164 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j |6frn'” e�bre" 1793 « La Convention nationale, après avoir en¬ tendu le rapport de son comité de législation [Pons {de Verdun), rapporteur (1)] sur la pétition de la municipalité de Maillerencourt, tendant à ce que le procès qui existe entre les habitants de cette commune et Sartan-Fenrier, depuis 1765, soit jugé par les arbitres auxquels il a été soumis, conformément à la loi du 10 juin; « Considérant que ce procès a pour objet la restitution de droits de surcharge sur eux perçus par Sartan-Fenrier ou ses auteurs, en vertu d’un titre nouveau extorqué et contraire au titre ancien: « Que ce genre d’usurpation proscrit par les anciennes lois, l’a été notamment par l’article 4 du titre 3 du décret du 24 mars 1790; « Qu’enfin le décret du 25 août 1792 (articles 10 et 12) ne défend que la répétition des droits payés conformément aux lois antérieures sans sur¬ charge, et n’éteint, sans dépens, que les procès intentés pour raison desdits droits; « Décrète qu’il n’y a pas lieu à délibérer (2). » « La Convention nationale renvoie au comité des secours publics (3), pour en faire un prompt rapport, la pétition de l’épouse de Joseph Char¬ tier, l’un des vainqueurs du 10 août, qui, dans cette journée mémorable, fut blessé en foudroyant les satellites de la tyrannie; qui, depuis cette époque, a fait des prodiges de valeur dans le 13e régiment des chasseurs à cheval, et dont néanmoins la femme et les enfants, accablés de misère, n’ont encore obtenu aucun secours de la patrie; et, par prévision, décrète qu’en vu du présent décret il sera délivré à la femme Char¬ tier, par le receveur du district du Mans, une somme de 150 livres à valoir sur les indemnités et secours qu’elle a droit d’attendre (4). » « La Convention nationale renvoie à son co¬ mité de l’examen des marchés (5), toutes les réclamations des comptes, qui n’ont été pré¬ sentés à la Commission créée pour les affaires de la Belgique que relativement aux indemnités accordées par le décret du 8 avril dernier, rap¬ porté le 11 brumaire. Art. 2. « H sera nommé trois nouveaux membres pour remplacer ceux de cette Commission qui sont absents. Us instruiront sur la dénonciation en péculat faite contre l’ex-ministre Lebrun, et con¬ naîtront de toutes les dilapidations commises (1) D’après la minute du décret qui se trouve aux Archives nationales, carton C 282, dossier 787. (2) Procès-verbaux de la Convention, t. 26, p. 170. (3) La minute du décret qui se trouve aux Archives nationales (carton C 282, dossier 787) est décrite et signée par Philippeaux. (4) Procès-verbaux de la Convention, t. 26, p. 170. (5) Le décret qui se trouve aux Archives natio¬ nales (carton C 282, dossier 787) a été proposé par Laurent Lecointre. dans la Belgique, conformément au décret du 18 août dernier (1). » Sur la dénonciation d’un membre [Laurent Lecointre (2)], tendant à ce que le ci-devant château de Tilliers, département de l’Eure, dan¬ gereux par sa force et sa position, soit détruit, renvoie aux représentants du peuple dans ce département, pour l’exécution des décrets rela¬ tif à la démolition des châteaux forts (3). La Convention nationale charge son comité de Salut public et de sûreté générale de lui pré¬ senter incessamment un rapport sur la conjura¬ tion qui lui a été dénoncée [Motion de Dan¬ ton (4)]; charge en outre son comité de Salut public de soumettre sans délai à la discussion le mode de gouvernement provisoire de la Répu¬ blique (5). Compte rendu du Moniteur universel (6). On entend quelques députations de com¬ munes qui apportent les dépouilles de leurs églises et des ci-devant prêtres qui renoncent à leurs fonctions ecclésiastiques. Danton. Il y a un décret qui porte que les prêtres qui abdiqueront iront porter leurs re¬ nonciations au comité. Je demande l’exécution de ce décret; car je ne doute pas qu’ils ne vien¬ nent successivement abjurer l’imposture. Il ne faut pas tant s’extasier sur la démarche d’hommes qui ne font que suivre le torrent. Nous ne voulons nous engouer pour personne. Si nous n’avons pas honoré le prêtre de l’erreur et du fanatisme, nous ne voulons pas plus ho¬ norer le prêtre de l’incrédulité; nous voulons servir le peuple. Je demande qu’il n’y ait plus de mascarades antireligieuses dans le sein de la Convention. Que les individus qui voudront déposer sur l’autel de la patrie les dépouilles des églises ne s’en fassent plus un jeu ni un tro¬ phée. Notre mission n’est pas de recevoir sans cesse des députations qui répètent toujours les mêmes mots. Il est un terme à tout, même aux félicitations. Je demande qu’on pose la barrière. Il faut que les comités préparent un rapport sur ce qu’on appelle une conspiration de l’étran¬ ger. Il faut nous préparer à donner du ton et de l’énergie au gouvernement. Lo peuple veut, et il a raison, que la terreur soit à l’ordre du jour; mais il veut que la terreur soit reportée à son vrai but, c’est-à-dire contre les aristocrates, contre les égoïstes, contre les conspirateurs, (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 26, p. 171. (2) D’après la minute du décret qui se trouve aux Archives nationales, carton C, 282, dossier 787. (3) Procès-verbaux de la Convention, t. 26, p. 171. (4) D après les divers journaux de l’époque. (5) Procès-verbaux de la Convention, t. 26, p. 172. (6) Moniteur universel [n° 68 du 8 frimaire an II (jeudi 28 novembre 1793), p. 275, col. 1]. Voy. d autre part ci-après, annexe n° 2, p. 235, le compte rendu de la même discussion d’après divers jour¬ naux. [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. ® frimaire an 11 165 contre les traîtres amis de l’étranger. Le peuple ne veut pas que celui qui n’a pas reçu de la na¬ ture une grande force d’énergie, mais qui sert la patrie de tous ses moyens, quelque faibles qu’ils soient, non, le peuple ne veut pas qu’il tremble. Un tyran, après avoir terrassé la ligue, disait à un des chefs qu’il avait vaincus, en le faisant tuer : « Je ne veux pas d’autre vengeance de vous. » Le temps n’est pas venu où le peuple pourra se montrer clément. Le temps de l’in¬ flexibilité et des vengeances nationales n’est point passé; il faut un nerf puissant, un nerf terrible au peuple. Ce nerf est le sien propre, puisque d’un souffle il peut créer et détruire ses magistrats, ses représentants. Nous ne som¬ mes, sous le rapport politique, qu’une Commis¬ sion nationale que le peuple encourage par ses laudissements. e peuple, après avoir fondé la République, veut que nous essayions tous les moyens qui pourront donner plus de force et d’action au gouvernement républicain. Que chacun de nous médite donc tous les jours ces grands objets. Il faut que le comité de Salut public se dégage de beaucoup de détails, pour se livrer tout entier à ces importantes méditations. Donnons enfin des résultats au peuple. Depuis longtemps, c’est le peuple qui fait toutes les grandes choses. Certes, il est beau que les représentants s’humilient devant la puissance souveraine. Mais il ferait beau qu’ils s’asso¬ ciassent à sa gloire, qu’ils prévinssent, et diri¬ geassent ses mouvements immortels. Je demande que le comité de Salut public, réuni à celui de Sûreté générale, fasse un prompt rapport sur la conspiration dénoncée et sur les moyens de donner une action grande et forte au gouvernement provisoire. Fayau. je ne m’oppose pas au renvoi; mais je fais observer à Danton qu’il a laissé échapper des expressions qui ne me paraissent pas propres. Il a dit que le peuple est souverain; c’est une vérité éternelle. Mais il a parlé de clémence; il a voulu établir entre les ennemis de la patrie une distinction dangereuse en ce moment. Quant à moi, je pense que quiconque n’a rien fait pour la liberté, ou n’a pas fait pour elle tout ce qu’il pouvait faire, doit être compté au nombre de ses ennemis. Danton. Je demande à relever un fait. Il est faux que j’aie dit qu’il fallait que le peuple se portât à l’indulgence; j’ai dit au contraire que le temps de l’inflexibilité et des vengeances natio¬ nales n’était point passé. Je veux que la terreur soit à l’ordre du jour; je veux des peines plus fortes, des châtiments plus effrayants contre les ennemis de la liberté; mais je veux qu’ils ne por¬ tent que sur eux seuls. Fayan. Danton a dit encore que nous faisons un essai du gouvernement républicain. Je suis bien loin de partager cette opinion. N’est-ce pas donner à penser qu’un autre gouvernement peut convenir au peuple? Non, nous n’aurons pas juré en vain la République ou la mort; nous aurons toujours la République. Danton. Je ne conçois pas qu’on puisse ainsi dénaturer mes idées. Il est encore faux que j’aie parlé d’un essai du gouvernement républicain. Et moi aussi je suis républicain, républicain impérissable. La Constitution est décrétée, et acceptée. Je n’ai parlé que du gouvernement provisoire; j’ai voulu tourner l’attention de mes collègues vers les lois de détail nécessaires pour parvenir à l’exécution de cette constitution républicaine. La proposition de Danton est décrétée au milieu des applaudissements. « La Convention nationale, après avoir en¬ tendu le rapport de son comité des secours pu¬ blics [Roger-Ducos, rapporteur (1)], sur les observations faites par le ministre de l’intérieur, relatives à l’exécution de la loi des 22 février et 14 août 1793 (vieux style), concernant les indemnités à accorder aux citoyens qui ont éprouvé ou qui éprouveront des pertes par l’inva¬ sion de l’ennemi, décrète ce qui suit : Art. 1er. « L’article 3, omis dans la dernière rédaction de la loi du 27 février et 14 août, sera rétabli en ces termes : « Le conseil exécutif enverra sans délai dans « chaque département où l’ennemi a pénétré, « deux commissaires pris dans les départements « de l’intérieur, à l’effet de dresser procès-verbal « des dégâts qui y ont été commis, et constater « la perte que chaque citoyen aura faite. » Art. 2. « Les indemnités déterminées par des procès-verbaux dressés en conformité des précédentes lois, et antérieurement à la promulgation de celle des 27 février et 14 août, seront acquittées; mais les pertes ou dommages, à quelque époque qu’ils aient été effectués, qui n’auraient pas été constatés avant cette promulgation, le seront d’après le mode prescrit par la dernière loi des 27 février et 14 août. Art. 3. « La Convention nationale, expliquant l’ar¬ ticle 10 de la même loi, décrète que l’indemnité accordée aux fermiers pour les frais d’exploita¬ tion et de semences, ne pourra, en aucun cas, excéder l’évaluation du revenu net de l’héritage affermé, tel qu’il est porté dans les matrices des rôles, sans que les prix des baux puissent entrer en considération, ni dans l’intérêt des fermiers, ni dans celui des propriétaires. Art. 4. « La valeur des maisons des villes, des fa¬ briques, manufactures et moulins, sera égale¬ ment déterminée ainsi qu’il est prescrit par les articles 11 et 12 de la même loi, et d’après les (1) D’après la minute du décret qui se trouve aux Archives nationales , carton C 282, dossier 787.