 88 et 93. (3) Témoins 14, 17, 18, 19, 30 et 82. (4) Témoins 16, 17, 25, 35, 48, 56, 70 et 72. (5) Témoins 25 et 48. [19 février 1791.1 357 Dansletempsqueledrapeaurouge avait été porté par l’abbé de Belmont, les autres officiers municipaux avaient été solliciiés de se rendre aux casernes pour requérir le régiment de Guyenne. MM. de Glansonnette, Grioletet Meynier, commissaires du roi, et Pontier, officier municipal, s’étant concertés avec le lieutenant-colonel et le major, il fut déterminé que MM. Griolet et Pontiers se rendraient à l’hôtel de ville pour conférer avec les autres officiers municipaux : arrivés, il fut déterminé, forcément de la part des officiers municipaux, que la loi martiale serait publiée (1); en conséquence M. Ferrand Demissol dressa la proclamation, et prit un autre drapeau rouge; et, suivi d’une escorte considérable, il prit la même route que son confrère l’abbé de Belmont. Arrivé aux Calquières, les gens à pouf rouge qui n’avaient pas désemparé des tours et des remparts, firent une nouvelle décharge sur ce cortège; un légionnaire reçut un coup de feu à la cuisse; l'escorte rétrogada encore; et M. Ferrand s’étant avancé, ainsique l’abbé de Belmont, vers la porte des Carmes, les légionnaires à pouf rouge l’enlevèrent avec le drapeau, et le conduisirent à la tour où ils étaient retranchés (2). Détenu dans la tour, le sieur Ferrand fit des représentations aux chefs des rebelles; Froment, l’un d’eux, jetant son chapeau avec rage, se plaignit ue ce que la municipalité ne leur avait pas livré la cidadelle (3). La troupe, qui avait été forcée d’abandonner le second drapeau rouge, se rendit par un chemin détourné aux casernes ; le régiment de Guyenne était en ordre de bataille; mais M. de Bonne, lieutenant-colonel, ne voulut jamais le mettre en marche, sans une réquisition de la municipalité; en vain les commissaires du roi sollicitèrent le sieur Pontier, olficier municipal, de faire cette réquisition; un vieux caporal indigné, cria : Braves soldats de Guyenne, la patrie étant en danger, nous ne devons pas attendre plus longtemps pour remplir notre devoir; à ces paroles, le lieutenant-colonel commanda la marche; les légionnaires patriotes se réunirent au régiment : le calme fut ramené; le régiment rentra aux casernes, et les légionnaires allèrent passer la nuit dans un enclos sur le chemin de Montpellier (4). Les rebelles continuèrentd’occuper les remparts et les tours; Froment, avocat, receveur du chapitre, Folacher, son beau-frère et Descombiès, notable, tous les trois capitaines, et chefs as-dé-geants, prirent des précautions pour avoir des secours à 11 heures du soir; il dépêchèrent deux exprès à M. de Bouzzols, commandant en second de la province du Languedoc, chargés de deux letires, écrite l’une par Descombiès, l’autre par Froment. (Elles soüt à la suite des vérités historiques.) Dupré et Lieutaud furent chargés de ces deux lettres, DescomPiès et Froment les ayant munis d’un pas>ep ort, comme chargés d’affaires du roi et de l’Eiat. (Ils sont imprimés à la suite des vérités historiques.) D’autres légionnaires à pouf rouge vont parcourir les villages voisins; réunis à minuit à plusieurs habitants de Gourbessac (lieu où Descombiès a une maison de campagne), ils présen-(1) il résulte du procès-verbal des officiers municipaux, daté du 15 juin, qu’ils y furent contraints. (2) Témoins 13, 14, 48, 74, 79, 146, 152, 153, et ledit procès-verbal du 15 juin. (3) Témoins 27, 127, 146 et 152. (4) Voyez les dépositions des 14, 48 et 152e témoins. ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 358 tent au curé une lettre décachetée, portant qu’on avait tué un capucin; qu’il fallait donner du secours, et en réclamer; ils voulaient que 1 curé signât cette lettre, pour la produire ailleurs; il s’y refusa. Gela résulte de sa déposition (1). Le lundi matin, le vicaire de Bouil largues disait publiquement au curé de Rodillon, qu’il y avait une révolte à Nîmes, ajoutant : nous sommes tous perdu*. Le sieur Jaufrès, praticien, beau-frère du sieur Grelleau, procureur et officier municipal, capitaine à pouf roiige de la compagnie de Caissargues, écrivit au sergent de cette compagnie d’arriver promptement chez Froment, par la porte des Carmes (2). Le sieur Vignes, négociant, capitaine d’une autre compagnie à pouf rouge, étant à Bouillar-gues dès le grand matin du lundi, répandit le bruit que les protestants massacraient les catholiques à Nîmes; les mêmes propos furent tenus à Manduel; le tocsin sonna; Jes habitants de ces deux villages se rendirent armés sur le chemin de Beaueaire à Nîmes, au Pont du Quart; ceux de Redessan et Marguerittes se joignirent à eux ; le sieur Vignes y alla aussi; cette troupe catholique arrêtait les passants, et les interrogeait; s’ils étaient protestants, ils étaient massacrés: Blan-cher, Hugues, Peyre et trois étrangers élevant des versa soie dans une campagne voisine furent tués (3). Descombiés, Froment et Folacher, chefs des rebelles, n'avaient pas désemparé de la tour et des remparts; dès le matin, leur troupe fut augmentée; Descombiés et Froment enfoncèrent une porte de la maison de Therond, pour entrer chez les Jacobins, et de là à la tour attenant au couvent; ce qui fut exécuté : ils établirent divers postes, notamment à l’embouchure de la rue du Collège, allant chez Froment, à la porte des Carmes, et en delà du pont pour aller aux Colquiè-res. De ces divers postes, on tirait sur des citoyens isolés et sans armes (4). Tandis que les rebelles s’étaient ainsi disposés, les patriotes des villes et villages voisins arrivèrent et formèrent un corps d’armée sur la place de l’Esplanade; les légionnaires patriotes de Nîmes s’y réunirent. M. Saint-Pons, major, dès le matin, se rendit avec une compagnie dans le couvent des capucins, dont les fenêtres dominent sur la place où était l’armée; la visite fut faite avec tranquillité et décence : cela résulte de la disposition du major, il est le soixante-troisième témoin; et encore du certificat des capucins. Les arènes furent également visitées, et rien n’y fut trouvé de suspect. Au lieu d’être à leurs fonctions, les officiers municipaux disparurent de l’hôtel de ville; les commissaires do roi en informèrent le corps électoral, qui nomma de suite un comité militaire et de subsistance, chargé de pourvoir, conjointement avec les commissaires du roi et les olfîciers municipaux qui restaient, au rétablissement de l'ordre; ce fait résulte du procès-verbal de la séance du lundi matin, 14 juin. Dans le temps que l’armée et le corps électoral s’occupaient de la sûreté générale, le procureur du roi et le lieutenant criminel visitaient les cadavres; 4 étaient vérifiés, et un cinquième (1) Témoins 28 et 36. (21 Témoins 36. (3) Témoins 117, 118, 119, 123, 127, 128, 129, 131, 139 et 140. (4) Témoins 1, 9, 18, 17, 22, 26, 33, 50, 33, 69, 73, 76, 79, 80, 81, 89, 106, 141 et 142. [19 février 1791.] al1 ait. l’être, lorsqu’une troupe de révoltés à houppe rouge fit une décharge sur ces magistrats et leur escorte; cela résulte de leur procès-verbal. Toujours dans la matinée du lundi, les gardes nationales d’Âiguevives, Yauvert et plusieurs de Nîmes, défilaient dans la rue de Lespic, criant: Vivent la nation, la loi et le roi ! Ce cri de joie fut bientôt changé en cri de douleur : de la fenêtre d’une maison, au coin de la rue de l’Horloge, on tira sur ces patriotes; le tambour de la garde nationale d’Aiüuevives fut tué, et son cadavre porté à la maison commune (1). Dans le même instant, la compagnie Lami s’introduisit par une porte de derrière eans le couvent des capucins ; des coups de fusil furent tirés du couvent, ou des fenêtres, sur l’armée qui était à l’Esplanade; un oflicier municipal de Saiut-Côme, en écharpe, et à la tête des gardes nationales de ce lieu, fut tué, un sapeur blesse à mort, 25 autres gardes nationales blessés; on tira encore des arènes sur l’armée; ce signal de carnage irrita ces troupes; elles se portèrent au couvent des capucins; au lieu de leur ouvrir la porte, on sonne le tocsin, la porte fut enfoncée; 5 capucins et plusieurs houppes rouges tués, les autres prennent la fuite : 1 s capucins qui sont épargnés, se réfugient chez Paulhan, non catholique (cela résulte de leur certificat) : le couvent est dévasté; mais l’église est respectée; un ciboire trouvé dans la sacristie, est volé par un brigand de Sommières> qui s’était mêlé dans la troupe ; il fut arrêté et mis en prison (2). Le feu le plus soutenu et le plus opiniâtre fut fait en même temps par les gens qui occupaient les remparts et la tour, vis-à-vis la maison de Froment, et des deux autres tours, attenant à la maison des Jacobins, desquelles Folacher, Descombiés et Froment s’étaient emparés. Ce feu, qui commença à 10 heures du matin, continua jusqu’à 4 heures après-midi; il fallut mettre du canon en usage pour assiéger les tours et les remparts. A 4 heures, les scélérats Descombiés, Folacher et Froment, se qualiliant de capitaines commandant les tours du château, écrivirent la lettre suivante : « à Monsieur le commandant des troupes « de ligne, pour communiquer aux légionnaires « campés à l’E-planade. Monsieur,... on vient de « nous dire que vous proposez la paix. Nous l’a— « vons toujours désirée, et jamais nous ne l’ait vous troublée. Si ceux qui sont la cause des « désordres affreux qui régnent dans la ville, « veulent mettre fin à leur coupable conduite, « nous offrons d’oublier le passé, et de vivre ert « frères. Nous sommes avec toute la franchise et « la loyauté de bons patriotes et de vrais Fran-« çais, vos très humbles serviteurs, les capitaines « de la légion nîmoise, commandant les toms du « château. Nîmes, le 14 juin 1790, à 4 heures du « soir. » Cette lettre fut portée par le valet de De-combiés; il est le cent quarante-septième témoin de l’in formation. D’après cette lettre, le trompette de la ville fut envoyé aux tours pour offrir aux rebelles une capitulation. Leurs chefs se présentèrent pour parler aux commissaires du corps électoral; ils étaient armés et suivis d’un grand nombre de légionnaires aussi armés, couchant en joue les électeurs. Malgré cette conduite, on proposa aux (1) Voyez le procès-verbal de vérification du cadavre et les dépositions des 32 et 33e témoins. (2) Témoins 4, 14, 16, 30, 34, 43, 44, 45, 46, 49, 56, 63 et 126. (Assemblée nationale.! ARCHIVES PARLEMENTAIRES- [19 février 179 l.f (Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. 359 trois chefs» Descombiés, Froment et Folacher, de se rendre et se mettre sous la sauvegarde de l’assemblée électorale; ils s’y refusèrent; le public en fut indigné : les commissaires électeurs se retirèrent, et les rebelles rentrèrent dans leurs retranchements. Ces faits sont établis par les témoignages déjà rappelés ; ils le seront encore par ceux de M. Cha-baud, vice-président du département; de M. de Jonquier du Saint-Esprit, et M. Le Grand, qui étaient les commissaires du corps électoral. Le feu commua de part et d’autre; le canon tira; les rebelles abandonnèrent les tours et les remparts, ils prirent la fuite; certains furent se réfugier à la maison des Jacobins, d’autres à celle du collège, attenant aux remparts; les assiégeants les poursuivirent; 4 ou 5 furent tués; Pierre Froment fut du nombre; la maison de Froment livrée au pillage ; on soupçonna les Jacobins d’avoir favorisé l’entrée dans leurs tours; des dégâts sont commis à leur maison; mais l'église est respectée, ainsi que celle du collège; cela résulte des mêmes preuves rapportées ci-devant, et des certificats imprimés, donnés par ces deux maisons religieuses. Le lendemain mardi, le sieur Vidal, procureur de la commune, travesti en soldat, et Lau-rens, officier municipal, carhés depuis le dimanche dans la maison de Gas, cantinier des gens à pouf rouge, furent trouvés cachés dans une autre maison inhabitée; on voulait les conduire à la lanterne : le sieur Ribot, non catholique et capitaine d’une compagnie, les sauva, en les conduisant au palais, pour les mettre sous la sauvegarde du corps électoral, qui les reçut ; mais dans la nuit ils disparurent, et depuis lors le sieur Vidal est réfugié dans le Vivarais. Ces faits notoires sont établis par la procédure, notamment par la déposition du cent vingt-quatrième témoin. Ce même jour, le sieur Vignes, capitaine à pouf rouge, était avec des gens armés sur le chemin d’Arles, se disant commandant de poste; il arrêta un valet de ville envoyé par la municipalité d’Arles, chargé d’une lettre pour le club des amis de la Constitution; il le força de se rendre au château de La Coste,dit Bellevue, intercepta la lettre, empêcha le message de se rendre à Nîmes, le tit rétrograder, ayant fait la minute d’une lettre remise dans la procédure, conçue en ces termes : « Ce 15 juin 1790... Monsieur, dans la « situation où se trouve la ville de Nîmes, j’ai « eu ordre d’intercepter toute correspondance, « et de prendre connaissance de tout événement; « en conséquence votre lettre a été ouverte... » La lettre fut déchirée, et la partie qui contient ces mots remise par M. de Lu Baulme,cent quinzième témoin de l’information; il a déposé avec étendue sur tous les détails, desquels il résulte que le sieur Vignes était sur le chemin comme chef d’une troupe; ce qui est encore établi par le rapport du valet de ville d’Arles et qui doit l’être par les témoignages du curé de Bouillargues et du vicaire de Bellegarde, indiqués par le sieur de La Baulme. Après cette expédition, le sieur Vignes, à la tête de sa troupe armée, se porta dans plusieurs campagnes voisines, et faisait forcer les personnes qui y étaient de se réunir à la troupe. Cela est prouvé par L s témoins déjà indiqués sur les faits les concernant, du lundi matin. Le même jour, 15 juin, le corps électoral s’occupa de rendre la tranquillité dans la ville. Le lendemain 16, la paix fut publiée ; les circonstances qui ont précédé et suivi, sont rendues en détail dans un récit adressé par les commissaires du roi à l’Assemblée nationale. La paix était ramenée dans la ville , tandis qu’au dehors il se commettait de nouveaux crimes. Un verbal des commandant et officiers de Ja garde nationale de Roquemaure a donné le détail de ce qui s’est passé à Remoulin, Lafoux, Saint-Bonnet etBezousse ; on y remarque que des Cebets à pouf rouge de la ville de Nîmes et un capucin, excitaient la rage des soldats catholiques contre les protestants ; et il résulte des interrogatoires des nommés Ri bières frères, fugitifs de Nîmes, décrétés de prise de corps, que le curé de Saint-Bonnet donna la bénédiction aux soldats nationaux, en les exhortant de se rendre à Nîmes. Une procédure particulière, faite à la requête du sieur Maigre, établit avec évidence que le shur Maigre, son père, âgé de 80 ans, et son frère aîné furent assassinés sur le terroir dudit lieu de Saint-Bonnet, et jetés dans la rivière du Gardon ; ils étaient protestants. Le 17, le procureur du roi et le lieutenant criminel s’étant transportés dans le couvent des capucins pour en constater l’état, ils y trouvèrent une quantité considérable de brochures incendiaires, relatives à la Révolution. Cela est établi par le procès-verbal joint à l'information. Ce procès-verbal dément tous les récits faits par les officiers municipaux sur les prétendus désordres commis dans l’église. SEPTIÈME ANNEXE. Nouvelle adresse de la municipalité de nimes présentée à l’Assemblée nationale par M. de Marguerittes, député du département du Gard et maire de Nîmes, et par M. Boyer, substitut du procureur de la commune de la même ville; en réponse à 1 adresse du directoire du département du Gard du 25 septembre dernier, et d’un avertissement signé pur MM. Chambon, Voulland, Soustelle, Rabaut et Meynier. Messieurs, les officiers municipaux de Nîmes, calomnieusement inculpés aux yeux de la France entière, ont cru devoir user avec courage du droit de publier leur justification. On leur oppose des procédures consommées à la hâte, une information dirigée par les membres du club et dans laquelle le procureur du roi n’a voulu faire entendre aucun des nombreux témoins qui devaient constater les assassinats commis, avec autant de sang-froid que d’atrocité, sur plus de 200 pères de famille, dont 153 sont connus. Mais une adresse publiée à Paris au no n des officiers municipaux, dont M. Boyer, substitut du procureur de la commune, avait les pouvoirs, et réimprimée à Nîmes au nom de tous, a démontré la partialité de ces procédures et la nécessité d’ordonner, conformément aux décrets, rendus pour Montauban le 26 juillet et pour Schelestadt le 14 août, que l’information commencée devant les juges de Nîmes, relativement aux troubles quiont eu lieu dans cette ville pendant les mois de mai et de juin, demeurera comme non-avenue et qu’il sera informé de va »l les juges de Montpellier, ou autres étrangers au département du Gard et à la diligence de la parlie publique, de tous les évé-