368 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée d’Aix.] portance, de telle manière cependant qu’il n’y ait dans tous les cas que deux degrés de juridiction forcés pour les justiciables. Art. 7. Les députés demanderont que les communautés du pays soient maintenues dans les droits et privilèges attachés aux offices et dont elles ont été dépouillées par le parlement immédiatement après la réunion consommée. Art. 8. Les députés seront expressément chargés de requérir l’abolition de tous privilèges et la contribution à toutes les charges de la part de tous les sujets de;Sa Majesté suivant leurs facultés, en quoi elles consistent et puissent consister, soit biens, capitaux, droits seigneuriaux ou autres; la puissance royale protège toutes ces espèces de biens, toutes ces espèces de biens doivent donc contribuer pour la maintenir. Art. 9. Les députés aux Etats généraux auront pouvoir de consolider la dette de l’Etat après qu’elle aura été dûment vérifiée, reconnue et épurée. Art. 10. Les députés solliciteront une nouvelle formation d’Etats pour le pays de Provence, non-seulement pour l’administration , mais encore pour la députation aux Etats généraux. La députation actuelle n’étant pas constitutionnelle et la communauté n’y ayant consenti que pour donner à Sa Majesté une nouvelle preuve de sa soumission. et de sa fidélité et dans l’espoir qu’elle a suppléé les protestations du pays par le préambule des lettres patentes de convocation et reconnu la nécessité que la nation soit légalement représentée. Art. 11. Les députés demanderont que les communautés soient autorisées à racheter tous les droits seigneuriaux qui portent le caractère de la vraie propriété et l’abolition de tous les autres droits féodaux qui ne sont que le fruit de l’usurpation que la puissance des grands se permit sur la faiblesse des peuples. Art. 12. Les députés réclameront une modération sur le prix du sel rendu uniforme pour tout le royaume, comme aussi l’abolition de tous droits de circulation dans son intérieur, et notamment le reculement des bureaux des traites, sur les frontières. Art. 13. Les députés demanderont qu’il ne puisse pas être attenté à la liberté individuelle des citoyens sans l’observation des formes qui seront indiquées par les Etats généraux. Ils solliciteront la liberté de la presse, sauf les réserves dont elle peut être susceptible. Art. 14. Les députés réclameront l’abolition de tous privilèges exclusifs, et notamment de ceux qui grèvent le pauvre peuple, en concentrant dans une compagnie le droit de faire le commerce des denrées et marchandises de première nécessité. Art. 15. Les députés demanderont que les Etats généraux soient périodiques, et que leur tenue ne puisse pasêtreéludée aux époques qui seront déterminées, sans qu’il y ait suspension d’impôt dans tout le royaume. Art. 16. Les députés insisteront à ce qu’il ne soit perçu aucun impôt à l’avenir autre que ceux qui seront déterminés par les Etats généraux, aucun corps judiciaire n’avant le droit de les consentir sous prétexte de' la vérification de leur établissement, au préjudice de la nation qui ne peut pas se dépouiller de ce droit. Art. 17. Les députés de la nation provençale aux Etats généraux réclameront l’abrogation de la loi qui exclut le tiers des emplois militaires. Art. 18. Les députés insisteront à ce que, dans le choix des impôts, il soit donné la préférence à ceux qui affecteront le plus la propriété. Art. 19. Les députés de la présente assemblée auront le pouvoir de concourir à toute délibération, voter ou consentir tous autres objets die doléance que la présente assemblée n’aurait pas prévus, et se concilier à cet égard, soit avec les commissaires, soit avec les députés qui rédigeront le cahier national. Art. 20. Les députés aux Etats généraux solliciteront la responsabilité des ministres comme loi fondamentale de l’Etat. Art. 21. Us demanderont que la présidence aux Etats de la province passera alternativement aux trois ordres. Art. 22. Ils demanderont que la procuration du pays soit séparée du consulat d’Aix. Art. 23. Us demanderont qu’il ne soit jamais réuni plusieurs charges importantes sur la tête d’un même homme. Signé Gayane; A. Richard; Branuche; Deymad ; Esrues; Merendoi; Roux; Rimbaud; Arnaud; Do-nadieu; Chartes; Ghave; Esmenard; Audibran; Louis; Bertrand; Raymond; Jague; Estienne; Ricard; Bruno Ësménard; Glomar; Tibus; Galoy; Joseph Bertrand; Mine; Perron; J. -B. Secret; P'. Santon; Beaufils; Plenese; Pierre Rize; Castellon; Porte; Pomuy; Bonleos; J. Roman; Ricard; Bérard; Jean Lauris; Saint-Martin ; Jaubert, médecin; SimonVion; Mille; Aillaud; Bormaud ; Ghapuv ; Berard; Lau-rens; J. Estienne; Brun; Joseph Montagnier; Bou-rcche; Joseph Caire; J. Gay;'Poncet; Berrad; Vaisse; Bertrand; Joseph Laurence; Malhiesmenard; Rossignol; Pellegrin aîné; Gonsale Chauvet; Reynaud; Gavaudan; Roumieu; Louis Cristal; Morel; Saint-Martin; Henri Louche; Gauberl; Ghane; Estienne cadet; Berard-Romans; Martin Favotte; François Chauvel; Roux; Andrés; Bonnaud fils; Sicard; Pironel; E. Perron; Esmenard-Dumazet; Castelas; Daubergue; Roch;Segond; J. Brun; Gaubcrt; Cba-brus; Durand; Roussel; Lauray; Gayane; Attenoux; Pierre Cattenoux; Bonsilhon; J. Bôunolhon; Montagnier; Ratimieu; Louche; Bonnaud; Sire; Bon-tous, viguier. CAHIER Des doléances de la communauté de la Penne (1). Le Roi veut mettre un terme à nos maux. Sa bienfaisance l’a porté à consentir que les communes de son royaume pussent lui faire parvenir leurs doléances soit relativement à ce qui regarde la généralité du royaume, soit par rapport à celles qui ont trait à l’administration de la province, et soit à ce qui peut en particulier intéresser chaque communauté. Empressons-nous de profiter d’un bienfait si précieux et présentons les nôtres avec cette confiance que sa bonté inspire. PREMIER OBJET. — La généralité du royaume. La nation représentée par les Etats généraux qui seront périodiques. Les emprunts, impôts et subsides consentis et octroyés par les Etats généraux. Egalité dans la répartition des impôts, sans distinction d’état et de condition, et des biens nobles ou roturiers. Envoi direct du produit des impositions des (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire. [Élats gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée d'Aix.] 369 provinces au trésor royal sans intermédiaires. La liberté individuelle en l’abrogation de toutes lettres attentatoires à la liberté des citoyens. Anéantissement de toutes distinctions qui peuvent avilir la dignité de l’homme. Révocation de l’ordonnance militaire de 1781. Tous droits de propriété inviolables. Réforme du code civil et criminel, et anéantissement de toutes juridictions seigneuriales. Raccourcissement des délais dans la procédure, modération dans les épices, et dans les droits de séance, et dans tous les extraits pris au greffe. Abolition de tous droits de circulation dans l’intérieur du royaume, et le reculement des bureaux des traites sur la fin des frontières. Suppression des visites domiciliaires par les employés des fermes. Anéantissement de la dîme, n’étant point d’institution divine ; offre de payer aux curés et aux prêtres desservants ce qui peut leur être nécessaire, et ce qui sera déterminé dans les Etats généraux, ou abonnement de la dîme avant l’impôt territorial, pour éviter tous procès. Abolition de tout servage. Affranchissement des cens et directes par le rachat, qui ne sera perçu que sur la représentation du titre emphytéotique, et non des reconnaissances, avec défenses à l’avenir aux vendeurs d’immeubles d’établir aucunes servitudes, ni de se réserver aucunes redevances. Les ministres seront comptables aux Etats généraux de l’emploi des fonds qui leur seront contiés. La liberté de la presse, à la charge par chaque auteur de souscrire son ouvrage. DEUXIÈME ORJET. — La province. Réforme de la constitution ou nouvelle formation. Syndic pour le tiers avec entrée aux Etats. Présidence non perpétuelle et alternative entre les trois ordres. Exclusion des magistrats et de tous officiers attachés au fisc des mêmes Etats. La désunion de la procure du pays du consulat d’Àix et l’admission des gentilshommes non possédant fiefs, et dujclergé du second ordre dans les-dits Etats. Egalité de voix, au moins pour l’ordre du tiers, contre celles des deux premiers ordres, tant dans les Etats que dans la commission intermédiaire, et surtout l’égalité des contributions pour toutes charges royales et locales sans exemption aucune et nonobstant toute possession ou tous privilèges quelconques. L’impression annuelle des comptes de la province dont envoi sera fait dans chaque communauté. Poids et mesures communs dans toute la province. TROISIÈME OBJET. — La communauté. Nous noos plaignons que notre terroir étant stérile, que l’engrais pour le faire produire et la main-d’œuvre emportant au moins la moitié du produit, il ne nous reste pour principale denrée que le vin, attendu la mortalité des oliviers survenue par le froid excessif de cet hiver, et qu’on nous met des entraves qui nous empêcheront bientôt de le vendre. Nous nous plaignons que nous n’avons pas la liberté de transporter dans l’étendue de notre 1 re Série. T. VI. terroir notre vin d’un endroit à l’autre, ainsi que notre huile, sans être obligés de prendre des acquits-à-caution au bureau qui est établi dans notre terroir, ce qui procure très-souvent des procès qui nous ruinent. Nous nous plaignons que si nous portons notre vin dans les maisons de la communauté qui touchent le chemin de Marseille, pour le vendre, on vient nous le saisir, ce qui a procuré divers procès qui existent encore, et que la ferme veut nous soumettre à déclarer la quantité du vin qui nous est nécessaire pour notre consommation. Nous nous plaignons que la ville de Marseille, en vertu de certains arrêts qu’elle a obtenus, nous empêche d’avoir des moutons pour les engraisser, ce qui nous enlève pour l’engrais de nos terres. Nous nous plaignons que la province nous soumet à l’entretien du chemin royal de Marseille dans la longitude de notre village, où il n’y a point de rues fermées, et dont les maisons se trouvaient séparées du chemin par un ruisseau. Nous nous plaignons que, pour avoir entrée à nos maisons du côté du chemin, et couvrir ce ruisseau par une voûte, nous avons été obligés de consentir à une servitude et à un cens, et que cette voûte ayant été prise pour l’agrandissement dudit chemin de Marseille, on nous fait payer toujours le cens qui y a été attaché. Nous nous plaignons que si nous transportons noire vin à Marseille, il nous faut payer des droits, et que si nous ne pouvons pas le vendre, et que nous soyions dans l’obligation de le rapporter, nous sommes encore dans l’obligation de payer un autre droit; que si nous apportons une charge de blé de Marseille, on ne fait rien payer, tandis que quand on en apporte au delà de dix on nous fait payer. Nous nous plaignons encore qu’il s’est élevé en Provence une chambre plus ardente que celle de Valence. On nous soumet à n’avoir que trois mulets attelés aux charrettes, et que le chemin étant mauvais, et rempli d’eau et de boue dans l’hiver, si le hasard fait, pour ne pas marcher dans l’eau et dans la boue, qu’on se mette un moment sur la charrette, le moindre cavalier de la maréchaussée dresse procès-verbal contre nous, sans nous rien dire ni le signifier ; on obtient une condamnation d’une amende de 50 livres à l’intendance qu’on nous fait ensuite signifier avec commandement de payer dans trois jours, autrement saisie, sans avoir pu être entendu ni défendu avant le jugement; il arrive même» que quelquefois le cavalier se trompe, ou qu’il n’a pas trouvé; mais comme la moitié de l’amende lui est attribuée, il se procure par là dix fois plus que sa solde. Nous demandons l’anéantissement de toutes les fermes de la communauté, comme pesant trop sur les pauvres, et la cessation de tous les abus ci-devant mentionnés. Telles sont nos plaintes. Fait et arrêté cejourd’hui 20 mars 1789 en la présente assemblée, et ont signé ceux qui l’ont su. Signé d’Ollières ; Gartagnée ; Gaspard Parride ; Louis Poutels; Jean-Antoine Julliard; Jean Sarde; Joseph Finaud; Trecon ; P. Bistagues ; Baptiste Trucv; Gabriel Arnaud; Jacques Dumond; Lazare Michel’; Senez; André; Maignaud; Antoine Mariad ; J.-L. Nicolas; Jean-Antoine Garoute; Fucurny ; Biaise Audibert ; Estienne ; Trucy ; Joseph Mistrad ; J. Tardieu; Joseph Cas; Guitton; Honoré Juttaud; Louis Garoute; Bertrand; Jean-Joseph Pinatel ; Moussard, viguier; Martinot, greffier. 24