376 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée d’Aix.l 8° La communauté entretient à grands frais la martellière des Hermitants, pour conduire l’eau aux moulins du seigneur ; 9° Chaque charrue paye annuellement deux corvées ; 10° La neuvième partie des amendes; 11° Paye la dîme au seize; 12° 7 cosses et demie de blé [pour chaque mariage, et la moitié pour les veufs ou veuves, et les fours sont à la charge de la communauté. Si, après ces charges aussi excessives que la communauté paye qui emportent la moitié des fruits que les pauvres habitants ont tiré de la terre par la sueur de leurs fronts, et qui sont encore accrues par des 'procès de toute espèce que le seigneur intente contre eux, on venait à mettre un nouvel impôt, sans diminuer les droits du seigneur, il n’y aurait plus moyen de vivre. Art. 18. Qu’il soit permis aux habitants de cette communauté de mettre des terres dans leurs étables et bergeries, et de la sortir pour l’engrais de leurs prés et de leurs oliviers ; la voracité des eaux qui arrosent les premiers, et la mortalité des derniers nécessitent cette permission. Art. 19. Que les habitants de cette communauté soient autorisés à faire des sorties dans la montagne avec des armes à feu, sans que le seigneur puisse les en empêcher, afin de donner la chasse aux loups, sangliers et autres animaux sauvages, dont les uns ravagent les troupeaux et les autres les campagnes. Art. 20. Enfin l’assemblée autorise les députés à l’assemblée générale de la sénéchaussée d’Aix à voter tout objet de doléances imprévus et qui seront jugés nécessaires et avantageux à l’ordre du tiers. Fait et arrêté à Peypin-d’Aigues, dans l’hôtel de ville, ledit jour 29 mars 1789. Signé Chapier, juge; Galliane, consul; Gelus ; N. Bonnet; Firat; Mouret; Sicard; Roux; 3. Furet; J. Dirau; J. Ollivier; J.-B. Jauber; Langier; Pel-len; Jourdan; Dlice; Eyries; A. Ollivier; Furet; A. Ripert; J. Jauber; J. Lud, greffier. Paraphé ne varietur à Peypin-d’Aigues, le 29 mars 1789. Signé Chapier, juge. CAHIER Des doléances de la communauté de Peyrolles (1). Le conseil général de tous chefs de famille a unanimement arrêté que quant aux objets qui intéressent la généralité du royaume, seront expressément chargés d’y requérir et réclamer : 1° Que la convocation des trois ordres faite par sénéchaussée est contraire à la constitution du co-Etat de Provence, qu’elle porte atteinte au droit précieux individuel et immissible qu’ont tous les sujets de province de concourir immédiatement ou médiatement à la rédaction des instructions, et à la députation des Etats généraux, et essentiellement parce qu’elle est imparfaite et indi-visée. 2° Que dans les Etats généraux, il sera délibéré par tête et non par ordre, ainsi qu’on le pratiquait avant le seizième siècle, désavouant toute opinion contraire. 3° Que les Etats généraux du royaume seront périodiquement tenus dans un temps fixe et pro-(1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire. chain, sans que la forme puisse être changée, et le nombre des représentants diminué. 4° Que les trois ordres de Provence seront assemblés immédiatement après la tenue des Etats généraux, comme étant le sûr moyen de nous donner des Etats vraiment représentatifs et nationaux. 5° Que les Etats généraux se chargeront pour et au nom de la nation de la dette du royaume. 6° Qu’il ne sera dorénavant établi ou levé aucun impôt sur les sujets et sur les propriétés, que les Etats généraux ne l’aient expressément délibéré et consenti. 7° Que tout impôt consenti par lesdits Etats ne pourra être prorogé, sous quelque prétexte que ce soit, et qu’il cessera par le défaut de convocation des Etats généraux. 8° Que les ministres seront comptables à la nation, poursuivis et jugés par elle comme criminels de lèse-majesté, quand ils tromperont la confiance du souverain et qu’ils malverseront. 9° Que tous les domaines qui ont apartenu à la couronne, et qui ont été donnés, vendus ou échangés, seront repris, sauf telle indemnité que les Etats généraux détermineront. 10° Que tous sujets nobles et ecclésiastiques contribueront également et en proportion de leur fortune à toutes les charges quelconques, et en raison de la protection qu’ils reçoivent, comme étant l’unique destination de l’impôt. 1 1° Que tous les privilèges seront abolis, car si tout privilège est dispense pour l’un, il est découragement pour l’autre. Tout privilège étant hors du droit commun, il suit que l’exemption des uns préjudicie aux autres, voilà l’injustice. Les privilèges honorifiques avilissent le grand corps des citoyens. Pourquoi humilier tant d’hommes pour en honorer quelques autres, voilà la déraison. 12° L’abolition de la noblesse héréditaire. C’est étendre le privilège jusqu’à ceux qui ne le mériteront jamais, c’est éteindre toute émulation. La noblesse doit être la récompense du citoyen et sujet vertueux, utile à sa patrie et à ses concitoyens. 13° Que les codes civil et criminel seront réformés. Que l’instruction de la procédure criminelle sera publique, que le ministère public ne pourra se saisir d’un domicilié sur un simple soupçon, hors les cas très-rares qui justifient des exceptions; que les juges imprudents qui le priveront de sa liberté soint soumis à des dédommagements ; que les parties, aussi, qui exposeront faux dans leurs plaintes soient tenues à des dommages. 14° Que tous les tribunaux d’exception seront supprimés, en indemnisant les pourvus à titres d’office ; qu’il n’y ait plus que deux tribunaux, celui du domicile et par appel aux cours souveraines et en dernier ressort. 15° L’abrogation de toutes lettres attentatoires à la liberté des citoyens. 16° Que tous les sujets de quelque ordre qu’ils soient concourront indistinctement à tous emplois militaires, bénéfices et charges, même attributives de noblesse. 17° L’abolition de tous droits de circulation dans l’intérieur du royaume et le reculement des bureaux des traites dans les frontières. 18° Que toutes les communes de Provence seront rétablies dans l’exercice des mairies que les seigneurs de fiefs se sont appropriées. La Provence les a acquises, elle doit donc jouir de son droit. C’est débarrasser les communes d’une chaîne d’autant plus lourde, qu’il est dans la disposition des seigneurs d’empêcher : 1° La tenue des conseils municipaux quand on [Étals gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée d’Aix.] 377 veut y délibérer sur un intérêt opposé au leur, et cela n’est pas sans beaucoup d’exemples -, 2° De diriger le vœu des habitants quand ils sont timides et qu’ils n’ont pas de communistes éclairés. Beaucoup de droits n’existeraient pas sans l’ignorance ou la faiblesse de ceux-ci. 19° Que tout comme il n’y a qu’un souverain, il ne doit y avoir qu’une justice royale ; en conséquence, 'demander l’extinction de' toutes les juridictions seigneuriales. 20° La suppression aussi des capitaineries de chasse et de pêche. Le droit exclusif que les seigneurs de fiefs exercent est une source de vexations. Le laboureur est toujours réduit à voir dévorer toutes ses récoltes par le gibier et autres animaux, parce qu’il ne peut s’en défendre. On lui fait des procédures s’il tend des lacs, s’il tue quelque gibier avec son bâton, on lui tue son chien s’il court le gibier. Cette suppression est d’autant plus nécessaire que tous les oliviers ayant péri par le froid, iis ne se reproduiront plus si les jets et leur pousse nouvelle est rongée par le gibier. 21° La liberté aux communes et à chaque particulier individuellement de se racheter en tout temps, et en divers payements, des droits et devoirs seigneuriaux consistant en censes, tasques, lods, retraits, banalité et autres, sur quelque titre qu’ils soient assis, en indemnisant ainsi et de la manière que les Etats généraux ordonneront que l’estimation en soit faite; l’agriculture et le commerce y gagneront, la population augmentera dans les villages qu’on déserte par les mêmes raisons qui les faisaient déserter dans les treizième et quatorzième siècles. 22° Que les communes de Provence pourront nommer un syndic avec entrée aux Etats de la province. 23° Que le tiers-état sera en nombre de sa population et de sa contribution dans les Etats provinciaux et généraux, avec le clergé et la noblesse, et tout au moins en égalité de voix même dans les commissions intermédiaires, regardant comme inconstitutionnelle toute assemblée d’Etat et dans laquelle cette égalité au moins ne se rencontrerait pas. 24° L’exclusion des magistrats des Etats provinciaux et généraux. 25° La liberté de la presse, comme faisant partie de la liberté individuelle. Chacun doit pouvoir disposer de son opinion ; elle servira à propager les lumières. 26° La modération dans le prix du sel rendu uniforme dans tout le royaume. L’augmentation a ruiné la Provence, détruit l’agriculture, tari totalement les engrais qui fertilisaient les champs, la toison des troupeaux servait aux vêtements du cultivateur, le lait le nourrissait ; tout lui manque. 27° La réduction des droits sur les cuirs :'cette fabrication importante et nécessaire est détruite par l’augmentation de ces droits]; celle des droits royaux dans les tribunaux de justice et qui se reproduisent dans le même procès. 28° La suppression des dîmes, qui ne furent dans le principe qu’une oblation volontaire et pour sustenter les pasteurs. Les communes fourniront à leur entretien suivant que les Etats généraux en ordonneront. Elles seront chargées des églises et maisons curiales. Le résidu de l’immense produit qui nourrit le luxe de ceux qui le reçoivent ailleurs que dans le lieu où elle se perçoit servira à l’extinction de la dette publique et nationale. 29° Les communes de Provence seront maintenues dans la faculté constitutionnelle d’asseoir l’impôt ainsi qu’elles voudront et même de l’abonner. Enfin, la communauté de Peyrolles charge expressément ses députés de faire insérer dans le cahier des doléances, que son terroir , sans cesse exposé aux débordement de la rivière de Durance, est sans cesse endommagé, et qu’il sera inévitablement détruit si le gouvernement ne le protège pas, et ne vient pas à son secours ; qu’elle supporte des charges excessives par les impositions annuelles qu’elle emploie à des réparations avec lesquelles elle n’a pu se garantir. Que les dépenses excédant ses moyens, elle espère de la justice du meilleur des rois qu’il destinera une somme annuelle pour ces réparations pour être faites sur le terroir de la communauté et sous la direction des officiers municipaux, en conformité des devis des ingénieurs qu’elle choisira. Qu’il sera libre à ses habitants d’aller prendre sur le lit de ladite rivière le sable et pierres qui lui seront nécessaires pour leur bâtisse, sans que le seigneur du lieu puisse les en empêcher, soit à titre d’épave, alluvion ou autrement, ainsi qu’il prétend le pouvoir et qu’il l’empêche effectivement. Déclarant, au surplus, le conseil, quequantaux autres objets soit généraux pour le royaume, soit particuliers à cette province, il s’en réfère absolument au cahier des doléances qui sera dressé à la prochaine assemblée pour l’élection des députés aux Etats généraux, approuvant dès à présent tout ce qui sera fait et arrêté par eux et tous les pouvoirs qui leur seront donnés. Ainsi que dessus a été délibéré, et se sont tous les chefs de famille sachant écrire soussignés. Supplément des doléances au désir des communistes. Le conseil charge expressément ses députés de réclamer; l°que la communauté rentre dans toutes ses possessions, domaines, terres gastes, îles et autres nonobstant, toute transaction sur ce passées entre les seigneurs de fief et les communautés, suivant que les Etats généraux en ordonneront. 2° Que les Etats généraux statueront sur ce qu’à l’avenir, pour ne pas détruire l’espèce, qu’il ne soit plus tué de veaux, agneaux et autres bêtes nécessaires pour l’engrais et la culture des terres. Signé Maurel, lieutenant déjugé; Ricard, maire; Abeau, consul; Michel ; Audan ; Gaspard Bernard; Isnard; Antoine Guenez ; A. Jayses ; Audran Baill ; Marin ; Pena Morel ; Pascal ; Joseph Ruenoux ; Joseph Reynoird; Jean-Baptiste Go ffin ; Monge ; Balier ; Gatemet ; Abeau ; Alary ; Jourdan ; Au-quier ; Hemiton ; Bernard ; Gautier ; J.-B. Rey-naud ; Nicolas ; Adainst ; B.-P. Robert ; Bouca-tier ; Boureillon ; Antoine Olonne ; Athenous , greffier. Paraphé ne varietur. Signé Maurel, lieutenant de juge. CAHIER Des doléances, plaintes et remontrances de la communauté de Porcioux (1), Délibéré en suite des ordres du Roi dans l’assemblée de tous chefs de famille convoquée à cet (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l'Empire.