556 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j ££�*1793 connaissance de toutes ces impositions. L’on nous croit responsables des sommes qui en pro¬ viennent. On pense qu’elles se versent au Trésor public. Eh bien, ni ce Trésor, ni les caisses de district n’ont reçu un seul denier de ces imposi¬ tions arbitraires. Dans toute l’argenterie du culte qu’ont apportée les citoyens à la Conven¬ tion, il y aura aussi un certain déficit, car il s’est fait beaucoup de friponneries. S’il est essentiel de punir les contre-révolu¬ tionnaires, les égoïstes, par des impôts forcés, il est important que nous donnions des secours aux pères et mères indigents des défenseurs de la patrie, et pour cela, il faut de l’économie, il faut de l’ordre, il faut que tout s’organise et vienne au centre commun (à la trésorerie). Je demande que l’état des taxes révolutionnaires soit envoyé à la trésorerie et que l’on s’occupe de déterminer un mode de dépenses révolution¬ naires. D’après les propositions de différents membres, le décret suivant est intervenu. (Suit le texte du décret que nous avons inséré au cours de la séance d'après le procès-verbal.) IV. Compte rendu des Annales patriotiques et littéraires ( 1 ). Bourdon (de l'Oise) dénonce la Sentinelle du Nord, journal dans lequel une nouvelle fausse se trouve insérée. Il y est dit qu’un bâtiment de Danemark nous a apporté 20,000 fusils. Une autre nouvelle, démentie par une lettre du représentant Isoré et insérée dans la même feuille, c’est que les représentants à l’armée du Nord ont été mis en arrestation. Merlin (de TJiionville) . Sans doute c’est une dénonciation que votre comité doit examiner, car un journaliste qui commet un faux ment à la nation entière. Il peut égarer par des me¬ sures dangereuses, et l’on doit sévir contre celui qui ose ainsi mentir au peuple. Le fait dont il s’agit est faux et tend à nous aliéner les puissan¬ ces neutres. Mais j’appelle votre attention sur des faits non moins graves. Thionville, qui a rendu des ser¬ vices importants à la République, Thionville qui tripla son courage et ses forces en présence de l’ennemi; eh bien Thionville voit ses habi¬ tants taxés arbitrairement par des agents du conseil exécutif. Voici plusieurs de leurs mandats ; celui-ci porte : Le citoyen... paiera, dans trois heures, la somme de 1,000 livres, sous peine d’être traité comme suspect. Il faut enfin que le conseil exécutif examine la conduite de ces hommes qui, hier aristocrates, aujourd’hui forcenés patriotes, cherchent ainsi à faire ou¬ blier leurs opinions précédentes. Cambon. L’on se plaint journellement des taxes arbitraires; mais je déclare qu’il n’en est pas encore rentré un sol à la trésorerie nationale. Les caisses de district n’en ont pas reçu un de¬ nier. L’argenterie du culte éprouvera un déficit (1) Annales patriotiques et littéraires [n° 350 du 27 frimaire an II (mardi 17 décembre 1793), p. 1581, col. 2]. très grand, car il s’est fait, à cet égard, bon nombre de friponneries. Il faut enfin y mettre ordre. Je demande que l’état des taxes révolution¬ naires soit envoyé à la trésorerie nationale et que l’on organise le mode des dépenses révolu¬ tionnaires. L’Assemblée décrète qu’elle renvoie au co¬ mité de Salut public l’examen de la conduite des commissaires du conseil exécutif dans la ville de Thionville. Ce comité prendra les me¬ sures les plus efficaces pour en obtenir des comptes. Le comité examinera le fait relatif aux 20,000 fusils prétendus envoyés de Danemark et inséré dans différents journaux. Les propositions de Cambon sont renvoyées au comité des finances. Compte rendu du Journal de la Montagne (1). Bourdon dénonce la Sentinelle du Nord comme ayant cherché à augmenter le nombre de nos ennemis par la manière perfide avec laquelle le rédacteur rapporte que le roi de Danemark, au mépris des lois de la neutralité, nous a fait passer 20,000 fusils. Un membre remarque que le même fait a été répété dans plusieurs autres journaux. Renvoyé au comité de Salut public. Le même comité [celui de Salut public] est chargé d’examiner la conduite des commis¬ saires du conseil exécutif dans la ville de Thion¬ ville et de prendre les mesures les plus efficaces pour en obtenir des comptes. Cambon. Ils ne sont pas les seuls à qui il faut en faire rendre. Il n’est pas encore rentré un sol au Trésor national des taxes révolutionnaires, et l’argenterie des églises, que l’exagération évaluait à des milliards, ne l’a guère plus enri¬ chi jusqu’à présent. Les mesures qu’il propose à ce sujet sont ren¬ voyées au comité de Salut public. CONVENTION NATIONALE Séance du 27 frimaire an II. (Mardi, 17 décembre 1793) La séance est ouverte à 11 heures (2). Les administrateurs du département de l’Aude font hommage à la Convention nationale de plusieurs de leurs arrêtés, et lui demandent de les recevoir comme la preuve de leurs efforts et de leurs succès pour faire triompher les (1) Journal de la Montagne [n° 34 du 27 frimaire an an II (mardi 17 décembre 1793), p. 272, col. 2] et n° 35 du 28 frimaire an II (mercredi 18 décembre 1793), p. 278, col. 2]. (2) �Procès-verbaux de la Convention , t. 27, p. 255 [Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES, j � ” 557 armes de la République et les principes de la raison et de la philosophie. La mention honorable et le renvoi au comité de Salut public sont décrétés (1). La Société républicaine de Rochefort exprime son vœu pour que l’or et l’argent disparaissent jusqu’à la paix, parce qu’ils ont causé tous les maux de la République, et les succès des scé¬ lérats et des aristocrates. La Convention nationale décrète l’insertion au « Bulletin » et le renvoi au comité des finan¬ ces (2). Le citoyen Adam, marchand chapelier, rue Saint-Honoré, section des Tuileries, n° 12, dé¬ pose sur l’autel de la patrie la somme de 727 liv. 14 s. en créance sur trois émigrés, pour être employée, soit pour l’équipement de nos frères d’armes, soit au soulagement de leurs femmes ou enfants. L’état en est annexé à la pétition. Mention honorable, insertion au « Bulletin « (3). Suit la lettre du citoyen Adam (4). Au citoyen Président de la Convention nationale. « Citoyen, « Le citoyen Adam, marchand chapelier, rue Saint-Honoré, au coin de la rue Saint-Florentin, te prie d’être son organe auprès de la Convention pour lui annoncer qu’il dépose sur l’autel de la patrie la somme de 727 liv. 14 s. en créances sur trois émigrés dont l’état est annexé ci-joint pour être employés soit pour l’équipement de nos frères d’armes, soit au sou¬ lagement de leurs veuves, femmes ou enfants. « Il annonce que cette somme forme à peu près le tiers de son avoir, et voudrait que ses faibles facultés lui permissent de donner davan¬ tage. « Adam, section des Tuileries, n° 12. » La Société populaire de la Châtre fait hom¬ mage à la Convention nationale du succès qu’ob¬ tiennent ses soins en prêchant l’illusion du fana¬ tisme et de la superstition, qui sont remplacées par le culte de la raison et de la philosophie; elle ajoute que les vases, les saints et les métaux s’accumulent au district pour servir aux besoins de la nation; que l’enthousiasme de la liberté et de l’égalité embrase tous les cœurs, qu’il s’est généralement manifesté dans la fête ci¬ vique célébrée la première décade de brumaire où, parmi les hymnes nombreux, fut chanté celui de la composition du citoyen Dubost; que le tribut de sensibilité et de reconnaissance fut rendu aux mânes de Lepelletier et de Marat, aux héros et victimes du Champ-de-Mars et de la patrie; que cette fête a été suivie d’un repas civique et d’un feu qui a consumé les titres féodaux et nobiliaires, aux cris mille fois répétés de : Vivent la République, la Convention et la Montagne! Cette Société invite la Convention (I) Procès-verbaux de la Convention, t. 27, p. 255. (2) Ibid. (2) Ibid. (4) Archives nationales, carton G 284, dossier 816. nationale à rester à son poste jusqu’à la paix. Enfin, elle l’instruit qu’elle fait partir à l’heure même 25 hommes, la plupart pères de famille, pour aller à Tours s’opposer au passage des re¬ belles de la Vendée. Cette Société annonce en¬ core qu’elle a arrêté de fournir un cavalier monté armé et équipé. Mention honorable, insertion au « Bulletin » (1). Suit V adresse de la Société populaire de La Châtre (2). Adresse à la Convention nationale, par la Société populaire de La Châtre. « La Châtre, ce 17 frimaire, l’an II de la République française, une et indivisible. « Citoyens représentants, « La Société populaire de La Châtre, chef-lieu de district au département de l’Indre, cons¬ tamment occupée des moyens d’affermir la Révolution, de vivifier l’esprit public et de con¬ courir au salut de la patrie, vous fait hommage des succès qu’obtiennent ses soins. « Nous avons prêché l’illusion du fanatisme, le voile qui le couvrait est tombé, la superstition religieuse a disparu, le culte de la raison et de la philosophie l’a remplacé; les prêtres s’empres¬ sent chaque jour d’abjurer leur état imposteur; ils livrent aux flammes leurs lettres de prêtrise et deviennent des citoyens utiles, les uns en se mariant et les autres en prenant les armes pour la défense de la patrie. « Les églises se ferment ou se désertent, les vases, les saints et les métaux utiles viennent s’accumuler à l’administration du district pour servir aux vrais besoins de la nation. « L’enthousiasme de la liberté et de l’égalité embrase tous les cœurs, il s’est généralement manifesté dans la fête civique que nous avons célébrée le jour de la lre décade de brumaire où, parmi des hymnes nombreux, fut chanté celui de la composition du citoyen Dubost, l’un des membres de notre Société, que nous vous adres¬ sons. « Jamais spectacle ne fut plus magnifique que celui où la masse des citoyens rejette l’habitude des préjugés superstitieux pour se livrer au culte de la raison et se réunit avec la plus sincère fraternité pour le consacrer. « Cette profession de foi, les discours prononcés sur cet objet, les hymnes chantés à cette occa¬ sion, le tribut de sensibilité et de reconnaissance rendu aux mânes de Lepeletier et de Marat, des héros du Champ-de-Mars et de toutes les vic¬ times de la patrie, furent suivis d’un feu allumé sur une place publique pour y consumer les titres féodaux et nobiliaires, et ensuite d’un banquet civique où la masse des citoyens réunis pêle-mêle partagea dans le même lieu un repas frugal et commun où la décence, la joie la plus pure et la douce fraternité ont cons¬ tamment régné, et ont été resserrées par les cris mille fois répétés de Vive la nation! vive la Répu¬ blique ! vivent la Convention et la Sainte Mon¬ tagne ! (1) Procès-verbaux de la Convention, t. 27, p. 256. (2) Archives nationales, carton G 286, dossier 841.