460 [Assemblée nationale.] charger de la perception des droits sur les eaux-de-vie, une régie intéressée, c’est-à-dire une compagnie qui s’engageait à payer une somme fixe, et qui donnait en outre une part de l’excédent en cas qu’il s’en produisit. La perception ayant éprouvé depuis un an une diminution sensible, par suite de causes qu’on ne saurait imputer à la régie, les régisseurs ont demandé une indemnité. Votre comité a pensé qu’il était juste de la leur accorder, mais comme le Trésor public ne doit pas souffrir du défaut de perception qui a eu lieu, nous vous proposons de faire contribuer à cette indemnité les peuples de l’ancienne province d’Artois. Cette proposition est décrétée en ces termes : « L’Assemblée nationale, sur le rapport qui lui a été fait par son comité des finances, de la pétition des régisseurs généraux de l’octroi sur l’eau-de-vie, dans la ci-devant province d’Artois, et des moyens opposés à ladite pétition, par les députés extraordinaires de l’Assemblée administrative du département du Pas-de-Calais, décrète : « 1° Qu’il n’y a pas lieu à délibérer sur ladite pétition tendant à ne verser dans les caisses générales et particulières dudit département, les droits provenant des octrois sur l’eau-de-vie, que d’après le résultat d’un compte de clerc à maître ; « 2° Que l’assemblée administrative du département du Pas-de-Calais, et, à son défaut, le directoire, après avoir entendu les municipalités et pris l’avis des districts, réglera l’indemnité qui peut être due auxdits régisseurs; et ce, d’ici au Ier janvier 1791, pour tout délai, sur laquelle indemnité il sera statué définitivement par l’Assemblée nationale; et, dans le cas où l’indemnité sera jugée due, il sera pourvu par elle au mode de remplacement des revenus publics : déclare que, jusqu’à cette époque, les régisseurs des octrois étant autorisés à suspendre leurs payements à l’administration du département, les receveurs généraux et particuliers des finances demeurent provisoirement autorisés à suspendre, jusqu’à concurrence des sommes qui seraient dues par lesdits régisseurs, leurs poursuites vis-à-vis les receveurs dudit département; « 3° Quant aux sommes dues aux villes pour la part qu’elles ont dans lesdits octrois, elles leur seront payées au marc la livre par les régisseurs ; savoir : un quart avant le 1er décembre prochain, et les trois autres de dix en dix jours, en portions égales, jusqu’à l’extinction des sommes échues, de manière qu’elles soient entièrement acquittées au Ier janvier 1791 ; que dans le premier payement entreront les sommes saisies et arrêtées, dont sera fait état auxdits régisseurs, leur faisant mainlevée, au surplus, de toutes saisies-arrêts et exécutious et contraintes; « 4° Lesdits régisseurs continueront de payer de mois en mois aux villes les sommes courantes qui leur seront dues , conformément au traité auquel il ne sera rien innové. » M. Gossin, au nom du comité de judicature. Le conseil supérieur de Corse a été créé et installé en 1768; les membres qui le composent ont tous été nommés par le roi; ils avaient des appointements fixes, au moyen desquels tous émoluments ou épices leur ont été interdits. Le plus grand nombre d’entre eux a consumé, loin de ses foyers, celte portion active de la vie pendant laquelle les connaissances se perfectionnent et les facultés de l’esprit se concentrent dans le cercle d’un état qui les absorbe toutes. S’il est impos-J16 novembre 4790.1 sible à un certain âge d’entrer dans une nouvelle carrière, c’est surtout pour des magistrats que des devoirs habituels et multipliés de leur état éloignaient nécessairement de toute étude comme de toute autre habitude. Quelques-uns touchent au dernier période de la vieillesse, d’autres ont atteint celui des infirmités. Leur sort serait affreux si la patrie, qui doit à sa régénération, à sa nouvelle organisation, le sacrifiçe de leur existence civile, ne pourvoyait pas à leur existence civique. Ces motifs sont communs aux membres du conseil supérieur, originaires et non originaires; mais ces derniers représentent que, transplantés en Corse depuis plusieurs années, même depuis vingt-deux ans, ils sont presque tous devenus étrangers à leur première patrie; qu’ils ont sacrifié les intérêts qui les y attachaient encore pour rendre meilleur leur sort sur une terre étrangère qu’ils avaient adoptée comme ils en avaient été adoptés. Ils ne peuvent espérer d’être élus par un peuple auquel ils ne tiennent par aucun de ces liens qui forcent les suffrages. Etrangers dans leurs provinces, oubliés, méconnus, peut-être dans leur propre pays, ils seraient désormais isolés sur la terre, sans patrie, même sans droits, s’ils étaient abandonnés par le souverain ou par la nation qu’ils ont servis pendant tout le cours utile de leur vie. Votre comité de judicature, quoique touché de ces motifs, n’a pas pensé qu’il dût vous proposer aucune indemnité à décréter en faveur des anciens magistrats de la Corse. Il faut distinguer les originaires de Plie de ceux qui ne le sont pas. Quant aux originaires, ils sont dans la position des ci-devant magistrats des cours souveraines du royaume, pourvus sur de simples commissions du roi. Quant aux magistrats non originaires de Corse, votre comité croit qu’ils pourront avoir droit à une pension, et vous présente le projet de décret suivant : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport du comité de judicature, décrète que la pétition des ci-devant magistrats de Corse, pour ce qui concerne ceux non originaires de cette île, est renvoyée au comité des pensions, qui en rendra compte incessamment. » (Ce projet est adopté.) M. Gossin. J’ai aussi à vous présenter, au nom du comité de Constitution, le projet de décret suivant : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport du comité de Constitution, confirme la délibération de l’assemblée électorale du département de Corse et décrète qu’en conformité du vœu qu'elle exprime, cette île forme un seul département, dont Bastia est chef-lieu. » (Ce projet est adopté.) M. Regnaud, député de Saint-Jean-d'Angély. Je demande que le comité de Constitution nous présente un mode de tribunal provisoire auquel on attribuera la commission de confirmer les jugements criminels du Châtelet. On ne peut plus contenir les prisonniers; quand on s’y présente, ils vous disent en vous découvrant leur poitrine : « Un jugement ou la mort. » M. Prieur. Il est impossible d’organiser un tribunal dont nous n’avons aucun élément. (L’Assemblée passe à l’ordre du jour.) M. le Président. L’ordre du jour est la suite de la discussion sur l'impôt du tabac. ABCHIYES PARLEMENTAIRES.