[Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [27 octobre 1790.] 4� ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. BARNAVE. Séance du mercredi 27 octobre 1790 (1). La séance est ouverte à neuf heures et demie du matin. MM. les secrétaires donnent lecture des procès-verbaux des deux séances de la veille, au matin et au soir. M. d’André demande que dans le procès-verbal de la séance du soir il soit fait mention des deux amendements proposés sur le décret concernant l’affaire des Baux. M. Durand-iSaillane propose , si cette demande est accueillie, qu’ii soit également rendu compte des motifs qui ont fait rejeter ces amendements. Cette double motion est décrétée. Le premier amendement omis dans le procès-verbal d’hier soir est celui-ci : L'Assemblée nationale a cassé la procédure prévotale , comme faite par juges notoirement incompétents , et attentatoire aux droits des municipalités, à la liberté de leurs délibérations . Gel amendement a été combattu comme attribuant à l’Assemblée nationale l’exercice du pouvoir judiciaire. Le second amendement consistait à réserver aux accusés leurs moyens de défense, notamment l’incompétence des juges, et les nullités de la procédure. Mais on avait répliqué que cette réserve était de droit; qu’il est même de l’office du juge, avant de prononcer sur le fond, d’examiner la procédure et de la casser s’il la trouve nulle; et les deux amendements avaient été rejetés par la question préalable. Le comité de vérification des pouvoirs propose d’admettre M. Albert, aîné, homme de loi, en remplacement de M. Hermann, député de Colmar, décédé. M. l’abbé Pinelle. Je ne m’oppose pas à l’admission de M. Albert, mais je dois faire remarquer, pour la régularité des faits, qu’on a eu tort de le considérer comme suppléant de M. Hermann, attendu que M. Hermann avait accepté sa mission et l’a remplie pendant longtemps, et que M. Albert ayant été nommé pour le cas auquel M. Hermann n’acepterait point la députation, n’est pas nommé pour le cas de mort qui se présente aujourd’hui. M. de Broglie. Le comité de vérification a considéré en cette affaire l’intention présumée des électeurs. Elle est naturelle et raisonnable. M. le Président consulte l’Assemblée. M. Albert est admis en remplacement de M. Hermann. M. Voulland, député du département du Gard. Je suis chargé par le club des amis de la Constitution, établi à Nîmes, et dont le patriotisme vous est connu, de démentir la plus atroce et la plus absurde calomnie, que n’a pas craint de hasarder contre eux M. Tessier, se disant autrefois baron de Marguerittes. J’ignore quels sont ses garants, mais je devine aisément quels peuvent être ses motifs secrets; l’Assemblée les pénétrera sans peine si elle veut se rappeler qu’elle va, sous peu de jours, s’occuper de la grande affaire de Nîmes... ( Une grande partie de la salle demande l'ordre du jour.) On a saisi avec prestesse, pour calomnier le club des amis de la Constitution de la ville de Nîmes, le moment où aucun des membres qui auraient pu les défendre n’étaiti encore rendu à la séance. Vous avez entendu, comme par défaut, une abominable calomnie ; il serait de votre justice d’entendre, comme par voie de rétractation, le démenti que je suis chargé d’en faire, au nom de cinq cents citoyens distingués par leurs vertus civiques, et dont vous avez quelquefois accueilli favorablement les pétitions patriotiques... {On persiste à demander l'ordre du jour ou le contenu en deux mots de la lettre.) Eh bien ! en deux mots, M. Tessier a dit, et Le Moderne, rédacteur du Courrier de Madon , a répété après lui, n° 10, que, dans la séance du soir, du 12 de ce mois, M. Tessier avait déclaré : <• Que le major de la légion de Nîmes s’était permis, en dernier lieu, de dire hautement dans le club des amis de la Constitution, après la lecture d’une adresse des officiers municipaux de Nîmes à l’Assemblée nationale, que la lanterne était un supplice trop doux pour eux, qu’il fallait dresser un échafaud au milieu de la place de l’Esplanade, et les y faire expirer sur une roue de charrette. » Cette inculpation odieuse a révolté les membres de cette société, tous vrais amis de la Constitution ; en l’apprenant, ils ont voté par un cri unanime d’en faire le démenti le plus formel auprès de l’auguste Assemblée nationale, devant laquelle on n’a pas craint de les calomnier. C’est devant plus de deux mille personnes , disent les amis de la Constitution à Nîmes, que la lecture de l’adresse des officiers municipaux a été faite dans une de nos séances, et nous en appelons au témoignage de tous les honnêtes citoyens, qui ont tous le droit d’assister à nos assemblées, pour déclarer s’ils y ont rien entendu qui eût quelque rapport à cette phrase incendiaire. Je n’ai plus rien à dire, je crois avoir dit tout ce qu’il fallait pour détruire complètement la plus absurde et la plus calomnieuse inculpation; votre jugement dans la fameuse affaire de Nîmes, fixant l’opinion qu’on cherche à égarer par des écrits incendiaires, rendra à chacun selon ses œuvres, et vengera légalement tous ceux qui ont à se plaindre des municipaux de Nîmes. M. Louis-Alphonse Savary de Lancos-me, député du département d’Indre-et-Loire, demande un congé d’un mois. L’Assemblée accorde ce congé. M. de Lancosme. Avant de profiter de mon congé, je suis bien aise d’offrir à l’Assemblée un ouvrage de ma composition intitulé : Opinion et projet de décret sur la mendicité. Je me trouverai honoré si elle veut bien en agréer l’hommage et les vues. (1) Cette séance est incomplète au Moniteur. M. Dupré, député de Carcassonne. Je me suis occupé d’une matière à peu près semblable en (As emblée natiqnalo.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [27 octobre 1790.] 48 recherchant les moyens d'exciter l'industrie nationale et de détruire la mendicité. Je me propose également de faire distribuer mon travail à mes collègues. (Ces deux mémoires sont renvoyés au comité de mendicité.) (Yoy. plus loin ces documents annexés à la séance de ce jour.) M. d’André. Plus de quatre-vingts membres de l’Assemblée nationale ont été nommés juges dans différents districts ; c’est une preuve de la confiance qui les environne. Ils demandent tous des congés pour aller se faire installer, et nous allons ainsi nous voir privés d’une foule d’excellents patriotes; je demande que, pour arrêter ces absences, l’Assemblée nationale décrète que ceux de ses membres qui sont nommés juges ne pourront siéger qu’après la présente session, et qu’avant ce temps ils seront remplacés dans les sièges par des suppléants. (Cette proposition est adoptée.) M. de Wimpfen, rapporteur du comité militaire. Le régiment de la Reine, cavalerie, qui avait exigé une somme de 30,000 livres de M. de Roucy, son ancien colonel, a soumis ses récla-mations.à M. de Plantadeque le roi avait nommé inspecteur. Après la reddition des comptes qui ont été trouvés parfaitement en règle, les sous-officiers et soldats ont reconnu leur faute; ils ont voulu que leur déclaration fût inscrite sur le procès-verbal d’examen et ils ont demandé à s’acquitter par une retenue journalière sur leur solde. Le comité n’a vu dans leur première démarche que le délire d’une fièvre chaude, le fruit des vexations dont ils avaient été les victimes et du passage trop précipité peut-être de l’ancien au nouveau régime. Voici le décret qu’il vous propose : « L’Assemblée nationale, après avoir entendu le rapport de son comité militaire sur ce qui s’est passé au régiment de la Reine, cavalerie, le 12 du mois d’août dernier et jours suivants, déclare que, d’après le compte rendu, par l’officier général inspecteur, de la bonne administration de ce régiment, les sous-officiers et cavaliers qui ont contraint M. de Roucy, leur ancien colonel, à leur payer une somme de 30,Ü00 livres, qui ne leur était point due, se sont rendus coupables envers la loi ; mais prenant en considération leur prompt relour à la discipline et le repentir qu’ils ont manifesté de leur faute, elle décrète que le roi sera prié de ne pas exercer envers eux la rigueur des lois, mais d’ordonner la retenue, au profit du Trésor public, d’un soi par jour sur Je prêt de chacun des sous-officiers et cavaliers qui ont eu part au partage, jusqu’au parfait payement des 30,000 livres. « Et considérant qu’il est de tonte justice de rembourser M. de Roucy, l’Assemblée nationale décrète que le minisire de la guerre lui fera délivrer sans retard la susdite somme de 30,000 liv., sur les fonds affectésaux dépenses extraordinaires de son département. » M. le Président met aux voix ce projet de décret. Il est adopté. M. Rabaud . Je dois vous rendre compte des mouvenientpquî onteulieu danslecomlatVenais-sin. On est dans la plus grande inquiétude de ce que l’Assemblée nationale ne prend aucun parti. Il y a eu une escarmouche entre les habitanls d’Avignon et ceux de Gavaillon. Les Avignonnais ont perdu quelques hommes. Les relations de commerce que nous avons avec Avignon et le comtat Venaissin nous imposent la loi de remédier à ces maux. Je crois donc qu’il faudrait mettre Avignon et le comtat Venaissin sous la protection de la loi, sans rien préjuger sur la grande question de la réunion. Je demande, en conséquence, que le comité diplomatique et celui d’Avignon fassent au plus tôt leur rapport. M. d’André. L’affaire de Brest a occupé tous les moments du comité diplomatique, et il ne lui a pas été facile de se réunir au comité d’Avignon.. M. de Saint-Martin. J’ai reçu une lettre de Valence, par laquelle on m’attesté que l’imprimé dans lequel on affecte de répandre que cinquante villes sont armées pour la défense de la religion et de la monarchie, et que les gardes nationales du Vivarais ont fait serment de dissoudre l’Assemblée nationale, la lettre, dis-je, m’atteste qu’il n’est pas un mot de tout cela. A l’exception de dix ou douze individus qui ont formé ie camp de Jallès, tous les citoyens sont amis de la liberté, et ils mourront pour la maintenir. (L’Assemblée décide que le rapport de l’affaire d’Avignon lui sera fait à la séance de samedi soir.) Un membre demande une interprétation sur le décret relatif au remboursement des dîmes inféodées appartenant aux laïques. M. Durand-Maillanc répond que le comité ecclésiastique prépare une instruction qui remplira cet objet. La motion n’a pas de suite. M. le Président. L'ordre du jour est la suite de la discussion sur la contribution personnelle. Titre IL M. Defermon , rapporteur. Je ne vous représenterai pas aujourd’hui les dispositions de l’article 9 que vous avez ajournées dans la séance d’hier ; elles trouveront lèur place lors de l’as-siette qui doit servir à la perception delà coniri-bution personnelle. Je passe à l’ancien article 8 qui devient l’article 9 du décret et je vous soumets une rédaction nouvelle ; « Art. 9. A l’égard de tous les contribuables qui justifieront être imposés aux rôles des contributions foncières, ou avoir supporté, sur les rentes dont ils sont propriétaires par titre public, des retenues conformes à ce qui a été décrété pour la contribution foncière, il leur sera fait, dans le règlement de leur cote, une déduction proportionnelle à leurs revenus fonciers ou aux rentes qui auront supporté leur retenue. « L’Assemblée nationale se réserve de statuer sur les déductions à faire aux étrangers résidant en France et aux Français propriétaires de biens, soit dans les colonies, soit dans l’étranger, » M. Dionis Duséjour. Ou l’imposition que vous avez décrétée sera forte, ou elle sera modérée : dans le premier cas, il sera impossible de la faire payer, dans le second elle sera nulle. Pour qu’elle soit supportée plus également, je pense qu’il faut lui donner une grande surface. Je demande, en conséquence que l’article soit ajourné jusqu’au moment où l’on fera le tarif de l’imposition. M. Régaler. Je demande, par amendement, que