004 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Châlon-sur-Saône. dix-huit ans, attendu que l’expérience apprend qu’en retardant les vœux jusqu'à vingt et un ans, ainsi qu’il avait été provisoirement ordonné. les maisons religieuses sont désertes et manquent de sujets; 2° Que tous les religieux rentés seront soumis à l’inspection des évêques tant qu’ils seront employés soit à l’éducation de la jeunesse, soit aux fonctions du ministère ; 3° Que les religieux mendiants ne seront plus assujettis à des quêtes aussi onéreuses pour les peuples qu’insuffisantes pour eux-mêmes ; mais qu’à raison de leur grande utilité, ils seront conservés et suffisamment dotés ; 4* Que les communautés religieuses mendiantes seront réunies à des communautés de religieuses rentées, attendu qu’il est nécessaire d’obvier à l’indécence de leurs quêtes et aux dangers de leurs courses éloignées. Art. 32. Enfin le clergé du bailliage, pénétré du désir de parvenir à la réforme des abus malheureusement introduits dans la discipline, les mœurs ecclésiastiques, la liturgie, le soin des églises, etc., forme un vœu qui renferme seul les moyens d’atteindre au succès de ses louables desseins : c’est le rétablissement des conciles provinciaux. Sa Majesté est suppliée d’en accorder la convocation tous les cinq ans; il serait précédé des synodes diocésains auxquels on appellerait un député choisi librement dans chaque archiprêtré par MM. les curés qui le composent. Lesdits articles du présent cahier ont été lus et relus à la séance de ce jour , le matin du 30 mars 1789, cotés et parafés à toutes les pages, ne varietur, par nous, secrétaires soussignés, ainsi qu’il est dit au procès-verbal de ladite séance. Si-né à la minute, Therion de Briel, secrétaire, de La rosse, chanoine, secrétaire. Et plus bas est écrit :« Les cahiers de doléances ainsi arrêtés par nous, secrétaires susdits, ont été présentés à Monseigneur l’évêque. Signé fJ.B. évê-ue de Châlon ; Genetet, curé d’Etrigny ; de La rosse, chanoine; secrétaire, l’abbé d’Austrude; Men-neault, curé de Gharcey; Charles, curé de l’Aives. J’ai soussigné ledit cahier sans préjudice des addi-tionsqueje me résérve d'y insérer : À. Delore,curé, P. Virot Constantin, curé de Saint-Germain du Pain, de La Coisine, curé de Louhans. » Le clergé séculier et régulier du comté d’ Auxonne, diocèse de Besançon, qui fait partie du bailliage de Châlon-sur-Saône, en adhérant aux délibérations de la chambre du clergé dudit bailliage de Chà-lon-sur-Saône relatives aux Etats généraux, déclare que, par son adhésion, il n’entend ni ne peut déroger seul aux chartes des ducs de Bour-?ogne et des rois de France de 1405, 1479, 1582, 588, 1595, 1617, 1646, 1716, et çà, en faveur des églises dudit comté, dont il renvoie la disposition à la sagesse du Roi et des Etats généraux, et il demande que la présente déclaration soit insérée dans le procès-verbal desdites délibérations. A Châlon-sur-Saône, le 30 mars 1789. Et ont signé tant pour eux que pour leurs commettants, signé Magnier, curé de Villeneuve ; de Grivel, curé de Saint-Huges ; Barbier, curé de Mont ; Plaxin, curé de Ghamblanc; Robelot, prêtre; Girerdet, curé de Monthier en Bresse; Petitjean, curé d’Authume; Renaudet, curé de Saillenard ; Pageauit, curé de Seurre ; N. Oudot, prêtre familier de Louhans ; Gouill' rot, prêtre, curéduFay; Cabuchet, curé de Sagy; Maïechard, prêtre; Sinon, curé deBous-selange ; Offandmondon, curé de la chapelle Saint-Sauveur; Tissot, prêtre” familier de Louhans; Oudot, curé deSavigny en Rovermont; Billot, curé; Richaud curé de Charette; Thierion de Briel, curé de Chateaurenaud ; Roger, doyen, official, moine chanoine et chantre. Collationné à l’original déposé au greffe du bailliage de Châlon-sur-Saône. Signé Bottex, secrétaire. CAHIER Des doléances de la noblesse du bailliage de Chalon-sur-Saône (1). Sire, C’est avec une respectueuse reconnaissance que la noblesse de votre bailliage de Châlon-sur-Saône vient porter à vos pieds des hommages dictés par son cœur et les vœux que vous lui avez permis de former pour le bonheur de l’empire français. Daignez, Sire, recevoir les uns aveccettè bonté qui vous fait chérir, et les autres avec la justice qui caractérise le moment éclatant de votre règne. Appelés par Votre Majesté pour faire connaître * à l’assemblée la plus auguste les vices de l’administration, nous allons les exposer tous avec cette noble franchise qui distingue particulièrement la nation; puissent-ils, Sire, s’effacer de notre mémoire et puisse le temps ne graver en celle de nos neveux que le souvenir de vos bienfaits ! Tels sont, Sire, les vœux ardents de votre noblesse ; il n’est point de sacrifice qu’elle ne fasse pour la prospérité de l’Etat, et rien ne lui coûtera quand il s’agira de prouver son zèle pour le bonheur de l’empire et son amour pour son Roi. Répartition de l'impôt. » Art. 1er. Section unique. Notre noblesse offre de renoncer formellement à toute distinction pécuniaire, et elle déclare qu’elle s’engage à partager avec les deux autres ordres toutes les impositions présentes et à venir consenties par les Etats généraux et sanctionnées par les Etats particuliers de cette province, suivant ces traités et privilèges, également communs et précieux aux trois ordres. Code national des lois générales. Art. 2. Section première. Demande que les lois constitutionnelles du royau me soient réunies d’une manière claire et précise dans un même Code, où le trône, le Roi et la nation puissent trouver la base et l’assurance de leurs droits et privilèges respectifs. Section ii. Que les lois générales et permanentes gu’on voudrait proposer à l’avenir et qu’on pourrait joindre au code national ne seront jamais établies qu’au sein des Etats généraux. Si cependant le besoin l’exigeait dans l’intervalle des Etats, elles seraient soumises à la vérification des cours, qui pourraient faire des remontrances, s’il y avait lieu, et ne les enregistreraient jamais que provisoirement jusqu’à la prochaine assemblée delà nation, où elles seraient soumises à un nouvel examen pour y être acceptées ou rejetées; et dans le cas où on oublierait de les présenter aux Etats généraux, elles seraient de fait abrogées et nulles. Section ni. Maintenir les rois de l’inaliénation des domaines; demander cependant une meilleure administration, une révision des engagements et échanges ; enfin employer tous les moyens qui peuvent les rendre susceptibles d’amélioration, et que leurs amodiations et délivrances soient faites sur les lieux après plusieurs enchères publiques annoncées six mois d’avance. (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des , Archives de l’Empire. [Elats gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. Religion. Art. 3. Section première. Le maintien de la religion catholique, apostolique et romaine, seule dominante dans l’Etat. La sanction du dernier édit rendu en faveur des non catholiques qui leur assure un état civil, mais ne jamais permettre qu’ils aient l’exercice public de leur religion. Liberté individuelle. Art. 4. Section première. La liberté individuelle à tout citoyen français, de quelque état et condition qu’il puisse être. La suppression totale des lettres de cachet, lettres closes et d’exil; qu’il soit même défendu à toutes personnes de se charger d’en être le porteur sous les peines les plus graves. Que toute personne arrêtée soit remise dans les vingt-quatre heures entre les mains de ses juges naturels, qui, dans le plus court délai, les décréteront juridiquement s’il y a lieu, ou les feront relâcher si elles sont innocentes, auquel cas à elle permis de se pourvoir contre l’auteur de leur détention. Liberté épistolaire. Section ii. Qu’il soit défendu à tout directeur des postes ou autres préposés, d’ouvrir ou laisser ouvrir les lettres par qui que ce soit, à peine d’être poursuivi comme violateur de foi publique , si ce n’est en temps de guerre, les lettres venant de l’étranger, ou adressées à l’étranger, déclarées suspectes par le ministère. Liberté de la presse. Section iii. Etablir la liberté indéfinie de la presse par la suppression absolue de la censure, à la charge par l’imprimeur d'apposer son nom à tous les ouvrages et de répondre personnellement, lui ou l’auteur, de tout ce que les écrits pourraient contenir de contraire à la religion dominante, à l’ordre général, à l’honneur public et à celui de tous les citoyens. Administration de la justice , inamovibilité des magistrats. Art. 5. Section première. Renouveler les lois sur l’inamovibilité des magistrats. Assurer la permanence des parlements, et qu’on ne puisse rien faire enregistrer par des porteurs d’ordres. Les parlements seront confirmés dans la possession d’adresser des remontrances au Roi sur les lois qui émaneront de son conseil pour fait de monnayes et autres qui attenteraient aux privilèges et propriétés des Français, lesquelles lois ne pourront jamais obliger qu’elles n’aient été librement enregistrées. Et qu’en aucun cas celles qui porteraient des impositions autres que celles consenties par la nation, ainsi que des prorogations ou extensions d’impôts ou d1emprunts, seront rejetées par arrêt avec défense de percevoir à peine de confiscation. Suppression des commissions et évocations au conseil. Section ii. Qu’à l’avenir on ne puisse jamais être jugé par des commissions nommées à cet effet, mais toujours renvoyé à ses juges naturels. Qu’il soit fait une loi formelle sur cet objet important qui proscrive tout droitde committimus , évocations et arrêts de sursis. Abolition du préjugé déshonorant des confiscations. Section iii. Solliciter une loi capable de détruire le préjugé injuste et barbare qui déshonore [Bailliage de Châlon-sur-Saône.] 605 les parents des criminels condamnés, et demander aussi la suppression des confiscations qui reviennent soit au Roi, soit aux seigneurs haut justiciers. Ré formation du Code civil et criminel. Section iv. Qu’il soit nommé une commission de magistrats et gens de loi les plus recommandables par leurs lumières et leur probité pour travailler à la réformation des lois civiles et criminelles, dont elle s’occupera sans relâche, afin de porter le plus tôt possible cet ouvrage à sa perfection, lequel n’aura force de loiqu’après avoir reçu la sanction de la nation assemblée. Que l’on ne puisse plus plaider dans les campagnes pour des injures verbales ; que ces affaires soient renvoyées à la tenue des jours où le juge prononcera définitivement suivant la loi. Assurance des propriétés assiette de l’impôt et administration des finances. Art. 6. Section première. Le maintien formel de toute espèce de propriété, cette loi sacrée étant la base de toute société et de la tranquillité de tous; que si cependant, pour des travaux d’une utilité publique bien reconnue on touchait à celle de qui que ce pût être, même par un chemin royal, il en serait dûment indemnisé. Que la nation seule assemblée en Etats généraux a le droit de s’imposer; qu’il ne sera établi aucun impôt ni ouvert aucun emprunt sans son consentement; qu’on ne pourra non plus proroger les uns, ni donner aucune extension aux autres, même à ceux qui auraient été établis précédemment. Périodicité des Etats généraux. Section ii. Que les Etats généraux n’accorderont jamais de subsides pour plus de cinq années, époque qu’il faudra fixer pour le retour périodique des Etats généraux, et à laquelle tous les impôts cesseront de droit s’ils ne sont consentis de nouveau par la nation. Recherches sur les finances. Section iii. Demander à avoir un tableau exact et détaillé de la situation des finances par pièces justificatives, avoir une connaissance approfondie du déficit et de ses véritables causes. Section iv. Proposer toutes les réformes qui peuvent s’opérer dans la maison du Roi, les bâtiments, dans toutes les parties de l’administration, dans les bureaux, et enfin dans tout ce qui serait susceptible d’amélioration; demander la vérification des titres de créance et emprunts pour qu’ils y éprouvent la réduction qu’ils doivent subir en ce qu’ils auraient d’onéreux. Pensions. Section v. Il s’est glissé une quantité énorme d’abus sur l’article des pensions ; on en accorde sûrement de méritées, mais il en est beaucoup qui ne sont données qu’à la faveur; on les prostitue à des gens de toute espèce : des jeunes gens, en épousant des millionnaires, en obtiennent pour se marier. Pour obvier à ces abus certainement inconnus à Sa Majesté, demander qu’il soit remis aux Etats généraux un tableau exact de toutes les pensions, des caisses sur lesquelles elles sont affectées, des motifs qui les ont fait accorder, afin que, réduites et fixées par les Etats, la liste en soit imprimée avec le nom des titulaires, la publicité étant le meilleur moyen d’éloigner dorénavant les demandes mal fondées, et un honneur de plus pour ceux qui les auront méritées. 006 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Châlon-sur-Saône.l Fixation des départements. Section vi. Demander la fixation motivée des divers départements, la responsabilité des ministres pour leur gestion, et conséquemment la publicité par la voie d’impression des comptes de recette et dépense de toutes et chacune des branches de l’administration, tant du royaume que de la province. Fonds pour la guerre . Section vii. Demander que la nation taxe chaque province à avoir un tonds en séquestre en cas de guerre. Ces sommes seraient prêtées au commerce avec toute sûreté, et la rentrée des fonds assurée de trois mois en trois mois. Déficit. Section vïii. Le déficit constaté et toutes les réformes opérées, accorder les impôts absolument nécessaires, demandant cependant que ceux qu’on adoptera soient d’une perception simple et facile, portant également et sans distinction sur tous les ordres. Tous les recouvrements se feront avec le moins de frais possible, et tous les receveurs et trésoriers hypothéqueront des biens-fonds au lieu d’argent, non-seulement pour la sûreté, mais encore afin d’éviter les intérêts qu’on leur payait ci-devant. Agiotage et capitalistes. Section ix. Il serait important que les Etats généraux suppliassent le Roi de proscrire entièrement l’agiotage, monstre insatiable et odieux, enfanté par l’égoïsme qui a causé tant de maux de nos jours, par l’avidité criminelle des capitalistes, classe nombreuse qui engloutit des richesses immenses! sans contribuer aux charges de l’Etat. Il sera donc essentiel de trouver les moyens de les imposer et de les faire contribuer comme les autres citoyens. Gabelle. Section x. Ce serait un acte de justice du souverain de diminuer le prix du sel, denrée de première nécessité, qu’il est impossible au peuple de se procurer en Bourgogne, en mettant cette denrée qui coûte si peu au Roi à un prix plus modéré, plus rapproché des facultés de chacun; la contrebande sür cet objet, source de tant de maux, serait anéantie, et le débit devenant beaucoup plus considérable, le trésor du prince y gagnerait plutôt que d’y perdre. Confirmation des privilèges de la province. Art. 7. Section première. Faire confirmer toutes les capitulations, traités et privilèges de la province, et demander, comme suite de ce principe, qu’elle soit réintégrée dans les droits dont elle aurait pu perdre l’usage, comme celui de nommer librement tous les membres de sa commission intermédiaire. Section ii. Demander que les villes et communes choisissent librement leurs maires et officiers municipaux, les offices de maire ayant été rachetés par la province. Section iii. Gomme un des privilèges les plus essentiels de la Bourgogne est de ne pouvoir être imposée que du consentement des gens des trois Etats, qu’ainsi nos députés aux Etats généraux n’ont de pouvoir pour l’impôt que ceux que nos Etats particuliers lui confèrent, il en faut demander toujours la convocation avant les Etats généraux et après l’assemblée des bailliages. Section iv. Gomme par nos privilèges les Etats seuls, avec la sanction du Roi, ont lé pouvoir de rectifier les abus qui s’y seraient glisses, demander une convocation particulière des Etats à cet effet, où l’admission de ceux qui ont la noblesse acquise et transmissible recevra la dernière sanction, Section v. Demander encore par suite de çes mêmes privilèges, auxquels nous ne pouvons consentir qu’on donne atteinte, qu’on n’atténue pas le ressort du parlement, qu’on n’en transfère pas le siège hors de Dijon, étant une des clauses principales du traité fait avec Louis XI, en 1476, de n’avôir qu’un parlement séant à Dijon, ainsi qu’une chambre des comptes et une du domaine. Section vi. Depuis longtemps les cahiers de la province sont toujours chargés de réclamer le privilège qui assure à tout Bourguignon de n'étre jamais traduit hors de son ressort ; malgré une si juste réclamation, une loi si Sage est journellement transgressée. En conséquence il faut demander avec instance qu’on ne puisse jamais porter atteinte à un privilège si essentiel à la tranquillité et à la sûreté de tout particulier. Noblesse. Art. 8, Section première. Que la noblesse ne soit plus vénale, mais qu’elle soit réservée aux services rendus à l’Etat et à la patrie par les militaires, les magistrats et les citoyens qui se distingueront par leur mérite et leur vertu. Section il Demander la suppression de l’article de l’ordonnance qui exige des preuves de quatre générations pour entrer au service du Roi, et qu’à l’avenir quiconque aura la noblesse acquise et transmissible y soit reçu. Militaire , Art. 9. Section unique. L’intention du Roi étant d’étendre ses vues de bienfaisance sur tous les individus qui composent son royaume, et les troupes en faisant une partie considérable et absolument nécessaire, ce serait un acte de justice du souverain d’abolir à jamais la peine deê coups de plat de sabre et de bâton ; l’opinion publique la trouve avilissante. Les citoyens ne voient qu’avec crainte leurs enfants s’engager, parce qu’ils sont exposés, souvent pour des fautes légères et suivant le caprice et la mauvaise humeur des chefs, à des punitions si rigoureuses et si diffamantes, qu’elles les conduisent à déserter ; d’aillêurs le courage d’un homme qu’on traite en esclave et d’une manière aussi dure est énervé. Et pourquoi se priver de ce grand mobile de la nation française, l’honneur, qui fend les troupes capables de tout et qui n'altère en rien l’exactitude de la discipline? Demander qu’à l’avenir tout citoyen revêtu d’un office militaire ne puisse en être privé que par un conseil de guerre chargé de prononcer sur sa destitution. (Suit un mémoire sur cet article qui sera annexé au présent cahier.) Commercé. Art. 10. Section première. Demander la suppression des entraves que le commerce éprouve dans la communication de province à autre dans ce bailliage ; les acquits-à-caution surtout sont la source des plus grandes vexations. (Suit une note à ce sujet annexée au cahier.) Section il. Le refus à l’avenir de l’obtention et du renouvellement de tous privilèges exclu- {États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Châlon-sur-Saône.] 607 sifs, destructeurs du commerce et de l’industrie. Section iii, Que le Roi n’accorde plus de sauf-conduit aux banqueroutiers et faillis que pour six mois, et qu’ils ne puissent être renouvelés ou prolongés que du consentement unanime de tous les créanciers. Objets particuliers de la province. Art. 11. Section première. Veiller à ce que la forme de l’impôt que les Etats adopteront et qu’on proposera à la Bourgogne d’accepter n'altère en rien l’engagement que le Roi a pris avec la province pour les arrérages et remboursements des emprunts dont elle a été caution. Section ii. Demander que si les arrérages des emprunts faits et à faire pour construction des canaux excédait le produit qu’on en pourrait tirer, ils fussent supportés par le royaume entier, étant d’utilité générale. Section iii. Que les lettres patentes sollicitées par la commission intermédiaire ne le puissent jamais être qu’en vertu de décrets des Etats de là province, auxquels elles ne pourront déroger ni augmenter ; en conséquence, demander dès à présent l’abrogation de toutes celles qui pourraient porter atteinte auxdits décrets, notamment celles qui exigent le canal en fief avec évocation au conseil, chose attentatoire au privilège de n’être point distrait de son ressort. Section iv. S’occuper des moyens de supprimer la mendicité, qui est un des plus grands fléaux des campagnes, en ce qu’elle autorise et suscite même la paresse par l’appât d’une vie gagnée sans rien faire. Chaque paroisse ainsi que les villes pourraient se charger de nourrir leurs pauvres, soit par des secours pécuniaires, soit par des ateliers de charité. Supprimer les dépôts de mendicité, qui ne sont que des réceptacles de toutes les misères humaines, et dont l’inutilité est démontrée par le fait, puisque depuis qu’il y en a, la mendicité loin, de diminuer, semble s’être encore augmentée. Section v. Demander une loi pour autoriser le prêt à intérêt sur obligation et la substitution telle qu’elle se pratique en Bresse : la province a déjà mis plusieurs fois la demande du prêt à intérêt dans ses cahiers, notamment aux Etats de 1787. Cette loi devient d’autant plus nécessaire que Je nombre des usuriers s’accroît tous les jours, particulièrement dans les campagnes. Section vi. Que l’intendant ne soit plus chargé de la tutelle des communautés des villes et des campagnes, et que les affaires et les comptes de ces mêmes communautés soient renvoyés par-devant les juges des lieux ou les juges royaux, au choix des habitants. Section vil Renouveler la fixation des limites qui séparent dans ce bailliage le droit écrit d’avec la coutume de Bourgogne et celles qui la séparent d’avec les provinces limitrophes, parce qu’il existe une grande incertitude sur ces limites, ce qui fait que les prétentions des différen tes juridictions sont très-onéreuses pour les habitants. Section vin. Remontrer que les commis de la marine vexent continuellement les propriétaires en enlevant dans leurs bois des arbres qu’ils réservaient pour leur service, en marquant ceux qu’ils n’abattent point ou qu’ils ne font point enlever après les avoir abattus, ou enfin en appliquant le marteau de la marine à des arbres que le propriétaire a dessein de laisser sur pied. Section ix.. Remontrer encore que les paysans sont forcés de quitter j dans des temps essentiels, les travaux de la campagne pour conduire des pièces de bois énormes qui harassent leur bétail, cassent très-souvent leurs voitures pas assez fortes pour de tels fardeaux, sans avoir jamais de dédommagements, étant d’ailleurs très-mal payés après avoir attendu des années et fait plusieurs voyages inutiles pour se procurer leur payement. Section x. Représenter aussi que dans la partie de ce bailliage qui avoisine la Franche-Comté, notamment dans les paroisses de Beaurepaire, Je Fay, Savigni en Reviremont, Lays, Cuiseaux, les droits des communautés et des particuliers sont affectés aux salines de tout le saulnier, quoique les habitants de ces paroisses ne puissent faire usage du sel qui s’y fabrique. Cette injustice révoltante est encore le moindre des abus dont ces malheureux sont tous les jours les victimes. (Suit un mémoire imprimé très-détaillé sur cet objet.) Résidence . Art. 12. Section première. Un des plus grands malheurs de l’Etat et surtout des provinces vient de ce que tout afflue à Paris et que tous les possesseurs riches, non-seulement de leur patrimoine, mais de grâces de la cour, de bénéfices, évêchés, abbayes, commandements et autres tirent tout de la province sans presque rien y consommer. En conséquence, demander que les titulaires de tous ces bénéfices et emplois soient obligés à une résidence de six mois au moins sans aucune dispense. Non pluralité des bénéfices. Section ii. Demander qu’à l’avenir on ne puisse cumuler plusieurs bénéfices sur une même tête à moins qu’ils ne soient au-dessous de 10,000 livres de rente. Education publique . Section iii. Demander que le Gouvernement s’occupe avec soin et vigilance de la régénération des mœurs. C’est par l’établissement de bonnes écoles pour l’éducation publique qu’il sera possibled’obtenir cette heureuse révolution, si nécessaire à la prospérité de l’Etat. Milice. Section iv. Trouver le moyen de rendre la milice moins onéreuse au peuple, à qui cet impôt personnel est fort à charge. Maréchaussée. Section v. La sûreté publique sur les chemins et le maintien du bon ordre étant de la plus grande utilité, il serait à désirer qu’on augmentât la maréchaussée d’un quart, qui ne serait pas montée, et qu’on placerait dans les petites villes, bourgs et gros villages les plus voisins des forêts. Signé Beaurepaire, président de la noblesse du bailliage de Chalon-sur-Saône ; Groselier, secrétaire, et lame, secrétaire. CAHIER Des pouvoirs de MM. les députés de la noblesse du bailliage de Châlon-sur-Saône aux Etats généraux (1). En vertu des lettres patentes du. Roi, la convocation des Etats généraux du 24 janvier dernier et de l’ordonnance de M. le lieutenant général du bailliage de Châlon-sur-Saône en date du 26 février 1789, cejourd’hui 30 mars, la noblesse, iéga-(1) Nous publions ce cahier d’après an manuscrit dès Archives de V Empire. 608 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Bailliage de Châlon-sur-Saône.l lement assemblée, a donné à ses députés aux Etats généraux les pouvoirs qui suivent. Art. 1er. Il est ordonné aux députés du bailliage de Chalon-sur-Saône de ne jamais consentir que les voix aux Etats généraux soient prises autrement que par ordre, suivant la forme constitutionnelle de la monarchie, en réservantpour chaque ordre le droit du veto , seule sauvegarde de leurs libertés réciproques, et que si, par impossible, lesdits députés étaient forcés par des moyens quelconques d’opiner par tête, ils protesteront au nom de la noblesse de ce bailliage et déclareront nul tout ce que l’on aurait pu exiger d’eux. Art. 2. Il est défendu aux députés de permettre qu’aucune motion concernant les impôts, soit pour sanctionner ceux actuels, soit pour en accorder de nouveaux, puisse être mise en délibération avant que les Etats généraux aient statué sur tous les objets de législation et de réforme dans l’administration, autorisant cependant les députés d’accorder un secours momentané dans le cas où le gouvernement en aurait un besoin pressant. Art. 3. Que dans le cas où les besoins de l’Etat engageraient lesdits députés à accorder un secours momentané et où ils seraient forcés de consentir à un emprunt, ils prendront un moyen sûr pour que l’on ne puisse y donner une extension au delà de la somme fixée. Art. 4. Que la nation assemblée en Etats généraux, avant de souffrir qu’aucun objet soit mis en délibération, proposera une charte dans laquelle seront reconnus tous les privilèges de la nation, et notamment les articles ci-après exprimés ; que cette charte sera sanctionnée par le Roi, afin qu’elle devienne loi fondamentale et inviolable. Art. 1er de la charte. Assurer le retour périodique et successif des Etats généraux à une époque qui sera fixée par les Etats généraux eux-mêmes, et qui sera déterminée de telle manière que le Roi ne puisse se dispenser de les convoquer. Art. 2 de la charte. Que la personne de chaque membre des Etats soit regardée comme sacrée, et que la liberté de leurs suffrages ne puisse être gênée en aucun cas. Art. 3 de la charte. Sa Majesté est suppliée d’abolir à jamais les lettres de cachet comme attentatoires au droit le plus sacré, celui de la liberté, et que tout homme qui serait arrêté soit mis dans les vingt-quatre heures entre les mains des juges qui lui sont donnés par la loi. Art. 4 de la charte. Que dans aucun cas il ne sera porté la moindre atteinte aux droits sacrés de la propriété. Art. 5 de la charte. Qu’aucun impôt ne sera à l’avenir mis ou prorogé, ni qu’il sera à l’avenir ouvert aucun emprunt sans le consentement des Etats généraux. Art, 6 de la charte. Que la magistrature sera confirmée dans son inamovibilité, et que dans aucun cas le dépôt des lois et des greffes ne puisse être violé, altéré ou changé en manière quelconque. A insérer sHl est possible dans la charte. Art. 7. Que l’inaliénabilité des domaines soit de nouveau sanctionnée comme constitutionnelle. Suite des pouvoirs. Art. 5. Que tous impôts accordés par les Etats généraux cesseront six mois après l’époque où les Etats généraux auraient dû s’assembler; que les tribunaux seront tenus de poursuivre comme concussionnaires ceux qui seraient chargés de les répartir, asseoir, lever, et que tout citoyen soit admis à les dénoncer. Art. 6. Que les dépenses de chaque département, y compris celles de la maison du Roi, seront invariablement fixées, et que les ministres de chacun d’eux seront responsables à la nation assemblée de l’emploi des fonds. Art. 7. Que dans aucun cas les Etats généraux ne pourront toucher aux privilèges et constitutions des Etats de la province, qui seuls sont en droit de se réformer. Art. 8. Laissant, au reste, la noblesse de ce bailliage, à ses députés le droit de statuer sur tous les objets qui leur paraîtraient avantageux pour le bien du royaume sans préjudicier aux articles ci-dessus énoncés. Signé Beaurepaire, président de la noblesse du bailliage de Chalon-sur-Saône ; Jame et Groselier secrétaires. RESPECTUEUSES REMONTRANCES. Et doléances du tiers-état du bailliage de Châlon-sur-Saône , assemblé en ladite ville, en exécution de la lettre de Sa Majesté du 24 janvier 1789, et de l’ordonnance de M. le lieutenant général (1). § I". Les députés demeurent expressément chargés de faire de très-humbles remercîments à Sa Majesté de ce qu’elle a bien voulu convoquer les Etats généraux et accorder au tiers-état une représentation libre et égale à celles des deux autres ordres réunis. Les députés seront tenus de demander qu’aux dits Etats généraux les opinions soient prises par tête, soit que les ordres délibèrent en commun, soit que l’on divise par bureaux, et que, dans le second cas, chaque bureau soit composé des députés du tiers-état en nombre égal à ceux des deux autres ordres ; de manière que dans toutes les délibérations l’influence du tiers-état soit égale à celle des deux autres ordres réunis. Qu’il soit établi une forme fixe et invariable pour la convocation des Etats généraux, dont le retour sera déterminé tous les cinq ans, et que les représentants de l’ordre du tiers ne puissent être choisis que parmi leurs pairs. Qu’il ne soit délibéré sur les impositions que lorsque les lois fondamentales auront été reconnues et la constitution réglée. Les députés ne pourront, au surplus, se prêter à aucune des distinctions humiliantes qui avilissaient les communes dans les précédents Etats. Lois fondamentales. Les députés supplieront Sa Majesté d’ordonner qu’il soit fait un code particulier des lois constitutives de l’Etat, dans lequel code les droits du monarque et ceux de la nation seront tellement assurés, qu’il soit impossible de les méconnaître et de les enfreindre. Que les pr in cipales ba ses de la constitution seront: Art. 1er. L’indépendance de la couronne de France de toute puissance étrangère. Art. 2. La succession au trône en faveur des mâles, par ordre de primogéniture, et l’exclusion absolue des filles. Art. 3. Le droit exclusif à la nation de pourvoir à la régence en cas de minorité, auquel effet les Etats seront convoqués par les baillis et 1 sénéchaux, pour être assemblés dans la capitale, le quarantième jour à dater du décès ; qu’il soit établi un conseil pour administrer dans l’intervalle, (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire.