519 [Assemblée nationale.) ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [18 novembre 1790.) à partie contre les juges : voilà le principe consacré, voilà l’intention de l’Assemblée. Où est la difficulté de l’ajournement? Vous allez décréter le premier article qui' vous est proposé ; vous examinerez ensuite si le tribunal jugera au fond les prises à partie. L’Assemblée ajourne le second article présenté par le comité. Le premier est décrété en ces termes : « La section de cassation prononcera sur toutes les demandes en cassation lorsque la requête aura été admise; elle ne pourra juger qu’au nombre de quinze juges au moins. La cassation sera prononcée à la majorité simple des voix. * M. d’André. La discussion ayant été assez confuse, je demande qu’il soit fait lecture de tous les articles adoptés dans la séance de ce jour sur le tribunal de cassation. M. lie Chapelier fait cette lecture ainsi qu’il suit : Art. 1er. « Les membres du tribunal de cassation seront élus pour quatre ans, ils seront renouvelés en entier tous les quatre ans, mais ils pourront être réélus. Art. 2. « Avant que la demande en cassation ou en prise à partie soit mise en jugement, il sera préalablement examiné et décidé si la requête dqit être admise, et la permission d’assigner accordée. Art 3. « A cet effet, tous les six mois la cour de cassation nommera vingt de ses membres pour former un bureau qui, sous le titre de bureau des requêtes, aura pour fonctions d’examiner et de juger si les requêtes en cassation ou en prise à partie doivent être admises ou rejetées : ce bureau ne pourra juger qu’au nombre de douze juges au moins. Art. 4. « Si, dans le bureau, les trois quarts des voix se réunissent pour rejeter une requête en cassation ou en prise à partie, elle sera définitivement rejetée : si les trois quarts des voix se réunissent pour admettre la requête, elle sera définitivement admise, l’affaire sera mise en jugement, et le demandeur en cassation ou en prise à partie sera autorisé à assigner. Art. 5. << Lorsque les trois quarts des voix ne se réuniront pas pour rejeter ou admettre une requête en cassation ou en prise à partie, la question sera portée à tout le tribunal rassemblé. Art. 6. « La section de cassation seule, et sans la réunion des membres du bureau des requêtes, prononcera sur toutes les demandes en cassation lorsque la requête aura été admise. La section de cassation ne pourra juger qu’au nombre de quinze juges au moins. La simple majorité des voix suffira pour former la décision. » M. I© Président donne lecture à l’Assemblée d’une lettre du 17 de ce mois, du maire de Paris à M» le président, qui rend compte à l’Assemblée des adjudications faites la veille par la municipalité, de trois objets dépendant des biens nationaux, savoir : 1° D’une maison cour Saint-Martin, louée 1,200 livres, estimée 8,045 livres, adjugée 17,400 livres ; 2° D’un chantier dit de Saint-Victor, quai Saint-Bernard, loué 4,000 livres, estimé 61,000 livres, adjugé 104,700 livres ; 3° D’une maison, cour Saint-Martin, louée 800 livres, estimée 15,500 livres, adjugée 32,300 livres. (Cette lettre est renvoyée au comité des aliénations.) 2° D’une lettre aussi du 17 de ce mois, du ministre de la marine, à M. le président, qui instruit l’Assemblée des dépenses extraordinaires qui ont été faites par le département' de la marine, en conformité de ses décrets, et s’élève à 2,073,604 livres 13 sous 6 deniers. (Cette lettre et les états y joints sont renvoyés au comité de la marine.) 3° D’une lettre du 16 de ce mois, du ministre de la guerre, qui rend compte à l’Assemblée des précautions prises et des ordres donnés pour arrêter le sieur Châlons, aide-major de Belfort, et de son évasion avant l’exécution de ces ordres. (Le renvoi de cette lettre, et de celle y jointe, du sieur Guy, major de Belfort, du 8 du courant, est fait au comité des rapports.) M.Anthoine. Je demande que, sans donner un effet rétroactif à la loi que je sollicite, l’Assemblée déclare que tout homme cité devant un juge, soit par les tribunaux, soit par le Corps législatif, lorsqu’il n’obéit pas à cette citation, est par le seul fait déchu du droit de cité. (On passe à l’ordre du jour.) M. Seurrat de lia Boullaye, député d’Orléans, absent par congé du 3 octobre dernier, remet son passeport sur le bureau pour justifier de son retour. M. Roussillon, député de Toulouse, absent par congé du 14 septembre, fait une semblable justification. (La séance est levée à trois heures et demie.) ' ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. CHASSET. Séance du jeudi 18 novembre 1790, au soir( 1). La séance est ouverte à six heures et demie par la lecture des adresses suivantes : Adresse de félicitation, adhésion et dévouement de l’assemblée primaire du canton de Veuvey, district de Baune ; elle supplie l’Assemblée de ne point se séparer avant d’avoir terminé le grand ouvrage de la Constitution, et que les nouveaux ressorts du gouvernement soient dans une activité parfaite. Adresse de la société des amis de la Constitution de la ville de Dunkerque : elle demande que les séances des assemblées administratives soient publiques. (1) Cette séance est incomplète au Moniteur. 520 [Assemblée nationale.} ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [18 novembre 1790.] Adresse des administrateurs du département de l’Aisne, par laquelle ils recommandent à la jus-tice et à la bienveillance de l’Assemblée le sieur Palloy, citoyen de Paris, entrepreneur de la démolition de la Bastille, qui a envoyé aux quatre-vingt-trois départements un modèle très exact de cette forteresse, ainsi que plusieurs tableaux et effets destinés à conserver la mémoire de sa prise et de sa destruction. Adresse de M. Jolivet, chargé des affaires de France dans le pays de Liège, contenant les protestations de MM. Dothée et de Creefft, officiers au régiment Royal-Liégeois, en semestre à Liège, contre les excès commis à Belfort par ce régi-( ment; ensemble une lettre qui lui a été écrite à Bruxelles, par M. de Ringler,* officier du même régiment, dans laquelle il manifeste les mêmes sentiments. Mémoire de Pierre Prades-Prestreau, Français de naissance, dans lequel il fait un exposé frappant des vexations affreuses qu’il a essuyées de la part du gouvernement de Naples, où il était établi, et faisait un négoce considérable, lesquelles vexations l’ont forcé de se retirer à Marseille dans la plus triste situation. 11 supplie l’Assemblée de solliciter son retour à Naples pour mettre ordre à ses affaires, et de lui faire obtenir sûreté individuelle pour le reste de l’Italie. Adresse des habitants de la paroisse d’Haugest, département de la Somme, qui, ne jouissant que d’un revenu inférieur à la somme de 400 livres, jaloux pourtant de donner à la nation une preuve de dévouement à la chose publique, supplient l’Assemblée nationale d’agréer, par forme de contribution patriotique, l’hommage du produit de leur rôle de supplément de 1789. M. Poignot, secrétaire , fait lecture d’une adresse des sieurs Gaudin et Daries, tous deux citoyens de Rouen, par laquelle ils font hommage à l’Assemblée nationale de 800 exemplaires d’un imprimé sur un projet de circulation journalière des voitures publiques dans le royaume. (L’Assemblée renvoie cette adresse au comité d’agriculture et de commerce.) M. Poignot lit ensuite une lettre des sieurs Stranbarth frères et compagnie; cette lettre est accompagnée d’un mémoire contenant des offres d’accélérer la fabrication des nouveaux assignats. (La lettre et le mémoire sont renvoyés au comité des assignats.) M. Bureaux de Pusy propose de faire lecture d’un mémoire adressé à l’Assemblée nationale, par les quartiers-maîtres-trésoriers de l’armée. (Ce mémoire est renvoyé au comité militaire.) Une députation de la section de Gravilliers, fait une pétition tendant à abolir le duel. M. le Président répond : <« L’Assemblée nationale voit avec satisfaction le zèle des habitants de cette capitale s’animer sur un objet aussi important qu’une loi sur le duel. Plusieurs de vos concitoyens sont venus comme vous solliciter l’Assemblée pour bannir à jamais cet usage aussi barbare que criminel : elle prendra votre pétition dans une sérieuse considération. Elle vous invite d’assister à sa séance. » M. de Marinais. Je demande le renvoi de çette pétition au comité de jurisprudence criminelle, qui prendra sans doute aussi des mesures contre les provocations. (L’Assemblée ordonne le renvoi de cette pétition à son comité de jurisprudence criminelle.) M. Anson fait lecture d’une lettre adressée à l’Assemblée nationale par le sieur Des Rotours, premier commis des finances au département des monnaies, par laquelle il lui fait part que le sieur Drez, artiste, dont les talents ont fixé l’attention des Anglais, fait hommage aux représentants de la nation, d’une pièce d’or frappée avec une nouvelle machine de son invention. L’Assemblée décrète que la lettre sera insérée tout entière dans le procès-verbal de la séance, et que la pièce d’or sera envoyée aux archives nationales. Suit la teneur de cette lettre: « Un artiste dont les talents ont fixé l’attention des Anglais, qui l’ont appelé pour établir chez eux différentes machines de son invention, propres à la fabrication des monnaies, le sieur Drez, vient de m’envoyer une pièce d’or frappée avec ces nouvelles machines, et il me charge de la présenter à l’Assemblée nationale pour son don patriotique. J’ai l’honneur de vous envoyer ce tribut des arts et de l’amour de la patrie, et j’ai cru devoir vous rendre compte, en même temps, des précieuses découvertes dont il me fait part. II m’annonce qu’avec une pompe à feu, dont la force équivaut à celle de dix chevaux, il fera mouvoir huit balanciers qui frapperont régulièrement et avec la plus grande perfection soixante pièces chacune par minute; que quatre enfants suffiront pour gouverner ces huit balanciers, leurs fonctions se réduisant à mettre les flaons dans une espèce de tremuye, d’où elles sont conduites entre les coins par une machine de son invention; en sorte que le monnayage n’exposera plus à aucun danger les personnes auxquelles il sera confié. « Le sieur Drez ajoute qu’en augmentant de quatre dixièmes, à peu près, la force de la pompe à feu, elle pourrait faire mouvoir huit coupons en même temps que les huit balanciers qui, comme ces derniers, seront servi parquatre enfants. « Il m’annonce encore deux autres découvertes non moins intéressantes pour la célérité et la perfection du monnayage : savoir, un moyen de multiplier les coins à volonté : moyen qui établit entre eux telle similitude, qu’il rend la con-trefaction très facile à reconnaître. L’autre découverte a pour objet de fabriquer les flaons avec une telle précision, qu’il ne serait plus nécessaire de les ajuster. « Le sieur Drez témoigne, au surplus, le plus grand désir de venir faire hommage de ses découvertes à la France, qu’il a, depuis vingt ans, adoptée pour sa patrie. Il voit, en conséquence, avec beaucoup de plaisir approcher le moment où, après avoir rempli ses engagements avec nos voisins, il lui sera libre de consacrer ses talents au service de la nation. « Je suis, etc.» Signé : Des Rotours, premier commis des finances, au département des monnaies . 12 novembre 1790. Une députation de la République de Mühlhausen se présente à, la barre pour y faire une péti-! tion.