[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [21 septembre 1791.] {55 au département sur le désarmement de la ville d’Arles. Vous voyez qu’il est important d’y remédier bien vite* (L’Assemblée, consultée, décrète le renvoi au comité des rapports en lui ordonnant de faire son rapport demain.) M. le Président fait lecture d’une lettre de MM. les membres de la commission des monnaies par laquelle ils lui envoient un mémoire en réponse à la dénonciation de M. Souton et dont ils le prient de donner lecture à l'Assemblée immédiatement après cette dénonciation. Voix diverses : Lisez! lisez! Non! non! (L’Assemblée, consultée, décrète qu’il sera fait lecture de ce mémoire.) M. Darche, secrétaire , fait lecture de ce document, ainsi conçu : Eclaircisseménts présentés à V Assemblée nationale par la commission des monnaies sur les dénonciations de M. Souton1 directeur de la monnaie de Pau. « Messieurs, « La commission des monnaies, instituée par l’Assemblée nationale et nommée par le roi, a vu avec reconnaissance, dans les décrets de son établissement, l’obligation de rendre compte de ses travaux aux représentants de la nation, à des époques déterminées : elle était assurée qu’en méritant leurs suffrages, elle fixerait l’opinion publique sur l’utilité de son institution. « Ses premières occupations ont été d’exécuter vos décrets; et c’est au commencement de ses travaux qu’elle est attaquée par un directeur des monnaies. Pour vous mettre à portée de juger du mérite des inculpations de M. Souton, il est peut-être nécessaire de remonter à l’époque où il fut question d’employer le métal des cloches à faire de la monnaie moulée. Nous ne vous offrirons, Messieurs, qu’une suite de faits dont vous reconnaîtrez facilement l’exactitude : heureux que cette circonstance nous procure l’honneur de vous offrir l’hommage de notre respect et de notre dévouement à la patrie et à la loi; plus heureux encore si notre conduite obtient votre approbation. « La commission des monnaies, Messieurs, n’avait encore manifesté de vœu en faveur d’aucune des propositions qui vous étaient faites pour employer le métal des cloches à la fabrication des monnaies, lorsque vous rendîtes le décret du 25 juin qui ordonnait que ce métal serait fondu et converti en monnaie moulée; elle s’occupait sans relâche, à cette époque, des expériences qui lui avaient paru nécessaires pour constater les avantages ou les inconvénients de cette monnaie; pour connaître le degré de célérité et d’économie dont sa fabrication était susceptible. Un de ses membres avait annoncé sur cette matière une opinion très formée, et la commission avait ordonné l’impression de son rapport pour s’éclairer et éclairer l’Assemblée nationale, en livrant cette opinion au choc de la critique et de la discussion. Franpés des avantages que cette opération semblait promettre, vous accueillîtes, Messieurs, cette opinion ; et tandis que votre comité et la commission ne se croyant pas encore suffisamment éclairés, différaient de vous proposer une décision, le désir pressant de satisfaire aux besoins publics vous la fit adopter. « Il n’était plus possible de s’occuper d’aucune autre proposition, et la commission n’avait qu’à préparer les moyens d’exécuter la loi. Elle dis* posait avec ta plus grande activité un atelier qui pût servir de modèle et de règle à tous ceux qui voudraient entreprendre cette fabrication et lui faire connaître à elle-même les conditions et les charges qu’il convenait d’imposer aux adjudicataires. Déjà les principales dispositions étaient achevées ; mais les coins manquaient, et le graveur général n’était point encore nommé ; pendant ce temps, l’opinion publique parut s’inquiéter sur la nouvelle monnaie que vous aviez adoptée; elle n’était point encore fabriquée et de toutes parts on se hâtait de la décrier. « Vous le sentîtes, Messieurs, il était nécessaire d’écarter le discrédit que l’on cherchait à jeter sur la nouvelle monnaie, et la commission, empressée de concourir à vos vues, fit constater, par des expériences multipliées, les moyens les plus faciles et les plus avantageux d’employer le métal des cloches, en l’alliant à une proportion de cuivre suffisante pour le mettre en état de recevoir la pression du balancier. Ces nouvelles expériences dans lesquelles le métal des cloches a été allié d’un sixième, d’un cinquième, d’un quart, d’un tiers et de moitié de cuivre pur, ont convaincu la commission que, pour rendre la fabrication plus facile et plus sûre, il fallait porter dans cet alliage la proportion de cuivre pur jusqu’à la moitié du mélange. « Vous avez adopté, Messieurs, ce dernier procédé par votre décret du 3 août, et vous avez reconnu qu’il vous offrait un moyen de tirer un parti beaucoup plus avantageux de la matière des cloches, puisqu’en soumettant cette monnaie à l’action du balancier, vous pouviez, sans craindre la contrefaçon, doubler presque la valeur que vous lui aviez donnée par votre décret du 25 juin, et eu diminuer considérablement le volume. La commission atteste ici tous les artistes et les citoyens même qui, sans connaître les procédés de l’art, ont cru pouvoir proposer quelques vues utiles, et elle ne craint point d’être démentie en assurant qu’elle a accueilli avec reconnaissance toutes les lumières qui lui ont été offertes. M. Souton se plaint de n’avoir pas reçu de la commission toutes les facilités que méritait l’importance de ces projets et lui reproche ainsi qu’à votre comité, de ne vous avoir point rendu compte de ses propositions, dans l’intention de favoriser MM. les intéressés à la manufacture de Romilly; il reproche encore à la commission de vous avoir laissé ignorer l’expérience qu’elle lui a fait faire sur la matière des cloches alliée d’un quart de cuivre, parce qu’il n’a pas voulu faire connaître le procédé par lequel il rend cette matière susceptiblede supporter la pression du balancier. Permettez-nous, Messieurs, d’entrer à ce sujet dans quelques détails. « M. Souton a fait une première proposition au comité des monnaies avant la formation de la commission. A cette époque, il voulait extraire le cuivre du métal des cloches par des procédés qui ont, suivant lui, le mérite de la nouveauté et il offrait de payer le métal qui lui serait livré, à raison de 18 sous la livre; mais par le mémoire qu’il a présenté à la commission, le 24 mai dernier, il a annoncé qu’il ne pouvait plus se charger de cette opération, parce qu’il eût été obligé de construire des ateliers exprès, cette décomposition ne pouvant se faire dans les hôtels des monnaies; que ces ateliers eussent été d’autant plus coûteux qu’ils auraient dû être construits 156 ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [21 septembre 1791. J [Assemblée nationale.] avec beaucoup de précipitation et seraient devenus inutiles aussitôt qu’il y aurait eu assez de monnaie pour l’échange des petits assignats; que la quantité de menue monnaie qui devait être fa-briquée n’ayant point été déterminée, il eût été exposé à voir cette fabrication arrêtée, avant qu’elle lui eût procuré l’indemnité des avances qu’il aurait faites pour l’établissement de ces ataliers. « En conséquence, il a réformé sa première soumission, et sa nouvelle proposition a été de faire une monnaie, composée de trois cinquièmes de métal de cloches contre deux cinquièmes de cuivre pur; il a annoncé que cette matière, ainsi alliée, supporterait le laminage et la pression du balancier par des procédés dont la découverte lui appartient; il a offert de payer la matière des cloches qui lui serait livrée eu nature, à raison de 25 sous la livre et d’acheter des adjudicataires du surplus de ce métal le cuivre dont il aurait besoin pour l’alliage, sur le pied de 22 sous la livre. Les conditions auxquelles M.Souton offrait de se charger de cette fabrication étaient : « 1° Que les pièces seraient à la taille de 8 au marc, pesant chacune une once et valant 2 sous 6 deniers; « 2* Qu’on lui abandonnerait les hôtels des monnaies de Paris, Lille, Metz. Lyon, Bordeaux, Pau et Bayonne, et la monnaie des médailles, avec toutes les machines et ustensiles nécessaires à la fabrication et qu’il en aurait la libre disposition jusqu’à ce que sa fabrication fût achevée; « 3° Qu’il pourrait se servir de tels ouvriers qu’il jugerait à propos, sans être obligé d’employer les ajusteurs et les monnayeurs. « Nous ignorons, Messieurs, si votre comité des monnaies vous a rendu compte de ces propositions; il peut se faire qu’il ait jugé inutile de les mettre sous vos yeux. La seconde condition exigée par M. Souton ne pouvait se concilier ni avec votre justice, ni avec l’intérêt public, puisqu’il eût fallu enlever à la fabrication des espèces d’argent 7 des principaux hôtels des monnaies pour les livrer à M. Somon et condamner les employés de ces monnaies à l’inaction, sans parler de l’impossibilité de confier à un seul nomme un aussi grand nombre d’ateliers. Quant à sa première proposition, à laquelle il avait, d’ailleurs, apposé les mêmes conditions, il y avait lui-même renoncé; il n’en pouvait donc plus être question. « M. Souton a encore remis, vers la fin de juillet, un nouveau mémoire à la commission, par lequel il a proposé d’allier le métal des cloches à un quart de cuivre pur, de le rendre, par cet alliage, malléable, et de le convertir en monnaie frappée. Sur ce mémoire, la commission a invité M. Souton à faire une expérience sous les yeux des commissaires qu’elle a nommés pour constater le résultat de ses procédés. M. Soutou s’est rendu à l’invitation de la commission, mais il a déclaré qu’il ne pouvait pas faire son expérience en entier devant les commissaires, parce qu’après que le mélange était fait et les flans lormés, il était obligé de leur donner, pour les mettre en état d’être frappés, une préparation en quoi consistait son secret et qu’il ne pouvait faire en présence de personne. Quoique cette difficulté ne permît pas aux commissaires d’être assurés de l’identité de la matière et d’avoir un résultat certain, ils ont consenti au désir de M. Souton, et lui ont remis 20 flans dont ils ont seulement constaté le poids, afin que ce poids pût servir à reconnaître, jusqu’à un certain point, leur identité. M. Souton a accepté cette proposition; mais, au lieu de rapporter ensuite les 20 flans, il n’en a représenté que 17. La commission privée du seul caractère qui aurait pu, quoique d’une manière très imparfaite, rassurer que ces flans étaient les mêmes qui avaient été remis à M. Souton et réfléchissant d’ailleurs qu’il ne lui était pas possible de rendre un compte exact d’une expérience faite en partie hors de ses regards, a déclaré à M. Souton qu’elle ne croyait pas devoir en tenter de nouvelles, à moins que la totalité de. l’expérience ne se fît sous ses yeux. «Quoique M. Souton ait refusé d’acquiescer à cette condition, la commission était si éloignée de s’opposer au succès de ses projets, que, le 2 août, elle consentit que M. Souton fît frapper à un des balanciers de la Monnaie, quelques flans qu’il annonça provenir de son procédé. « Le décret pour la fabrication de la nouvelle monnaie, ayant été rendu le lendemain 3 août, la commission et le ministre n’ont pas laissé, depuis ce moment, passer un seul jour sans prendre de nouvelles mesures pour en presser l’exécution. « M. Souton s’est encore présenté à la commission, et a demandé de nouveau à faire frapper, dans l’hôtel des monnaies, des flans dont la matière avait été préparée suivant son procédé. Le ministre lui a déclaré, en présence de la commission et d’un des membres de votre comité, que, si ces propositions avaient pour objet l’exécution de votre décret, il ne lui refuserait aucunes facilités; mais que, si elles tendaient à la contrarier ou à la suspendre, il ne lui serait accordé aucune permission. M. Souton a refusé de s’expliquer ; mais cette démarche n’a pas été la dernière qu’il ait faite vis-à-vis de la commission. « Il s’est encore présenté devant elle le 23 août, tenant à la main la dénonciation qu’il venait de faire impîimer, et, après avoir prévenu la commission du dessein qu’il avait de la présenter à l’Assemblée nationale, et de la rendre publique, il a offert de la supprimer, si la commission voulait prendre l’engagement de faire cesser à l’instant les travaux de l’atelier établi en la maison des barnabites pour la fabrication de la monnaie décrétée le 3 août; de mettre aussi à l’instant cette fabrication en adjudication au rabais, et d’accorder, à prix égal, la préférence aux directeurs des monnaies. La commission s’est contentée de lui observer que l’objet de sa demande devait être portée immédiatement au ministre des contributions publiques, par l’ordre duquel ces travaux s’exécutaient. « Jamais la commission n’a exigé de M. Souton qu’il lui fît connaître ses procédés, et, s’il est vrai qu’ils tiennent à une découverte, c’est mal à propos qu’il a craint qu’elle n’abusât de sa confidence. Elle a seulement demandé que l’opération fût faite sous ses yeux, pour être assurée que les pièces que l’on soumettrait au balancier, seraient identiquement celles qui auraient produit la matière composée et traitée par M. Souton. « D’autres artistes, Md. Briatte et Sauer, qui ont pareillement annoncé avoir un secret pour rendre la matière des cloches malléable, ont consenti à opérer sous les yeux ne la commission; ils ont fait usage d’une poudre qu’ils ont projeté sur la matière en fusion, et d’une liqueur dans laquelle ils ont trempé la lame, sans que la commissien ait exigé d’eux qu’ils lui fissent connaître la nature de cette poudre et de cette liqueur. La commission n’avait pas à juger la [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [21 septembre 1791.] 457 bonté des moyens employés par ces artistes, ni par M. Soutun, mais elle devait s’assurer de la vérité des résultats. « Inutilement, M. Souton multipliait-il ses démarches auprès de la commission, s’il ne croyait pas qu’elle dût donner un avis sur le résultat de son opération; et si, au contraire, il voulait qu’elle pût donner un avis, il fallait qu’elle ne perdît pas de vue un seul instant, les produits de la matière traitée par ce procédé. « Le ministre et la commission sont encore inculpés de chercher à retarder la pleine exécution du décret que vous avez rendu sur la basse monnaie, afin de favoriser, pour cette fabrication, quelques intrigants et particulièrement MM. les intéressés à la manufacture de Romilly . « Quelque vague que soit cette inculpation, il est vraisemblable que M. Souton se plaint de ce que la fabrication de la nouvelle monnaie n’est point mise en adjudication : si ce n'est pas là le sens de cette inculpation, elle n’en a aucun. « Cette fabrication a-t-elle dû être mise en adjudication ? a-t-on dû attendre que cette adjudication fût faite pour commencer la fabrication? « Par son décret du 25 juin, l’Assemblée nationale en ordonnant la fabrication d’une monnaie moulée, avait autorisé le pouvoir exécutif à adjuger la fabrication de cette monnaie à un ou plusieurs entrepreneurs. La fabrication devait etre faite hors des hôtels des monnaies, et le produit seulement y devait être versé par les entrepreneurs : mais votre décret du 3 août, Messieurs, a changé ces dispositions. « Il y est dit que la fabrication aura lieu dans tous les hôtels des monnaies du royaume : que les départements tiendront à la disposition du ministre des contributions publiques, les cloches des églises supprimées dans leurs arrondissements; enfin que le ministre prendra les mesures convenables pour procurer incessamment aux divers hôtels des monnaies, le cuivre nécessaire soit par le départ d’une partie du métal des cloches, soit en traitant avec les manufacturiers. « Si ces dispositions n’éloignent pas l’idée d’une adjudication, au moins établissent-elles bien que le ministre ne pourrait pas être obligé d’adjuger, si tout autre mode était plus économique, plus prompt et plus utile à la nation. Mais, s’il avait fallu attendre pour commencer la fabrication, que l’on eût acquis toutes les lumières nécessaires pour connaître les conditions et les charges que l’on devait imposer aux adjudicataires; que l’on eût comparé les différentes méthodes du départ; que dans chaque département, des artistes se fussent présentés pour entreprendre cette opération, on ne craint pas de le dire, il n’y aurait pas encore une pièce de la nouvelle monnaie dans la circulation ; et si, au contraire, on eût hâté les marchés ou adjudications, sans s’être donné le temps de recueillir les lumières nécessaires sur les frais et les produits de l’opération, la nation aurait pu être jouée par l’avidité de quelques entrepreneurs, et ses intérêts sacrifiés à l’intérêt particulier. « C’est encore pour accélérer l’opération et la rendre plus économique, que le ministre a sollicité de la sagesse de l’Assemblée, le décret qui consacre à la fabrication de la nouvelle monnaie, les vieux cuivres des maisons religieuses et des églises supprimées, et ce moyen u’a pas sans doute été imaginé pour favoriser les fournisseurs de cuivre et la manufacture de Romilly , ou pour augmenter les opérations du départ. « Les reproches de M. Souton, si vagues que l’on ne sait à quel point s’arrêter pour y répondre, paraissent aussi porter sur la monnaie de cuivre dont vous avez ordonné la fabrication provisoirement par les décrets des 17 et 20 mai, et pour laquelle vous avez cru devoir passer sur toutes les considérations, et autoriser le pouvoir exécutif à prendre tous les moyens propres à l’accélérer et à en augmenter la masse : cette opération quia procuré déjà 1,400,000 livres et plus de numéraire effectif à la circulation, ne devait pas être l’objet de la critique. « Vous avez senti. Messieurs, que la première de toutes les lois était le salut du peuple, et vous avez trouvé légers tous les sacrifices qui pouvaient tendre au soulagement de la classe la plus malheureuse. Le ministre a fait tout ce qui a été en son pouvoir pour concourir à vos vues bienfaisantes; il a aplani les difficultés, il a levé les obstacles pour alimenter, par la monnaie de cuivre, les plus pressants besoins de la circulation, et lorsqu’il a mis à exécution une loi qui a contribué si efficacement à maintenir la tranquillité publique, la malignité ose encore répéter qu’il n’a consulté que des intérêts particuliers. « La commission des monnaies ne se contentera pas, Messieurs, de vous dire avec M. Souton, que, pour fabriquer la monnaie décrétée, il ne faut que des fourneaux, des moules et des cou-poirs; que l’on peut s’en procurer promptement et que cette fabrication ne peut se faire, nulle part, mieux que dans les hôtels des monnaies. Elle vous dira, de plus, qu’elle a rédigé une instruction pour mettre les fondeurs les moins habiles en état d’exécuter le moulage; que cette instruction a été imprimée, et est envoyée dans les départements; qu’elle fait préparer ici les moules et les lames qui doivent servir de modèles, afin de les envoyer dans tous les lieux où il sera établi des ateliers ; que tous les départements ont reçu les ordres nécessaires pour faire parvenir aux hôtels des monnaies les cloches et les vieux cuivres destinés à servir d’alliage ; que des bordereaux uniformes de toutes les livraisons et réceptions, doivent, conformément aux ordres du ministre des contributions publiques, être affectés à la commission pour assurer l’emploi de toutes les matières et prévenir toute dilapidation; que des modèles de fourneaux à faire le départ, sont exécutés à Paris, pour être envoyés à tous les hôtels des monnaies, avec une nouvelle instruction sur la manière d’opérer le départ; que tous les hôtels des monnaies sont en ce moment fournis des poinçons nécessaires pour la fabrication des nouveaux sous; que non seulement le poinçon original des pièces de 2 sous est achevé depuis plus de 3 semaines, mais aussi qu’il est déjà multiplié et envoyé à plusieurs hôtels des monnaies ; que pour accélérer encore la fabrication, en en augmentant les moyens, un nouvel atelier va être établi à l’hôtel des monnaies et garni de machines plus économiques que les balanciers et dont on croit pouvoir se promettre le même succès; que le ministre empressé de lever tous les obstacles qui pourraient ralentir ou suspendre l’activité des ateliers, a engagé MM. les intéressés à la manufacture de Romilly à lui céder, sans aucun bénéfice, 50 mille marcs de cuivre pur pour allier le métal des cloches, en attendant que le départ puisse être bien établi; que les entrepreneurs de la manufacture de Ma-rome ont consenti au même sacrifice ; qu’en fin, au milieu des difficultés de tout genre, le seul hôtel des monnaies de Paris a déjà fourni à la cir- 158 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [21 septembre 1791.] culation plus de 500,000 livres en pièces de 15 sous et une somme égale en métal de cloches et en cuivre. « M. Souton accuse le comité et la commission des monnaies de protéger spécialement M. Auguste et MM. les intéressés de la manufacture de homilly , et il prétend que l’on ne vous a fait décréter qu’il fallait ailier le métal des cloches d'un.e égale quantité de cuivre, qu’afin de rendre, pour le premier, l’opération de l’épurement plus considérable, et de faire vendre aux derniers une plus grande quantité de cuivre ; c’est-à-dire que la commission et le comité favorisent également 2 entreprises, dont les intérêts sont diamétralement opposés, 2 entrepreneurs, dont l’un ne peut être favorisé sans tarir la source des béné; lices de l’autre. Ce n’est pas là une accusation ni une calomnie, c’est une chimère. « Nous ne nous permettrons point, Messieurs, de répondre aux reproches que M. Souton a dirigés contre votre comité monétaire; il a bien voulu, dès le moment de sa formation, nous inviter à partager ses travaux, et si l’amour de la patrie n’avait pas suffi pour nous inspirer le plus entier dévouement à la chose publique, le zèle de ceux d’entre vous, Messieurs, qui composent ce comité, à approfondir les détails arides de la science monétaire, nous aurait excités puissamment à remplir un devoir si sacré. « La commission n’entrera point dans la discussion du projet que vous a présenté M. Souton ; si l’Assemblée croit devoir l’adopter, la commission, fidèle à ses principes, prend d’avance l’engagement d'en hâter l’exécution. « Qu’il lui soit permis, en finissant, d’exprimer sa sensibilité sur la manière dont M. Souton s’est permis de parler d’un de ses membres (M. Tillet), qui a rempli une carrière de près de 80 ans de travaux et de vertus ; qui a écrit toute sa vie avec succès, sur les arts qu’il a pratiqués ; qui, toujours consulté, toujours honoré, toujours irréprochable, est peut-être au moment d’être enlevé à la patrie qu’il a servie ; aux sciences qu’il a cultivées avec gloire ; à sa famille et à ses amis qui chérissent la douceur de sa société, pour n’avoir pas mesuré les efforts de son zèle sur l'affaiblissement, suite nécessaire, quoique souvent imperceptible de la vieillesse. « La commission des monnaies a satisfait à son devoir ; chargée de l’exécution des lois, elle a rendu compte aux légi-lateurs de ce qu’elle a fait pour l’assurer et l’accélérer, et l’exposition de sa conduite lui a suffi pour faire disparaître les inculpations de celui qui se pare du titre de son dénonciateur. Elle sait qu’il eût été facile de fermer la bouche à cet adversaire, si l’intérêt public eût permis de lui accorder la place de directeur de fa monnaie de Paris, qu’il réclamait comme la récompense due à son mérite. « Daignez, Messieurs, recevoir de la commission l’assurance de sa soumission à la loi, et le vœu sincère qu’elle fait pour que le bonheur publie soit la seule punition des délateurs qui sacrifient à leurs intérêts ceux d’une nation libre et généreuse. « Signé : FargèS, Vice-Président ; d ’Origny , Magimel, Rochon, SoLIGNAC, A. -J. SlLVESTRE. » « Nota. — Depuis la rédaction de ce mémoire, il a paru une nouvelle dénonciation par M. Souton, qui ne contient qu’une répétition des inculpations renfermées dans son premier écrit : on y remarque seulement une assertion fausse qu’il peut être utile de contredire. « M. Souton dit qu’on l’avait assuré que l’on ajoutait à la matière des cloches du cuivre jaune, et qu’ayant questionné les ouvriers employés à la fabrication, sur la vérité de cette assertion, ils lui ont répondu qu’on avait réellement ajouté de ce mixte, et même en assez grande quantité, à la matière des cloches, mais qu’on s’était assuré que cela nuisait. « Il ajoute ensuite s’être assuré par lui-même de l’existence du cuivre jaune dans cette monnaie, et qu’elle contient beaucoup plus de zinc qu’il n’y en a dans les cloches, « Rien n’est moins exact que ce qu’avance M. Souton. Tout le cuivre jaune qui a été retiré des églises et maisons religieuses supprimées, exisie encore en nature dans les magasins de l’aielier des Barnabites. lia seulement été fait un essai de l’alliage du cuivre jaune au métal des cloches : il n’a été coulé qu’un seul châssis de ce métal ainsi composé, et ce métal a pris dans la fusion une couleur verte. Cette couleur provenait de ce que le zinc n’avait pu s’évaporer suffisamment, et le même inconvénient n’aura pas lieu lorsque l’opération du départ sera bien établie. Aucune pièce de cet alliage n’a été frappée, ni par conséquent mise en circulation. « Signé : FargèS, Vice-Président; d’ORiGNY, Magimel, Rochon, SOLIGNAC, A. -J. SlLVESTRE. » M. Belzais-Coiirméiiil, au nom du comité des monnaies. Messieurs, vous venez d’entendre la justification complète, ce me semble, de la commission administrative des monnaies. Il vous reste à entendre le ministre des contributions et votre comité monétaire. Le ministre sans doute vous fera passer, dès que vous le désirerez, sa réponse aux attaques de M. Souton. Pour votre comité, il est inculpé de 3 choses ; on lui reproche sou ignorance, on lui reproche d’avoir voulu favoriser la manufacture deRomilly, et d’avoir avancé qu’on fabriquait des sous dans tous les hôtels des monnaies. Tout cela, Messieurs, mériterait peu de réponse : cependant je vous supplierai de faire donner communication à votre comité delà dénonciation de M. Souton, qui n’est plus la même que celle qui est imprimée ; et je répondrai seulement aujourd’hui que le premier rapport de votre comité que M. Souton prétend avoir réfuté par un pamphlet qu'il fit imprimer dans le temps, que ce premier rapport, dis-je, était principalement l'ouvrage des gens les plus connus de l’Europe dans la science monétaire et par leur connaissance dans l’économie politique ; il suffit de vous citer M. Bordelais, M. Portau, I. de Sacy, jeune homme assis sur la ligne des premiers savants lorsque les autres ne Font que commencer à s’instruire, enfin 10 ou 12 autres personnes d’un mérite aussi connu. À l’égard de la protection qu’on nous accuse d’avoir accordée à la manufacture de Roinilly» c’est la première fois qu’on nous fait ce reproche, car on nous a reproché peut-être avec plus de raison, de nous être laissé séduire par des préventions contre cette manufacture. Chaque jour il venait au comité des personnes qui nous disaient : Défiez-vous des entrepreneurs de Romilly. — Chaque jour on nous donnait des inquiétudes sur leur loyauté. Enfin on en vint jusqu’à nous dire qu’ils répandaient dans la circulation, qu’ils ea-