[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [8 août 1791.] 287 vous démontrer, que les principes des lois sont extrêmement simples; qu’ils sont applicables partout. Les lois rurales comme toutes les autres lois n’ont d’autres bases que les droits communs des hommes; on peut les réduire à un très petit nombre de lois, qui porteront partout avec elles la liberté et le respect des propriétés. M. Boutteville-Dumetz. Je crois, avec le préopinant, qu’il n’est pas impossible de faire un code rural universel; mais il est important que le corps entier de la loi, qu’on vous a fait décréter, soit revu avant d’être présenté à la sanction. En général, cette loi ne me paraît pas suffisamment méditée. Les connaissances des jurisconsultes sont indispensables pour faire de pareilles lois. M. Heurtault-I�amerville, rapporteur . Je crois que les observations de M. Merlin sont un peu tardives, et que s’il trouvait la loi mauvaise, il ne devait pas attendre qu’elle eût employé 6 séances à l’Assemblée nationale, et 8 mois de travail dans les comités. Mais cette loi, telle que vous l’avez décrétée, paraît à beaucoup de bons esprits, à beaucoup de jurisconsultes éclairés, le seul moyen de terminer les procès dans les campagnes. ( Une partie de L'Assemblée applaudit.) Les habitants des campagnes n’auront pas besoin d’autre catéchisme, que ce code de lois rurales. Il fera plus pour la tranquillité des campagnes que toute votre Constitution. D’ailleurs, ce travail peut être fini dans une séance ; je demande que celle de dimanche prochain lui soit réservée. (L’Assemblée, consultée, décrète que la suite des articles sur le code rural lui sera présentée dimanche prochain.) M. Rocque de Saint-Pons, député du département de l'Hérault , qui était absent parcongé, annonce son retour et sa présence à l’Assemblée nationale. Plusieurs membres se lèvent pour sortir de la salle. M. le Président. Messieurs, Messieurs, la séance n’est pas levée. M. le ministre de l’intérieur a quelque chose à communiquer relativement à l 'uniformité des poids et mesures ; je lui donne la parole. M. Delessart, ministre de l’intérieur. Messieurs, l’Assemblée nationale désirant faire jouir la France de l’uniformité des poids et mesures, a voulu que l’Académie des sciences préparât cette grande opération. Les commissaires de l’Académie s’en sont occupés avec tout le soin que l’on pouvait attendre de leur zèle et de leur patriotisme ; ils ont déjà, à cet effet, préparé leurs travaux; mais ces travaux exigent nécessairement quelques dépenses. On avait d’abord évalué ces dépenses extrêmement haut ; on avait dit qu’elles pourraient se porter à plusieurs millions; mais l’aperçu que MM. les commissaires ont formé, a porté* cette dépense totale à une somme de 300.000 livres ; et à l’égard du temps nécessaire pour remplir leur travail complètement, temps qui avait été aussi très exagéré, ils l’ont fixé à l’espace de 2 ans, de manière qu’à cette époque, ils espèrent que ce travail sera complet, et que la législature pourra déterminer quelque chose à cet égard. lre Série. T. XXIX. Actuellement, beaucoup d’ouvriers ont déjà été employés; des voyages vont être entrepris, car il s’agit de mesurer un arc de méridien depuis Dunkerque jusqu’à Barcelone; il va falloir des instruments : tout cela exige nécessairement quelques frais, et l’on demande avec instance que l’Assemblée veuille bien pourvoir à ces dépenses. Ce n’est pas la somme de 300.000 livres qui est actuellement nécessaire et que l’Académie désire ; une somme de 100.000 livres est, d’après le vœu même des commissaires d’Académie, tout ce qu’il faut pour le moment. Je demande donc à l’Assemblée nationale d’ordonner que cette somme sera comptée par le trésorier de la caisse de l’extraordinaire au ministre de l’intérieur, qui en disposera pour les dépenses à faire par les commissaires désignés, au fur et à mesure de leurs besoins. Lorsque cette somme sera consommée, il sera rendu compte de l'emploi qui en aura été fait et l’Assemblée prendra sur ce, des déterminations ultérieures. M. de Montesquieu. Lorsque l’Assemblée nationale a voulu une entreprise aussi honorable pour les sciences, qu’utile pour la nation, elle a certainement compté que l’Etat en ferait la dépense. Aussi, rien ne me paraît plus simple que d’autoriser les commissaires de l’Académie, sur une ordonnance du ministre de l’intérieur, à puiser dans le Trésor public la somme de 100.000 livres et que la législature décrète une autre somme lorsque besoin sera. M. Camus. Je demande le renvoi de la proposition de M. le ministre de l’intérieur au comité des finances. Ce n’est pas, certainement, que je croie la demande de fonds exagérée ; je suis même persuadé que le comité y fera droit, et qu’elle ne souffrira aucune difficulté. Mais je crois qu’il serait dangereux de voter une somme quelconque sur la simple proposition d’un ministre. C’est pourquoi je demande le renvoi au comité, pour nous faire son rapport incessamment. Plusieurs membres : C’est juste. (L’Assemblée ordonne le renvoi de la proposition du ministre au comité des finances.) M. le Président annonce l’ordre du jour de la séance de demain. La séance est levée à trois heures. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. ALEXANDRE DE BEAÜHARNAIS. Séance du lundi 8 août 1791 (1). La séance e�t ouverte à neuf heures du matin. M. Ramel-HTogaret, secrétaire , fait lecture du procès-verbal de la séance du samedi 6 août , au soir , qui est adopté. M. Bauchy, au nom des comités de Constitution et des contributions publiques. Messieurs, vous avez renvoyé à vos comités de Constitution et des contributions publiques la motion de M. Bouche tendant à assurer le recouvrement des con-(1) Cette séance est incomplète au Moniteur. 17 958 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [8 août 1791.] tributions dues par les fonctionnaires publics et les membres des assemblées électorales. Les comités ont examiné cette question et ils ont vu que les lois précédemment décrétées satisfaisaient en très grande partie aux intentions de l’Assemblée et au but qu’elle se propose d’atteindre. Vous avez, en effet, décrété en mai dernier qu’aucun administrateur, aucun fonctionnaire public ne pourrait recevoir son traite ent qu’en j ustifiant d’avoir acquitté ses contri b ions échues; dans cette disposition sont comprises toutes les personnes salariées ou pensionnées parla nation. Nous avons donc pensé que toute précaution ultérieure et plus étendue à cet égard était inutile en ce moment. Il ne nous reste donc plus qu’ànous occuper de ce qui concerne les assemblées électorales; et sous ce rapport notre avis est qu’il faut encore attendre. Les assemblées primaires sont en effet actuellement convoquées et il nous parait inutile de faire un décret de circonstance pour ces assem-blées-là.Ily aurait encore d’autres inconvénients à rendre la loi dans ce moment: il serait possible que cette loi, n’arrivant que deux jours avant le rassemblement des assemblées électorales, soit la cause, dans ces assemblées mêmes, de dissensions et de perte de temps. Je vous avoue, Messieurs, qu’outre le retard, outre les difficultés que cela entraînerait, c’est contre leur opinion que les comités vous proposent le projet de décret qui, dans la séance dernière et dans la précédente, a été si instamment réclamé. Voici ce projet de décret : « L’Assemblée nationale décrète ce qui suit: « Art. 1er. Aucun citoyen ne pourra être admis à l’exercice des fonctions publiques dans les assemblées primaires et électorales, administratives et municipales, s’il ne justifie avoir payé ses contributions. « Art. 2. Au moment où se formeront les assemblées primaires et électorales, après l’élection des présidents et des secrétaires, et avant toute autre opération, chaque membre de l’assemblée représentera les quittances de toutes les contributions de 1790 et 1791, auxquelles il a été cotisé dans la communauté de son domicile, et dont le terme est échu un mois avant le jour de l’ouverture de l’assemblée. « Art. 3. A l’ouverture des assemblées de conseil de département et de district, les membres de ces assemblées seront tenus de justifier de même du payement de leurs contributions. « Art. 4. Les membres des assemblées du conseil général des communes seront aussi tenus de justifier, dans la même forme, du payement de leurs contributions à l’ouverture de la première assemblée, qui sera tenue après le premier mars de chaque année. « Art. 5. Ceux qui n’auront pas satisfait aux conditions prescrites par les articles précédents ne seront pas admis aux séances, et il en sera fait mention au procès-verbal. » (La discussion est ouverte sur ce projet de décret.) M. Chrîstin. Vous pouvez penser que ce décret ne parviendra pas dan s les districts, dans les municipalités, avant 6 semaines ; or, avant ce temps-là, les électeurs seront assemblés. Il faudra donc qu’ils attendent à distance de 20 Heues, de 30 lieues, les certificats de leurs impositions, ce qui occasionnera trop de retard ; ce projet de décret ne paraît pas supportable. Je demande la question préalable. M. Craultier-Biauzat. Il faut renvoyer le projet à la prochaine législature. M. Bouche insiste pour l’adoption du projet. (L’Assemblée, consultée, décrète qu’elle passe à l’ordre du jour.) M. le Président annonce qu’il a reçu les ho m mages suivants : 1° De M. Julienne de Belair, un ouvrage intitulé : « Un militaire, ami de la liberté, aux Français ;J» 2° De M. Mauray, un mémoire sur la nécessité d’établir un bureau général servant de dépôt et de lieu de délivrance de tous les actes, archives et autres papiers de toutes les églises de Paris, etc.; 3° De M. Jacob l’aîné, imprimeur à Orléans, les premières feuilles d’un ouvrage intitulé : « Opérations du tribunal de la haute-cour nationale provisoire établie à Orléans ». (L’Assemblée ordonne qu’il sera fait mention de ces hommages dans le procès-verbal.) M. Prugnon, au nom du comité d’emplacement, fait un rapport et présente un projet de décret tendant à donner au directoire du département de l'Oise , à Beauvais , V autorisation de prendre à loyer , pour ses séances, le premier étage de la maison épiscopale de Beauvais , conformément au plan qui en a été dressé. M. d’André. Les ci-devant palais épiscopaux sont proportionnés au luxe des anciens évêques; aujourd’hui que les mœurs de nos évêques sont régulières, je ne crois pas qu’ils doivent occuper d’immenses palais. Il est juste que la nation tire parti des emplacements que les évêques n’occupent pas. Leur en laisser la disposition, leur permettre de les louer à leur profit, ce serait établir entre les évêques une inégalité de traitement. Je demande donc le renvoi du projet de décret au comité. M. Graultier-Btauzat appuie la demande de renvoi. (L’Assemblée, consultée, ordonne le renvoi du projet de décret au comité.) M. Prugnon, au nom du comité d'emplacement , présente ensuite un projet de décret tendant à autoriser le directoire du département de l'Ailier à faire V acquisition d'une maison dans la ville de Moulins, pour le logement de l'évêque du département. Ce projet de décret est ainsi conçu : «L’Assemblée nationale, ouï le rapport de son comité d’emplacement, considérant qu’il n’existe dans la ville de Moulins aucun édifice national propre à servir de logement à l’évêque, et que le décret du 18 mai dernier, qui avait autorisé le directoire du département de l'Ailier à faire l’acquisition de la maison des héritiers Cbermont, n’a pu avoir son exécution, l'autorise à acquérir du sieur Faucompré sa maison, moyennant la somme de 46,000 livres, prix convenu entre les parties, pour y loger son évêque. Autorise pareillement le directoire dudéparte-ment à faire faire à ladite maison tous les ouvrages et arrangements intérieurs nécessaires, à l’adjudication, au rabais desquels il sera procédé sur le devis estimatif qui en aura été préalablement dressé; pour le montant de l’adjudication, ainsi que la somme de 46,000 livres, prix de l’ac-