SÉANCE DU 28 BRUMAIRE AN III (18 NOVEMBRE 1794) - NOB 26-31 363 delle l’attend; l’heure approche et son utilité est imperceptible. Le jour, au contraire, par son influence, excite l’émulation; l’artiste alors compliquant son devoir avec son courage, récompense le retard de la lumière universelle. Depuis trois jours la porte ferme à six heures et demie, et s’ouvre à sept; l’appel est fait, et nous perdons un tiers pour une demie heure de retard. L’administration ne se trouve point compétente à analyser la rareté de la lumière avec la mauvaise saison, le jour et le froid ; mais elle est impérative avec ses agens pour la rigueur de son règlement qu’elle nous donne pour loi sans modification, puisque, dit-elle, elle n’est rien d’elle-même. Cependant vient-elle visiter les ateliers? alors ils ne sont plus nationaux. La fraternité n’est qu’un mot, l’égalité une chimère, et la liberté un fantôme. Nous les voyons, le chapeau sur le front menaçant, accompagner et marcher sur des esclaves, vexant et renvoyant, à leur gré, ce qui ne leur plaît pas, et nous désignant tous comme des malheureux. Attachés à nos travaux, nous nous consolons en doublant de courage ; et conduits par le génie de la patrie, nous accélérons les instrumens qui servent à détruire les esclaves de nos tyrans. Mais deux commissaires viennent alternativement nous troubler par leur présence inutile. Nous portons au terme nos confections à l’inspecteur qui ne fait point de différence d’un défaut de perfection à celui essentiel... Dans ce labyrinte, où la raison et les principes sont méconnus, resterons-nous, infortunés dans nos demandes, et vexés dans nos travaux? Non : vous êtes nos pères, et la justice n’a d’autre asyle qu’ici. Nous vous demandons, Législateurs, une administration versée dans la manipulation et métallurgie, et dont les principes soient renfermés dans les vertus républicaines. Une organisation classée et définitive, où les prix fixés et annexés en proportion des besoins de la vie, portent la consolation aux vieillards, aux pères de famille, et l’émulation aux jeunes gens; de manière que, selon la mutation des choses, tout se trouve proportionnellement. Une police raisonnée suffit pour ramener un artiste à son devoir, l’atelier étant plutôt composé d’honnêtes citoyens que de brigands : ceux-ci ne seront jamais soufferts, sitôt qu’ils seront connus. Ce n’est point avec la tyrannie que l’on conduit des hommes qui mettent tout leur bonheur à travailler pour défendre la liberté, l’égalité, et respecter toutes les vertus républicaines. Renvoyé au comité de Salut public pour en faire le rapport incessament (85). 26 Les veuves des infirmiers des hospices militaires de la commune de Versailles (85) Débats, n° 786, 813-815, Moniteur, XXII, 529-530; Mess. Soir, n° 823; J. Univ., n° 1819. [Seine-et-Oise], réclament l’exécution des décrets de bienfaisance rendus en leur faveur. Renvoyé au comité des Secours publics (86). 27 La citoyenne Lefèvre, dont le mari et deux fils sont morts en combattant pour la liberté, demande d’être affranchie des formalités exigées par la loi, pour toucher de modiques arrérages qui lui sont dus par le Trésor public. Renvoyé au comité des Secours (87). 28 Le citoyen et la citoyenne Beuvry Saillans, détenus à Liancourt, département de l’Oise, réclament leur mise en liberté. Renvoyé au comité de Sûreté générale pour y statuer (88). 29 Le citoyen Depeuille fait l’hommage à la Convention d’une estampe ayant pour titre, L’Africain hospitalier. Mention honorable, insertion au bulletin, renvoi au comité d’instruction publique (89). 30 Le citoyen Bellay, détenu dans la maison de l’Egalité [Paris], demande son élargissement. Renvoyé au comité de Sûreté générale pour y statuer (90). 31 Le citoyen Julian de Carentan, président du Champ-de-Mars, détenu au Plessis, demande sa mise en liberté, ou sa traduction au Tribunal révolutionnaire. Renvoyé au comité de Sûreté générale (91). (86) P.-V., XLIX, 263. (87) P.-V., XLIX, 263. (88) P.-V., XLIX, 263-264. (89) P.-V., XLIX, 264. (90) P.-V., XLIX, 264. (91) P.-V., XLIX, 264. Moniteur, XXII, 547-548. 364 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE [Julien de Carentan, détenu depuis 11 mois, et accusé d’avoir distrait une somme de 138 000 L. appartenant à la République, lorsqu’il était employé par le comité de Salut public, demande que Bourdon (de l’Oise), qui s’est chargé de l’affaire, fasse incessamment son rapport, afin qu’il soit puni s’il est coupable, et mis en liberté s’il est innocent. LE COINTRE (de Versailles) : Effectivement, Julien est accusé du vol dont il s’agit, et c’est aux tribunaux à en connoître. Je demande, en conséquence, que le comité de Sûreté générale fasse passer les pièces au tribunal criminel.] (92) 32 La Convention nationale rend les décrets suivans (93) : a La Convention nationale, après avoir entendu le rapport de [MENIJAU au nom de] son comité des Secours publics sur la pétition de Jean-Baptiste Bonbergue, jardinier, demeurant à Favemey, district de Vesoul, département de la Haute-Saône, dont la femme vient d’accoucher de trois enfans, décrète que la Trésorerie nationale fera passer sans délai à l’agent national provisoire du district de Vesoul la somme de 300 L, pour être donnée, à titre de secours, au citoyen Jean-Baptiste Bonbergue (94). b SAINT-MARTIN, au nom du comité des Secours publics, après avoir examiné avec la plus sévère attention la question de savoir si la loi du 13 prairial pourrait être applicable à la citoyenne Supplis, veuve Desruelles, a unanimement voté pour la négative. Il a considéré qu’il est dans la lettre et dans l’esprit de cette loi de n’accorder des pensions et des secours qu’aux veuves et aux familles des citoyens qui sont morts en défendant la patrie, ou en faisant un service requis ou commandé; Que le citoyen Desruelles ne se trouve ni dans l’un, ni dans l’autre de ces cas. Il n’est pas mort en défendant la patrie, nul doute à ce sujet ; il n’est pas mort, non plus en faisant un service requis ou commandé; il était bien en réquisition pour travailler à la manufacture nationale d’armes établie aux ci-devant Cordeliers, mais on ne peut pas présumer qu’il soit mort dans l’exercice de ses fonctions, ou de la (92) Mess. Soir, n° 825. (93) P.-V., XLIX, 264. (94) P.-V., XLIX, 264. Bull., 28 brum. (suppl.). Rapporteur Menuau selon C* II, 21. suite des fatigues de ces mêmes fonctions, puisqu’il a été trouvé noyé dans la Seine. A-t-il été assassiné? a-t-il été tué dans une rixe, ou bien s’est-il noyé par accident, ou volontairement? C’est ce qu’on ignore ; mais, je le répète, le genre de sa mort écarte toute présomption qu’elle soit la suite de son service de maître forgeron à la manufacture d’armes. Ce serait ouvrir une trop large porte aux abus, ce serait constituer la République en des dépenses au-dessus de ses forces, que d’étendre les dispositions de la loi du 13 prairial aux familles de tous les citoyens employés par la nation, qui meurent accidentellement, ou de maladie naturelle, hors de l’exercice de leurs fonctions. Cette loi est juste, bienfaisante, digne de la munificence d’une grande nation ; jamais, chez aucun peuple, la patrie ne donna des secours si abondants aux familles indigentes des citoyens qui meurent à son service ; mais il faut prendre garde de ne pas la rendre inexécutable en lui donnant une extension qui épuiserait le Trésor public. Ce sont ces considérations qui ont déterminé votre comité à arrêter que la veuve Desruelles n’avait point droit à la pension. Mais, comme cette veuve, chargée de trois enfants en bas âge, est dans l’indigence, comme elle a été attirée à Paris par la réquisition de son mari, comme ce voyage lui a occasionné des pertes, et qu’elle est sans moyens pour regagner ses foyers, le comité m’a chargé de vous proposer de lui accorder un nouveau secours de la somme de 400 livres, une fois payée ; je vous propose le décret suivant (95) : La Convention nationale, après avoir entendu [SAINT-MARTIN au nom de] son comité des Secours publics, sur la pétition de la citoyenne Supplis, veuve d’Etienne Desruelles, maître forgeron, travaillant à l’atelier d’armes établi aux ci-devant Cordeliers de Paris, décrète que, sur le vu du présent décret, la Trésorerie nationale paiera à ladite veuve Desruelles la somme de 400 L, à titre de secours et indemnité, pour l’aider à retourner avec ses enfans au lieu de son domicile. Le présent décret ne sera imprimé qu’au bulletin de correspondance (96). 33 [Carrier, représentant du peuple au président de la Convention nationale, Paris le 28 brumaire an III\ (97) (95) Moniteur, XXII, 538-539. (96) P.-V., XLIX, 265. Moniteur, XXII, 539 ; Bull., 28 brum. (suppl.). Rapporteur Saint-Martin selon C* II, 21. (97) C 323, pl. 1383, p. 17. Moniteur, XXII, 535. Débats, n° 786, 818; J. Paris, n° 59; Rép., n° 59; J. Fr., n° 784; Ann. R. F., n° 58; Gazette Fr., n° 1051; Ann. Patr., n° 687; J. Perlet, n° 786.