[Convention nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. ) SéctmbT 1793 -33 priétaire de la manufacture, qu’ils emmenaient par foroe; ils avaient pris ce dernier dans son lit, où il était malade, et ayant une médecine dans le corps. , « Je restai seul avec sa femme, et jusqu’à 3 heures et demie je n’eus aucune nouvelle. A cette heure, j’appris par le commissaire natio¬ nal et le propriétaire de la manufacture, qui s’étaient sauvés, que les rebelles s’étaient por¬ tés sur la Ferté-Gaucher, qu’ils avaient pris les ornements et vases de leur église, qu’ils détrui¬ saient avec fureur le local des séances de la Société populaire, qu’ils en avaient pris les registres pour en connaître les membres, qu’ils les menaçaient de leur couper les cheveux, de les massacrer, que tous les patriotes étaient dispersés et dans la plus grande consternation,- et qu’il en était même quelques-uns d’entre eux de blessés. « Alors, sans m’inquiéter de ma responsabi¬ lité, parce que ma tête est à ma patrie quand je croirai pouvoir la servir, je pris un cheval, je passai au grand galop au milieu de plus de 150 rebelles en différents groupes qui se trou¬ vaient sur ma route, et me rendis à Coulom-miers pour avoir de la force armée. « J’appris, à mon arrivée, qu’il y avait eu insurrection pareille à Mauperthuis, qu’il y avait eu une expédition de faite, et que le len¬ demain la force armée devait retourner dans le même canton; je fis valoir toutes les raisons qui avaient motivé ma demande, et je déter¬ minai mon collègue et l’Administration à faire marcher la force armée de mon côté. « Nous aurions mis sans doute un commis¬ saire de la Convention à la tête de la force armée; mais elle le demanda; ce fut une raison de plus pour nous y décider. « Il fallait aussi un commissaire pour parer aux événements qui pouvaient arriver aux envi¬ rons de Coulommiers. Il fut décidé que nous par¬ tagerions, et je fus nommé pour être à la tête de la force armée. « Je commençai mon opération par faire désarmer les communes suspectes ou coupables qui se trouvèrent sur mon passage; je m’y pris de manière à ne pas ralentir notre marche et à ne courir aucun risque. « Je me rendis ensuite à la Ferté, où il y avait un commencement de rassemblement, qui faisait présager les suites les plus fâcheuses, mais qui se dissipa à l’approche de notre arri¬ vée. Notre avant-garde a entendu le tocsin dans plusieurs endroits. Je me décidai à y faire repo¬ ser la troupe, parce que nous étions à l’approche de la nuit, et que c’eût été l’exposer que de faire dans cet instant une entreprise importante. « Les patriotes nous reçurent comme des libérateurs, et nous versâmes respectivement des larmes d’attendrissement. Je profitai des circonstances pour rétabhr la Société popu¬ laire, et nous allâmes tenir la séance la plus inté¬ ressante qu’il soit possible de voir, sur les dé¬ combres mêmes de l’ancien local. « Dès le matin nous partîmes pour Jouy. Nous l’entourâmes. Nous entrâmes avec la cavalerie et un détachement d’infanterie, et nous fîmes prisonniers presque tous les hommes qui y étaient, après nous être emparés de toutes les armes que nous trouvâmes dans la commune. Nous fîmes la même opération à Choisy. Nous en avons fait hier encore plusieurs autres, et nous avons emmené au total environ 600 pri¬ sonniers. « Maintenant, tout est dans le plus grand calme. Pour sûreté, je laisse 280 hommes à la Ferté-Gaucher. « Je ne saurais trop faire l’éloge des adminis¬ trateurs du district de Eozoy, qui m’ont accom¬ pagné dans toutes mes opérations ; des autorités constituées de Coulommiers et de la Ferté-Gau¬ cher; de la force armée, de ses officiers; du citoyen Chevré, commandant la force armée de Meaux; du citoyen Barré, qui commandait celle de Coulommiers; du citoyen Thomé, lieute¬ nant de gendarmerie, qui nous a donné les preuves d’un zèle infatigable; du citoyen Du-hem, frère de notre collègue, qui commandait les chasseurs, et qui nous a donné les plus grandes preuves de fermeté, de prudence et de talents militaires. « P. 8. ■ — J’ai eu à ma disposition plus de 20,000 hommes, dont je n’ai pas fait usage. Nous n’avons manqué de rien. La commune de Meaux, ses magistrats, ont tenu à notre égard une con¬ duite digne des plus grands éloges. L’armée révo¬ lutionnaire est arrivée ici hier soir. Nous allons prendre des mesures ultérieures. « Salut et fraternité, « Morisson, « représentant du peuple. HL Les représentants aux papeteries de Courtalin et du Marais au comité de Salut public (1). « Coulommiers, 29 frimaire an II (19 décembre 1793). « Citoyens nos collègues, « Nous pouvons vous assurer, comme nous l’avons dit à la Convention, que le calme est parfaitement rétabli dans la partie de ce dépar¬ tement qui a été en insurrection. « La révolte serait devenue générale dans ce département, et peut-être dans ceux qui l’envi¬ ronnent, si on ne l’eût pas arrêtée dès son prin¬ cipe; l’activité des administrateurs du district de Eozoy et la promptitude de nos mesures ont pu seules en arrêter les progrès. « L’observation que nous avons faite, que l’insurrection existait le même jour, sur diffé¬ rents points éloignés les uns des autres, nous a démontré qu’il existait de grands conspirateurs qui, cachés derrière la toile, conduisaient les diverses ramifications des mouvements que nous avons éprouvés. « Ils ont profité de l’excès du zèle de quelques autorités constituées subalternes et de quelques citoyens patriotes relativement au culte catho¬ lique. Nous ne pouvons vous le cacher, on a exercé ici une espèce de persécution en faisant publier un arrêté du département de la Nièvre, absolument contraire au principe de la liberté des cultes, et quelques citoyens en ont pressé trop vivement l’exécution. « Parmi les remèdes, nous avons employé surtout l’instruction, et nous nous disposions à faire une proclamation, lorsque nous avons eu connaissance de l’adresse que le Conseil exé¬ cutif a faite sur ces objets et qui nous a paru devoir suffire. La lumière et le zèle des admi¬ nistrateurs et surtout du commissaire national S3(l) Archives nationales, AFii, n° 152. Aulard : Becueil des actes et de la correspondance du comité de Salut public, t. 9, p. 521.