[Assemblés nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [13 mars 1790.] 453 M. Baron, membre du comité des domaines, réclame contre le décret porté le 1 1 mars sur les coupes extraordinaires des bois des ecclésiastiques; il y trouve de grands inconvénients, et expose que ce décret, prétendu offert au nom des comités ecclésiastique et des domaines, ne leur était pas connu. En conséquence, il demande que ce décret soit rapporté, et que désormais un projet de décret ne puisse être présenté de la part d’un comité qu’il ne soit revêtu de la signature du président de ce comité. M. Goupil de Préfeln regarde comme dangereux de représenter à l’Assemblée un décret adopté par elle et déjà soumis à la sanction royale. Si les dispositions en sont vicieuses, il faut les modifier par un nouveau décret. Il demande et obtient le renvoi de la motion de M. Baron au comité des domaines et au comité ecclésiastique qui se réuniront à cet effet. M. Hegnaud (de Saint-Jean d’Angély) fait une motion sur le retard qu'éprouve le recouvrement des impôts dans quelques provinces et sur la nécessité d'en accélérer le paiement. Cette motion est adoptée ainsi qu’il suit : « L’Assemblée nationale décrète que son président se retirera dans le jour par devers le roi, pour supplier Sa Majesté de donner très promptement des ordres pour que les intendants et commissions intermédiaires fassent parvenir, dans les paroisses qui ne les ont pas encore reçues, les commissions nécessaires pour la confection des rôles des tailles, et pour que cette confection et la perception n’essuyent pas un retard dont la prolongation deviendrait si préjudiciable à la chose publique ». M. Gillet de La Jacquemlnlère. Les décrets que vous avez rendus sur les droits féodaux doivent porterie calme dans les provinces ; vous avez ordonné qu’une instruction serait rédigée pour en accompagner l’envoi ; mais cette instruction ne pourra vous être présentée que dans huit jours. Ce temps, peu considérable en lui-même, peut être précieux dans la circonstance. Je demande que le comité féodal présente le décret général, afin qu’il soit, immédiatement après, envoyé dans les provinces. (L’Assemblée ordonne que le comité féodal présentera lundi prochain la réunion de tous les articles décrétés sur les droits féodaux.) M. l’abbé Gouttes, membre du comité des finances , fait le rapport des demandes formées par les villes de Langres, Gray, Poitiers et Mouzon, pour être autorisées à se procurer, par les voies qu’elles ont indiquées, les sommes nécessaires pour fournir aux besoins de leurs concitoyens pauvres. L’Assemblée rend les quatre décrets qui suivent : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité des finances, prenant en considération les motifs qui lui ont été exposés par la nouvelle municipalité de Langres, l’autorise à toucher les termes échus et à échoir du prix de l’adjudication faite en 1788, des bois du chapitre de la même ville, jusqu’à concurrence d’une somme de 40 000 livres, pour être employée au service des marchés en grains de Langres, à la charge par la municipalité de rendre cette somme dans le courant de la présente année, de justifier de l’emploi, et d’en rapporter les preuves de libération à l’assemblée de département. » « L’Assemblée nationale permet à la municipalité de la ville de Gray, de faire un emprunt de la somme de vingt mille livres remboursables dans l’année, et qui sera employée aux besoins exprimés dans sa délibération du 5 février 1790. » « L’Assemblée nationale autorise la ville de Poitiers à imposer sur les habitants qui paient un écu d’imposition et au dessus, la somme de douze mille livres, pour ladite somme être employée au paiement de pauvres valides occupés aux travaux de charité, et à la subsistance des mendiants invalides, et le rôle sera rendu exécutoire par l’assemblée de département. » « L’Assemblée nationale permet à la municipalité de Mouzon, de faire l'emprunt de la somme de 10,000 livres, conformément à la demande par elle faite dans sa requête du 9 février 1790, et autorise le prieur de l’abbave de Bellevalvet tous autres, à prêter ladite somme. » M. le Président. L’ordre du jour appelle la discussion sur le projet de décret présenté par le comité des finances pour le remplacement de U gabelle. M. Pétion de Villeneuve. Enfin, nous alloni abolir cet impôt si onéreux pour le peuple, si dangereux par ses conséquences : on vous a proposé un projet de décret pour opérer la suppression et le remplacement de cet impôt; le premier article de ce projet ne présente pas la plus légère difficulté ; mais il n’en est pas de même des articles 2,3 et 8, que je crois susceptibles d’observations importantes. Je pense que la répartition de la contribution proposée par les articles 2 et 3 du projet de décret sur les départements et les districts, dans les pays de grande et petite gabelles, ne peut être que provisoire; je crois aussi que si on se contentait des simples conversions exigées par ces articles, on perpétuerait, l’inégalité des répartitions. 11 me semble que la fin de l’article 8, dont voici la teneur ; « A compter de l'époque où ils ont été affranchis de fait des gabelles, et où l’Etat a cessé d’en retirer un revenu dans leur province , » il me semble, dis-je, que la fin de cet article présente des difficultés qui pourraient donner lieu à des soulèvements, à des insurrections. Combien de citoyens ne sont nullement coupables du retard ou du défaut de paiement qu’ont éprouvé les impôts ! combien d’endroits où la force armée n’était pas suffisante pour réprimer la fraude ! De plus, Messieurs, d’après la nouvelle division du royaume, les différentes provinces vont se trouver confondues les unes dans les autres : comment pouvoir établir dans ces provinces une répartition à l’abri d’inconvénients et de discorde ? La chose me paraît absolument impossible. L’article 9 ne présente pas, selon moi, moins de difficultés. Je n’aperçois pas les avantages qui pourraient résulter de la vente du sel par les fermiers généraux, au prix qui sera établi par la concurrence du commerce. Oui pourra soutenir la concurrence des compagnies opulentes déjà approvisionnées pour deux ans ? Je demande si, dans le moment actuel, ceux qui ont le sel entre 181 [Assemblée nMion&te.l ARCHIVES PARLEMENTAIRES. HS marsl 700.1 leurs mains ne pourront pas y mettre un prix exorbitant ? (Non, répond-t-on de plusieurs parties de la salle.) Il est possible d'avoir un avis différent; mais je ne sais pas si, dans le moment actuel, où le prix du sel n’est pas marchand, on voulait le vendre à un prix très considérable dans les provinces qui ne sont pas approvisionnées de cette denrée de première nécessité, je ne sais pas, dis-je, quels seraient les moyens de s’v opposer. Assurément, si cela était facile, loin dé contenter le peuple, on pourrait l’indisposer. Il n’est cependant pas impossible de fixer le prix du sel ; on sait précisément ce qu’il coûte aux endroits d’où on le tire ; le prix du transport est également connu ; il ne s’agit plus que de déterminer le bénéfice. Autorisez les assemblées de département à demander la quantité de sel nécessaire pour leurs approvisionnements ; que les fermiers soient tenus de le remettre au prix qui sera indiqué ; yoilà ce que vous devez faire, ce que vous devez vouloir. En conséquence, je propose de déclarer : 1° que la répartition entre les provinces de grande et petite gabelles ne sera que provisoire ; 2° que l’article 8 sera supprimé ; 3° de déterminer le prix du sel, et d’ordonner aux fermiers généraux d’en délivrer au prix qui sera fixé par l’Assemblée nationale. M. Bigot de Vernière prétend et cherche à prouver que le plan du comité des finances, présenté par M. Dupont, est injuste et vicieux ; qu’il porte sur de vaines suppositions, qu’il excède surtout les formes prescrites au comité des finances, en ce que ce comité n’avait pas été chargé d’examiner si les provinces de grande et petite gabelles étaient ou non surchargées... Ce que les provinces ont supporté jusqu’à présent, elles doivent le supporter encore. H conclut à ce que le comité des finances soit chargé de faire un nouveau rapport sur les moyens de remplacer la gabelle seulement, et enfin sur le monde de remplacement. M. Deliey d’Agier. Si nous sommes forcés de remplacer les produits de la gabelle dans les pays de grande et petite gabelles, nous avons aussi à réparer les inconvénients inévitables d’une concurrence dans la vente de cette denrée. Je ne suis pas de l’avis du préopinant, qui pense que les provinces doivent payer une somme de contributions égale à celles qu’elles payaient sous un régime de fer. Nous sommes venus pour donner au peuple la liberté, et non pas pour lui vendre la liberté. Le sel est une denrée de première nécessité ; la proposition qu’on vous a faite d’en rendre le commerce libre rat sans doute bien séduisante : mais ne nous exposons-nous pas, en T adoptant en entier, au danger des accaparements? Je pense que la ferme générale ayant profité des facilités qu’elle avait pour faire un approvisionnement de sel pour deux ans, doit naturellement être autorisée à le vendre ; je pense aussi que le prix doit en être modéré, et fixé par vous. Il faudra pour cela calculer le prix d’achat, celui du transport, et accorder ensuite aux fermiers généraux un bénéfice léger et raisonnable. Par ce moyen, le peuple aura du sel meilleur et à meilleur marché, que celui qui pourrait lui être offert par la concurrence des petits marchands. — • Je passe à des observations particulières sur l’article 5. (Il fait lecture de eet article.) Lorsque les villes ont établi des droits d’entrée, ce n’était que pour subvenir à leurs charges, et former un supplément à leurs revenus patrimoniaux. L’inégalité des besoins des villes rend impossible un règlement général. Je demande donc que l’on supprime de l’article 5 les mots, aux droits d'entrée des villes, etc., et que si on les conserve, on y ajoute ceux-ci, en proportion des revenus patrimoniaux. M. de Cazalès. Les difficultés naissent de ce que la question qui vous occupe a été présentée prématurément : cette opération devrait être la dernière que vous avez à faire pour rétablissement de l’impôt. Mais puisque l’Assemblée a ordonné de discuter sur le remplacement de la gabelle, je chercherai à jeter quelque jour sur la question, et à dissiper l’obscurité qu’occasionne cette marche irrégulière. Tous les impôts en général peuvent se ranger dans deux classes, les impôts directs et les impôts indirects. Les impôts indirects conviennent à un peuple libre; les impôts directs ne conviennent qu’à un peuple esclave : ceux-ci sont une espèce de flétrissure attachée à la terre; leur perception ne peut Be faire qu’avec violence; leur répartition est nécessairement inégale, puisqu’elle pèse sur le pauvre comme sur le riche. L’imposition indirecte, au contraire, ne portant pas sur celui qui cultive, mais sur celui qui consomme, est proportionnée aux facultés, parce que celui qui possède plus consomme plus. Cette imposition se plie à l’inégalité des fortunes; elle se perçoit d’une manière simple, facile, journalière, et sans qu’on soit obligé de recourir à ces contraintes toujours odieuses parce qu’elles sont exercées le plus souvent contre la pauvreté. Cette imposition préviendra l’extrême accroissement de la population des villes, et rendra aux campagnes les bras dont l’agriculture est privée, et sans lesquels nos plus précieuses richesses sont anéanties. Il ne faut pas rompre par le fait l’équilibre entre les impôts directs et les impôts indirects: cet équilibre serait rompu, puisque par le remplacement proposé vous convertiriez un impôt indirect en impôt sur lés terres. Si vous adoptiez le projet du comité, votre décret deviendrait le premier article d’un plan dangereux, la première base d’un système accrédité parmi beaucoup de membres de cette Assemblée, d’un système qui, en dernière analyse, donne pour résultât que tout impôt, quel qu’il soit, est supporté par la terre. J’attaquerai ce système, j’en développerai lés dangers, je dévoilerai les erreurs u’il présente; mais aujourd’hui je me borne à emander que le comité des finances soit chargé de soumettre, dans huit jours, un projet de remplacement de la gabelle par un impôt indirect qui ne porte pas sur les consommations de première nécessité, et qui ne pèse point sur la classe indigente du peuple. L’impôt du timbre, par exemple, pourrait offrir ce remplacement, non pas tel qu’il avait été conçu en 1788, mais avec de grandes et d’utiles modifications. Si mon opinion devenait celle de l’Assemblée, je déposerais au comité des finances mes idées sur cet objet. M. Duport. Vous avez, par un précédent décret, ordonné le remplacement delà gabelle; il faut que ce décret soit exécuté, il faut en suivre l’esprit, et trouver une mesure tout à la fois sûre et prompte : si elle ne recueillait pas ces deux qualités, elle serait dangereuse. Je conviens que le timbre est le moins mauvais des impôts indirects : mais vous aurez d’autres impôts indirects à détruire, à modérer, ou à modifier ; par exemple le contrôle, qui présente des inconvénients sans [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [13 mars 1790 ] 4MH nombre, dont le moins funeste n'est pas l’espèce de nécessité où se trouve le peuple de faire des actes obscurs, qui, sans tromper le fisc, donnent lieu à une foule de procès et exposent à l’imposition judiciaire, sans éviter l’imposition financière. Ainsi, en pensant comme Je préopinant sur l’impôt de timbre, je crois que son idée sera utile lorsqu’il s’agira d’un plan général d’impositions. Une imposition égale sur les terres est bonne pour l’objet que vous vous proposez. Si vous vouliez adopter un remplacement ou imposition indirecte, il faudrait s’entendre avec les compagnies de finances, demander des renseignements aux départements, écouter des rapports étendus et se livrer 4 une longue discussion ; ainsi la mesure proposée, quand bien même elle serait bonne, deviendrait dangereuse dans la circonstance, parce qu’elle ne serait ni sûre ni prompte. — M. Duport appuie les réflexions et les observations de M. Pé-tion de Villeneuve, et conclut à ce qu’on discute sur-le-champ le plan du comité article par article. M. l’abbé llaury . La grande question du remplacement de la gabelle paraît exiger des observations préalables et rapides. J’ai lu avec beaucoup d’attention les ouvrages des économistes; ils m’ont semblé avoir une plus grande raison que leurs adversaires ; mais je dois faire remarquer que dans tous les Etats de l’Europe, où l’on a voulu faire l’application des principes qu’ils ont professés, l’expérience leur a toujours été contraire. L’Assemblée l’a reconnu lorsqu’elle a rendu son sage décret contre l’exportation des grains; décret ui attaque directement le principe fondamental u système des économistes. — On a toujours pensé, depuis la nuit du 4, que les privilèges des provinces étaient détruits; cependant le plan proposé consacre tous les privilèges des provinces; le remplacement ne porte pas sur celles qui n’avaient pas de gabelle ; le privilège de la gabelle est donc conservé. — Le projet du comité affranchit de l’impôt les banquiers, les capitalistes et les agioteurs, et tend à faire tomber sur le peuple tout le poids de la gabelle: il serait impossible au peuple de payer cet impôt; le troisième vingtième n’a jamais pu l’être. Vous répandriez dans toutes les provinces cet esprit de désespoir qui a déjà obligé an grand nombre, un très grand nombre de propriétaires à abandonner leurs propriétés au fisc. in membre de l’Assemblée, député d’Auvergne, remettra sur le bureau cent actes qui établissent ce fait. Peut-il être dans l’intention de l’Assemblée de favoriser les capitalistes aux dépens des cultivateurs? que deviendront ceux-ci, si vous les accablez? Ils vous vendront le pain 6 sous la livre, Au moment où, sans augmenter la force du peuple, on aggravera son fardeau par un nouvel impôt territorial, le prix des denrées s’accroîtra, et le malheureux qui vit de ses sueurs ne pourra atteindre à ce prix. Vous anéantissez vos maaufac-tures, en nécessitant l’augmentation de la valeur du pain, du pain qui fait la loi à tout, parce que l’agriculture, ie commerce, les manufactures auront toujours le même sort dans l’Etat. On ne veut que des impôts directs : ce système an ti patriotique est une calamité publique. Une seule imposition est impossible, ou bien elle amènerait dix fois par an une banqueroute. Certainement les impositions indirectes sont toujours les mieux payées ; elles le sont d’avance, tandis que l’année d’imposition directe est de vingt-deux mois. On nous a alarmés sur la continuation de fa vente exclusive du sel ; on a craint le sommeil du peuple et la renaissance de la calamité qui l’opprime. Je ne puis éprouver cette inquiétude; la constitution est établie sur des bases inébranlables. S’il est possible qu’il existe jamais un impôt qui ne soit point consenti par le peuple, il n’y a plus de patrie, plus de constitution, nous sommes encore sous la verge du despotisme.. Il n’est donc pas sage de rejeter ie mode de vente que contient l’article 8, et qui présente de si grands avantages : ou la nation ne sera plus, ou la gabelle ne se rétablira jamais. Le sel est Un cinquième élément; la disette du sel est donc au nombre de ces calamités que le corps législatif doit prévoir. Gette disette se renouvelle tous les six ans : l’accaparement est également à craindre, si le sel est commerçant. Un autre danger vaut bien la peine qu’on s’en occupe : le sel n’est salubre qu’après trois ans de fabrication ; il faudra qu’ün négociant fasse des avances considérables et attende trois années avant de pouvoir vendre sa marchandise : le fera-t-il ? le feront-ils tous ? peut-on confier au premier venu la santé des citoyens? Il serait donc avantageux, sous tous les rapports, de traiter avec leâ fermiers généraux, en rendant au peuple le service essentiel de fixer ie sel à un prix si bas qu'il ne puisse pâsyavoir d’avantage à faire la contrebande. Ge parti est éloigné de toute conséquence alarmante sur le ByStème général de l’impôt. L’Assemblée nationale, sans rien adopter de confiance, se concertant avec les fermiers généraux, dont le* connaissances et le patriotisme sont également certains, peut donner à l’Etat un avantage aussi grand que si le sel était marchand. Dang le cas où ces idées ne seraient point accueillies, je demanderais toujours un impôt indirect pour remplacer un impôt direct. M. Gaultier de BlaUzat. Le préopinant me araît avoir traité la matière qui nous occupe ’une manière générale et hors de la question présente. H est incontestable qu’on ne peut laisser subsister la gabelle; il est incontestable qu’il faut un impôt de remplacement dans la proportion dans laquelle chaque province était imposée. Le préopinant n’a présenté pour cet objet nue le système de la ferme générale; il voudrait rétendre 4 tout le royaume, et faire admettre un impôt qui produirait 20 millions, et qui en coûterait 15 de frais de régie et de perception... On vous parle souvent d’un plan général, et à la première contestation qui s’élève, on se hâte, dans cette tribune, de vous menacer de Ta banqueroute; comme si la banqueroute était possible, comme si nos ressources étaient épuisées. L’impôt de la gabelle, dont la suppression est indispenpble, était supporté par ceux qui n’ont rien; il faut que celui qui le remplacera soit supporté par ceux qui ont tout, et qui ne paient presque rteo... Peut-on vouloir faire supporter aux provinces non ga-bellées la remise qui sera faite aux provinces gu-bellées?Pour répondre à cette question par l’affirmative, on dit que les provinces gabeltééSont été surchargées ; je réponds qu’au Contraire lès provinces dites rédimées ont elles-mêmes supporté plus d’impositions que les autres. Je le dis, je m’en plains, et j’ai le droit de m’eu plaindre. En 1589, l’imposition totale de tû taille était de 31 millions; l’Auvergne, province rédïméé, payait 464,000 livres, c’est-à-dire le soixante-septième dé la totalité de la taille. En 1635, ha taille était dé 28 millions, l’Auvergne payait 6004)00 livres, c’est-à-dire le quarante-cinquième de la taille. En 1789, la taille montait à9t millions, l'Auvergne payait 106 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [13 mars 1790.] environ 3 raillions, c’est-à-dire le trentième de la totalité de la taille. Ainsi l’imposition de la taille, dans les provinces dites rédiraées, s’est progressivement augmentée. La capitation a éprouvé des accroissements non moins considérables ; celui ui, en 1695, payait 2 livres, a payé, par la suite, e 75 à 80 livres. Depuis 1695, la capitation a toujours augmenté en proportion de la taille, de sorte qu'une province qui payait double taille a payé double capitation. Qu’on cherche une province de gabelle qui ait été aussi chargée que l’Auvergne. {On interrompt.) Ah ! j’ai vraiment droit de me plaindre.il ne faut pas dédaigner ces connaissances qu’on trouve, non dans les livres des économistes, mais dans l’expérience, dans l’expérience ! Nous avons à remplacer un équivalent de 60 millions; il faut trouver ces 60 millions, et les faire supporter par ceux gui les payaient déjà. Jusqu’à ce que des commissaires qui, pour cette fois, mériteraient le nom d'impartiaux, aient établi les différences qui existent entre les provinces gabellées et celles qui ne le sont pas, il faut faire paver aux provinces gabellées ce qu’elles ont toujours payé. Je rappelle à la mémoire de l’Assemblée que les contribuables sont d’accord, puisqu’ils ont offert de donner un remplacement plus considérable que le produit de la gabelle. On vous parle <*e biens abandonnés dans les provinces non gabellées. Je ne reviens pas à ces idées meurtrières de banqueroute et de famine, qu’on se plaît à présenter sans cesse à l’inquiétude du peuple. Il y a sans doute des biens abandonnés; il yen a depuis longtemps : j’ai moi-même abandonné une de mes propriétés depuis dix-huit ans. Je pourrais sans doute payer les droits; mais ce bien ne me rapporte pas la valeur des impôts. Je rappelle ce fait pour prouver le danger d’augmenter les impôts réels. L’article 3 parle de 2 millions à imposer sur les provinces tranches ; vous feriez ainsi supporter à ma province une gabelle qu’elle n’a jamais payée. — Je supplie le comité de finances de présenter lundi un état comparatif des charges des provinces gabellées et non gabellées. (La séance est levée à trois heures, et l’Assemblée se retire dans les bureaux pour procéder à l 'élection de ses officiers.) ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DEM. FRÈTE AU, ANCIEN PRÉSIDENT. Séance du samedi 13 mars 1790, au soir (l). M. Fréteau, ancien président, ouvre la séance à 6 heures, en l’absence de M. l’abbé de Montes-quiou, président. M. Gaultier de Biauzat, l'un de MM. les se - crêtaires, fait lecture du procès-verbal de la 8éahce du matin. Il ne se produit aucune réclamation. M. le Président annonce que d’après le recensement du scrutin pour l'élection des secrétaires, MM. Mougins de Roquefort, Gossin et le marquis de Bonnay, ont obtenu la majorité des voix (1) Cette séance est incomplète au Moniteur. en remplacement de MM. Gaultier de Biauzat, le comte de Castellaneet de Nompère de Ghampagny. M. Gaultier de Biauzat, secrétaire , fait la mention des adresses ainsi qu’il suit : Adresses des municipalités de Pont-Gibaut, Vi-verols, Murol, Bromont-Lamothe, Saint-Pardoux près de Laroie, Tauves, Bourg, Lastic et Mauzun, qui expriment l’adhésion la plus absolue aux décrets de l’Assemblée nationale. Les communautés de Yiverols, Mauzun et Murol, sont remises en don patriotique du montant de la contribution des ci-devant privilégiés, pour les six mois de 1789. Celles de Tauves demande que ce bourg soit pris pour centre de district par substitution à Besse. Celle de Bourg-Lastic, en manifestant sa répugnance à dépendre du district de Besse, à cause des rivières et des montagnes qui l’en séparent, dit : « qu’il n’est guère possible qu’il soit accordé un district à Tauves, qu’il n’était jadis qu’un petit endroit inhabité, qui ne compose aujourd’hui, et depuis que la route de Clermont à Mauriac y passe, qu’un très petit bourg. » Adresse des habitants de la communauté de Maraye en Champagne; ils demandent le rétablissement des foires et marchés dont ils jouissaient autrefois. Adresses des bas-officiers du régiment de la Fère, en garnison à Phalsbourg; ils jurent de vouer à jamais une haine irréconciliable aux ennemis de la liberté que cimente l’Assemblée, de n’employer leurs armes que pour le soutien de la Constitution désirée, d’être fidèle à leurs drapeaux, au souverain de la nation, et de ne jamais proportionner leur zèle aux récompenses qui leur sont accordées, mais bien à la valeur qui anime le cœur de tous les vrais français. Adresses des communautés de Charmes, de Chavannes, et de Veaunes en Dauphiné; elles sollicitent un tribunal de district pour la ville de Romans. Adresses des conseils politique et permanent de la ville de Nîmes; ils supplient l’Assemblée d’accorder à M. le baron de Marguerittes, nommé maire de Nîmes, un congé pour se rendre dans sa patrie, où sa présence est utile et nécessaire. Adresses des officiers municipaux de la communauté de Nancré, élection de Richelieu, contenant leur serment civique et celui de la commune, ayant à sa tête M. Bouin de Noi ré, seigneur de la paroisse, chevalier de Saint-Louis, et commandant la milice nationale du Ghâtelleraudois. Adresse des officiers municipaux de la ville de Cherbourg; ils annoncent que la lettre circulaire de M. le Président, relative au paiement des impôts indirects, a fait le meilleur effet. Adresse de la garde nationale de la ville de Vienne; elle supplie l’Assemblée de s’occuper au plus tôt de l’organisation des milices nationales. Adresse de la garde nationale de la ville de Gournay-en-Bray. « Nosseigneurs, disent-ils, vous avez affronté tous les dangers pour rendre vos décrets ; nous braverons la mort pour les défendre. » Adresse de la communauté de Podensac; elle fait le don patriotique du produit de la contribution sur les ci-devant privilégiés. Adresses des nouvelles municipalités de la communauté de Beort en Béarn, de la ville de Mont-de-Marsan, de la communauté de Monsem-pron en Agenois, de celle de Cazordite, de celle deSaint-Martin-des-Lauriers, de celle de Brehat,de