[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [31 mai 1790.] de Puységur, obtenue par lui en 1778. Je n’entrerai, Messieurs, dans aucun détail sur cette affaire qui me paraît n’être pas du ressort de l’Assemblée nationale; mais je dois, pour remplir le vœu du régiment de Strasbourg, vous dire, en son nom, qu’il est vivement attaché à M. de Puységur, qu’il le regarde comme son père et qu’il se rend caution de ses sentiments et de son patriotisme ; ce témoignage d’affection des soldats envers leur colonel, cette union entre le régiment et son chef est si précieuse, Messieurs, qu’après vous avoir proposé de renvoyer cette affaire au pouvoir exécutif, je crois devoir engager l’Assemblée de charger son président d’écrire au régiment d’artilhrie de Strasbourg, pour lui témoigner la satisfaction qu éprouve l’Assemblée nationale de l’union intime qui règne entre ce régiment et son chef. (Cette motion est mise aux voix et adoptée.) M. Brival, procureur du roi de la prévôté de Tulle, admis à la barre, supplie l’Assemblée d’ordonner que toutes les minutes des procédures pour cause d’attroupement soient renvoyées sur le champ au comité des rapports. Il prononce le discours suivant : Messieurs, je réclame l’exécution des lois ; je plaide la cause de l’humanité. Le-tribunal prévôtal de Tulle, où je suis procureur du roi, a méprisé toutes les règles, violé toutes les formes, il est toujours dirigé par les mêmes principes et je ne le défère à cette auguste Assemblée qu’après m’être inutilement adressé aux tribunaux supérieurs. Ces magistrats, jaloux de cacher et d’ensevelir dans l’oubli les vices d’une juridiction qu’ils dirigent à leur gré, n’ont fait aucun droit sur ma réclamation. Je me suis plaint à eux de ce qu’on avait condamné plusieurs particuliers pris en attroupement à Favars, sans avoir fait droit, ni même prononcé sur ma demande en cassation de la procédure. Je me suis plaint, Messieurs, de ce qu’on s’était permis de juger, et surtout de prononcer des peines de mort, sans qu’il y eût aucune conclusion sur le fond. Je me suis plaint de ce que ce tribunal avait condamné à mort un homme qu’il ne déclarait que coupable d’avoir été pris dans un attroupement les armes à la main et violemment soupçonné (Savoir brûlé une amorce, tandis qu’aux termes de la loi martiale, de cette loi, que les circonstances avaient nécessitée, il ne pouvait condamner à la mort que ceux qu’il déclarait atteinis et convaincus d’avoir usé de violence. Mes supérieurs me répondirent: l’un qu’il n’était juge que des compétences, l’autre qu’il y avait trop de vivacité de ma part, comme si l’on pouvait se plaindre froidement de ce qu’on a fait périr des malheureux qui ne le méritaient pas, ou qui n’étaient pas légalement condamnés. Des discussions survenues entre Tulle et Brive engagèrent ces deux villes à envoyer des députés vers l’Assemblée nationale. Si les députés de Tulle s’étaient renfermés dans les termes de leur mission, je n’aurais pas cru devoir me présenter sur la scène, laissant à l’Assemblée nationale le soin de rendre justice à qui elle était due. Mais, Messieurs, j’ai vu pendant ces discussions les haines s’accroître dans notre province, les passions fermenter, les préventions grossir, j’ai vu l’opinion publique s’altérer par les intrigues des ennemis de la Constitution, par ces ennemis 21 qui seuls, depuis le décret de sursis, entretiennent les divisions entre les municipalités de la province. J’ai vu l’innocence exposée aux fureurs des méchants. Je me suis vu inculpé moi-même pour avoir fait le bien, pour avoir cédé aux mouvements d’une âme compatissante et pour avoir fait éclater mon zèle pour le maintien et l’exécution des lois. Un des députés extraordinaires a présenté comme un crime, à tous mes concitoyens, le soin que j’avais pris d’éclaircir, aux yeux de mes supérieurs, la conduite du tribunal prévôtal de Tulle. Si je n’avais eu à combattre que cette inculpation particulière, si je n’avais eu qu’un intérêt personnel à défendre, après avoir rempli mes devoirs, j’aurais attendu patiemment, du temps et de la vérité, ma justiücaiion. Mais j’ai tremblé qu’une ligue avide du sang des hommes ne parvînt à remettre en des mains dangereuses un glaive qu’elles pourraient souiller encore ..... Mais j’ai craint que les intrigues du parti anticonstitutionnel n’égarassent les esprits dans notre province. Je n’ai plus hésité sur le parti qui me restait à prendre : j’accours pour faire connaître à l’Assemblée nationale les fautes graves, les erreurs volontaires, et puisqu’il faut le dire, les prévarications de ce tribunal qui fait tant d’efforts pour se renantir d’un pouvoir dont il a tant abusé. Ce corps cherchera vainement, comme il l’a fait jusqu’ici, à confondre son intérêt avec celui de la commune et de la garde nationale de Tulle. Ce n’est, Messieurs, ni cette garde nationale ni celte commune que j’attaque. Je m’empresse, au contraire, de louer le patriotisme et le zèle qui les ont distinguées. Je m’empresse de reconnaître et de publier que c’est principalement à la garde nationale de Tulle qu’est dû le rétablissement du repos public dans notre province et j’ose même dire que j’ai partagé sa gloire et ses dangers. Je n’attaque que le tribunal prévôtal, au sort duquel l’honneur de la ville et celui de la garde nationale ne sont point attachés. Les citoyens de Tulle doivent considérer que mon zèle embrasse leurs ppis chers intérêts, puisqu’il est dans l’ordre des événements possibles qu’ils soient eux-mêmes exposés quelque jour aux procédures de la prévôté. JN’est-il pas affreux de sentir perpétuellement son âme oppressée par la douleur de voir qu’on a sacrifie des victimes, plus malheureuses que coupables, et par la crainte d’en voir sacrifier d’autres aux passions haineuses et sans cesse agissantes des ennemis du peuple ? Pour vous mettre à portée de connaître les abus que je n’ai pu arrêter et d’en prévenir surtout de plus grands, je vous supplie, Messieurs, d’ordonner que toutes les minutes des procédures instruites par le tribunal prévôtal de Tulle, pour cause d’attroupement, soient renvoyées sur le champ à votre comité des rapports. Je dis sur le champ et j’ai les plus fortes raisons pour désirer que cet ordre soit accéléré. M. le Président répond : L’Assemblée nationale prendra votre pétition en considération et elle vous permet d’assister à la séance. M4 lilalès demande que l’affaire soit renvoyée 22 (Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLËMENÏÀlftËS. [81 ift&i l7§0. au cotnité des rapports, Que le diécotirs du procureur du roi soit déposé sur le bureau et que ledit procureur soit entendu lorsque l’affaire Sera discutée. La motion, mise aux voix, est décrétée. M. Bourdon de là Oôsnfère, électeur et représentant de la commune de Paris, admis à là barre, prononce un discours et présente un mémoire sur la nécessité de former une école d’expérience pour la partie morale de l’éducation publique; il présente en même temps üti arrêté de la municipalité de Paris qui juge l’expérience nécessaire. M. le Président répond : « L'Assemblée nationale; qui Veut fonder Sur des bases solides le bonheur qu’elle prépare à la France, connaît toute l’importance et le prix d’une éducation nationale conçue sUr de bons principes. Elle sait que les cœürs innocents et purs de là jeunesse sont le monument le plus précieux et le plus durable sur lequel elle puisse graver la Constitution. Elle ne peut donc voir qu’avec un extrême intérêt que vous consacriez à cet utile emploi les fruits de Vos veilles et de votre expérience. Elle prendra ert considération les projets que vous lui soumettez et vous permet d’assister à sa séance. » L’Assemblée décrète qüë le Mémoiré Sur l’éducation, présenté par M. Boürdoü, sera renvoyé au comité de Constitution. M. lièroÿ, maire dé Lisieux, , admis à la barre, prononce un discours dans lequel il annonce que la municipalité de Lisieux, animée du désir de coopérer, autant qu’il est en elle, à rétablissement et au maintien dé la Constitution, l’a chargé de mettre sons les yeux de l’Àssemblêé : 1° un arrête du 17 du courant, par lequel, ën supprimant et anéantissant un iibellh fanatique, intitulé : Déclaration des catholiques de Mme s, elle déclare interrompre toute correspondance fraternelle (H amicale avec la municipalité de Nîmes, jusqu’à ce qu’elle ait authentiquement désavoué ce ridicule ouvrage; 2° un autre arrêté du lendemain 18, ayant pour objet un imprimé incendiaire qui a pour titre : Adresse aux assemblées primaires du département de Châlons. M. Leroy ajoute que la garde nationale et la municipalité de Lisieux, animées du même esprit du bien public, s’occupent des moyens de formel1, avec les troupes nationales des villes voisines, Une cbufédêration qui, en assurant la tranquillité dans ces cantons. ôtera aüx antipatriotes tout espoir dé troublet et apporter obstacle aux décrets de l’Assemblée nationale. M. le Président admet M. Leroy à la séance. Un membre fait la motion qüe l’Assemblée Charge son président d’écrire à la garde nationale de Lisieux, pour l’assurer que l’Assemblée nationale applaudit au patriotisme qui anime cette garde. La motion, mise aux voix; est décrétée� M. le Président s’étant retiré par devers le roi, M. Camus prend place aü fauteuil. M. Dupont (de Nemours ) présente à l’Assemblée la soumission de la municipalité de la ville d’Auxerre, pour acquérir des biens nationaux jusqu’à concurrencé dé là somme de 8 millions. Cette Soumissiôn est accompagnée ü’uüe adhésion entière aux décrets de l'Assemblée nationale. Il donné ensuite lectufe d’une adresse du conseil général de la Comriiuiie de Nemours, qui contient: 1° l’ex pression dés Sentiments d’admiration; de respect et. de soumission dont tous lés citoyens de la ville de Nemours sont pénétrés pour tous les décrets émanés de l’Assemblée nationale et Sanctionnés pâr le roi. « Nous y âdhê-rotts de toutes nos forbeS, disérit-ils, comme à la loi qui Oblige, Comme à la religion qui persuade, comme au bonheur qui fait tout notre espoir; -> 2b la Soumission d’acquérir pour i million des fonds nationaux-, 3b le montant de la contribution patriotique, 3*7,369 livrés; enfin, la dénonciation d’écrits incendiaires. Cette adresse est terminée par cette phrase : « Nos cœurs, nos fortunes, nos biens sont tout entiers à la Constitution. » M» Sallé de Choux déclare qu’ayant déjà offert, au mois, d’octobre dernier, une somme de 1,000 livres, à titre de don patriotique, pour le sieur Rouillé, receveur du grenier à sel, à San-Cërre, il est encore chargé par ce citoyen estimable d'offrir, pour sa contribution patriotique, une somme de 2,000 livres� formant non pas seulement lé quart, mais la moitié de son revenu, laquelle, somme a été réalisée aujourd’hui, à la caisse des dons patriotiques par lui, Sallé de Choux, député du Berry. M. Bouttevllle-Duiüetz, au hom dii comité chargé de l’aliénation des domaines nationaux, fait lecture d’une instruction pour Vexécution du décret du 14 mai, sur la rente des domaines nationaux. M. le dtt© de La ttoéhefottcnttld fiait la motion dé décrétée Que l’itiBtructibü Sera exécutée suivant Ba forme et tëneut; comme lé dëcrët dti 14 mai, et qu’elle Berâ jointe â sbU pÿbdèsAVèrbfel de ce ioür, Cette motion est adoptée. Suit la teneur de l’instruction : instruction, pôüHNfxêcuÜèn dû décret dé V Assemblée nationale, du \kmaï 1790, Sur la rente des dômitièi Mli'Onàùx. Les dispositions de là loi sont ïénféfmêës sôüs trois titrés différents. . . Le premier autorise toutés lés municipalités du royaume à acquérir des doniainés nationaux jusque concurrence d'iirië somme de 400 millions; règle les formalités et les conditions qu’elles âüs ront à remplir et fixe les profits qu’éilës doiVént retirer de leurs acquisitions. Le second assure à chaque municipalité ünê préférence sur les biens situés dans J’ête.ndüé de son territoire, lui permet de se faire subroger à là municipalité qui les aurait précédemment acquis, et détermine les conditions, lés formes et les avantages de la subrogation. . � Le troisième oblige les municipalités â revéndrè aussitôt qu’il leür sera fait des offres égaies àu prix dé restimation, et règle les termes et lès facilités qui seront accordés aux acquèfëürs particuliers. L’analyse et le développement des dispositions de la loi faciliteront l’intelligence, et préviendront les difficultés que son exécution pdürrait faire naître,