ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les murs.] 21 [États gén. 1789. Cahiers.] habitants étant presque tous parents ou alliés, ne feraient bien ce service que vis-à-vis les étrangers. On doit sentir que, par cette précaution, loin d’augmenter les maréchaussées, on en diminuerait le nombre en décharge pour l’Etat, parce que l’Etat doit protection à ceux qui Font bien servi, et que la solde d’un cavalier de maréchaussée, eu égard à son équipement et à son cheval, est très-coûteuse ; et par ce qui est proposé, l’ordre serait établi, les vieux serviteurs récompensés et en état de vivre, et les invalides, comme le guet de Paris, conduiraient les délinquants chez le procureur fiscal qui en ordonnerait la prison ou la liberté, ainsi que font les commissaires de Paris, lesquels, comme les procureurs fiscaux de toutes justices, sont responsables de leurs décisions à M. le procureur général. En outre, les invalides pourraient être établis à la garde des récoltes du territoire, à la décharge des cultivateurs, sauf à augmenter leur nombre pendant le temps des moissons, ce qui produirait le plusgrandbien dans la paroisse, et ils porteraient les délits et les délinquants chez le procureur fiscal, ce que ne peuvent par nature faire ceux qui en sont ordinairement chargés, ne pouvant ou n’osant constater la contravention de leurs parents les plus proches et de leurs alliés ; l’aperçu des objets ci-dessus fait connaître assez et une récompense et une épargne considérables. On voit même qu’il faudrait bien peu de maréchaussée à l’avenir dans le royaume; en outre, on présume aisément ce que coûtent les officiers de ce corps dont on n’a pas parlé. Art. 28. Lorsqu’il plaît à Sa Majesté d’accorder aux criminels graciables des lettres de grâce, elles sont accordées gratuitement. Pourquoi la justice n’agirait-elle pas de même? 11 est donc à désirer que soient scellées et entérinées les lettres de grâce, gratis, tant par les juges que leurs greffiers et procureurs, parce que les sceaux et entérinement coûtent beaucoup aux impétrants et les ruinent s’ils n’ont un peu de fortune. Art. 29. Il serait à désirer aussi qu’une loi astreignît MM. les avocats, notaires et procureurs, de donner à chaque citoyen un récépissé des litres qu’ils leur confient pour leurs défenses, parce qu’à défaut de récépissé, il leur est presque indifférent de les adhirer et que souvent il en résulte la perte des meilleures causes et Ja ruine des citoyens. Art. 30. Quoique le commerce soit une branche honorable et avantageuse à la nation, le préjugé à empêché la noblesse de s’v livrer. Ainsi il serait à désirer une loi qui levât ce préjugé, pour que la noblesse puisse embrasser cette partie sans aucunement déroger. Les milords et les lords anglais s’y livrent bien; la nation ne pourrait que considérablement y gagner. Art. 31. Il est aussi à désirer la réforme des abus dans la procédure, d’en restreindre les longueurs et qu’il ne puisse être donné au plus que trois avenirs avant chaque sentence ou arrêt; de supprimer les épices et de fixer un temps pour la durée des procès. Art. 32. Il serait également à désirer que, dans les lieux où il y a plusieurs justices, qu’elles fussent toutes réunies à la haute justice s’ily en a, et les basses justices réunies à la moyenne, si, dans le lieu, il n’y en a pas de hautes, et laisser subsister les basses justices quand il n’v en aura que de cette espèce, afin de ne pas distraire les habitants de leur domicile, parce que rarement il y a des appels des premiers juges et que la justice locale est très-nécessaire. CAHIER Des doléances , plaintes et remontrances des habitants de Pierrelez (Pierre Laye), qu’ils osent très-respectueusement représenter sous les yeux de Sa Majesté et des Etats généraux (1). Art. 1er. Nous supplions de vouloir bien nous accorder une modération des impositions, attendu la très-grande modicité du terrain et qui se trouve encore dévasté par les lapins et autres gibiers. Art. 2. Que toutes les impositions soient payées chacune dans sa paroisse, attendu la grande difficulté que cela cause aux collecteurs. Art. 3. Une liberté de pouvoir nettoyer les mauvaises herbes qui se trouvent dans nos grains, comme aussi de pouvoir pâturer nos bestiaux dans les biens à nous appartenant et en commun, vu que le terrain ne peut produire aucune pâture a cause de sa modicité. Art. 4. La destruction des lapins ainsi que des pigeons, qui dévastent les semences. Art. 5. De pouvoir arracher de mauvais bois qui se trouvent dans le terroir pour pouvoir remettre le terrain en culture. Art. 6. La diminution sur le prix du pain. Art. 7. La diminution sur le prix du sel. Art. 8. La diminution sur les droits du vin et autres boissons. Art. 9. Que toutes les impositions soient payées par tous les propriétaires de fonds sans exception. Ce fut fait le mardi 14 avril 1789, en présence de toute l’assemblée, et ont signé : Denis Leveau, ancien marguillier ; Duvivier; Louis-Alexandre Mael; Courteville; Jean-Louis Legrand ; Jean-Louis Leveau , marguillier en charge; Louis Jacquin; Vaillant-Courteville; Bernard ; Dumeny, ancien marguillier ; Du Bucquoi ; Jean-Pierre Rougeaux; Jean -Baptiste Leveau; Jean-Louis Galle ; Pierre Cousin; Cousin, syndic; Danjeau, greffier; Cousin Fleuret, député. CAHIER Des doléances , plaintes et réclamations de messire Carré, propriétaire des fiefs de Tabary-les-Obous et hôtel de la Pierre , au principal manoir des susdits fiefs situés au village du Pin (2). Sera le seigneur Roi très-humblement supplié de jeter un regard favorable aux précises ci après exprimées. Art. 1er* Demande Ja suppression du droit de franc-fief que l’on fait payer à présent aux roturiers qui sont propriétaires de fiefs et de terres nobles. H faut considérer que lesdits propriétaires payent au Roi la taille, la capitation, le quartier d’hiver imposé à la marge du rôle pour les entretiens des troupes du Roi, et il paye aussi les vingtièmes deniers et les charges des corvées et des paroisses; toutes ces impositions royales, sans comprendre le droit de franc-fief, se montent à la moitié delà production desdits fiefs. Vous voyez qu’il est de toute nécessité d’ôter les droits de franc-fief de sur lesdits fiefs, comme n’étant pas payés dans l’ancien temps ; le tout, réparti ensemble, fait que lesdits propriétaires desdits fiefs payant (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire. (2) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire. 22 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Paris hors les murs. les deux tiers de leur revenu au Roi, se trouvent trop chargés de droits. Art. 2. Demander que les laboureurs de Ja campagne-ne fassent valoir que deux fermes ensemble tout au plus, parce que, par leur trop grande entreprise d’emploi, vous voyez toujours qu’ils ne peuvent pas tous les ans semer toutes leurs terres en blé dans la bonne saison; les mauvai-s temps sur l’arrière-saison les empêchent de tout semer lesdits blés, et l’on voit que, s’ils sèment le tout très-souvent, ils manquent de terre et ne lèvent pas, rapport à la gelée et les faux dégels, et si peu qui lève, les corbeaux l’arrachent de dans terre pendant l’hiver et on se trouve obligé de semer deux fois très-souvent la même année ; c’est ce qui cause absolument la cherté des grains, et empêche aussi qu’il ne s’établisse des jeunes gens dans des fermes de labour pour y faire leur établissement, lesquels feraient de bons cultivateurs, l’agriculture en étant privée par le manque d’emploi de ce que d’autres ont de trop grandes entreprises, ne pouvant pas trouver d’emploi pour s’établir et se marier ; cela est la cause qu’ils passent leur jeunessê par la faute d’emploi, durant qü’il y a plusieurs laboureurs fermiers qui foat valoir trois, quatre, cinq et six fermes ensemble ; cela empêche l’établissement de beaucoup de jeunes gens de famille, ce qui fait un grand tort tant sur les établissements que sur l’agriculture de la terre et sur les récoltes des grains toutes les années ; suivant leur demande, qu’il y ait un règlement ordonné pour cet article. Art. 3. Demander que tout laboureur qui fait valoir 80 arpents de terre ou environ, il lui soit accordé le pouvoir d’exempter son premier fils ou son premier charretier, étant le premier à la tête de i’ouvrage, comme cela a déjà été dans les anciennes ordonnances ci-devant, pour le soutien et conservation de la cultivation des terres qui est très-intéressant ; il se trouve que le fils d’un laboureur dont les père et mère sont trop âgés viendrait à tirer à la milice et y tomberait au sort, il servirait à faire un soldat au service du Roi de mauvaise volonté en regrettant de quitter ses père et mère et ses ouvrages; son établissement souvent qui est prêt à se faire lui ferait grand tort de ne pas pouvoir continuer les désirs qu’il aime; cela vaudrait bien mieux de conserver des bons cultivateurs qui, à la suite du temps, deviendraient de bons pères de famille, plutôt que d’être soldat et malgré lui, car vous voyez très-souvent que celui qui a quitté le travail de jeunesse ne peut pas s’y remettre quand il devient âgé ; le tout se fait par habitude ordinairement. Art. 4. Demander la suppression de l’imposition des corvées demandée par les collecteurs des tailles, comme on n’a pas coutume de les payer en argent comme autrefois. Gela fait une surcharge coûteuse aux cultivateurs laboureurs qui sont déjà trop chargés d'impositions. Art. 5. Demander la suppression des dîmes dans les campagnes, sur toutes les terres, en récoltes et autres choses les concernant, lesdites dîmes; en payant en argent les règlements qui seraient oraonnés ; cela ferait un bien général poür les cultivateurs et pour les engrais de la terre, amendement qui se trouve retiré par les enlèvements des dîmes qui sortent sur les terres. Art. 6. Demander que tous les procès étant bien vérifiés par titre et par droit, et suivant l’ordonnance et les coutumes dont ils relèvent, il y ait un règlement d’ordonnance ; qu’il fût jugé, après tout considéré, dans le temps d’un an définitif, et faire supprimer toute lenteur de chicane qui se fait assez souvent avec certaines gens de justice qui ne veulent pas finir les affaires qui sont dans leurs mains, et souvent consomme les familles en frais, parce qu’ils font tous leur ministère, sans exception, sans aucune inspection ni règlement d’aucune manière ; ceux qui se trouvent dans ce même cas devraient être punis d’être en perte de frais qu'ils font injustement, parce qu’ils gardent des causes trop longtemps dans leurs mains, pendant quelquefois des dix ou douze années, ce qui cause que l’on ne peut pas jouir de son bien assez souvent pendant sa vie, sans pouvoir faire finir ses affaires ; c’est ce qui fait un grand tort considérable dans les familles ; et, en conséquence, il est très-nécessaire qu’il y ait de nouvelles ordonnances de règlement, obligeant de Een dernier ressort, dans le délai d’un an, ,ue toutes les instructions sont faites desdits procès. Art. 7. Demander des diminutions des entrées de Paris sur plusieurs marchandises, qui sont trop forcées, ce qui fait une perte considérable aux vendeurs marchands. Il faut considérer que les nouvelles barrières posées dans les alentours de Paris, par les écartements que l’on a faits, obligent une grande quantité de marchands à payer des droits d’entrée qu’ils ne payaient pas autrefois, et causent la perte desdits marchands, des marchandises qui se trouvent enclavées dans lesdites barrières, et pour favoriser la diminution des droits, les accroissements des écartements rempliraient toujours les mêmes revenus et feraient le soulagement du peuple qui est le bien général de tout le monde, tant de Paris que de la campagne. Art. 8. Demander les diminutions sur les droits de vin dans les bureaux et entrées où ils sont sujets à payer. Art. 9. Demander la diminution du sel, étant trop cher de prix, ce qui fatigue le peuple beaucoup. Fait et arrêté le 28 avril 1789. Signé Carré. CAHIER De doléances, plaintes et remontrances des habitants du village du Pin , près Lagny en Brie , divisé en deux colonnes , la première concernant les abus qui se sont glissés jusqu'à nos jours dans cette paroisse , la seconde concernant les remèdes à ces abus. Abus. Art. 1er. Il y a dans cette paroisse un syndic qui ne sait ni lire ni écrire, qui n’a été choisi de cette manière que par le curé, le maître d’école et autres de leurs affidés, afin qu’aucun autre habitant ne puisse réclamer contre les abus qui se perpétuent, particulièrement dans la fabrique, entre les fabriciens et le curé, qui ne rendent jamais de comptes. Le syndic encore n’est pas né dans ce village, de sorte qu’il n’a pas l’esprit des habitants propriétaires , avec d’autant plus de raison qu’il n’a aucun bien de son chef dans le territoire. Remède aux abus. Art. 1er. Il est intéressant et urgent d’avoir, conformément aux vues du Roi, un syndic natif de cette paroisse qui sache lire et écrire, et qu’il soit nommé et choisi par tous (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire.