192 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE récolte, peut-être un mois, au moins quinze jours plus tôt que les années ordinaires. Ainsi la providence que les conspirateurs méconnaissent favorise ouvertement la cause des républicains. » Calignon. b [La Sté popul. de Gyé-sur-Seine, à la Conv.; s.d .] « Citoyens législateurs, La destinée d’un grand peuple est entre vos mains; c’est un dépôt sacré confié à vos soins et qui tient à votre responsabilité. Des monstres, sous le masque d’un patriotisme perfide, ont tenté d’y porter atteinte; ils avaient ourdi la trame la plus atroce et contre la représentation nationale, et contre les droits de l’homme; mais ce masque n’a pu longtemps soutenir le choc de votre active surveillance, il est tombé; vous avez alors mis au grand jour, leurs horribles complots, et bientôt après, ils ont payé de leurs têtes la peine due à leurs forfaits. Citoyens représentants, continuez à surveiller tous les ennemis de la patrie, que les traîtres tremblent et palissent, ou plutôt qu’ils périssent; nous sommes là pour vous défendre, prêts à répandre jusqu’à la dernière goutte de notre sang; achevez donc le grand ouvrage du bonheur que vous nous préparez; détruisez, anéantissez tous ces insectes venimeux qui ne cherchent qu’à corrompre et à empoisonner l’air pur que nous commençons à respirer, et ne quittez votre poste qu’après avoir forcé les tyrans coalisés et leurs esclaves à reconnaître la souveraneité du peuple français, et à lui demander la paix : vous aurez toujours mérité de la patrie, oui, nous serons libres et heureux ! et nous ne cesserons de vous adresser l’hommage de notre reconnaissance. » Delouche, Douge, Cavot. 38 Le citoyen Closquinet (1) fait hommage à la Convention nationale d’un exemplaire d’un discours de morale républicaine, qu’il a prononcé dans l’assemblée générale de la section régénérée de Beaurepaire, à la suite de l’inauguration des bustes de Marat et Lepeletier. Mention honorable, insertion au bulletin et renvoi au comité d’instruction publique (2). [Paris, s.d.] (3). Législateurs, Je viens faire hommage à la Convention nationale d’un discours de morale républicaine dont les principes, puisés dans la justice et la Raison, sont ceux que vous avez mis à l’ordre du jour et qui doivent opérer la régénération des mœurs, sans lesquels il ne peut exister ni (1) Et non pas Losquinet. (2) P.-V., XXXVI, 76. J. Fr., n° 577. (3) F17A 1010A, pl. 4, p. 3015; mention dans J. Sablier, n° 1276. gouvernement ni bonheur. Mes pères sont morts, au service de la patrie et les armes à la main un frère qui me reste, un autre étant mort aussi au service officier d’artillerie, ce frère qui me reste combat aujourd’huy la rage des tirans coalisés du nord. Ce soldat, son civisme, ses talents et les vœux de ses frères d’armes l’ont élevé au commandement d’un corps de républicains françois, c’est dire de héros; il est au premier rang pour lancer ou recevoir la foudre; un sans-culotte ne la craint point. Pour moi privé par des infirmités de défendre mon pays à la pointe de l’épée je tâche de me rendre utile par des conseils; je combats les traîtres de l’intérieur, je ralie les bons citoyens autour de l’arbre de la liberté, de la Représentation nationale, de cette sainte Montagne, la terreur des conspirateurs et le salut du peuple. Je combats avec les armes de la raison, l’esprit ambitieux, la morgue contrerévolutionnaire qui conduira à l’échafaud le dernier intrigant. Heureux ! si je pouvais ramener les hommes égarés au but où les conduit l’impulsion révo-lutionaire au point qui fera leur bonheur ou ne voyant leur intérêt que dans celui de la patrie ils n’y trouveront que des frères et des amis. Closquinet. Citoyens Législateurs, j’espère de la justice de la Convention nationale d’être renvoyé par-devant l’une des commissions qui remplace le ministère par préférence à celle de la guerre où mes talents militaires peuvent être le plus utile à la République. J’ai besoin d’ailleurs d’une place pour me procurer l’existence et je me flatte de la mériter tant par mes talents que par mon civisme. DISCOURS Prononcé dans V Assemblée générale de la Section régénérée de Beaurepaire, à la suite de l’inauguration des bustes des Martyrs de la Liberté, MARAT et LE PELETIER; Par le citoyen A.C.N. CLOSQUINET, Membre de la Commission de Bienfaisance, Auteur de plusieurs Ouvrages patriotiques. Citoyens, La pompe dont nous honorons l’inauguration des bustes des Martyrs de la Liberté, est un devoir sacré que commande la reconnoissance; il tient à la juste sensibilité, il est l’expression du cœur où règne la vertu; et c’est une jouissance puisée dans la Nature, que de rappeler souvent à sa mémoire le souvenir de ses amis. Ce n’est point à cet argile muet, qui ne reçoit de forme que de la main de l’Art, que le profond témoignage de nos regrets, et les élans de notre amour reconnoissant s’adresse; non, la cendre des morts n’est pas susceptible d’une nouvelle vie; c’est dans notre cœur que leur mémoire repose; c’est-là qu’identifiés avec nous-mêmes, nos amis vivent toujours, quoiqu’ils aient abandonné à la terre leur dépouille mortelle; c’est-là qu’une douce illusion qui les rend présens à la tendresse d’une sainte amitié, rappelant sans cesse la pensée sur ces objets chéris, les montre toujours aimables, et fait jouir du bonheur de les posséder lorsqu’ils ne sont plus. 192 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE récolte, peut-être un mois, au moins quinze jours plus tôt que les années ordinaires. Ainsi la providence que les conspirateurs méconnaissent favorise ouvertement la cause des républicains. » Calignon. b [La Sté popul. de Gyé-sur-Seine, à la Conv.; s.d .] « Citoyens législateurs, La destinée d’un grand peuple est entre vos mains; c’est un dépôt sacré confié à vos soins et qui tient à votre responsabilité. Des monstres, sous le masque d’un patriotisme perfide, ont tenté d’y porter atteinte; ils avaient ourdi la trame la plus atroce et contre la représentation nationale, et contre les droits de l’homme; mais ce masque n’a pu longtemps soutenir le choc de votre active surveillance, il est tombé; vous avez alors mis au grand jour, leurs horribles complots, et bientôt après, ils ont payé de leurs têtes la peine due à leurs forfaits. Citoyens représentants, continuez à surveiller tous les ennemis de la patrie, que les traîtres tremblent et palissent, ou plutôt qu’ils périssent; nous sommes là pour vous défendre, prêts à répandre jusqu’à la dernière goutte de notre sang; achevez donc le grand ouvrage du bonheur que vous nous préparez; détruisez, anéantissez tous ces insectes venimeux qui ne cherchent qu’à corrompre et à empoisonner l’air pur que nous commençons à respirer, et ne quittez votre poste qu’après avoir forcé les tyrans coalisés et leurs esclaves à reconnaître la souveraneité du peuple français, et à lui demander la paix : vous aurez toujours mérité de la patrie, oui, nous serons libres et heureux ! et nous ne cesserons de vous adresser l’hommage de notre reconnaissance. » Delouche, Douge, Cavot. 38 Le citoyen Closquinet (1) fait hommage à la Convention nationale d’un exemplaire d’un discours de morale républicaine, qu’il a prononcé dans l’assemblée générale de la section régénérée de Beaurepaire, à la suite de l’inauguration des bustes de Marat et Lepeletier. Mention honorable, insertion au bulletin et renvoi au comité d’instruction publique (2). [Paris, s.d.] (3). Législateurs, Je viens faire hommage à la Convention nationale d’un discours de morale républicaine dont les principes, puisés dans la justice et la Raison, sont ceux que vous avez mis à l’ordre du jour et qui doivent opérer la régénération des mœurs, sans lesquels il ne peut exister ni (1) Et non pas Losquinet. (2) P.-V., XXXVI, 76. J. Fr., n° 577. (3) F17A 1010A, pl. 4, p. 3015; mention dans J. Sablier, n° 1276. gouvernement ni bonheur. Mes pères sont morts, au service de la patrie et les armes à la main un frère qui me reste, un autre étant mort aussi au service officier d’artillerie, ce frère qui me reste combat aujourd’huy la rage des tirans coalisés du nord. Ce soldat, son civisme, ses talents et les vœux de ses frères d’armes l’ont élevé au commandement d’un corps de républicains françois, c’est dire de héros; il est au premier rang pour lancer ou recevoir la foudre; un sans-culotte ne la craint point. Pour moi privé par des infirmités de défendre mon pays à la pointe de l’épée je tâche de me rendre utile par des conseils; je combats les traîtres de l’intérieur, je ralie les bons citoyens autour de l’arbre de la liberté, de la Représentation nationale, de cette sainte Montagne, la terreur des conspirateurs et le salut du peuple. Je combats avec les armes de la raison, l’esprit ambitieux, la morgue contrerévolutionnaire qui conduira à l’échafaud le dernier intrigant. Heureux ! si je pouvais ramener les hommes égarés au but où les conduit l’impulsion révo-lutionaire au point qui fera leur bonheur ou ne voyant leur intérêt que dans celui de la patrie ils n’y trouveront que des frères et des amis. Closquinet. Citoyens Législateurs, j’espère de la justice de la Convention nationale d’être renvoyé par-devant l’une des commissions qui remplace le ministère par préférence à celle de la guerre où mes talents militaires peuvent être le plus utile à la République. J’ai besoin d’ailleurs d’une place pour me procurer l’existence et je me flatte de la mériter tant par mes talents que par mon civisme. DISCOURS Prononcé dans V Assemblée générale de la Section régénérée de Beaurepaire, à la suite de l’inauguration des bustes des Martyrs de la Liberté, MARAT et LE PELETIER; Par le citoyen A.C.N. CLOSQUINET, Membre de la Commission de Bienfaisance, Auteur de plusieurs Ouvrages patriotiques. Citoyens, La pompe dont nous honorons l’inauguration des bustes des Martyrs de la Liberté, est un devoir sacré que commande la reconnoissance; il tient à la juste sensibilité, il est l’expression du cœur où règne la vertu; et c’est une jouissance puisée dans la Nature, que de rappeler souvent à sa mémoire le souvenir de ses amis. Ce n’est point à cet argile muet, qui ne reçoit de forme que de la main de l’Art, que le profond témoignage de nos regrets, et les élans de notre amour reconnoissant s’adresse; non, la cendre des morts n’est pas susceptible d’une nouvelle vie; c’est dans notre cœur que leur mémoire repose; c’est-là qu’identifiés avec nous-mêmes, nos amis vivent toujours, quoiqu’ils aient abandonné à la terre leur dépouille mortelle; c’est-là qu’une douce illusion qui les rend présens à la tendresse d’une sainte amitié, rappelant sans cesse la pensée sur ces objets chéris, les montre toujours aimables, et fait jouir du bonheur de les posséder lorsqu’ils ne sont plus. SÉANCE DU 4 FLORÉAL AN II (23 AVRIL 1794) - N° 38 193 S’il est vrai que l’union des sentimens enchaîne les esprits, que la sympathie des goûts et des habitudes, que l’ami enfin vive dans son ami, nos héros sont ici, ils se réjouissent avec nous, ils applaudissent aux succès de la Raison; oui, mon cœur me le dit, ils m’entendent, ils vous entendent; et quand nous jouissons du spectacle touchant de leur apothéose, eux aussi ils jouissent, car la Patrie triomphe. Il est juste de consacrer un jour à honorer la mémoire de ceux qui ont donné tous leurs momens à la Patrie, qui veillant pour tous, et les couvrant de leur bouclier impénétrable, ont eu l’héroïsme de livrer sans défense leur poitrine au fer sacrilège des assassins, de faire de leurs corps un rempart à l’auguste Liberté, de cimenter de leur sang son union indestructible avec le Peuple, et d’expirer contens au poste de l’honneur. Qu’elles sont intéressantes ces fêtes civiques, où la douce Egalité rapproche les Citoyens de l’état naturel, si propre au bonheur ! Là, les pères, les mères, les époux, les enfans, les vieillards, les amis, confondus en une seule famille, s’animent du même esprit, et l’intérêt de la Patrie les enflamme par une seule étincelle. Ces couronnes, ces guirlandes, ces fleurs, ces trophées déposés respectueusement sur la tombe des Martyrs de la Patrie, par les mains innocentes de jeunes citoyennes, destinées à donner à la France une population régénérée, dont les vertus, la beauté et les charmes sont le prix que la paix prépare aux vainqueurs des tyrans; cet hommage si pur, symbole de la vertu, dont la première, pour ce sexe aimable, est la sensibilité, est le plus agréable aux mânes des héros qui ont acheté au prix de leur vie la régénération de l’ordre social. Tout en ce jour inspire le sentiment du plaisir; ces hymnes, ces chants, les acclamations du Peuple, tout annonce le triomphe de la Raison, et qu’en célébrant la gloire des Martyrs de la Liberté, nous nous pénétrons des vertus républicaines, dont il nous ont imposé la loi de suivre l’impulsion. Les Martyrs de la Liberté sont ceux qui, n’écoutant que la raison, la justice et leurs consciences, bravant les périls et la mort pour le salut de la Patrie, intrépides dans les combats, et toujours victorieux, les armes à la main, ne reçoivent le trépas que du lâche assassin. Tels étoient Marat et Le Peletier, qui fixent dans ce moment les regards attendris de la Patrie reconnoissante. Le Peletier, d’un caractère doux, d’une amabilité qui le rendoit d’un commerce charmant, savoit attacher à la cause du Peuple, qui est celle de la Raison; par les agrémens d’une éloquente dialectique, il combattoit avec méthode l’hydre du despotisme; il enivroit le serpent pour l’approcher de près, et le mieux écraser; il perdoit le méchant, par l’ascendant que donne sur lui l’art de cacher à propos une résistance souvent indiscrette. Marat, au contraire, plus confiant dans son énergie que dans les ressources du talent, n’écoutant que le cri de l’humanité souffrante qui déchire son cœur, il attaque corps à corps la tyrannie, et la frappant sans relâche, il voue son existence à hâter le moment du bonheur. Tel est donc l’empire de la vérité, de la justice et de la raison, que la différence même des caractères les plus opposés, ne soit point un obstacle pour ceux qui les révèrent, et qui tendent au même but. Quels motifs de confiance dans le succès d’une révolution qui a ces vertus pour principes et pour guide ! Que cette considération est encourageante pour une âme républicaine, et qu’elle verse de consolation dans le cœur du foible, de celui dont les yeux sont presque insensibles à l’éclat de la lumière ! Le Peletier, né dans la caste rebelle de la Noblesse, n’en avoit ni les vices ni la mauvaise éducation; un naturel humain et docile avoit permis à la philosophie de mettre assez de justesse dans ses idées, pour établir dans son moral l’équilibre nécessaire entre la sensibilité du cœur et la pénétration de l’esprit, qui constitue l’homme de bien; l’étude, la méditation et le travail lui avoient fourni les moyens de s’élever dans la carrière politique d’une manière à l’y faire distinguer. Il brilla au Barreau, il présida avec dignité au ci-devant Parlement, et dès sa plus tendre jeunesse, il pouvoit passer pour le père du pauvre, de la veuve et de l’orphelin. Appelé par le vœu de ses concitoyens à l’Assemblée nationale, il fut un mandataire fidèle; et de ce que fit cette Assemblée, le seul objet qui nous reste de remarquable, qui respire une sainte philosophie, c’est le Code pénal, et il est de Le Peletier. A la Convention il nous donna un plan d’éducation publique fort estimé; il défendit les intérêts du Peuple avec courage et intelligence; il vota la mort du Tyran avec fermeté; il fut assassiné, et content de mourir pour la cause du Peuple, que la Patrie soit heureuse, fut le vœu qu’exprima son dernier soupir. Marat étoit de ces hommes rares, dont la philosophie fait choix pour ramener à la justice et à la raison les hommes dégénérés. La Nature crée de ces sortes de génies, dans la décrépitude des siècles, pour rendre du ton à l’espèce humaine, et la rappeler à la vie. Doué d’un grand caractère, d’une âme forte, d’un jugement solide, d’une étonnante pénétration, et d’une activité incroyable, Marat se déclara l’Ami du Peuple; Marat fit tout pour le Peuple, Marat mourut pour le Peuple. Marat savoit que la tyrannie a pour soutien la corruption; voilà pourquoi, dès les premiers momens de la révolution, il s’attacha particulièrement à l’épuration des nouvelles Autorités constituées, et on peut dire qu’il ne les frappa jamais à faux; il atteignit les scélérats avec l’audace du courage, et les terrassa sans foi-blesse. Il savoit que dans une génération avilie, le règne de la justice et de la raison seroit plus difficile à établir que l’anéantissement même du despotisme à opérer, et que le nouvel ordre politique seroit long-temps infecté du poison de l’ancien; par la raison que les hommes pervers ne se régénèrent point. Il savoit que le masque de la vertu est l’arme perfide dont l’hypocrisie abuse pour poignarder la Patrie. Il savoit qu’une révolution ne pouvoit se faire sans un combat à mort entre le vice et la vertu, et que pour décider la victoire, il ne falloit cesser de frapper les traîtres. Il savoit que ce n’étoit pas en multipliant des amnisties qu’on dompteroit l’insolente aristocratie, ni par des mentions honorables qu’on éleveroit à la dignité républicaine les vils intri-15 SÉANCE DU 4 FLORÉAL AN II (23 AVRIL 1794) - N° 38 193 S’il est vrai que l’union des sentimens enchaîne les esprits, que la sympathie des goûts et des habitudes, que l’ami enfin vive dans son ami, nos héros sont ici, ils se réjouissent avec nous, ils applaudissent aux succès de la Raison; oui, mon cœur me le dit, ils m’entendent, ils vous entendent; et quand nous jouissons du spectacle touchant de leur apothéose, eux aussi ils jouissent, car la Patrie triomphe. Il est juste de consacrer un jour à honorer la mémoire de ceux qui ont donné tous leurs momens à la Patrie, qui veillant pour tous, et les couvrant de leur bouclier impénétrable, ont eu l’héroïsme de livrer sans défense leur poitrine au fer sacrilège des assassins, de faire de leurs corps un rempart à l’auguste Liberté, de cimenter de leur sang son union indestructible avec le Peuple, et d’expirer contens au poste de l’honneur. Qu’elles sont intéressantes ces fêtes civiques, où la douce Egalité rapproche les Citoyens de l’état naturel, si propre au bonheur ! Là, les pères, les mères, les époux, les enfans, les vieillards, les amis, confondus en une seule famille, s’animent du même esprit, et l’intérêt de la Patrie les enflamme par une seule étincelle. Ces couronnes, ces guirlandes, ces fleurs, ces trophées déposés respectueusement sur la tombe des Martyrs de la Patrie, par les mains innocentes de jeunes citoyennes, destinées à donner à la France une population régénérée, dont les vertus, la beauté et les charmes sont le prix que la paix prépare aux vainqueurs des tyrans; cet hommage si pur, symbole de la vertu, dont la première, pour ce sexe aimable, est la sensibilité, est le plus agréable aux mânes des héros qui ont acheté au prix de leur vie la régénération de l’ordre social. Tout en ce jour inspire le sentiment du plaisir; ces hymnes, ces chants, les acclamations du Peuple, tout annonce le triomphe de la Raison, et qu’en célébrant la gloire des Martyrs de la Liberté, nous nous pénétrons des vertus républicaines, dont il nous ont imposé la loi de suivre l’impulsion. Les Martyrs de la Liberté sont ceux qui, n’écoutant que la raison, la justice et leurs consciences, bravant les périls et la mort pour le salut de la Patrie, intrépides dans les combats, et toujours victorieux, les armes à la main, ne reçoivent le trépas que du lâche assassin. Tels étoient Marat et Le Peletier, qui fixent dans ce moment les regards attendris de la Patrie reconnoissante. Le Peletier, d’un caractère doux, d’une amabilité qui le rendoit d’un commerce charmant, savoit attacher à la cause du Peuple, qui est celle de la Raison; par les agrémens d’une éloquente dialectique, il combattoit avec méthode l’hydre du despotisme; il enivroit le serpent pour l’approcher de près, et le mieux écraser; il perdoit le méchant, par l’ascendant que donne sur lui l’art de cacher à propos une résistance souvent indiscrette. Marat, au contraire, plus confiant dans son énergie que dans les ressources du talent, n’écoutant que le cri de l’humanité souffrante qui déchire son cœur, il attaque corps à corps la tyrannie, et la frappant sans relâche, il voue son existence à hâter le moment du bonheur. Tel est donc l’empire de la vérité, de la justice et de la raison, que la différence même des caractères les plus opposés, ne soit point un obstacle pour ceux qui les révèrent, et qui tendent au même but. Quels motifs de confiance dans le succès d’une révolution qui a ces vertus pour principes et pour guide ! Que cette considération est encourageante pour une âme républicaine, et qu’elle verse de consolation dans le cœur du foible, de celui dont les yeux sont presque insensibles à l’éclat de la lumière ! Le Peletier, né dans la caste rebelle de la Noblesse, n’en avoit ni les vices ni la mauvaise éducation; un naturel humain et docile avoit permis à la philosophie de mettre assez de justesse dans ses idées, pour établir dans son moral l’équilibre nécessaire entre la sensibilité du cœur et la pénétration de l’esprit, qui constitue l’homme de bien; l’étude, la méditation et le travail lui avoient fourni les moyens de s’élever dans la carrière politique d’une manière à l’y faire distinguer. Il brilla au Barreau, il présida avec dignité au ci-devant Parlement, et dès sa plus tendre jeunesse, il pouvoit passer pour le père du pauvre, de la veuve et de l’orphelin. Appelé par le vœu de ses concitoyens à l’Assemblée nationale, il fut un mandataire fidèle; et de ce que fit cette Assemblée, le seul objet qui nous reste de remarquable, qui respire une sainte philosophie, c’est le Code pénal, et il est de Le Peletier. A la Convention il nous donna un plan d’éducation publique fort estimé; il défendit les intérêts du Peuple avec courage et intelligence; il vota la mort du Tyran avec fermeté; il fut assassiné, et content de mourir pour la cause du Peuple, que la Patrie soit heureuse, fut le vœu qu’exprima son dernier soupir. Marat étoit de ces hommes rares, dont la philosophie fait choix pour ramener à la justice et à la raison les hommes dégénérés. La Nature crée de ces sortes de génies, dans la décrépitude des siècles, pour rendre du ton à l’espèce humaine, et la rappeler à la vie. Doué d’un grand caractère, d’une âme forte, d’un jugement solide, d’une étonnante pénétration, et d’une activité incroyable, Marat se déclara l’Ami du Peuple; Marat fit tout pour le Peuple, Marat mourut pour le Peuple. Marat savoit que la tyrannie a pour soutien la corruption; voilà pourquoi, dès les premiers momens de la révolution, il s’attacha particulièrement à l’épuration des nouvelles Autorités constituées, et on peut dire qu’il ne les frappa jamais à faux; il atteignit les scélérats avec l’audace du courage, et les terrassa sans foi-blesse. Il savoit que dans une génération avilie, le règne de la justice et de la raison seroit plus difficile à établir que l’anéantissement même du despotisme à opérer, et que le nouvel ordre politique seroit long-temps infecté du poison de l’ancien; par la raison que les hommes pervers ne se régénèrent point. Il savoit que le masque de la vertu est l’arme perfide dont l’hypocrisie abuse pour poignarder la Patrie. Il savoit qu’une révolution ne pouvoit se faire sans un combat à mort entre le vice et la vertu, et que pour décider la victoire, il ne falloit cesser de frapper les traîtres. Il savoit que ce n’étoit pas en multipliant des amnisties qu’on dompteroit l’insolente aristocratie, ni par des mentions honorables qu’on éleveroit à la dignité républicaine les vils intri-15 194 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE gans qui n’ont arraché de la gorge du Peuple la sangsue royale, que pour s’attacher à tous ses artères, et pomper le reste de son sang. H vouloit ce qui est juste; il vouloit ce que nous voulons, ce qu’il faut, et ce qui sera, la juste sévérité des Loix, et que la première de toute, qui est le salut du Peuple, fût enfin mise à l’ordre du jour. C’est ainsi qu’il fut un buveur de sang, un anthropophage, un homme de boue, un monstre désorganisateur. Eh bien, ce monstre, ce monstre si féroce, qui avoit armé de poignards tant de bras pour égorger les hommes d’Etat, croira-t-on que pour le mettre à mort, on n’ait pas cuirassé les plus forts athlètes ? Ici le crime de ses ennemis, le crime de nos ennemis rend hommage, par une sorte de prodige, à son innocence. C’est par le sentiment de la sensibilité qu’on suggère au fanatisme le moyen de l’approcher; c’est une femme qui devient l’instrument de la vengeance. Armée du couteau fatal : Va, lui dit-on, écrit à Marat que tu est malheureuse, sa porte te sera ouverte; perce-lui le cœur. O comble d’horreur ! vous frémissez... Citoyens, ce crime fut nécessaire au salut de la France; ce trépas précipité laisse à l’impro-viste la correspondance, la conduite et la misère de notre ami au plus grand jour. Le Peuple, sans doute, perd son ami, son tendre ami, son plus ferme appui; cette perte est cruelle; elle est irréparable; mais par le réveil qu’occasionne un si noir attentat, il retrouve l’énergie nécessaire pour punir les traîtres, et suivre avec intelligence l’impulsion révolutionnaire imprimée par Marat. Citoyens, pour célébrer dignement nos héros, il suffit de s’occuper sans cesse, à leur imitation, de la chose publique; cet avis est pour le profit de tous. L’homme qui voit son bonheur hors celui de sa Patrie, est un insensé qui attire sur sa tête la foudre révolutionnaire. L’orgueilleux qui tentera de s’élever au-dessus du niveau de l’Egalité sera pulvérisé par le mouvement rapide qui agite la masse de la Nation; l’avare n’a rien à prétendre sur la fortune publique, que l’œil du Peuple surveille, et le sombre hypocrite verra toujours ses trames perfides se dénouer au jour de la raison; oui, la mort attend sur l’échafaud le dernier intrigant. Tel est le résultat d’une révolution qui a pour principe la philosophie, de briser les passions déréglées contre les vertus naturelles, de rapprocher les hommes de l’ordre et de la justice, et de n’avoir pour régulateur que l’opinion publique, fondée sur la connoissance acquise du droit et du devoir : que l’expérience du passé serve de leçon pour l’avenir; qu’on ne compte plus sur son génie, ni sur les ressources des talens, pour s’élever aux dépens de la chose publique; ceux qui se sont abandonné à ce fol espoir, l’ont déjà payé de la vie. Les Dieux de la terre ont disparu comme un nuage orageux; le souffle de la Raison les a dissipés; le Despote lui-même, courbé sous le poids de ses tyrannies, n’a pu se soustraire au coup vengeur du fer sacré de la Loi; tous ses vils suppôts ont attiré sur leur tête, ou la proscription, ou la mort. Lafayette a fui, Dumouriez l’a suivi. Un Duc d’Orléans forma le projet de régner; son trône fut l’échafaud; une faction nombreuse, effrayante par l’intrigue et de funestes talens, par le masque trompeur d’un patriotisme affecté, et surtout par des droits usurpés à la confiance publique, eh bien, le Peuple a deviné la trahison, il a puni les traîtres. Le fanatisme a voulu faire siffler ses serpens, le voilà écrasé. Des villes se sont établies en rébellion; Lyon et Toulon sont détruits; enfin la Vendée, ce foyer alarmant de conspiration, cette lèpre de la Patrie, ce fléau n’existe plus. Ne demandez pas ce qu’il faut faire, pour fixer enfin ces bases de justice énernelle, qui doivent porter l’édifice majestueux d’un Gouvernement heureux, où l’homme, élevé à la dignité de sa raison, jouira de la plénitude de ses droits par le respect de ses devoirs. Ce qu’il faut faire ? tout ce qu’on ne fait pas; c’est dans son cœur qu’il faut d’abord fixer la justice, et soumettre son esprit à l’empire absolu de la raison. Ce qu’il faut faire ? s’abandonner avec confiance au sort de la chose publique, et contribuer de toutes ses facultés au bonheur commun. Ce qu’il faut faire ? des sacrifices sans nombre, et les faire de bon cœur, n’avoir d’autre intérêt en vue que celui de sa Patrie, s’occuper d’elle plus que de soi, et la considérer comme son unique fortune. Ce qu’il faut faire ? il faut renoncer aux passions, à l’orgueil, à la présomption, et sur-tout à l’avarice; il ne faut rien entreprendre au-dessus de ses forces, savoir discuter, et ne point disputer, parler de ce que l’on fait, faire ce que l’on doit, et ne rien prétendre. Ce qu’il faut faire ? ne se point déchirer, ni vilipender, s’unir, au contraire, contre l’ennemi commun, qui divise pour régner, repousser avec horreur la calomnie, et punir le calomniateur. Ce qu’il faut faire ? prévenir la trahison, et déjouer les traîtres, ne point écouter les flatteurs, se défier de soi-même, s’exercer au maniement des armes, se mettre en état de soutenir au besoin nos frères qui combattent pour notre Liberté, forcer par la culture nos champs à donner d’abondantes moissons, et ne point assassiner sa Patrie, en vendant au pauvre les fruits de la terre au poids d’or. Ce qu’il faut faire ? Citoyens, mes frères et amis, il faut savoir se priver du superflu, et ne point hésiter à partager avec les pauvres son propre nécessaire; le vice règne avec les tyrans, la vertu est l’appui de l’empire de la raison; aucun de nous n’est privé du bonheur de faire quelque bien, il suffit de le vouloir; et si chacun de nous réfléchissoit que les jours de son existence ne sont comptés que par le mérite des actions, laisseroit-il échapper la foule d’occasions que chaque minute procure pour se rendre utile ? Que ce jour consacré à célébrer la mémoire des Martyrs de la Liberté, soit un de ceux dont nous puissions compter le meilleur usage; que leurs vertus passent dans nos cœurs comme leurs lumières éclairent nos esprits et animent notre courage; souvenons-nous des sacrifices immenses que font à la Patrie ses généreux défenseurs; que ce moment sur-tout, justement consacré à honorer les vertus civiques, soit pour nous l’occasion de nous en montrer dignes; que ce rassemblement nombreux de bons Citoyens opère l’heureuse réunion des cœurs et des esprits; que nos frères qui combattent la rage des tyrans et l’intempérie d’une saison rigoureuse, 194 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE gans qui n’ont arraché de la gorge du Peuple la sangsue royale, que pour s’attacher à tous ses artères, et pomper le reste de son sang. H vouloit ce qui est juste; il vouloit ce que nous voulons, ce qu’il faut, et ce qui sera, la juste sévérité des Loix, et que la première de toute, qui est le salut du Peuple, fût enfin mise à l’ordre du jour. C’est ainsi qu’il fut un buveur de sang, un anthropophage, un homme de boue, un monstre désorganisateur. Eh bien, ce monstre, ce monstre si féroce, qui avoit armé de poignards tant de bras pour égorger les hommes d’Etat, croira-t-on que pour le mettre à mort, on n’ait pas cuirassé les plus forts athlètes ? Ici le crime de ses ennemis, le crime de nos ennemis rend hommage, par une sorte de prodige, à son innocence. C’est par le sentiment de la sensibilité qu’on suggère au fanatisme le moyen de l’approcher; c’est une femme qui devient l’instrument de la vengeance. Armée du couteau fatal : Va, lui dit-on, écrit à Marat que tu est malheureuse, sa porte te sera ouverte; perce-lui le cœur. O comble d’horreur ! vous frémissez... Citoyens, ce crime fut nécessaire au salut de la France; ce trépas précipité laisse à l’impro-viste la correspondance, la conduite et la misère de notre ami au plus grand jour. Le Peuple, sans doute, perd son ami, son tendre ami, son plus ferme appui; cette perte est cruelle; elle est irréparable; mais par le réveil qu’occasionne un si noir attentat, il retrouve l’énergie nécessaire pour punir les traîtres, et suivre avec intelligence l’impulsion révolutionnaire imprimée par Marat. Citoyens, pour célébrer dignement nos héros, il suffit de s’occuper sans cesse, à leur imitation, de la chose publique; cet avis est pour le profit de tous. L’homme qui voit son bonheur hors celui de sa Patrie, est un insensé qui attire sur sa tête la foudre révolutionnaire. L’orgueilleux qui tentera de s’élever au-dessus du niveau de l’Egalité sera pulvérisé par le mouvement rapide qui agite la masse de la Nation; l’avare n’a rien à prétendre sur la fortune publique, que l’œil du Peuple surveille, et le sombre hypocrite verra toujours ses trames perfides se dénouer au jour de la raison; oui, la mort attend sur l’échafaud le dernier intrigant. Tel est le résultat d’une révolution qui a pour principe la philosophie, de briser les passions déréglées contre les vertus naturelles, de rapprocher les hommes de l’ordre et de la justice, et de n’avoir pour régulateur que l’opinion publique, fondée sur la connoissance acquise du droit et du devoir : que l’expérience du passé serve de leçon pour l’avenir; qu’on ne compte plus sur son génie, ni sur les ressources des talens, pour s’élever aux dépens de la chose publique; ceux qui se sont abandonné à ce fol espoir, l’ont déjà payé de la vie. Les Dieux de la terre ont disparu comme un nuage orageux; le souffle de la Raison les a dissipés; le Despote lui-même, courbé sous le poids de ses tyrannies, n’a pu se soustraire au coup vengeur du fer sacré de la Loi; tous ses vils suppôts ont attiré sur leur tête, ou la proscription, ou la mort. Lafayette a fui, Dumouriez l’a suivi. Un Duc d’Orléans forma le projet de régner; son trône fut l’échafaud; une faction nombreuse, effrayante par l’intrigue et de funestes talens, par le masque trompeur d’un patriotisme affecté, et surtout par des droits usurpés à la confiance publique, eh bien, le Peuple a deviné la trahison, il a puni les traîtres. Le fanatisme a voulu faire siffler ses serpens, le voilà écrasé. Des villes se sont établies en rébellion; Lyon et Toulon sont détruits; enfin la Vendée, ce foyer alarmant de conspiration, cette lèpre de la Patrie, ce fléau n’existe plus. Ne demandez pas ce qu’il faut faire, pour fixer enfin ces bases de justice énernelle, qui doivent porter l’édifice majestueux d’un Gouvernement heureux, où l’homme, élevé à la dignité de sa raison, jouira de la plénitude de ses droits par le respect de ses devoirs. Ce qu’il faut faire ? tout ce qu’on ne fait pas; c’est dans son cœur qu’il faut d’abord fixer la justice, et soumettre son esprit à l’empire absolu de la raison. Ce qu’il faut faire ? s’abandonner avec confiance au sort de la chose publique, et contribuer de toutes ses facultés au bonheur commun. Ce qu’il faut faire ? des sacrifices sans nombre, et les faire de bon cœur, n’avoir d’autre intérêt en vue que celui de sa Patrie, s’occuper d’elle plus que de soi, et la considérer comme son unique fortune. Ce qu’il faut faire ? il faut renoncer aux passions, à l’orgueil, à la présomption, et sur-tout à l’avarice; il ne faut rien entreprendre au-dessus de ses forces, savoir discuter, et ne point disputer, parler de ce que l’on fait, faire ce que l’on doit, et ne rien prétendre. Ce qu’il faut faire ? ne se point déchirer, ni vilipender, s’unir, au contraire, contre l’ennemi commun, qui divise pour régner, repousser avec horreur la calomnie, et punir le calomniateur. Ce qu’il faut faire ? prévenir la trahison, et déjouer les traîtres, ne point écouter les flatteurs, se défier de soi-même, s’exercer au maniement des armes, se mettre en état de soutenir au besoin nos frères qui combattent pour notre Liberté, forcer par la culture nos champs à donner d’abondantes moissons, et ne point assassiner sa Patrie, en vendant au pauvre les fruits de la terre au poids d’or. Ce qu’il faut faire ? Citoyens, mes frères et amis, il faut savoir se priver du superflu, et ne point hésiter à partager avec les pauvres son propre nécessaire; le vice règne avec les tyrans, la vertu est l’appui de l’empire de la raison; aucun de nous n’est privé du bonheur de faire quelque bien, il suffit de le vouloir; et si chacun de nous réfléchissoit que les jours de son existence ne sont comptés que par le mérite des actions, laisseroit-il échapper la foule d’occasions que chaque minute procure pour se rendre utile ? Que ce jour consacré à célébrer la mémoire des Martyrs de la Liberté, soit un de ceux dont nous puissions compter le meilleur usage; que leurs vertus passent dans nos cœurs comme leurs lumières éclairent nos esprits et animent notre courage; souvenons-nous des sacrifices immenses que font à la Patrie ses généreux défenseurs; que ce moment sur-tout, justement consacré à honorer les vertus civiques, soit pour nous l’occasion de nous en montrer dignes; que ce rassemblement nombreux de bons Citoyens opère l’heureuse réunion des cœurs et des esprits; que nos frères qui combattent la rage des tyrans et l’intempérie d’une saison rigoureuse, SÉANCE DU 4 FLORÉAL AN II (23 AVRIL 1794) - Nos 39 et 40 195 reçoivent de l’amitié et de la justice les secours dont ils ont le plus pressant besoin; que chacun de nous coure sur-le-champ chercher les vête-mens dont il peut se passer, qu’il vienne les déposer dans ce Temple, qui a si long-temps servi d’asile à la superstition, et de soutien à la tyrannie; voué au crime, consacrons-le à l’humanité : nos frères ont des femmes, des en-fans, des parens infirmes et nécessiteux ..... Citoyens, qu’avant la fin du jour il n’y ait pas un malheureux qui n’ait été consolé et secouru; alors nous pourrons nous livrer aux transports de la joie qu’inspirent les heureux succès de nos armes, nous étoufferons nos querelles particulières dans nos embrassemens fraternels; les menaces de l’opinion disparoîtront à la lumière des principes d’une philosophie régénératrice; chacun obéira à la voix de la Nature qui parle dans sa conscience; il saura distinguer le foible du coupable, l’homme égaré, du scélérat qui médite de sang froid la perte de la Patrie; il réchauffera par le baiser de paix le cœur engourdi, et il rendra la liberté des bras qu’il suffit de délier; sa justice s’appesantira sur les têtes criminelles, et il ne cessera de frapper les traîtres. C’est ainsi que nous approcherons du règne heureux de la Liberté et de l’Egalité, et nous pourrons nous écrier avec un saint enthousiasme : vive la République, une et véritablement indivisible (1) . [Extrait du p.-v. de l’Assemblée gale, 25 niv. II.] Le Citoyen Closquinet a prononcé un discours en l’honneur des Martyrs de la Liberté, Marat et Le Peletier, qui respire le plus grand patriotisme; il a rappelé les vertus républicaines dont étoient animés ces dignes héros de la Montagne; il a ajouté qu’il ne suffisoit pas de se dire Républicain, qu’il falloit le prouver, et que le vrai patriote étoit celui qui, quand il le pouvoit, cherchoit à soulager ses frères, et n’étoit satisfait que quand il ne connoissoit personne dans le besoin. Ce discours a été entendu avec la plus vive satisfaction, et a reçu les plus grands applaudis-semens. L’Assemblée en a arrêté l’impression et l’envoi aux quarante-sept autres Sections, aux Autorités constituées, aux Comités révolutionnaires et aux Sociétés populaires. Délivré par extrait, cejourd’hui deux pluviôse, l’an deuxième de la République Française, une et indivisible. Bach (présid.), J. M. Calonne (secrét. par intérim). 39 Les membres du comité de surveillance de la commune de Bellesme, et la société populaire de Remalard-la-Montagne, félicitent la Convention sur la découverte et la punition des conseil Imprimé par ordre de l’Assemblée générale de Section. Voir aussi J. Guillaume, Procès-verbaux du comité d’instruction publique. T. IV, p. 492. pirateurs qui voulaient remettre la Nation dans les fers, et, ils l’invitent à rester à son poste jusqu’à ce que la révolution soit entièrement assise. Mention honorable et insertion au bulletin (1). a [Le C. révol. de Bellême, à la Conv.; s.d.] (2). « Citoyens législateurs, Vos comités de Salut public et de Sûreté générale viennent de sauver encore une fois la patrie. Ils ont découvert différentes conspirations qui tendaient à opprimer le peuple, à le remettre dans les fers; plusieurs chefs ont été arrêtés et ont subi les peines dues à leurs forfaits; purgez la terre française de tous ces scélérats; chaque jour, vous acquiérez de nouveaux droits à la reconnaissance des amis de la République; elle sera éternelle si vous restez à votre poste jusqu’à ce que la révolution soit entièrement assise. Restez y, nous vous en conjurons en vous félicitant et en vous assurant que nous seconderons vos vues bienfaisantes; et que nous continuerons de nous acquitter en vrais sans-culottes des fonctions que vous nous avez déléguées, » Verdier, Buge, Charles, Baillient, Rottier, Leprince, Cornu fils, Dufay, Sierre, Liberge [et 2 signatures illisibles]. b [La Sté popul de Remalard-la-Montagne à la Conv.; 1er jlor. II] (3). « Qu’il est beau le triomphe de la liberté naissante, sur l’antique esclavage ! De vils partisans du despotisme avaient osé combiner, dans l’ombre du crime, le projet insensé, d’exterminer dès le berceau, la République, et la République, comme un autre hercule, a écrasé les serpents de Pitt et de Cobourg. Législateurs, c’est par vous qu’elle a triomphé : grâces immortelles en soient rendues à votre active énergie : restez, restez à votre poste et s’il pouvait encore vous être préparé de nouveaux combats, ne cessez d’opposer l’égide du génie aux vains efforts des satellites stipendiés du royalisme et de la tyrannie, et l’univers étonné de voir tomber ses fers sous vos auspices, sera forcé de devenir libre. » Sursin, Boisnel, Foucault, Menague, Pravard. 40 Une députation de la société populaire de Mézières et Libreville (4), après avoir exprimé l’indignation dont cette société a été pénétrée lorsqu’elle a eu connaissance des noires ca-(1) P.V., XXXVI, 76. Départ1 de l’Orne. (2) C 302, pl. 1091, p. 29. (3) C 303, pl. 1100, p. 36. (4) Libreville : Charleville, départ1 des Ardennes. SÉANCE DU 4 FLORÉAL AN II (23 AVRIL 1794) - Nos 39 et 40 195 reçoivent de l’amitié et de la justice les secours dont ils ont le plus pressant besoin; que chacun de nous coure sur-le-champ chercher les vête-mens dont il peut se passer, qu’il vienne les déposer dans ce Temple, qui a si long-temps servi d’asile à la superstition, et de soutien à la tyrannie; voué au crime, consacrons-le à l’humanité : nos frères ont des femmes, des en-fans, des parens infirmes et nécessiteux ..... Citoyens, qu’avant la fin du jour il n’y ait pas un malheureux qui n’ait été consolé et secouru; alors nous pourrons nous livrer aux transports de la joie qu’inspirent les heureux succès de nos armes, nous étoufferons nos querelles particulières dans nos embrassemens fraternels; les menaces de l’opinion disparoîtront à la lumière des principes d’une philosophie régénératrice; chacun obéira à la voix de la Nature qui parle dans sa conscience; il saura distinguer le foible du coupable, l’homme égaré, du scélérat qui médite de sang froid la perte de la Patrie; il réchauffera par le baiser de paix le cœur engourdi, et il rendra la liberté des bras qu’il suffit de délier; sa justice s’appesantira sur les têtes criminelles, et il ne cessera de frapper les traîtres. C’est ainsi que nous approcherons du règne heureux de la Liberté et de l’Egalité, et nous pourrons nous écrier avec un saint enthousiasme : vive la République, une et véritablement indivisible (1) . [Extrait du p.-v. de l’Assemblée gale, 25 niv. II.] Le Citoyen Closquinet a prononcé un discours en l’honneur des Martyrs de la Liberté, Marat et Le Peletier, qui respire le plus grand patriotisme; il a rappelé les vertus républicaines dont étoient animés ces dignes héros de la Montagne; il a ajouté qu’il ne suffisoit pas de se dire Républicain, qu’il falloit le prouver, et que le vrai patriote étoit celui qui, quand il le pouvoit, cherchoit à soulager ses frères, et n’étoit satisfait que quand il ne connoissoit personne dans le besoin. Ce discours a été entendu avec la plus vive satisfaction, et a reçu les plus grands applaudis-semens. L’Assemblée en a arrêté l’impression et l’envoi aux quarante-sept autres Sections, aux Autorités constituées, aux Comités révolutionnaires et aux Sociétés populaires. Délivré par extrait, cejourd’hui deux pluviôse, l’an deuxième de la République Française, une et indivisible. Bach (présid.), J. M. Calonne (secrét. par intérim). 39 Les membres du comité de surveillance de la commune de Bellesme, et la société populaire de Remalard-la-Montagne, félicitent la Convention sur la découverte et la punition des conseil Imprimé par ordre de l’Assemblée générale de Section. Voir aussi J. Guillaume, Procès-verbaux du comité d’instruction publique. T. IV, p. 492. pirateurs qui voulaient remettre la Nation dans les fers, et, ils l’invitent à rester à son poste jusqu’à ce que la révolution soit entièrement assise. Mention honorable et insertion au bulletin (1). a [Le C. révol. de Bellême, à la Conv.; s.d.] (2). « Citoyens législateurs, Vos comités de Salut public et de Sûreté générale viennent de sauver encore une fois la patrie. Ils ont découvert différentes conspirations qui tendaient à opprimer le peuple, à le remettre dans les fers; plusieurs chefs ont été arrêtés et ont subi les peines dues à leurs forfaits; purgez la terre française de tous ces scélérats; chaque jour, vous acquiérez de nouveaux droits à la reconnaissance des amis de la République; elle sera éternelle si vous restez à votre poste jusqu’à ce que la révolution soit entièrement assise. Restez y, nous vous en conjurons en vous félicitant et en vous assurant que nous seconderons vos vues bienfaisantes; et que nous continuerons de nous acquitter en vrais sans-culottes des fonctions que vous nous avez déléguées, » Verdier, Buge, Charles, Baillient, Rottier, Leprince, Cornu fils, Dufay, Sierre, Liberge [et 2 signatures illisibles]. b [La Sté popul de Remalard-la-Montagne à la Conv.; 1er jlor. II] (3). « Qu’il est beau le triomphe de la liberté naissante, sur l’antique esclavage ! De vils partisans du despotisme avaient osé combiner, dans l’ombre du crime, le projet insensé, d’exterminer dès le berceau, la République, et la République, comme un autre hercule, a écrasé les serpents de Pitt et de Cobourg. Législateurs, c’est par vous qu’elle a triomphé : grâces immortelles en soient rendues à votre active énergie : restez, restez à votre poste et s’il pouvait encore vous être préparé de nouveaux combats, ne cessez d’opposer l’égide du génie aux vains efforts des satellites stipendiés du royalisme et de la tyrannie, et l’univers étonné de voir tomber ses fers sous vos auspices, sera forcé de devenir libre. » Sursin, Boisnel, Foucault, Menague, Pravard. 40 Une députation de la société populaire de Mézières et Libreville (4), après avoir exprimé l’indignation dont cette société a été pénétrée lorsqu’elle a eu connaissance des noires ca-(1) P.V., XXXVI, 76. Départ1 de l’Orne. (2) C 302, pl. 1091, p. 29. (3) C 303, pl. 1100, p. 36. (4) Libreville : Charleville, départ1 des Ardennes.