572 [Assemblée nationale.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. aux outrages? des partisans de l’ancien régime, aux erreurs même des citoyens tièdes et des esprits non éclairés? Qui moins que lui avait des moyens pour s’en défendre ? Il ne s’est pas néanmoins laissé arrêter par ces vaines terreurs. Il n’a point redouté surtout cette publicité , pour laquelle M. Guignard Saint-Priest témoigne tant d’effroi ; il y a, au contraire, recouru, toutes les fois qu’il a pu faire. Il a méprisé les injures , en se contentant de rétablir les faits , quand on les altérait; bien sûr que sa réputation surnagerait aux vaines inculpations qu’on lui a faites ; et, qu’en tout cas cette réputation n’était qu’une considération secondaire qui ne pouvait jamais être mise en balance avec ses devoirs. Il s’en est remis au public, avec le seul appui de son zèle et sa probité, seuls moyens que ses commettants pouvaient exiger de lut ; c’était à eux à juger du reste. ï Au fond, quels sont donc les dangers que M. Guignard Saint-Priest a courus dans cette occasion, et qui ont pensé le rendre la victime d’une multitude abusée, en souillant la fête de la fédération de quelque attentat capable d’en ternir la gloire? A-t-il couru ce risque de la vie, que les meilleurs citoyens ont couru sans sepiaiudre depuis la Révolution? Non. « J’étais, dit-il, re-« présenté dans ces libelles comme un conspira-» teur et un trait re à la patrie; on allait même « jusqu'à demander le renvoi de tous les ministres. « On proposait des motions à faire, pour ce reu-« voi, au Champ-de-Mars, par tous les bons ci » « toyens. » Ou laisse au public à juger du civisme de celui qui se plaît ainsi à dénigrer, autant qu’il est en lui, cette expression si sainte de bons citoyens. G’est elle que nos législateurs ont consacrée dans la formule par laquelle les magistrats municipaux doivent invitera la retraite les personnes qui se trouvent dans les attroupements lors de la publication de la loi martiale. Mais il résulte des expressions mêmes de M. Guignard Saint-Priest, que les risques qu’il a courus se sont réduits à la crainte de perdre sa place. On allait même�Ms�w’à demander son renvoi. Ne voilà-t— il pas un projet bien alarmant, et un peuple bien redoutable ! Les plusincendiaires demandent qu’on fasse des motions pour le renvoi des ministres, et ces motions ont été rejetées. Où voit-on donc là des attentats capables de souiller la gloire de la fédération ?Dans les pays despoiiques, dans le gouvernement de l’Orient, où la servitude universelle enchaîne habituellement les opinions, la langue et la plume des écrivains, ce n’est point par des motions pour le renvoi des ministres que Je peuple manifeste ses volontés quand il se réveille. Il demande avoir leurs têtes suspendues aux murs du sérail ; et si on les lui refuse, celle du tyran leur en répond bientôt. G’est la facilité de dénoncer les ministres et de les accuser publiquement, qui est la meilleure sauvegarde des administrateurs. Ils n’auront point à craindre qu’on se porte à des excès contre eux quand ils seront traduits en jugement comme les autres citoyens. Le peuple se reposera du soin de les poui suivre sur les accusateurs publics, sur ces nouveaux ministres de la justice nationale, que le Corps législatif vient enfin de décréter, et qui, sans doute, appelleront aussi le peuple à prononcer entre eux, accusés, et leurs juges. Si le comité s’était grossièrement mépris dans le jugement qu’il a porté sur M. Guignard Saint-Priest, comme on le prétend, il se serait nui à lui-même et non pas au ministre. Il a soumis à [3 août 1790.] tout le monde son opinion, les motifs qui l’ont déterminée et les pièces où il l’a puisée. Où peut donc être le sujet d’effroi pour M. Guignard Saint-Priest, s’il est innocent? S’il est coupable, ou seulement s’il y a des présomptions graves contre lui, n’était-il pas du devoir du comité de le mettre à portée de les détruire, par une discussion publique, qui ne pût pas laisser de nuages sur la vérité de sa justification? L’impression du rapport et des pièces ne change fias leur contenu : elle le divulgue seulement. Elle met tout le monde à portée d’apprécier et les motifs et la personne de M. Guignard Saint-Priest. On a donc eu raison de dire que c’élait lui rendre un vrai service, s’il était innocent, que de provoquer ainsi sa justification publique. Malheur à celui qui craint de voir sa conduite soumise à l’examen universel! L honnête homme et le patriote désireraient que leurs sentiments pussent être aussi manifestés que leurs actions. Quelle opinion doit-on avoir de ceux qui voudraient soustraire l’un et l’autre à l’examen du peuple, lors même qu’il s’agit de leur administration publique. ASSEMBLÉE NATIONALE. PRÉSIDENCE DE M. D’ANDRÉ. Séance du mardi 3 août 1790, au matin (1). La séance est ouverte à neuf heures un quart du matin. L’Assemblée est fort peu nombreuse. En attendant qu’elle soit en nombre, on propose de lire diverses adresses. M. Camus demande à donner lecture des divers décrets sur les pensions, mis dans leur ordre rationnel pour être présentés à la sanction. Gette proposition est adoptée et la lecture a lieu ainsi qu’il suit : Décret sur les pensions, gratifications et autres récompenses nationales, prononcé dans les séances des 10, 16, 23 et 26 juillet : L’Assemblée nationale, considérant que, chez un peuple libre, servir l’Etat est un devoir que tout citoyen est tenu de remplir, et qu’il ne peut prétendre de récompense, que la durée, l’éminence et la nature de ses services lui donnent des droits à une reconnaissance particulière de nation; que s’il est juste que, dans l’âge des infirmités, la patrie vienne au secours de celui qui lui a consacré ses talents et ses forces, lorsque sa fortune lui permet de se contenter des grâces honorifiques, elles doivent lui tenir lieu de toute autre récompense, décrète ce qui suit : TITRE PREMIER. Règles générales sur les pensions et autres récompenses pour l'avenir. Art. 1er. L’Etat doit récompenser les services (1) Cette séance est incomplète au Moniteur.