328 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE tyrans; un roi pour des français ! Les monstres ! avaient-ils donc oublié nos serments ! avaient-ils oublié que vous veillez au salut du peuple et que le peuple veille au vôtre ! ne savaient-ils plus ce, qu’aidé de ses Législateurs, le peuple français peut pour la liberté ! Du courage, Pères de la patrie, vrais montagnards, appelez des vengeurs et votre voix en produit des milliers. Continuez à sauver la chose publique, ne vous reposez que lorsqu’il ne restera plus dans l’atmosphère de la liberté aucun de ces miasmes pestilentiels qui l’infestent. Que la Montagne soit la roche tarpéienne d’où vous précipiterez tous les intrigans qui, leurs têtes roulant sur échafaud, vous fassent respecter; il exista des conspirateurs en France. Nous avons célébré une fête pour l’abolition de l’esclavage des nègres et l’inauguration des bustes des martyrs de la liberté : Marat et Lepeletier. Législateurs, restez à votre poste que vous honorez par vos vertus, le bonheur du peuple vous en impose l’obligation; votre dévouement à la cause de la liberté vous défend de le quitter. Guerre à tous les tyrans. La liberté, la République ou la mort, tels sont les sentiments qui nous animent et que nous ne cesserons de répéter qu’en cessant de vivre en vous défendant. Vive la République, vive la Montagne. » Castel (présid.), Legin (secret.), Regnard. 28 La citoyenne Suzanne Edeline, veuve Boul-lemer, expose qu’elle a été inscrite, par erreur, sur la liste des émigrés du district de Bellesme. Renvoyé à la commission des émigrés (1). 29 La citoyenne veuve Poirier expose ses besoins, et demande la conservation d’une pension de 200 liv., dont elle jouissoit. Renvoyé aux Comités de liquidation et des secours (2) . 30 « Un membre observe que la suppression des offices et l’inscription sur le grand livre des créances et des pensions dues par la République ont fait naître une foule de solliciteurs qui ont inondé les départemens de différens imprimés contenant des offres de service, soit pour la liquidation des offices, ou pour l’inscription sur le grand livre; que par ces offres de service, présentées d’une manière spécieuse et désintéressée, ces solliciteurs ont surpris la confiance d’un grand nombre de citoyens, qui leur ont adressé leurs titres et leurs certificats de résidence, et que, depuis, plusieurs de ces mêmes solliciteurs ont été mis en état d’arrestation, ou a) p.v., xxxvn, 2ii. (2) P.V., XXXVII, 211. ont négligé de déposer à temps utile les titres et certificats dont ils étoient dépositaires, en telle sorte que plusieurs propriétaires d’offices et créanciers de la République se trouvent maintenant privés, par la fatalité des délais fixés par la loi, de la liquidation de leurs offices ou de leurs pensions. » La Convention renvoie cette observation à ses Comités des finances et liquidation, pour lui en faire un prompt rapport » (1). 31 Le citoyen Flandrin, professeur de l’école vétérinaire, fait hommage à la Convention nationale d’un ouvrage sur l’éducation des moutons. Mention honorable, insertion au bulletin, et le renvoi au Comité d’agriculture (2) . 32 Les vétérans nationaux de la 84e compagnie présentent une pétition touchant leur traitement. Renvoyé au Comité de la guerre (3) . 33 Le citoyen Lohr, caporal au 18e bataillon des chasseurs, blessé le 23 mai (vieux style), demande à rejoindre son ancien corps, afin de pouvoir renvoyer aux esclaves des tyrans la balle qui l’a blessé. Renvoyé à la commission des mouvemens des troupes (4) . 34 La Société populaire de la section de la Halle-au-Bled annonce qu’ayant reconnu que l’intrigue a trouvé moyen de s’introduire dans les Sociétés sectionnaires, elle a arrêté de suspendre ses séances, et que, par un mouvement spontané, tous ses membres ont juré de se rallier et de maintenir la République une et indivisible, et de ne jamais se séparer de la Convention nationale. Mention honorable, insertion au bulletin (5). [ Extrait des délibérations; 24 flor. II] (6). La Société considérant que les Sociétés établies dans les différentes sections de la com-(1) P.V., XXXVII, 211. J. Paris, n° 501; M.U., XXXIX, 426; C. Eg., n° 636; J. Perlet, n° 601; J. Sans-Culottes, n° 455; Audit, nat., n° 600. (2) P.V., XXXVII, 212. Bin, 25 flor. (suppl*); J. Mont., n° 19. (3) P.V., XXXVII, 212. (4) P.V., XXXVII, 212. (5) P.V., XXXVII, 213 .B ln, 25 flor.; C. Eg., n° 635; J. Paris, n° 500; Rép., n° 146; J. Perlet, n° 600; Ann. R.F., n° 167; MU., XXXIX, 413; J. Sans-Culottes, n° 454; J. Sablier, n° 1318; Feuille Rép., n° 316; Débats, n° 602; (6) C 303, pl. 1112, p. 29. 328 ARCHIVES PARLEMENTAIRES - CONVENTION NATIONALE tyrans; un roi pour des français ! Les monstres ! avaient-ils donc oublié nos serments ! avaient-ils oublié que vous veillez au salut du peuple et que le peuple veille au vôtre ! ne savaient-ils plus ce, qu’aidé de ses Législateurs, le peuple français peut pour la liberté ! Du courage, Pères de la patrie, vrais montagnards, appelez des vengeurs et votre voix en produit des milliers. Continuez à sauver la chose publique, ne vous reposez que lorsqu’il ne restera plus dans l’atmosphère de la liberté aucun de ces miasmes pestilentiels qui l’infestent. Que la Montagne soit la roche tarpéienne d’où vous précipiterez tous les intrigans qui, leurs têtes roulant sur échafaud, vous fassent respecter; il exista des conspirateurs en France. Nous avons célébré une fête pour l’abolition de l’esclavage des nègres et l’inauguration des bustes des martyrs de la liberté : Marat et Lepeletier. Législateurs, restez à votre poste que vous honorez par vos vertus, le bonheur du peuple vous en impose l’obligation; votre dévouement à la cause de la liberté vous défend de le quitter. Guerre à tous les tyrans. La liberté, la République ou la mort, tels sont les sentiments qui nous animent et que nous ne cesserons de répéter qu’en cessant de vivre en vous défendant. Vive la République, vive la Montagne. » Castel (présid.), Legin (secret.), Regnard. 28 La citoyenne Suzanne Edeline, veuve Boul-lemer, expose qu’elle a été inscrite, par erreur, sur la liste des émigrés du district de Bellesme. Renvoyé à la commission des émigrés (1). 29 La citoyenne veuve Poirier expose ses besoins, et demande la conservation d’une pension de 200 liv., dont elle jouissoit. Renvoyé aux Comités de liquidation et des secours (2) . 30 « Un membre observe que la suppression des offices et l’inscription sur le grand livre des créances et des pensions dues par la République ont fait naître une foule de solliciteurs qui ont inondé les départemens de différens imprimés contenant des offres de service, soit pour la liquidation des offices, ou pour l’inscription sur le grand livre; que par ces offres de service, présentées d’une manière spécieuse et désintéressée, ces solliciteurs ont surpris la confiance d’un grand nombre de citoyens, qui leur ont adressé leurs titres et leurs certificats de résidence, et que, depuis, plusieurs de ces mêmes solliciteurs ont été mis en état d’arrestation, ou a) p.v., xxxvn, 2ii. (2) P.V., XXXVII, 211. ont négligé de déposer à temps utile les titres et certificats dont ils étoient dépositaires, en telle sorte que plusieurs propriétaires d’offices et créanciers de la République se trouvent maintenant privés, par la fatalité des délais fixés par la loi, de la liquidation de leurs offices ou de leurs pensions. » La Convention renvoie cette observation à ses Comités des finances et liquidation, pour lui en faire un prompt rapport » (1). 31 Le citoyen Flandrin, professeur de l’école vétérinaire, fait hommage à la Convention nationale d’un ouvrage sur l’éducation des moutons. Mention honorable, insertion au bulletin, et le renvoi au Comité d’agriculture (2) . 32 Les vétérans nationaux de la 84e compagnie présentent une pétition touchant leur traitement. Renvoyé au Comité de la guerre (3) . 33 Le citoyen Lohr, caporal au 18e bataillon des chasseurs, blessé le 23 mai (vieux style), demande à rejoindre son ancien corps, afin de pouvoir renvoyer aux esclaves des tyrans la balle qui l’a blessé. Renvoyé à la commission des mouvemens des troupes (4) . 34 La Société populaire de la section de la Halle-au-Bled annonce qu’ayant reconnu que l’intrigue a trouvé moyen de s’introduire dans les Sociétés sectionnaires, elle a arrêté de suspendre ses séances, et que, par un mouvement spontané, tous ses membres ont juré de se rallier et de maintenir la République une et indivisible, et de ne jamais se séparer de la Convention nationale. Mention honorable, insertion au bulletin (5). [ Extrait des délibérations; 24 flor. II] (6). La Société considérant que les Sociétés établies dans les différentes sections de la com-(1) P.V., XXXVII, 211. J. Paris, n° 501; M.U., XXXIX, 426; C. Eg., n° 636; J. Perlet, n° 601; J. Sans-Culottes, n° 455; Audit, nat., n° 600. (2) P.V., XXXVII, 212. Bin, 25 flor. (suppl*); J. Mont., n° 19. (3) P.V., XXXVII, 212. (4) P.V., XXXVII, 212. (5) P.V., XXXVII, 213 .B ln, 25 flor.; C. Eg., n° 635; J. Paris, n° 500; Rép., n° 146; J. Perlet, n° 600; Ann. R.F., n° 167; MU., XXXIX, 413; J. Sans-Culottes, n° 454; J. Sablier, n° 1318; Feuille Rép., n° 316; Débats, n° 602; (6) C 303, pl. 1112, p. 29. SÉANCE DU 25 FLORÉAL AN II (14 MAI 1794) - N° 35 329 mune de Paris ont fourni carrière à l’intrigue qui a trouvé moyen de s’y introduire et de dénaturer ainsi un des plus sûrs moyens que le patriotisme avait trouvé pour la déjouer; considérant que le gouvernement ayant besoin d’un centre et d’une activité qui ne peut être entravée sous aucun prétexte, considérant que la Société populaire séante dans la section de la Halle-au-Bled qui n’a cessé de marcher d’un pas égal dans la révolution qui a pris son origine au mois de 9bre 1792 (vieux style) au moment où la faction girondine voulait assassiner la liberté, qui la première a appelé la vengeance nationale sur la tête des Pétion, Barbaroux, Buzot, etc. doit encore donner une preuve constante de son amour pour la liberté, de son attachement au gouvernement révolutionnaire qui doit nous l’assurer, arrête qu’à compter de ce jour ses séances sont suspendues, que le président communiquera demain le présent arrêté à la Convention nationale, au Comité de salut public et à la Société populaire des Jacobins avec le nom des citoyens qui composent la Société; que le sceau de la Société sera remis au Comité révolutionnaire, et qu’elle s’assemblera pour la dernière fois septidi prochain pour entendre les comptes de la Société et satisfaire aux objets qui pourraient être dus, sans qu’on puisse délibérer à cette séance; et par un mouvement spontané et qui était dans tous les cœurs, tous les membres de la Société ont juré de se radier et de maintenir la République une et indivisible, et de ne jamais se séparer de la Convention nationale. Lavaux (vice-présid.). P.c.c : Le Guay (secrét.). (Applaudi.) 35 Le conseil-général de la commune de Paris [ayant le maire à sa tête] est admis à la barre : il félicite la Convention nationale sur le décret qu’elle a rendu le 18 floréal; et jaloux de faire disparoître tous les signes de la superstition et de propager les idées religieuses qui servent de base à la morale publique, il a arrêté que, sur tous les temples destinés aux fêtes publiques, on effaceroit ces mots, Temple consacré à la Raison, et que l’on y substitueroit cette inscription : à l’Etre suprême (1) . L’ORATEUR de la députation : Législateurs, Toutes les loix que vous donnez au peuple français pour la régénération de l’esprit public et l’affermissement de la liberté sont dictées par une philosophie politique. Les vertus, les mœurs, la probité servent de base à vos profondes discussions sur le salut de la patrie. Vous opposez aux efforts de l’Europe étonnée un peuple de héros représenté par des hommes de génie. Dans vos sublimes méditations, vous avez pensé que le bonheur du peuple se composait également de loix salutaires et de la morale publique, et qu’il était tems enfin de proclamer d’utiles opinions défigurées par le fanatisme, l’idée naturelle de (1) P.V., XXXVII, 213. l’existence de Dieu et la pensée consolante de l’immortalité de l’âme. Les efforts des ennemis de la révolution tournent toujours au profit de la révolution même. Ses premiers ennemis essayèrent de détruire la liberté, par l’anarchie de leurs excès, naquit la République. Les derniers conjurés ont employé tous les moyens pour anéantir la liberté par l’athéisme, des principes simples dont la nature fait un besoin à tous les cœurs se sont élevés sur les ruines dont ils nous avaient environnés. Ils ont voulu détruire la morale pour renverser la République qui repose sur cette base éternelle. Ils ont voulu outrer toutes nos vertus pour les rendre ridicules. Le patriotisme, ce sentiment pur et désintéressé, ils l’ont fait consister en un costume affecté; c’est ainsi que les prêtres, transformèrent la religion en des cérémonies bizarres, des signes superstitieux. Ils ont remplacé la fierté républicaine par l’insolence, la sévérité par l’injustice et la philosophie par l’intolérance. La comédie que jouaient des prêtres profondément hypocrites, commençait à tomber, faute de dupes pour les payer ou de spectateurs pour les entendre. Ils voulaient réveiller le fanatisme, ils excitèrent avec des intentions perfides un mouvement violent contre les cultes; mais leur espoir fut trompé, les étincelles du fanatisme furent étouffées par le bon esprit du peuple, votre sagesse et leur folie. L’idée de la vertu les importunait, ils voulurent créer une République sans vertu; l’idée d’un dieu était pour eux un reproche terrible, ils travaillèrent à créer urne religion sans dieu. Ils se réservèrent à juste titre les places de prêtres. Ils élevèrent des temples à la Raison; ils voulurent la rendre complice de leurs extravagances et de leurs attentats contre la divinité. Mais quelle était cette Raison à laquelle ils élevaient des temples ? Etait-ce à la raison éternelle qui gouverne le monde et qui préside à vos travaux ? Non sans doute puisqu’ils divinisaient en même temps l’athéisme. Etait-ce à la raison humaine qui croît avec nous, qui ne se forme que des leçons d’une longue expérience ? Ils ne pouvaient concevoir une idée aussi absurde et le peuple n’aurait d’ailleurs pas souffert qu’on eut outragé sa raison en lui dressant des autels. Est-ce à leur propre raison ? Mais des Français auraient-ils consenti à adorer la raison d’Hébert et de Chaumette. Ainsi ce mot la Raison prenait dans leurs bouches toutes les significations qui pouvaient être utiles à leurs intérêts; tantôt éclatait l’insurrection contre la liberté, tantôt c’était la femme d’un conspirateur (1) portée en triomphe au milieu du peuple. Un jour c’était l’actrice (2) qui la veille avait joué le rôle de Vénus ou de Junon; ou bien la Raison était représentée par un prêtre sexagénaire et fanatique, vieilli à l’ombre des autels de la superstition, dévoré de la soif de l’or et du pouvoir, se faisant un honneur de déclarer effrontément qu’il avait enseigné pendant vingt ans des erreurs et des absurdités auxquelles il n’avait jamais ajouté foi (3). Quel aveu! quelle probité ! quelle délicatesse ! (1) La femme de Momoro (précision donnée par Mon., XX, 524). (2) Mme Aubry, danseuse à l’Opéra, connue depuis sous le nom de Liberté-Aubry (id.) . (3) L’évêque de Paris, Gobel (id.). SÉANCE DU 25 FLORÉAL AN II (14 MAI 1794) - N° 35 329 mune de Paris ont fourni carrière à l’intrigue qui a trouvé moyen de s’y introduire et de dénaturer ainsi un des plus sûrs moyens que le patriotisme avait trouvé pour la déjouer; considérant que le gouvernement ayant besoin d’un centre et d’une activité qui ne peut être entravée sous aucun prétexte, considérant que la Société populaire séante dans la section de la Halle-au-Bled qui n’a cessé de marcher d’un pas égal dans la révolution qui a pris son origine au mois de 9bre 1792 (vieux style) au moment où la faction girondine voulait assassiner la liberté, qui la première a appelé la vengeance nationale sur la tête des Pétion, Barbaroux, Buzot, etc. doit encore donner une preuve constante de son amour pour la liberté, de son attachement au gouvernement révolutionnaire qui doit nous l’assurer, arrête qu’à compter de ce jour ses séances sont suspendues, que le président communiquera demain le présent arrêté à la Convention nationale, au Comité de salut public et à la Société populaire des Jacobins avec le nom des citoyens qui composent la Société; que le sceau de la Société sera remis au Comité révolutionnaire, et qu’elle s’assemblera pour la dernière fois septidi prochain pour entendre les comptes de la Société et satisfaire aux objets qui pourraient être dus, sans qu’on puisse délibérer à cette séance; et par un mouvement spontané et qui était dans tous les cœurs, tous les membres de la Société ont juré de se radier et de maintenir la République une et indivisible, et de ne jamais se séparer de la Convention nationale. Lavaux (vice-présid.). P.c.c : Le Guay (secrét.). (Applaudi.) 35 Le conseil-général de la commune de Paris [ayant le maire à sa tête] est admis à la barre : il félicite la Convention nationale sur le décret qu’elle a rendu le 18 floréal; et jaloux de faire disparoître tous les signes de la superstition et de propager les idées religieuses qui servent de base à la morale publique, il a arrêté que, sur tous les temples destinés aux fêtes publiques, on effaceroit ces mots, Temple consacré à la Raison, et que l’on y substitueroit cette inscription : à l’Etre suprême (1) . L’ORATEUR de la députation : Législateurs, Toutes les loix que vous donnez au peuple français pour la régénération de l’esprit public et l’affermissement de la liberté sont dictées par une philosophie politique. Les vertus, les mœurs, la probité servent de base à vos profondes discussions sur le salut de la patrie. Vous opposez aux efforts de l’Europe étonnée un peuple de héros représenté par des hommes de génie. Dans vos sublimes méditations, vous avez pensé que le bonheur du peuple se composait également de loix salutaires et de la morale publique, et qu’il était tems enfin de proclamer d’utiles opinions défigurées par le fanatisme, l’idée naturelle de (1) P.V., XXXVII, 213. l’existence de Dieu et la pensée consolante de l’immortalité de l’âme. Les efforts des ennemis de la révolution tournent toujours au profit de la révolution même. Ses premiers ennemis essayèrent de détruire la liberté, par l’anarchie de leurs excès, naquit la République. Les derniers conjurés ont employé tous les moyens pour anéantir la liberté par l’athéisme, des principes simples dont la nature fait un besoin à tous les cœurs se sont élevés sur les ruines dont ils nous avaient environnés. Ils ont voulu détruire la morale pour renverser la République qui repose sur cette base éternelle. Ils ont voulu outrer toutes nos vertus pour les rendre ridicules. Le patriotisme, ce sentiment pur et désintéressé, ils l’ont fait consister en un costume affecté; c’est ainsi que les prêtres, transformèrent la religion en des cérémonies bizarres, des signes superstitieux. Ils ont remplacé la fierté républicaine par l’insolence, la sévérité par l’injustice et la philosophie par l’intolérance. La comédie que jouaient des prêtres profondément hypocrites, commençait à tomber, faute de dupes pour les payer ou de spectateurs pour les entendre. Ils voulaient réveiller le fanatisme, ils excitèrent avec des intentions perfides un mouvement violent contre les cultes; mais leur espoir fut trompé, les étincelles du fanatisme furent étouffées par le bon esprit du peuple, votre sagesse et leur folie. L’idée de la vertu les importunait, ils voulurent créer une République sans vertu; l’idée d’un dieu était pour eux un reproche terrible, ils travaillèrent à créer urne religion sans dieu. Ils se réservèrent à juste titre les places de prêtres. Ils élevèrent des temples à la Raison; ils voulurent la rendre complice de leurs extravagances et de leurs attentats contre la divinité. Mais quelle était cette Raison à laquelle ils élevaient des temples ? Etait-ce à la raison éternelle qui gouverne le monde et qui préside à vos travaux ? Non sans doute puisqu’ils divinisaient en même temps l’athéisme. Etait-ce à la raison humaine qui croît avec nous, qui ne se forme que des leçons d’une longue expérience ? Ils ne pouvaient concevoir une idée aussi absurde et le peuple n’aurait d’ailleurs pas souffert qu’on eut outragé sa raison en lui dressant des autels. Est-ce à leur propre raison ? Mais des Français auraient-ils consenti à adorer la raison d’Hébert et de Chaumette. Ainsi ce mot la Raison prenait dans leurs bouches toutes les significations qui pouvaient être utiles à leurs intérêts; tantôt éclatait l’insurrection contre la liberté, tantôt c’était la femme d’un conspirateur (1) portée en triomphe au milieu du peuple. Un jour c’était l’actrice (2) qui la veille avait joué le rôle de Vénus ou de Junon; ou bien la Raison était représentée par un prêtre sexagénaire et fanatique, vieilli à l’ombre des autels de la superstition, dévoré de la soif de l’or et du pouvoir, se faisant un honneur de déclarer effrontément qu’il avait enseigné pendant vingt ans des erreurs et des absurdités auxquelles il n’avait jamais ajouté foi (3). Quel aveu! quelle probité ! quelle délicatesse ! (1) La femme de Momoro (précision donnée par Mon., XX, 524). (2) Mme Aubry, danseuse à l’Opéra, connue depuis sous le nom de Liberté-Aubry (id.) . (3) L’évêque de Paris, Gobel (id.).