SÉANCE DU 11 BRUMAIRE AN III (1er NOVEMBRE 1794) - N°s 36-39 291 La Convention a entendu la lecture du procès-verbal de la séance permanente des 9, 10 et 11 thermidor. La première rédaction de ce procès-verbal n’ayant pas paru ni assez étendue, ni écrite d’un style digne des évènemens qui ont eu lieu dans ces mémorables journées, la Convention avoit nommé Charles Duval et Audoin historiographes -adjoints au secrétaire qui avoit pris les notes de ce qui s’étoit passé dans la Convention. Avant de procéder à cette lecture, Charles DUVAL a prévenu la Convention que, pour n’être pas gêné dans son récit, il avoit cru devoir détacher du fond de l’histoire tous les incidens, les décrets et les adresses qui n’avoient pas un rapport direct avec les événemens. La lecture de cette nouvelle rédaction à laquelle on ne reprochera pas de n’être pas assez détaillée, avoit déjà duré près de deux heures, le lecteur avoit déjà fait deux pauses, lorsque plusieurs membres, fatigués par une aussi longue contention d’esprit, ont observé que malgré l’attention qu’ils avoient apportée, il leur étoit impossible de juger de l’exactitude du récit du rapporteur. [Sur la proposition de Clauzel, la Convention ordonne l’impression et la distribution de ce travail, ajourne la discussion trois jours après cette distribution, et sur la proposition de Goupilleau (de Fontenay), décrète que l’imprimé portera pour titre : Projet de procès-verbal .] (115) Cette proposition a été décrétée malgré les réclamations de Charles Duval qui assuroit que ceux à qui il l’avoit lu, l’avoient trouvé merveilleusement écrit et de l’exactitude la plus scrupuleuse (116). 36 Un membre [Joseph BECKER], inspecteur des procès-verbaux, observe que le vingt-troisième jour de vendémiaire, sur le rapport du comité des Secours, la Convention nationale avoit décrété que la Trésorerie nationale sur la présentation du décret, paieroit au citoyen Pulchérie Leconte la somme de 800 L à titre de secours et indemnités, pour se rendre au lieu ordinaire de son domicile et que le jour d’hier, la Convention nationale, par un autre décret, avoit accordé audit Pulchérie Leconte une somme de 1000 L, ce qui a fait un double emploi : il a demandé le rapport de ce dernier décret. La Convention nationale rapporte son dernier décret (117). (115) Débats, n° 769, 594. Moniteur, XXII, 400. (116) Mess. Soir, n° 806. Débats, n° 769, 594; Moniteur, XXII, 400 ; J. Mont., n° 19 ; J. Perlet, n° 769 ; J. Fr., n° 767 ; Ann. Patr., n° 670; Ann. R. F., n° 41; C. Eg., n° 805; F. de la Républ., n° 42; Gazette Fr., n° 1034; Rép., n° 42; J. Univ., n° 1801 ; M. U., XLV, 186. (117) P.-V., XL VIII, 148. C 322, pl. 1366, p. 19, minute de la main de Joseph Becker. 37 La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [MENUAU, au nom de] son comité des Secours publics sur la pétition du citoyen Louis Boisset, mis en réquisition par le représentant du peuple Noël Pointe pour travailler à la fonderie de canons établie à Nevers [Nièvre] et qui dans son travail a eu la main gauche écrasée, ce qui le met dans l’impuissance d’être jamais en état de pourvoir à sa subsistance et à celle de sa famille par aucun travail, décrète ce qui suit : Article premier. - La Trésorerie nationale fera passer sans délai à l’agent national provisoire de la commune de Nevers la somme de 200 L, pour être donnée au citoyen Louis Boisset, demeurant dans cette commune, à titre de secours imputable sur la pension à laquelle il peut avoir droit. Art. II. - Le présent décret ne sera inséré qu’au bulletin de correspondance (118). 38 La citoyenne Monnet fait offre à la Convention nationale d’une comédie intitulée : Les Montagnards. La Convention décrète la mention honorable du zèle de cette citoyenne et renvoie sa pièce au comité d’instruction publique (119). 39 La Convention nationale, dérogeant à l’article premier du décret d’hier, décrète que la commission des vingt-un pourra délibérer au nombre de 17 membres, qu’elle rédigera procès-verbal de ses séances pour constater le nombre des membres présens aux délibérations et qu’il en sera donné connoissance à la Convention (120). Le président annonce qu’en exécution du décret, un huissier s’est transporté chez Bonnet (de l’Aude); on lui a dit que Bonnet étoit à la (118) P.-V., XL VIII, 148-149. C 322, pl. 1366, p. 20, minute de la main de Menuau, rapporteur selon C* II 21, p. 20. Bull., 12 brum. (suppl.). (119) P.-V., XL VIII, 149. C 322, pl. 1366, p. 21, minute de la main de Crassous, rapporteur selon C* II 21, p. 20. Voir ci-dessus Arch. Parlement., n° 30. (120) P.-V., XL VIII, 149. C 322, pl. 1366, p. 22, minute de la main de Goupilleau (de Fontenay). Rapporteur Ricord selon C* II 21, p. 20. 292 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE campagne (121) [depuis quatre à cinq jours] (122), mais qu’on l’attendoit ce soir ou demain. A ce sujet, un membre [RICORD] (123) demande qu’enfïn la Convention prononce sur la proposition qui lui a été faite, et décide que la commission pourra délibérer lorsqu’elle sera composée des deux tiers de ses membres. On applaudit. On demande les trois quarts. GOUPILLEAU (de Fontenay) voudroit que le procès-verbal des délibérations fût mis sous les yeux de la Convention, avec le nom de ceux qui y auront assisté. DUHEM pense que d’après la décision de la Convention, la commission doit être entière pour pouvoir délibérer; le grand point de la question, dit-il, c’est de savoir pourquoi il y a des absens; s’ils sont malades ou en mission, il faut les remplacer, ou rapporter le décret qui fixe la composition de la commission à 21. La Convention a décrété qu’aucun membre ne pourroit se récuser, et c’est une véritable récusation qu’une absence continue. Il propose de décréter qu’ils pourront délibérer au nombre de 20, par exemple. Il faudra ensuite, dit Duhem, prendre des mesures pour empêcher ces sortes d’absences ; et ici, puisque Bonnet ne se retrouve point, je demande que la Convention rapporte son premier décret, et fixe le nombre des membres de la commission à 20. CLAUZEL demande le renvoi de l’examen des causes pour lesquelles un membre s’absente sans congé ou mission, et appuie la proposition, de permettre aux membres de délibérer au nombre de 17, par exemple. Décrété. La proposition de Goupilleau (de Fontenay) est décrétée (124). La séance est levée (125). Signé, PRIEUR (de la Marne), président, ESCHASSERIAUX jeune, BOISSY [d’ANGLAS], Pierre GUYOMAR, GUIMBERTEAU, GOUJON, secrétaires. En vertu de la loi du 7 floréal, l’an troisième de la République française une et indivisible. Signé, GUILLEMARDET, J.-J. SERRES, BALMAIN, C.A.A. BLAD, secrétaires (126). (121) J. Paris, n° 42; Ann. R. F., n° 41; Gazette Fr., n° 1034 ; ces gazettes indiquent que Bonnet est en mission de surveillance de plusieurs manufactures de papier. (122) Moniteur, XXII, 400. (123) J. Paris, n° 42. J. Perlet, n° 769; Ann. R. F., n° 41; Gazette Fr., n° 1034. (124) Débats, n° 769, 595. Moniteur, XXII, 400; Mess. Soir, n° 806. J. Mont., n° 19; J. Perlet, n° 769; J. Fr., n° 767 ; Ann. Patr., n° 670 et J. Paris, n° 42; Ann. R. F., n° 41; C. Eg., n° 805; F. de la Républ., n° 42; Gazette Fr., n° 1034; Rép., n° 42 ; J. Univ., n° 1803 ; M. U., XLV, 186. (125) P.-V., XLVIII, 149. Moniteur, XXII, 400, J. Perlet, n° 769, M. U., XLV, 191 indiquent 4 heures ; J. Fr., n° 767 donne 5 heures. (126) P.-V., XLVIII, 149. AFFAIRES NON MENTIONNÉES AU PROCÈS-VERBAL 40 L’ordre du jour appelle à la tribune Oudot (127) : OUDOT, au nom du comité de Législation (128) : Vous aviez chargé votre comité de Salut public, dès le 7 pluviôse, de vous faire un rapport sur la question de savoir s’il était nécessaire de mettre en séquestre les biens des détenus comme suspects. Ce comité n’a pu sans doute s’occuper de l’examen de cette question importante. Mais le zèle avait porté un grand nombre d’administrations à mettre le séquestre sans qu’il fût ordonné, et le comité de Législation était chargé des réclamations de la part des créanciers des détenus et de ceux qui avaient des partages à faire, des intérêts à démêler avec eux, pour vous engager à fixer un moyen d’obtenir le payement de ce qui leur était dû, et de terminer des affaires dont l’expédition était entravée par le séquestre. Votre comité de Législation crut devoir s’occuper de vous présenter un travail sur ces différentes réclamations : il en donna communication au comité de Salut public, à qui vous aviez renvoyé l’examen de la question du séquestre; mais l’un des triumvirs, Couthon, s’en empara. Notre but était de faire cesser les plaintes et les incertitudes qui résultaient d’un tel état de choses... Il nous a été impossible de retirer notre projet de ses mains. Nous avons senti la nécessité de refaire ce travail, après les événements du 9 thermidor, et vous l’avez même ordonné, par votre décret du 23 de ce mois ; et le membre qui avait fait le premier projet (le citoyen Bezard) était sur le point de présenter son nouveau travail au comité, lorsque vous l’avez envoyé en mission. Son projet tendait à régulariser le séquestre, à le rendre uniforme, à établir un mode pour régler l’exercice des actions des créanciers des détenus sur leurs biens. Mais votre comité a pensé qu’avant de confirmer le séquestre il fallait examiner si cette mesure était juste, et si elle était avantageuse à la nation. Nous nous sommes d’abord demandé en vertu de quelle loi les administrateurs s’étaient crus autorisés à séquestrer les biens des détenus ; nous n’en avons trouvé aucune qui le leur prescrivît. Nous avons ensuite cherché à connaître pourquoi les juges suspendaient les jugements qui concernaient les détenus ; nous n’avons pas vu non plus qu’ils pussent se fonder, à cet égard, sur aucun de vos décrets. (127) Gazette Fr., n° 1034. (128) Moniteur, XXII, 398-400. Débats, n° 769, 596-601; Mess. Soir, n° 806. J. Mont., n° 19 et 21; J. Perlet, n° 769; J. Fr., n° 767 ; Ann. Patr., n° 670 et J. Paris, n° 42 ; Ann. R. F., n° 41; C. Eg., n° 805; F. de la Républ., n° 42; Gazette Fr., n° 1034 ; Rép., n° 42; J. Univ., n° 1801; M. U., XLV, 186-191.