207 [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [15 février 1791.) PROJET DE DÉCRET. Art. 1er. Les colonels en activité effective, de toutes les armes, qui ont dix années de service dans ce grade et qui, renonçant à l’activité, préféreraient se retirer en ce moment avec Je grade de maréclial de camp, à l’assurance d’être� employés dans ce grade, ainsi qu’il est accordé aux officiers qui y parviendront, d’après les règles fixées par le décret du 21 septembre dernier, sur l’avancement militaire, obtiendront, en retraite, le grade de maréchal de camp. Art. 2. Les lieutenants-colonels en activité effective, de toutes les armes, qui ont 12 années de service dans ce grade et qui, renonçant à l’activité, préféreraient se retirer, en ce moment, avec le grade de maréchal de camp, à l’assurance d’être employés dans ce grade, ainsi qu’il est accordé aux officiers qui y parviendront d’après les règles fixées, par le décret du 21 septembre dernier, sur l’avancement militaire, obtiendront, en retraite, le grade de maréchal de camp. Art. 3. Ces officiers recevront fa retraite dont ils sont susceptibles par leurs années de service, suivant le décret du 3 août dernier, sans égard au grade de maréchal de camp. Art. 4. Les colonels qui auront été majors ou lieutenants-colonels compteront deux années de major pour une de lieutenant-colonel, et celles de lieutenant-colonel comme colonel. Art. 5. Les lieutenants-colonels, qui auront été majors, compteront deux années pour une de lieutenant-colonel. Art. 6. Les colonels et lieutenaots-coloDels, qui voudront profiter des dispositions du présent décret, auront deux mois, à compter de la publication, pour en former la demande; son efi\ t ne pouvant avoir lieu que pour cette fois seulement, et ne pouvant s’étendre au delà du terme fixé ci-dessus. Ceux desdils officiers qui conserveront leur activité dans les grades de colonels et de lieutenants-colonels suivront leur avancement aux grades supérieurs, d’après les règles fixées par le decret du 21 septembre dernier, qui abroge toutes les ordonnances précédemment rendues sur l’avancement militaire. (La discussion est ouverte sur le projet de décret.) M. de Foucault de Fardimalie. Je propose de substituer au projet de décret du comité la disposition suivante pour laquelle je demande la priorité : « Les lieutenants-colonels prendront rang de leur brevet de lieutenant-colonel parmi les colonels, pour être faits maréchaux de camp, en comptant deux années de major pour une de lieutenant-colonel. » M. d’Ambly. Messieurs, j’étais lieutenant-colonel, par mon rang, à l’âge de 26 ans ; conséquemment, je sais ce que c’est qu’un lieutenant-colonel, c’est l’âme d’un corps. Dans le temps où je l’étais, c’était l’ancienneté qui donnait ce grade; actuellement, beaucoup l’ont été de faveur; mais j’ose dire que le choix était excellent; cela n’empêche pas qu’ils n’ont pas traveisé tout le corps pour être lieutenants-colonels. La nation, en adoptant dans ce moment-ci le décret qui lui est proposé, se charge de retraites pour favoriser ce corps-là. Si vous adoptez ce que vient de dire le préopinant, vous allez vous jeter dans un embarras qui ne finira pas. Les majors en second reviendront, les capitaines reviendront, et vous ne finirez point cette hiérarchie-là. J’adopte le projet du comité. ( Applaudissements .) (L’Assemblée, consultée, accorde la priorité au projet du comité.) Un membre demande par amendement à l’article 1er que « les lieutenants-colonels, qui seront « nommés colonels, prendront rang parmi ces « derniers, conformément aux ordonnances qui « fixaient l’époque à laquelle ils devaient par-« venir au grade de maréchal de camp concur-« remment avec les colonels ». Un membre propose par amendement au même article que « les lieutenants-colonels, actuelle-« ment servant dans ce grade, rouleront avec les « colonels pour devenir maréchaux de camp ; « mais ils perdront six années de leur grade de « lieutenants-colonels ». (Les deux amendements sont rejetés par la question préalable.) M. de Whupfen. Il nous a échappé une observation et à moi-même qui ai contribué à ce décret. L’article 6 dit : « Ceux desdits officiers qui conserveront leur activité dans les grades de colonels et de lieutenants-colonels suivront leur avancement aux grades supérieurs, d’après les règles fixées par le décret du 21 septembre dernier, qui abroge toutes les ordonnances précédemment rendues sur l’avancement militaire. » Or, il est des lieutenants-colonels qui, d’après l’ordonnance dernière, prenaient rang dans la colonne des colonels, de la date de leur commission de lieutenants-colonels. Il faut donc ajouter à l’article ces mois : « Et néanmoins les colonels actuels en activité effective, qui ont été lieutenants-colonels, conserveront, dans la colonne des colonels, le rang qu’ils tiennent en vertu des-ordonnances qui existaient lorsqu’ils ont été promus à ce grade. » (Cet amendement est décrété.) M. Alexandre de Lameth. Je suis très fâché que le corps très respectable des lieutenants-colonels soit soutenu de cette manière dans l’Assemblée. Si les décrets que vous avez rendus sur l’avancement militaire ont rendu la fortune d’un grand nombre d’individus, surtout de ceux qui ue sont parvenus que par la faveur, les colonels attachés avaient par les ordonnances le droit de parvenir à tous les régiment�. Qn’a proposé le comité militaire? Que sur 3 régiments, 2 seraient donnés aux lieutenants-colonels et 1 seulement aux colonels attachés. Ain-i on a frappé sur tous ceux qui avaient obtenu des faveurs et des grâces de l’ancien régime; on a traité les lieutenants-colonels avec une très grande faveur; presque les deux tiers des régiments leur appartiennent; leurs appointements ont été augmentés; on veut qu’ils participent aux bienfaits du nouveau régime et qu’ils conservent les avantages de l’ancien. Mais les capitaines servaient l’Etat comme les lieutenants-colonels; mais les sous-lieutenants servent l’Etat, les sous-ofticiers servent l’Etat, tout comme les colonels, et cependant ils n’obtiennent rien. Eh bien, si l’on veut détruire tous les états de l’ancien régime, si l’on veut que les [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [15 février 1791.J 208 lois aient un effet entièrement rétroactif, que l’on fasse monter tous les officiers à toutes les places, nue l’on ne combatte pas seulement pour les lieutenanis-colonels, que l’on détruise la hiérarchie militaire, que l’on détruise l’armée tout entière. (Vifs applaudissements.) M. d’Estourmel. Je demande à M. le rapporteur si, par ce mot générique : de toutes les armes , il a entendu comprendre non seulement les lieutenants-colonels en activité actuellement, mais ceux à qui, par des ordonnances de réforme précédemment rendues, l’activité avait été conservée. M. Alexandre de Beauharnals, rapporteur. Le lieutenant-colonel en activité dans les régiments de l’armée. M. d’Estonrmel. C’est d’après ces observations que je crois qu’il est de la sagesse de l’Assemblée nationale de ne pas perdre de vue qu’il y a un nombre d’individus qui se trouvent réformés, tels que tes officiers de gendarmerie. (Murmures.) J’avoue que je suis étonné qu’il s’élève des réclamations sur ce point-là. Je réclame aussi pour les ci-devant officiers aux gardes françaises qui sont encore en activité de service (Murmures); ils ne sont point encore remboursés de leur charge, leurs appointements n’ont point cessé de courir qu’au 1er janvier dernier. Je demande s’il est de votre justice que ces officiers qui ont 30 ou 40 ans de services, soit mis dehors, du moment que vous décrétez un principe général, qui admet les lieutenants-colonels et les colonels à devenir officiers généraux. Je demande donc que l’on généralise le décret. (L’amendement est rejeté.) M. de 'Virïeii. A l’article 6, les mots : auront 2 mois , à compter de la publication du présent décret , sont trop vagues (Murmures); il faudrait mettre : à compter de la publication , dans les corps dans lesquels ils servent. M. Alexandre de Beauharnals, rapporteur. J’adopte l’amendement. Le projet de décret est adopté dans les termes suivants : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu son comité militaire, décrète ce qui suit : Art. 1er. « Les colonels de toutes les armes qui ont dix années de service dans ce grade, et qui, renonçant à l’activité, préféreraient se retirer en ce moment avec le grade de maréchal de camp, à l’assurance d’être employés dans ce grade, ainsi qu’il est accordé aux officiers qui y parviendraient, d’après les règles fixées par le décret du 21 septembre dernier, sur l’avancement militaire, obtiendront en retraite le grade de maréchal de camp. Art. 2. « Les lieutenants-colonels de toutes les armes en activité effective, qui ont douze années de service dans ce grade et qui, renonçant à l’activité, préféreraient se retirer en ce moment avec le gracie de maréchal de camp, à l’assurance d’être employés dans ce grade, ainsi qu’il est accordé aux officiers qui y parviendront, d’après les règles fixées par le décret du 21 septembre dernier, sur les avancements militaires, obtiendront en retraite le grade de maréchal de camp. Art. 3. « Ces officiers recevront la retraite dont ils sont susceptibles pour leurs années de service, suivant le décret du 3 août dernier, sans égard au grade de maréchal de camp. Art. 4. « Les colonels, qui auront été majors ou lieutenants-colonels, compteront deux années de majors pour une de lieutenant-colonel, et celtes de lieutenant-colonel, comme colonel. Art. 5. « Les lieutenants-colonels, qui auront été majors, compteront deux années pour une de lieutenant-colonel. Art. 6. « Les colonels et lieutenants-colonels qui voudront profiter des dispositions du présent décret, auront deux mois, à compter de la publication dans les corps dans lesquels ils servent, pour en former la demande, son effet ne pouvant avoir lieu que pour cette fois seulement et ne pourra s’étendre au delà du terme fixé ci-dessus. « Ceux desdits officiers qui conservent leur activité dans les grades de colonels et de lieutenants-colonels suivront leur avancement aux grades supérieur, d’après les règles fixées par le décret du 21 septembre dernier, qui abroge toutes les ordonnances précédemment rendues sur l’avancement militaire; et néanmoins les colonels actuels en activité effective, qui ont été lieutenants-colonels, conserveront dans la colon ne des colonels le rang qu’ils tiennent, ea vertu des ordonnances qui existaient lorsqu’ils ont été promus à ce grade. » Un membre propose un article additionnel dont l’objet est de décréter « que les lieutenants de grenadiers qui ne parvenaient point au grade de capitaine, obtiennent, après trente-deux ans de service en total, dont 20 d’officiers, la retraite de capitaine, et que la même justice soit rendue aux lieutenants de cavalerie pendant l’espace de cinq années. » (Cet article additionnel est renvoyé au comité militaire, qui est chargé de présenter incessamment ses vues sur cet objet.) L’ordre du jour est un rapport du comité militaire sur les invalides. M. Dubois-Oancé, rapporteur , donne lecture de son rapport et du projet de décret du comité (1). M. l’abbé llanry. Messieurs, je crois devoir faire observer à l’Assemblée qu’indépendamment de la discussion des articles qui vn nnent de vous être proposés, il y a une question première et générale dont l’Assemblée doit s’occuper. Ce que j’ai à combattre, c’est la suppression des invalides, c’est le système général de tout le plan du comité. J’avoue, Messieurs, que le profond respect que j’ai pour une cause aussi importante, qui a été (1) Voyez ci-dessus ce document, séance du 13 février 1791.