505 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [2 août 1790.] « 10° Au décret du même jour, concernant le droit de voirie et de planter des arbres dans les chemins publics, rues et places des villages, bourgs ou villes ; « 11° Au décret du même jour, qui fixe les traitements accordés pour la table des officiers généraux de la marine, capitaines de vaisseaux, et autres officiers commandant les bâtiments de guerre; « 12° Au décret 'du 28, concernant le passage des troupes étrangères sur le territoire de France; « 13° Et, enfin, Sa Majesté a donné ses ordres en conséquence du décret du 24, pour l’envoi des troupes à Orange. Signé : Champion DE CiCÉ, archevêque de Bordeaux. Paris, le 1er août 1790. (La séance est levée à trois heures.) ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. D’ANDRÉ. Séance du lundi 2 août 1790, au soir (1). La séance est ouverte à six heures et demie du soir. M. Alquier, secrétaire , donne lecture du procès-verbal de la séance d’hier dimanche, 1er août. 11 est adopté. Il est fait lecture de l’extrait de différentes adresses ainsi qu’il suit : Adresse de félicitation, remerciement et adhésion des communautés réunies de Vaux et Vil-leurbaume : elles supplient l’Assemblée de leur assurer la propriété et jouissance de leurs biens communaux. Adresse de la confrérie des pénitents de Mar-boz, département de l’Ain, qui a statué, tant en son nom, qu’en celui des pénitents de Roanne et des Compagnies-Unies, qu’à l’avenir aucun sujet ne serait admis parmi eux, sans avoir préalablement prêté le serment civique; a arrêté qu’il serait placé dans l’endroit le plus apparent de leur église un tableau où l’on verrait écrits les noms des représentants de la nation, sous ce titre : Les Amjs de l’Homme et du Citoyen ; que, le 14 juillet de chaque aunée, il serait fait un service solennel pour la prospérité du royaume et la conservation du roi Louis XVI, restaurateur de la liberté française : enfin, elle a arrêté d’envoyer l’extrait de cette délibération à toutes les confréries de pénitents du royaume. Adresse des sous-officiers et cavaliers de royal-cavalerie, en garnison à Strasbourg, qui annoncent que la plus parfaite harmonie règne entre eux et leurs officiers, et qu’ils sont aussi amis de l’honneur de la liberté, que soumis aux règles de la discipline militaire. Adresse du sieur Périchon, capitaine, commandant une compagnie d’invalides en garnison au château de Joux, qui annonce qu’il a fait prêter le serment civique à la garnison de ce château, le 14 de juillet. Adresse des officiers municipaux et habitants du bourg de la Haye du Puits, qui supplient l’Assemblée de fixer dans ledit bourg le chef-lieu du district provisoirement fixé à Garenlan. Adresse des membres composant le district de Saint-Amand, département du Cher, qui, dès l’instant de leur réunion, présentent à l’Assemblée le tribut de leur admiration et de leur dévouement; ils forment les vœux les plus ardents pour le succès de ses glorieux travaux. Adresse des municipalités de Saint-Paul et de Châtillon-Saint-Jean, département de la Drôme, de la Teste de Buch, district de Bordeaux, d’Au-reilhan, près Tarbes, deGrateloup, près Tonneins, de Gouréome, au département de la Charente, des villes d’Aunay, de Navarreins, d’Artonne et de Dours, toutes ces municipalités annoncent à l’Assemblée que tous les citoyens se sont réunis le 14 juillet, pour célébrer ce jour mémorable par une fête civique, dans laquelle ils ont fait éclater les sentiments de l’allégresse la plus vive, de l’union la plus étroite, et ont prononcé avec transport le serment fédératif du Champ-de-Mars. Les dames citoyennes de la ville d’Artonne ont résolu, dans cette fête, à l’exemple de leurs maris, de ne se servir que d’étoffes fabriquées en France. Adresse des administrateurs du district de Pé-ronne. Adresse de la municipalité de la Ghapelle-des-Fougerets, qui supplie l'Assemblée, par les motifs les plus pressants, d’abolir les duels. Adresse du sieur Grobert, membre des académies de Florence et de Bologne, qui propose à l’Assemblée l’exécution d’une machine de son invention, qui, par un mouvement uniforme de rotation, produit par l’action de quatre hommes, tirerait 360 coups de fusil, de différents calibres, par chaque minute. M. le Président fait donner lecture d’une lettre de M. François de Moustier, ministre plénipotentiaire auprès des Etats-Unis d’Amérique, ayant pour objet d’éclairer la nation sur les séductions employées par la compagnie du Scioto pour exciter les citoyens à une émigration funeste. L’Assemblée ordonne l’impression de cette lettre qui est ainsi conçue (1) : Messieurs, la séduction employée par des personnes qui se disent agents d’une compagnie de Scioto a eu un succès si effrayant, que je regarde comme un devoir particulier pour moi, en ma qualité de ministre du roi auprès des Etats-Unis, de chercher à prévenir le malheur d’une foule de mes concitoyens, et le dommage que cause au royaume l’émigration de ceux de ses habitants que l’erreur entraîne vers un autre continent. En respectant l’usage de la liberté dans sa plus grande étendue, je crois quelle est elle-même compromise, dès qu’elle peut entraîner ceux qui en abusent à leur propre perte, et devenir nuisible à la société dont ils sont membres. G’est sous ce rapport que je suis convaincu que l’Assemblée nationale daignera accueillir la dénonciation que je lui fais par votre organe, de l’espèce de complot qui existe contre le royaume et ses habitants, par l’effet d’une association déjà formée, et d’autres toutes disposées, pour faire émigrer des citoyens, non pas isolés, mais en masse. Si les embaucheurs sont regardés par tous les gouvernements comme des perturbateurs punissables, de quel œil peut-on envisager des séducteurs de familles entières ? (1) Cette séance est incomplète au Moniteur. (1) Ce document n’a pas été inséré au Moniteur. SÔ@ [Assembiée nationalé.j ÀftfcBlVËà PÂMLËMÈNTÀIRÉS. [2 août 1790.j Les lois condamnent, sans doute, les manœuvres criminelleSi qui tendent â affaiblir le royaume par des émigrations excitées; mais elles ne continuent pas moins ostensiblement, et leur impunité ale succès le plus fâcheux. L’Assemblée ilationale trouvera, sans doute* les moyens les plus propres à faire cesser un mal aussi grand que celui que je lui dénonce* Si le comité, autjuel elle confiera le soin de lui proposer des mesures qui remplissent ses vues sur cet objets juge à propos de recevoir de moi désinformations plus détaillées, je me rendrai à ses ordres dès qu’il me les aura fait parvenir. J’ai l’honneur d’être avec respect, Messieurs* volrë très humble et 'tés obéissant serviteur. François de Moustier. M. tâskuMiëe dë KStaiizftt. Je dénOttcë âuSSi M. l'abbé Mathias tj Ui a induit en erreur Un hdrhme simulé de ma prdvince,dë la ville d’ûsoire* qüi lüi il livré sa fortüile pour aller s’établir au Scioto. Quand il a été au port d'embarquement, il a été Instruit de la vérité; Alors, il est revenu à Paris rëëlaihëi’ sdh argent* mais dii Je lüi a re-* fusé. M. i4nt»l»é OeégoSrë. Je dénortcé également les enrôlements qui se font datis le dépafieuietit de la Meurthe, dahS toute la Lorraine et le pays Mcësitt, pour l’âi'ttiée dütHchiëilHé contre les Brabançon�. Je dénOHcë cënX qui ne rougissent pas d’abandotlner le pays dë la liberté pour aller cdtü-bâttrè SoÜS les enseignes dû despotisme; M. Àiéiâildëé dé Eiàftiettk. Je demandé la question préalable sur tout cë qui n’est pas la lettre deM. de Moustier. Je crois que l’Assemblée rie peut faire dë lois poür retenir lés Français dans leur pàyS et tfüe c’ëst un bienfait pour* la nation devoir s’enfuir tous les mauvais citoyens: Cëük qüi vont servir en Autriche, qui vont combattre uti peuple qui s’est armé pour la liberté, ne pourraient fiefi ajouter ftu bien public. (Cette motion est adoptée.) M. lé Pfréstdettt fait donner lecture d’tine lettre du ministre de la marine. « Le roi reçoit à l’instant de la Martinique les nouvelles suivantes, dout il me charge de faire part â l’Assemuiee. « Le 3 juin, à Sàint-Piërre de ta Martinique, après la grarni’messe et la procession, oh a crié tout à coUp : Aux armes ! Le tocsin a soûné. Le peuple s’est armé, a tiré sur les gens de couléUr libres; Sept ont été lüés, sept autres ont été pris et peh-düs. M. de Damas, gouverneur, relevant de maladie, a été obligé de se retirer. L’assemblée coloniale l’a requis de marcher contre ces gens sans aveu çjüi ne connaissaient plus de frein. Il a été parfaitement bien secondé par les troupes, les milices et par M. de Poritevès, commandant de la station. La municipalité de Saint-Pierre lqi à envoyé Une adresse de remerdiiiërits après le calme rétabli. » (Celte lettre est renvoyée au comité colonial.) M-de Èoaiîles dit à l’Assemblée, que, d’après les troubles qui ont éclaté dans le territoire de N* mours, les boos citoyens pensant que sa présence y rétablirait la paix, l’ont engagé à s’v rendre; en conséquence, H demande la permis» sion d’aller passer quelques jours à Nemours. (Getlë permission lui est acéortiée.) M. Üarat fait hommage à l’Assemblée d’un plan de législation criminelle. M. le Président ordonne lâ lecture d’une lettre, signee G imillè Desmoulins, à laquelle est joint un exemplaire du n° 35 du Journal des révolutions de France et de Brabant. Le sieur Desmoulins demanderespectueüsemeotà l’Assémblée de charger un de ses comités de faire le rapport dés passages de son journal qui ont été dénoncés sans qo’on en ait donné lecture; et il s pplie l’Assemb ée, dans le cas où elle n’ordonnerait pas le rapport, de lui permettre de prendre à partie son dénonciateur, qui l’accuse d’avoir détourné le peuple de payer leS impôts. (Ici des applaudissements se font entendre â trois reprises dans une portion du côté gauche de la salle. — Tout le reste est troublé par des murmures et des réclamations.) M. le Président. L’Assemblée vient de manquer à 1 ordre; j’ai le devoir de l’y rappeler. Si je connaissais le membre qui a applaudi trois fois, je demanderais que son nom fût inscrit dans le. procès-verbal. M. le Président (se tournant ensuite vers les tribunes). Je recommande aussi aux spectateurs de se tenir dans le plus profond silence. M. Malouet demande la parole. M. Malouet. Il est bien question de ma plainte ! de plus grands intérêts doivent nobs oécü per ; ce sont des crimes publics, et non des délits privés dont j’invoque lechâliment. Je vous dëmâhdedans quel gouvernement ou dans quelle société barbare on permettrait ce qüe Votre décret défend. Camille Desmoüiins ëst-i l innocent? Il se justifiera. Est-il coupable? je serai sqn accusateur et de tous ceux qui prendront sa défense. Qu’il se justifie, s’il l’ose. (Une voix s’élève dés tribunes : Ouit je l'ose ! — Une partie de l’Assemblée se lève, le bruit sè répand dans l’ÀSsemblée qüë c’est M. Camille DesmoülinS qui a parlé.) M, le Président. Vous Veliéz d’êtrë témoins de i indécence qui vient d’être commise dans lê sanctuaire dés lois. J’ai cru devoir ddniier dès ordres provisoires pour que l’homme qüi à troublé, l’As.-mmblée soit arrêté. ( Pendant un instant un silence général semblé confirmer la mesure prise.) Un membre à gauche : Je demande que M. lè président prenne les ordres de l’Assembiée sur l’arrestation deM. Camille Desmoulins et que ce dernier soit admis à la barre pour se justifier. M. fâobesjpierre. Je crois que l’ordre provisoire donné par M. ie président était indispensable; mais devez-vous confondre l'imprudence et l’inconsidération avec le crime? 11 s’est entendu accuser d’un crime de lèse-nation; il est difficile à un homnm sensible de se taire. On ne peut supposer qu’il ait eu l’intentiou de manquer de respect au Corps législatif. L’humanité, d’accord avec la justice, réclame en sa faveur. Je demande son élargissement et qu’on passe à l’ordre du jour. M. le Président annonce que M. Camille Des-moulins s’étant érhapçé, il n’a pu être arrêté* (L’Assemblée passe a l’orciré du jour.)