(Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. |5 février 1791.] 704 acte de bienfaisance et de miséricorde; car tout ce qui tend au bien public est une fonction bienfaisante. ( Murmures à droite.) La cruauté, Messieurs, consiste, suivant les principes de la morale et de la politique, à épargner le coupable. La véritable religion consiste à punir, pour lebonheurdetous, ceux qui troublent la société. La motion de M. l’abbé Maury n’est fondée ni sur la morale, ni sur la religion, mais sur un préjugé qui n’est pas digne de notre législation nouvelle. (. Applaudissements . ) M. l’abbé Maury. L’Assemblée a déjà cru devoir exclure les ecclésiastiques des places municipales et de juges de paix; or, Messieurs, il est bien extraordinaire qu’on mette en question, si ce même juré, qui aura condamné un homme à être rendu, pourra ensuite être son confesseur et le mener à la potence (Murmures .) ; ce ne serait certainement pas là un moyen de lui attirer la confiance de son pénitent. Rappelez-vous que dans les parlements les conseillers-clercs n’étaient jamais de Tournelle. Il y a plus, Messieurs, si on veut examiner l’institution du juré dans la pureté de son principe, les ecclésiastiques doivent en être exclus, parce que le jugement par juré n’est autre chose que le jugement des pairs. ( Murmures prolongés.) Un membre : Voilà encore les privilèges. M. l’abbé Maury. Le devoir des ecclésiastiques est de dtscendre dans les cachots pour y consoler les malheureux; leur devoir est de monter sur les échafauds, et la religion n’est jamais plus grande que lorsqu’elle va ainsi porter des consolations à l’homme souffrant. Mais leur vocation n’est pas de condamner à mort; l’esprit de notre ministère y répugne; et quand on nous dit que les fonctions de juré sont un ministère de justice, on dit une grande vérité; mais la justice est trop sévère pour les pasteurs des peuples; c’est à eux à demander grâce pour les coupables et non pas à les condamner. Leur conserver cette faculté, ce serait en quelque sorte leur imposer la loi d’en accepter les fonctions. Or, ils ne le peuvent pas ; ils ne se tiendront pas pour offensés d’une exclusion qui honore leur ministère; et puisque vous les avez exclus des fonctions municipales, vous ne devez certainement pas les appeler à des fonctions judiciaires. M. Barnave . M. l’abbé Maury a enfin posé le vrai point de la question, lorsqu’il a dit que les ecclésiastiques ne devaient pas être jurés, parce qu’ils devaient former une classe particulière dans la société. C’est parce que les ecclésiastiques ne doivent pas former une classe particulière, qu’ils doivent être admissibles aux fonctions publiques, lorsque ces fonctions ne sont pas, par leur permanence et par l’assiduité qu’elles exigent, incompatibles avec les fonctions ecclésiastiques qu’ils exerçent déjà. (Murmures à droite.) C’est là le principe que vous avez suivi jusqu’à présent; vous avez exclu les fonctionnaires publics ecclésiastiques de toutes les places qui exigeaient une assiduité et une suite de travaux, telles que les places de juges, d’officiers municipaux, des directoires d’administrations; mais vous les avez formellement admis, au contraire, à celles qui n’exign nt que des fonctions passagères et momentanées, telle est véritablement la nature des fonctions de juré; et lorsqu’on nous dit que des raisons particulières d’humanité et de charité doivent éloigner les ecclésiastiques de ces fonctions, je dis que l’article remplit suffisamment tout ce qu’on peut désirer à cet égard, en leur laissant la faculté de ne pas les accepter; je dis que les principes d’humanité n’appartiennent pas exclusivement à une classe d’hommes, mais à toutes les classes de citoyens; je dis que dans la lettre des lois ecclésiastiques, que M. l’abbé Maury nous rappelle, il n’y a pour eux aucun obstacle à la fonction de juré, puisque c’est le juge, et non pas le juré, qui condamne l’accusé, et qui le soumet à la peine. ( Murmures à gauche.) Dans les fonctions auxquelles les ecclésiastiques ont été admis à ce jour, ils ont pu concourir à la condamnation d’un accusé ; on ne les a jamais écartés de la fonction de témoin; nous ne faisons donc rien de plus à cet égard. C’est aux ecclésiastiques fonctionnaires publics à s’en dispenser s’ils le veulent. Outre que c’est la loi civile, c’est que tous les Français sont citoyens, c’est que tous les citoyens sont soumis aux charges que la Constitution leur impose; enfin on vous propose d'exclure une classe de citoyens des fonctions publiques; c’est tout à la fois lui refuser le droit d’être, comme toutes les autres, jugée par des pairs; et c’est, d’autre part, renouveler dans la société un ordre séparé, uo ordre privilégié que nous avons détruits. M. l’abbé Maury. En Angleterre, les ministres ne participent pas à ces fonctions. (L’Assemblée ferme la discussion.) M. Boutteville-Dnmetz demande que les membres des directoires soient exclus du juré. M. de ChoiscnI-Prasfm répond que ces administrateurs ne font que contrôler les listes des éligibles. (La question préalable est demandée sur tous les amendements, excepté sur celui de M. Prieur.) (L’amendement de M. Prieur, tendant à remplacer les mots ; en sont dispensés, par ceux-ci : pourront s’en dispenser est adopté; les autres amendements sont rejetés.) L’article 4, ainsi amendé, est adopté en ces termes : Art. 4. « Ne pourront être jurés les officiers de police, les juges, les commissaires du roi, l’accusateur public, les procureurs généraux syndics et procureurs syndics des administrations, ainsi que tous les citoyens qui ne sont pas portés sur la liste des éligibles. Les ecclésiastiques et les septuagénaires pourront s’eu dispenser. » M. le Président. Messieurs, le scrutin pour la nomination de 6 commissaires-adjoints au comité d’agriculture a donné la majorité des suffrages à MM. Bureaux de Puzy, de Phélines, üionis du Séjour, Jarry, Millet deMureau et Chevalier. M. le maire de Paris m’annonce par lettre que la municipalité de ladite ville a fait hier l’adjudication de 3 immeubles nationaux : le premier, une maison louée 1,200 livres, estimée 15,000 livres, adjugée 35,000 livres; Le second, huit masses de bâtiments au marché Saint-Murtm-des-Champs, louées 4,500 livres, estimées 42,900 livres, adjugées 71,300 livres ; Le troisième, une maison, rue Saint-Martin, [S février 1791.] (Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. louée 4,050 livres, estimée 50,000 livres, adjugée 110,000 livres. M. le Président indique l’ordre du jour de la séance de ce soir, et lève la séance à trois ! heures. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. DE MIRABEAU. Séance du samedi 5 février 1791, nu soir (1). La séance est ouverte à six heures et demie du soir. Un dè MM. les secrétaires fait lecture des pièces suivantes : Lettre de M. Guy Àrdouin, laboureur au village de Lorrait, département de la Charente, père de 11 enfants, bientôt de 12, lequel fait don à l’Assemblée nationale de 800 livres en assignats, bien qu’il lui ait déjà fait don de 3,300 livres, avant même l'existence du décret sur la contribution patriotique. (L’Assemblée arrête qu’il sera fait une mention honorable de cette lettre dans son procès-verbal, et que la somme de 800 livres actuellement sur le bureau sera remise à la caisse des dons patriotiques.) Adresse des officiers municipaux de la ville de Bordeaux, qui annoncent queM. La Fosse, deHon-fleur, capitaine de navire au commerce, commandant le navire la Jeune Sabine, mouillé vis-à-vis du château Trompette, a sauvé la vie, à travers les plus grands périls pour lui, à plusieurs citoyens qui avaient fait naufrage le 23 janvier dernier ; et qu’ils ont délibéré de lui décerner une couronne civique, et de lui donner un pavillon aux couleurs nationales. (L’Assemblée nationale arrête qu’il en sera fait mention honorable dans sou procès-verbal.) La même municipalité fait aussi part, dans ladite adresse, de la conduite de deux femmes de la classe la plus indigente, qui ont donné les marques du courage le plus civique, et qui, après s’être exposées à de grands dangers, se sont empressées de donner aux naufragés, arrachés à la mort, tous les soins qu’elles ont pu. La municipalité recommande à l’Assemblée ces trois personnes intéressantes. (L’Adresse est renvoyée aux comités des pensions et des finances et l’Assemblée ordonne également une mention honorable, dans son procès-verbal, de l’action courageuse de ces deux citoyennes.) Discours prononcé par M. de La Court, curé de la paroisse de Saint-Romain, de la ville de Romans, département de la Drôme, lors de la prestation de son serment, dans lequel les motifs qui ont déterminé ce pasteur sont exposés d’une manière aussi simple que lummeuse. Plusieurs discours du même genre, l’un de M. Defaux, docteur en théologie, professeur au collège de Bar-le-Duc ; L’autre de M. le curé de Saint-Pierre de Caen. Adresse de dévouement des élèves de M. Jonan, 765 j instituteur à Tourmins, département de Lot-et-Garonne. Adresse des négociants et fabricants de la ville J de Grasse, département du Var, qui sollicitent t un tribunal de commerce. (Cette adresse est renvoyée au comité de Constitution.) Adresse de la municipalité de Saint-Denis, en l’île d’Oléron, contenant le précis de la conduite qu’elle a tenue, relativement à un naufrage arrivé sur ses côtes: il en résulte que, par son zèle et sa prudence, elle a sauvé les effets du vaisseau naufragé. (L’Assemblée arrête qu’il en sera fait mention honorable dans son procès-verbal.) Discours militaire et patriotique, prononcé dans la séance publique des amis de la Constitution des ville et dislrict de Lille, par M. Veruay, soldat au régiment de Brie, au nom de tous les soldats citoyens de cette ville, et par M, Dubois le jeune, député du détachement du corps-royal d’artillerie, en garnison à Lille. Adresse des administrateurs du directoire du département de la Côte-d’Or, contenant un procès-verbal qui atteste les généreuses dispositions de la garde nationale de Dijon à se transporter en corps partout où les dangers de la patrie et le maintien de la Constitution pourraient l’appeler. Adresse de M. Poutier, coraman tant à la citadelle de Besançon, qui renouvelle entre les mains de l’Assemblée nationale son serment civique : « Soumis, dit-il, aux lois de mon pays, je serai sans cesse dévoué au pouvoir qui les décrète, et, jusqu’à mon dernier soupir, je servirai ma patrie en brave, loyal et fidèle citoyen. » Adresse du conseil général de la commune de Mello, qui supplie instamment l’Assemblée nationale de ne point se séparer, avant d’avoir terminé et perfectionné ses glorieux et immortels travaux. Adresse de la société des amis de la Constitution de Lyon, qui supplie l’Assemblée de prendre des mesures contre les efforts des ennemis de la Constitution, tant au dedans qu’au dehors, et d’ordonner que les fonctionnaires publics soient tenus non seulement de prêter leur serment civique en France, mais même d’y résider. Adresse de M. Tribouillet, professeur de rhétorique au collège de Yesoul, qui fait hommage à l’Assemblée d’un ouvrage imprimé, sur la constitution civile du clergé. Adresse des officiers municipaux des villes de Cherbourg, Libourne, de la communauté de Cham-pigneule, du procureur de la commune d’Epernay, qui annoncent que les curés, fonctionnaires et instituteurs publics de ces différentes paroisses ont prêté le serment civique. Adresse des curés de Châtilloo, de Bereims et de Saint-Cyr, département de l’Ain, de Sublaines, département d’Indre-et-Loire, de la ville d’Eu, de Nangis-en-Brie, de Saint-Martio-d’Audouville, dé-partementde la Manche, de Saint-Romain de Blaye, de Salins, de Villers-la-Montagne, de Reinsling, de Givry-en-Argonne et d’Allondres,qui fout hommage à l’Assemblée des discours patriotiques qu’ils ont prononcés lors de la prestation de leur serment civique. Acte de serment du clergé de la Flèche, département de la Sarthe, qui atteste que tous les fonctionnaires publics du culte et de l’éducation ont juré d’être fidèles à la nation, à la loi et au roi, et de maintenir de tout leur pouvoir la Constitution décrétée par l’Assemblée nationale et acceptée par le roi. M. Vijlar, doctrinaire et supérieur du collège pt) Cette séance est incomplète au Moniteur .