299 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [18 juin 1791.] de son opinion ou de l’exercice du pouvoir qui lui est confié, sera puni de la peine de la dégradation civique. Art. 9. « Tout juré, après le serment prêté, tout juge criminel, tout oifioier de police en matière criminelle, qui sera convaincu d’avoir, moyennant argent, présent, promesse, trati \ué de son opinion, sera puni de la peine de 20 années de gêne. Art. 10. « Les coupables mentionnés aux deux articles précédents seront en outre condamnés à une amende égale à la valeur de la somme ou de l’objet qu’ils auront reçu. » (Ces différents articles sont successivement mis aux voix et adoptés.) M. Le Pellelier-Saint-Fargeau, rapporteur, donne lecture de l’article suivant : Art. 11 (Art. 9 du projet). « Tout fonctionnaire public, qui sera convaincu d’avoir détourné les deniers publics dont il était comptable, sera puni de la peine de 15 années de chaîne. » Un membre demande le renvoi de cet article au co'oiié. (L’Assemblée, consultée, décrète qu’il n’y a pas lieu à délibérer sur ce renvoi et adopte l’article 1 1 .) M. Le I*elletier-l§aïnt-Fargeau, rapporteur, donne lecture des articles suivants : Art. 12 (Art. 10 du projet). « Tout fonctionnaire ou officier public qui sera convaincu d’avoir détourné ou soustrait des deniers, effets, actes, pièces ou titres dont il était dépositaire, àiaison des fonctions publiques qu’il exerce, et par l’effet d’une confiance nécessaire, sera puni de la peine de 12 années de gêne. Art. 13 (Art. 11 du projet). < Tout geôlier ou gardien qui aura volontairement fait évader ou favorisé l’évasion de personnes légalement détenues, et dont la garde lui était coniiée, sera puni de la peine de 12 années de gêne. (Ces deux articles sont successivement mis aux voix et adaptés.) M. Le I*elletier-Saint-Fargean, rapporteur, donne lecture de l’article 12 üu projet, ainsi conçu : «. Tout lonctionnaire ou officier public, tout prépose à la perception de droits et c mtributions publiquts qui sera convaincu du crime de concussion, sera puni de la peine de 6 années de prison. » M. Thévenot de Sfarofse. Je demande que la peine soit portée à 6 années de gène. M. Bouche. Et moi, que l’on ajoute : « sans préjudice des sommes illégalement perçues ». M. Le Pelletier-Saint-Fargeau , rapporteur. J’adopte, et je propose de rédiger l’article comme suit : Art. 14 (Art. 12 du projet). « Tout fonctionnaire ou officier public, toute personne commise à la perception de droits et contributions publiques, qui sera convaincu d’avoir commis par lui, ou par ses prépo-éq le crime de concussion, sera puni de la peine de 6 années de gêne, sans préjudice de la restitution des sommes perçues illégitimement. » (Cet article est mis aux voix et adopté.) M. Le Pelletier-Saint-Fargean, rapporteur, donne lecture de l’article suivant: Art. 15 (Art. 13 du projet). « Tout fonctionnaire ou officier public, qui sera convaincu de s’être rendu coupable du crime de faux dans l’exercice de ses fondions, sera puni de la peine de la chaîne pendant 20 ans. » (Cet ariicle est adopté.) Un membre propose, comme article additionnel, la disposition suivante : * L< s autres crimes dont les geôliers, fonctionnaires publics peuvent se rendre coupables, doivent êire déierminés ainsi que la peine. » (L’Assemblée, consultée, décrète le renvoi de cette disposition additionnelle a x comités.) M. le Président lève la séance à trois heures. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. DAÜCHY. Séance du samedi 18 juin 1791, au matin (1). La séance est ouverte à neuf heures du matin. Un de MM. les secrétaires fait lecture du procès-verbal de la séance de jeudi matin. Une discussion s’engage sur la rédaction de l'article 10 du décret rendu dans cetie séance et relatif à la distribution de secours entre divers départements (2) . M, Ramel-Nogaret. Messieurs, l’article 10 du décret que vous avez rendu hier, relativement à la distribution de secours en re d vers départements, laisse subsister un doute que je prierai l’Assemblée de résoudre. Voici cet article : « L’Assemblée nationale se réserve de prononcer sur la distribution ultérieure des 5,760,000 livres restantes, ou par acompte ou définitivement, selon la nature et les circonstances des travaux et des besoins qui lui seront présentés par les divers départements. » Par cette disposition, l’Assemblée entend-elle que la somme restante soit réservée aux départements seuls qui n’ont eu aucune part à la distribution prononcée par le décret, ou qu’elle soit répartie entre tous les départements sans exception? M. Mauriet de Flory. Je demande à l’Assemblée la permission de lui rappeler les termes dans lesquels j’ai moi-même proposé l’article. Mon intention, en le proposant, était d’ass rer aux départements non compris dans les dispositif Cette séance est incomplète au Moniteur. (2) Yoy. ci-dessus, seance du 16 juin 1791, page 273. 300 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [18 juin 1791. [ tions du décret, qu’ils seraient admis à demander sur les fonds restants les sommes qui leur seront nécessaires, à mesure qu’ils fourniraient les élats de leurs besoins et les devis des travaux qu’ils doivent entreprendre. M. lanjulnaïs. J’appuie l’opinion du préopinant. Tous les départements ont les mêmes droits, et ceux qui ne sont pas compris dans le décret S'j plaignent vnement et croient que, pour avoir part aux secoms, il faut avoir des appuis dans le comité central ou dans quelque autre comité. Je demande donc que les mots : « Par les divers départements » soient remplacés par ceux-ci : <' Par les autres départements >•, de façon que les départements compris dans la première distribution ne puissent plus être admis à la répartition des sommes restantes. M. de lia Rochefoucaud-lianconrd, rapporteur. Je m’oppose à l'insertion du mot autres demandé par le préopinant, parce qu’il y a des départements qui ont plus souffert tes uns que les autres et qui doivent être préférés. Je demande donc qu’on maintienne le décret et qu’on exclue différents départements, comme ceux du nord, pur exemple, qui contiennent une grande quantité d’abbayes et de monastères riches qui occupent un grand nombre de bras. M. Régnier. J’appuie l’amendement de M. Lan-juinais, et je demande que les fonds soient également distribués entre les autres départements, en proportion de leurs besoins et de leuis travaux. Il n’y a pas de département dans le royaume qui n’ait de travaux à faire : répartisez également, c’est le vrai moyen de cimenter l’union que vous voulez établir enire tous les départements de l’Empire français. (Applaudissements.) M. d’Fstourmel. Les départements qui ne se trouvent pas compris dans la répartition du décret n’avaie A vraisemblab'ement pas envoyé au ministre de l’intérieur les plans et devis ae leurs divers ouvrages. Le département du Nord, par exemple, n’est compris que pour 100,000 livres, alors qu’il lui reste encore un travail pour le rétablissement provisoire de la navigation de la Sambre dont la dépense s’élève à 24,000 livres, et dont les plans et devis n’ont été adressés que depuis 8 jours. Lu département du Pas-de-Calais, d’un autre côté, n’est pas compris dans la distribution, parce qu’il n’a envoyé les plans et devis de ses travaux que depuis très peu de temps. Je demande donc que si, comme le demande M. Larijuinais, la préférence est accordée aux départements qui n’ont encore rien reçu, on n’exclue pas toutefois les départements dé, à compris dans la distribution, et qui auraient envoyé ies plans et devis de nouveaux travaux. M. de Folleville. Ce n’est point en décharge de taxe qu’on accorde ces secours; c’est comre l’esprit de 1 Assemb'ée. Je demande qu’on mette aux vuix l'amendement de M. d’Estourmel. M. Maurîet de Flory. Il me semble qu’a-près les explications uue j’ai fournies tout à l’heure, il ne peut plus y avoir de difficultés, puisque l'article, tel que jè l’ai proposé, comprenait formellement le mot autres , et qu’il a été décrété sans modification. Ce ne peut donc être qu’une omisàou dans la rédaction. M. Martineau. Je demande l’ordre du jour, et en voici la raison : c’est que les observations que l’on vient de faire l’ont été hier, et cependant le décret est passé tel qu’il est. Dans la distribution qui a été faite, vous n’avez pas eu égard aux besoins particuliers des départements ; vous n’avez consulté que les travaux présents. Je demande donc, Messieurs, que le décret reste lel qu’il est, et que l’on passe à l’ordre du jour sur tous les amendements. J’entends crier contre Paris ; je vous prie de considérer qu’il obtient un quinzième des secours, et il a payé, j’ose le dire, un quinzième des impositions générales. M. lanjuinais. Ohl oh ! M. Martineau. Oui, Monsieur. M. d’AHIy. Je vais vous faire observer que vous avez commencé par accorder 30,000 livres à chaque département ; ensuite, d’après les besoins très connue vous avez cru devoir accorder une masse de 15 millions. Ces 15 millions ont été distribués à raison de 80,000 francs par chaque département. Ensuite, par le dernier décret, vous avez réservé le surplus, non pas pour chaque département, mais pour les travaux qui seraient jugés de la plus grande utilité par l’Assemblée nationale, sur la proposition qui lui en serait faite par le ministre de l’intérieur. Je ne veux point examiner pourquoi on a accordé un million à la ville de Paris. On vous dit que la porte Saint-Bernard, la geôle de Paris ne présentent pas d’objet d’utilité générale, et moi je prends la liberté de vous dire que, dans vos 4 eomilés, après avoir bien pesé les faPs et les circonstances, nous avons jugé que c’était la plus grande utilité générale : je ne vous en dis pas d’avantage. (L’Assemblée, consultée, décrète qu’elle ne passe pas à l’ordre du jour.) M. Gaultier-Riauzat. Je demande qu’on laisse cet article tel qu’il est. M. Prieur. On ne peut pas faire des amendements à des décrets qui ont été solennellement discutés dans l’Assemblée. On peut seulement examiner la rédaction. Je demande la question préalable sur toutes les propositions. M. Tuaut delà Rouverte. C’est une dispute grammaticale qui résulte des mots : divers départements , qui sont amphibologiques. Le décret a été mal conçu. Il est question de l’interpréter, et non pas d’une nouvelle discussion. (L’Assemblée, cousultée, décrète qu’il y a lieu de délibérer.) M. d’André. Voici ce qui prouve combien le décret qu’on veut enlever serait injust ■. Les dé-uariements ont élé repartis très inégalement. Il y en a qui ont eu 50,000 livres, d’autres 150,000, et Paris un million. Tel département, qui n’a eu que 50,000 ivres, peut av ir droit à une distribution plus égale; ainsi l’Assemblée ne voudrait pas, par un décret qui déciderait aujourd’hui que les 6 millions restants ne porteront plus que sur les dépariemenis qui n’ont rien en, priver tel département, qui n’a eu que 50,000 livres, d’obtenir un nouveau secours, et il le mérite. (Murmures.) il faut donc conserver votre décret et laisser [Assena lée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [18 jninlTsH.] à l’Assemblée la liberté la plus absolue pour statuer sur les mémoires qui lui seront présentés; donner tout aux autres s’ils sont dans le cas de le mériier, ou quelque cho.-e encore à ceux qui n’ont eu que 50,000 livres, s’ils le méritent. M. Lanjuinais. En tenant compte des observations q i viennent ü’èlre présentées par M. d’André, voici l’amendement que je propose ; il consiste à placer à la fin de i’ariicle l’addition suivante : « En préférant, à égalité de besoins également urgents, les département' qui n’ont point de part dans la distribution faite dans le présent décret, en se conformant aux dispositions des articles 5, 6 et 7 de la loi du 19 décembre 1790. » M. d’André. J’y consens. (L’Assemblée, consultée, adopte l’addition proposée par M. Lanjuinais.) En conséquent e, l’article 10 du décret se trouve rédigé comme suit : « L’ Assemblée nationaleseréserve de prononcer sur la distribution ultérieure des 5,760,000 livres restantes, ou paracompie eu définitivement, selon la nature et les circonstanct s d s travaux et des besoins qui lui seront présentés par les divers départements. En préférant, à égalité de bes dns également urgents, les departements qui n’ont point de part dans la distribution faite par le présent décret, en se conformant aux dispositions des articles 5, 6 et 7 de la loi du 19 décembre 1790. » M. Lanjuinais. Il y a quinze jours que j’ai fait la motion que le Tré-or public ces-ât de fournir continuel len.ent d�s secours à la ville de Paris. Je renouvelle aujourd'hui mu motion et je demande qu’il soit décrété qu’à compter du 1er juillet prochain, la tiésorerie nationale cessera d’acquitter les dépenses de la ville de Paris, à l’exception de celles qui concernent la garde nationale soldée, sauf l’exécution du décret du 16 du présent mois, sur les ateliers de charité. Cette motion est essentielle, parce que vous voyez que depuis deux mois on vous demande 1 million puur les ateliers de charité et que, pour les hôpitaux, on va vous demander 3 millions-Il faut enfin rendre un décret qui oblige la ville de Paris à supporter ses propres dépenses : ma motion < st le seul moyen efficace d’amener le décret tant désiré dont le retardement fait murmurer tous les départements voisins. M. Camus. Je demande que i’on ne décrète rien aujourd’hui, que l’on prenne le temps d’examiner la question et que M. Lanjuinais soit chargé de se concerter avec le comité des finances et le département de Paris sur cet objet. M. lïegnaud (de Saint-Jean-d’ Angély). Lorsque vous avez privé la ville de Paris de ses entrées, au remplacement desquelles vous n’avez pas encore pourvu, vous avez ordonné qu’il serait fait des avances sur le bénéfice qu’elle doit faire dans la vente des biens nationaux. Adopt r la motion de M. Lanjuinais et par conséquent faire cesser le payement de ces avances, c’e-t décréter la banqueroute de la ville de Paris. 11 est bien temps que les amis de la liberté cessent de s’unir aux ennemis du bien public pour déclamer constamment contre cette ville qui mérite tant d’égards par la grande part qu’elle a prise à la Révolution, par les pertes qu’elle a subies 301 avec tant de patriotisme et de courage et qui a été et sera toujours le premier auteur de notre liberté. M. Lanjuinais. Il est temps de décharger le Trésor public des dépenses de la ville de Paris dont il est chargé depuis longtemps. M. Camus. Non, Monsieur, c’est faux ; donnez-en la preuve. M. Lanjuinais. La voici. Vous vous souvenez, Messieurs, que M. de La Rochefoucauld vous exposa, il y a six mois, à la tribune que les dépenses de la ville de Paris avaient été toujours laites par le Trésor public, parce que les entrées de Paris y ont toujours été versées ; mais les entrées de Paris ont cessé au mois de mai, et depuis le mois de mai, le Trésor royal fait encore la dépense de la ville de Paris. Il faut que cela cesse, car enfin comment font les autres villes du royaume, depuis la suppression des entrées, pour Subvenir à leurs besoins, ebes procèdent par emprunt, par cotisation, par contribution, on s’y prennent de tout antre manière, mais tou-juiirsppleur charge; faut-il ajouter que plusieurs ont été forcées de suspendre leur payement. Pourquoi favoriserait-on la ville de Paris? Il faut qu’elle fasse comme les autres villes; sans cela vous verrez successivement toutes les muni i-paliiés du royaume venir vous demander des secours et elles auraient les mêmes droits. Je renouvelle donc ma motion et je demande q�e le Tré-or public soit fermé pour toutes les dépenses de la ville de Paris. J’en excepte toutefois la garde nationale soldée, en attendant que vous l’ayez fait rentrer dans la troupe de ligne, et les dispositions du décret du 16 juin courant sur les ateliers de charité. M. Camus. J’insiste sur l’ajournement et sur le renvoi au comité des finances. M. de Foileville. 11 est extrêmement douloureux, lorsque quelqu’un de vos membres vous fait une proposition aussi raisonnable que celle de M. Lanjuinais de ne pas voir l’unanimité dans l’Assemblée. J’observe, Messieurs, que sous le tilre d avance on pér i tous les revenus publics et on empêche les revenus publics de se lever dans la ville de Paris. C’est cette condescendance que l’Assembbe a constamment montrée, qui fait de la ville de Paris un enfan gâté, qui, accoutumé aux largesses de son père, ne se livre point du tout à son industrie. Ce n’est que par ce moyen, que propose M. Lanjuinais, que vous obtiendrez des municipaux de Paris de s'occuper efficacement de la levée et de la rentrée des impositions. Je demande que très incessamment la motion de M. Lanjuinais soit adoptée, et qu’en même temps on renvoie incessamment au comité militaire pour ce qui concerne la garde nationale de Paris, afin de l’incorporer da*us la troupe de ligne. M. d’André. M. de Foileville est complètement d’arcont avec M. Camus sans s’en aperce voir. M. Camus a demandé l’ajournement, M. de Fol-le vil le demande l’ajournement, moi je demande aussi l’ajournement. Je vous prie. Monsieur le Président, de mettre cette demande d’ajournement aux voix. M. Lanjuinais. Pour quelle époque ?