[Assemblé1© nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [19 octobre 1189.] 458 Les comédiens de Marseille, 2,600 livres. M. de la Massellerie, 2,400 livres. Les colons américains font passer à l’Assemblée la délibération suivante : « L’assemblée des colons, délibérant sur la proposition qui lui a été faite par un de ses membres, a unanimement arrêté que, pour donner une preuve de leur zèle et de leur dévouement, les colons américains votaient, et que MM. leurs députés demeuraient autorisés, en vertu des présentes, à offrir à l’Assemblée nationale, pour subvenir aux charges de l’Etat, la quatrième partie de tous leurs revenus, ce qui peut être un* objet de 6 millions, et en outre un cautionnement de la cinquième partie de leurs biens, pour liquider la dette nationale. « Signé : DÉ Joly, président, RoLAND-AtJDlGER, PoiZAT, secrétaires. » On lit la lettre suivante de M. de Limon, contrôleur général des finances de M. le duc d’Orléans. « Monseigneur le président, je viens présenter entre vos mains, à l’auguste et tutélaire Assemblée nationale, l’hommage de la ville.de Pont-l’Evêque, dont j’ai l’honneur d’être maire-l’expression de son respect* de sa vive reconnaissance pour les décrets mémorables déjà émanés de l’Assemblée, ses vœux pour le succès de la constitution de ses travaux, ainsi que mes pouvoirs , sont consignés dans la délibération en forme qu’elle a prise le 5 août dernier; elle m’est arvenue dans le cours d’une tournée que je fais ans les possessions de monseigneur le duc d’Orléans, et j’en attendais la lin, pour avoir l’honneur de vous remettre moi-même, monseigneur, cette délibération, comme j’en avais d’abord le dessein, sous la crainte de différer trop longtemps un hommage que l’empressement des autres villes du royaume ferait paraître tardif ; mais sa date lui reste, et elle est précieuse puisque le 5 août est l’époque la plus glorieuse pour le patriotisme français. « Quant à moi, monseigneur le président, à la distance où je me trouve de la capitale, et occupé uniquement des domaines de monseigneur le duc d’Orléans, que je parcours, je ne viens que d’apprendre, par les papiers publics, que l’Assemblée nationale a bien voulu permettre à des particuliers de lui offrir des sacrifices patriotiques. Je m’empresse, monseigneur le président, de me mettre à leur suite. « Dès le mois de mars dernier, j’ai renoncé gratuitement aux droits de corvée en nature et en argent, au droit de banalité des moulins, et aux droits de colombier qui m’appartenaient: je n’ai plus rien à faire à cet égard. Mais j’ai une seigneurie qui s’étend sur huit paroisses. J’offre d’abandonner, sans rachat ni indemnité , à mes vassaux et censitaires, les droits de lods et ventes, de relief, et tous autres droits seigneuriaux, si les seigneurs suzerains, de qui je relève, veulent me traiter de même. « Probablement de très-longtemps mes fiefs ne seront pas vendus, et leur sacrifice sera très-éloigné, au lieu que je renoncerai dès à présent au produit annuel de mes lods et ventes. En faisant remonter cette remise gratuite jusqu’au premier anneau de lachuîneféodale, il n’yaurailde sacrifice sans compensation que pour le domaine de la couronne; mais il serait léger, et mes censitaires jouiraient de la condition gratuile de la féodalité, condition sans laquelle ce bienfait inestimable sera peut-être nul pour eux. Il m’est dû des rentes seigneuriales : j’offre d’en recevoir le remboursement au denier 20 et d’en placer le produit à 4 0/0 sur l’Etat. « Enfin, monseigneur lé président, à mon retour à Paris, je ferai porter mon argenterie à la Monnaie ; et également, à mon retour à Paris, et lorsque la Constitution aura garanli que les fonds publics ne pourront plus être détournés de leur destination, je verserai dans la caisse patriotique unesomme qui excédera de beaucoup le centième denier de ma fortune et de mes facultés ; mais, dans la crise actuelle, lorsqu’il est à craindre que le génie du premier ministre des finances, ses grands talents et ses ressources ne puissent pas triompher entièrement des circonstances, et mettre la plus auguste Assemblée du monde à portée de faire tout le bien que le Roi désire et que la nation attend, chacun doit un tribut personnel à sa patrie, et c’est par des privations et des sacrifices réels de fortune, quoique la mienne soit très-modique, que je veux acquérir le droit de dire : et moi aussi je suis Français. « Je suis avec un profond respect, monseigneur le président, votre très-humble et très-obéissant serviteur. « Geoffroy de Limons, « maire de la ville de Pont-V Evêque.» Le comité des rapports est invité à s’assembler pour s’occuper d’un mémoire adressé parla milice nationale de Rouen. Cette ville paraît fort agitée. Cette affaire est très-importante, puisque de la tranquillité de cette ville dépend essentiellement la subsistance de la capitale du royaume. La lecture dû procès-verbal donne lieu à plusieurs observations. 11 est décidé que la rédaction de cet acte sera revue, et que désormais tous les officiers des boréaux examineront les procès-verbaux avant qu’ils soient lus à l’Assemblée. Quelques représentations sur l’incommodité et le peu d’étendue de la salle de l’archevêché déterminent l’Assemblée à ordonner que les commissaires déjà nommés seront chargés de chercher Un local plus convenable. L'ordre du jour était la discussion du projet du comité de Constitution sur les municipalité à M. de SlÜery ayant obtenu la parole, veut entrer dans quelques détails sur la situation actuelle de l’Assemblée. 11 est invité à se renfermer exactement dans l’ordre du jour. M. de Btacons engage les députés de Dauphiné à se retirer pour prendre connaissance de dépêches très-importantes arrivées de cette province. 4 Une députation de la commune de Paris est introduite. M. Bailly, maire, accompagné deM. de Lafayette, porte la parole. M. Bailly. Messieurs, nous apportons à l’Assemblée nationale les hommages de la commune de Paris; nous venons renouveler à cette auguste Assemblée et l’expression d’un respect profond et-l’assurance d’une soumission entière. Nous avons toujours désiré l’honneur que nous recevons aujourd’hui, celui de voir les représentants de la nation réunis dans le sein de la capitale, et y délibérant sur les grands intérêts de l’Etat. Nous osons dire, Messieurs, que nous sommes dignes de cet honneur ; nous le sommes par le respect et la soumission dont nous venons vous [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [19 octobre 1789. [ 459 offrir l’assurance, mais nous le serons surtout par notre fidélité à maintenir la liberté de vos grandes et importantes délibérations. La ville de Paris n’a point d intérêt particulier; tout Français ne connaît dans ce moment que celui de la patrie. Nous demandons, comme toutes les provinces, que vous donniez à cet empire une Constitution durable qui maintienne sa prospérité, et qui fasse le bonheur de tous. Voilà notre intérêt, ce sont nos vœux. S’il nous est permis de le rappeler ici, la ville de Paris s’est armée la première contre les ennemis de l’Etat, et en faisant ce premier acte de liberté, elle a fait disparaître les soldats dont l’Assemblée nationale et la capitale étaient environnées ; elle a assuré sa liberté en assuraut la vôtre. Sa gloire sera que la félicité de la France ait été opérée dans son sein. La Révolution qui a été commencée par le courage doit être achevée par la sagesse. Votre sagesse, Messieurs, est de peser et de fixer la destinée de l’empire. Notre devoir, à nous, est de veiller pour vous, de vous entourer du repos et de la tranquillité. Tout citoyen sera soldat pour composer votre garde nationale ; et la commune quç vous voyez devant vous, tous les habitants de celte capitale sont prêts à répandre jusqu’à la dernière goutte de leur sang pour votre sûreté, pour l’inviolabilité de vos personnes et pour la liberté de vos délibérations. Si la capitale n’a pas encore joui de tout le calme que les bons citoyens désirent, c’est que les grandes agitations d’où la liberté doit éclore ne peuvent s'apaiser tout à coup. Le mouvement une fois imprimé ne cesse que par degrés, mais il est des circonstances heureuses qui accélèrent un repos nécessaire. Nous pouvons dire à cette auguste Assemblée que le retour du Roi à Paris y a répandu le bonheur, que sa présence chérie y établit une paix durable. Il n’y a plus de mouvement que pour se porter autour de lui, et cette paix si désirable est aujourd’hui assurée par votre présence. La paix est le fruit de la sagesse ; si la paix n’existait point encore, elle naîtrait du respect que vous inspirez. Qu’apportez-vous ici? La durée de cet empire par les lois, sa prospérité par les lois, et le bonheur de tous par les lois. En considérant le sénat imposant et vénérable auquel j’ai l’honneur de porter la parole, je crois voir les lois personnifiées et vivantes, ces lois simples et éternelles qui vont s’étendre dans toute la France et dans tout l’avenir, pour le bonheur universel. La paix sera dans tous les temps l’ouvrage de ces lois, la paix sera le fruit du respect et de l’amour. La loi et le Roi, voilà tout ce que nous devons respecter; la loi et le Roi, voilà tout ce que nous devons aimer. M. le Président à la députation : Messieurs, l’Assemblée naiionale reçoit avec satisfaction vos respects, vos félicitations et vos vœux. La majesté de ses séances, son zèle pour le rétablissement de l’ordre public et pour l’affermissement de la liberté, de la concorde et de la paix entre les ci-toyeus vont vous offrir de grands exemples ; elle attend aussi de vous, Messieurs, de grands secours. La première ville d’un vaste empire eut toujours une influence immense sur sa destinée. Rome, vertueuse et libre, fut l’idole de 1 Italie et la terreur du monde; Paris, ramené par le génie de la liberté, par la voix de la raison, par l’intérêt même de sa conservation, à des mœurs plus pures et plus simples, à un régime d’administration plus ferme, à des institutions et à des lois plus dignes de son respect, sera le modèle de la France et l’amour de l’univers. Quels gages de cet espoir consolant ne nous offre pas, Messieurs, la composition du corps auguste que vous représentez ! Les talents relevés par la modestie, la droiture unie au savoir, distinguent son chef; la circonstance où vos suffrages nous ont repris ce bien que vos suffrages nous avaient donné, a diminué pour nous le sentiment de sa perte, mais n’a pu faire oublier la longue suite des services qu’il nous a rendus. Que la commune de Paris jouisse de son honorable conquête ; elle s’applaudit à juste titre d’en avoir fait sur nous une autre encore digne de notre secrète envie, c’est le héros dont le bras la défend. Ce héros est un sage que le seul intérêt de l’humanité appela dans les champs de la gloire, et qui, sous les drapeau� d’un guerrier à jamais illustre, sembla comme lui priser les leçons d’un nouveau Lycurgue autant et plus peut-être que les palmes des triomphes qui fondaient la liberté de Philadelphie. Sous ces chefs patriotes on a vu la fermeté, le courage, la tranquille raison d’une commune fidèle à la loi et à son prince, au milieu même des orages qui l’agitaient, étonner la France, et soutenir l’espoir de ses habitants au fort de la tempête. Achevez votre ouvrage, Messieurs ; que l’exemple rie vos guerriers resserre le lien de la discipline militaire, relâché par nos légions. Que la sagesse et la vertu de vos administrateurs imposent un frein à la licence. Que votre respect pour les lois, vos soins pour relever l’éclat du trône, rappellent à la confiance et à la paix un peuple égaré momentanément par l’artifice de ses dangereux amis, mais toujours bon, toujours équitable et dévoué surtout au monarque citoyen dont les bienfaits ët les vertus sont empreints dans son cœur. L’Assemblée nationale vous verra avec plaisir à ses séances. M. le comte de Mirabeau. Messieurs, la première de nos séances dans la capitale n’est-elle pas la plus convenable que nous puissions choisir pour remplir une obligation de justice, et je puis ajouter un devoir de sentiment? Deux de noscollègues, vous le savez, ont été appelés par la voix publique à occuper les deux premiers emplois de Paris, l’un dans le civil, l’autre dans le militaire, je hais le ton des éloges, et j’espère que nous approchons du temps où l’on ne iouera plus que par le simple exposé des faits. Ici les faits vous sont connus. Vous savez dans quelle situation, au milieu de quelles difficultés vraiment impossibles à décrire, se sont trouvés ces vertueux citoyens. La prudence ne permet pas de dévoiler toutes les circonstances délicates, toutes les crises périlleuses, tous les dangers personnels, toutes les menaces, toutes les peines de leur position dans une ville de sept cent mille habitants, tenus en fermentation continuelle à la suite d’une révolution qui a bouleversé tous les anciens rapports; dans un temps de troubles et de terreurs, où des mains invisibles faisaient disparaître l’abondance, et combattaient secrètement tous les soins, tous les efforts des chefs, pour nourrir l’immensiié de ce peuple, obligé de conquérir, à force de patience, le morceau de pain qu’il avait déjà gagné par ses sueurs. Quelle administration I quelle époque où il faut tout craindre et tout braver ; où le tumulte renaît