296 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée d’Aix.] Art. 34. L’exclusion des cours suprêmes des personnes possédant fiefs. Art.. 35. La suppression de tous les tribunaux inutiles et onéreux. Art. 36. L’exercice au nom du Roi dans les ju-1 ridictions locales. Art. 37. L’abrogation de la vénalité des offices. Art. 38. La suppression de la présidence, et la suppression de Ja permanence de tout membre non amovible ayant, en l’état des choses, entrée auxdits Etats provinciaux. Art. 89. L’exclusion des mêmes Etats des magistrats et de tous officiers attachés au fisc. Art. 40. La désunion de la procure du pays, du consulat de la ville d’Aix. Art. 41. L’admission, dans lesdits Etats, des gentilshommes non possesseurs de fiefs, et du clergé du second ordre. Art. 42. L’impression annuelle des comptes de la province, dont l’envoi sera fait à chaque communauté. Art. 43. L’obligation de faire et arrêter, dans le sein des Etats clu pays, la répartition des sommes que Sa Majesté accorde à la province, ensemble celle de l’imposition de 15 livres par feu à la haute Provence. Art. 44. L’extinction, moyennant l’indemnité qui sera réglée, de tous les droits féodaux gênant la liberté des mutations, et opérant la désertion des habitants des bourgs et des villages, et l’abolition du droit de chasse. Art. 45. L’obligation à chaque province d’exiger tous les deniers perçus dans son district pour le compte du Roi, sous quelque dénomination que ce soit; de payer de ces deniers les sommes dues par l’Etat dans leurs mêmes provinces, et de verse rie restant, s’il y en a, directement dans la caisse des finances. Art. 46. La restriction de l’autorité des tribunaux suprêmes à la seule puissance exécutrice, sans jamais pouvoir user de la puissance législative. Art. 47. La soumission des communautés envers les Etats de leur province, ou envers la commission intermédiaire d’iceux, pour tout ce dont elles sont commises à l’inspection et à l’autorisation. Art. 48. Responsabilité, de la part des ministres, envers l’Etat et la nation, chacun de la partie de son administration, et la faculté aux Etats généraux de faire poursuivre ceux d’entre eux qui seront convaincus de péculat. Art. 49. La protection et l’encouragement de l’agriculture, et l’admission des cultivateurs dans toutes les charges, en concurrence avec les bourgeois et les artistes. Art. 50. La défense de tuer des veaux et des agneaux. Art. 51. De prévenir et d’empêcher tous les abus qui se commettent sur toutes les denrées comestibles, principalement sur les grains et salaisons. Telles sont les doléances, plaintes et remontrances, arrêtées cejourd’hui, 29 mars 1789, dans l’assemblée des habitants de Gemenos, nés Français, naturalisés, âgés de vingt-cinq ans au moins, et compris dans le rôle des impositions. Et ont signé qui ont su : Ainsi signé : Laget, maire; Taure], consul; H. Deluy; L. Etienne; J. Pignot; J. Bernard; Pi-gnol; B. Jomat; J. Jayné; L. Guest ; F. Pignol; J. Breth; Jayné; B. Lâuzet; J.-B. Samat; Mo'rrel-lard; L. Romanès; Joseph Deluy; D. Pellissier; F.-H. Hobert; A. Taurel ; Brest; A. Thobert; Guillaume de Pouziers; Jean-François Mallet; Augustin de Pouziers ; Auzet ; Louis Brest ; Jourdan; E. Mannier; J. Jean; Henri Ribouet; Bar-thélemy-Honoré de Luv; Martin, lieutenant de juge, et Romané, greffier. CAHIER Des doléances de la communauté de Gignac, sénéchaussée d'Aix , diocèse d' Arles ( 1). Dans le moment où le souverain desire entendre les plaintes de tous ses sujets, la communauté de Gignac expose combien elle souffre, surtout en deux points essentiels à l’existence de toute société, qui sont la religion et la liberté relative à l’aliment de première nécessité. Le fief de Gignac est distinct et séparé de tout autre fief appartenant au domaine du Roi dans les quinizème et seizième siècles. Son terroir est divisé en trois quartiers, éloignés les uns des autres d’environ trois quarts de lieue, pratiqués par des chemins montagneux. Ges trois quartiers formant le fief sont ordinairement désignés sous le nom de Rove, de Plan et Denzué, et peuplés ensemble d'environ douze cents âmes. Le principal quartier, où est la résidence du curé amovible, ainsi que l’hôtel de ville, est composé de cent feux; le second de quatre-vingts, et le troisième de cinquante : tous lesquels feux réunis démontrent que le fief de Gignac est composé de deux cent trente feux. Art. 1er. L’église de Gignac est un prieuré-cure, en faveur duquel le terroir supporte des dîmes, dont le produit est d’environ 3,000 livres, plutôt plus que moins. Elle n’a jamais eu d’autre connaissance de son bénéfice que celle que lui fournit la transaction passée en 1603, rière les écritures de M. Lebon, notaire royal de Marignane, entre messire de Guizauffret, prieur dudit Gignac, et les consuls de ladite communauté, portant la qualité des dîmes envers tous les possédants biens en faveur du prieur, et| toutes les obligations envers ledit prieur relatives à sa qualité. Ge bénéfice a été desservi par un titulaire jusque vers le milieu du siècle passé, époque à laquelle les jésuites d’Arles, s’en étant emparés sans aucun titre, le firent desservir par un curé amovible faisant sa résidence au quartier principal, ainsi qu’il l’a toujours faite depuis plus d’un siècle. A la destruction des jésuites, la direction des économats a traité la paroisse de Gignac de la même manière. Cependant le service de cette église, ne pouvant être fait par le seul curé amovible qu’on lui donne depuis un temps immémorial, les fidèles manquent, depuis ce temps, des instructions qui font la base des bonnes mœurs, et sont privés des derniers secours de la religion, et surtout le quartier Denzué, qui, de tous temps, a toujours été le plus abandonné. On a eu la douleur de voir qu’un pauvre mourant de ce quartier, désespérant pouvoir se confesser à un prêtre, déclarer sa confession à un laïque; des enfants qu’on apportait pour baptiser au quartier principal, mourir en chemin sans baptême. On trouve des adolescents dans ce dernier quartier qui ne connaissent pas encore les premiers éléments de notre croyance, faute de catéchiste, l’éloignement des quartiers rendant (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire. [Etats gén. 1789. Cahiers. [ ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée d’Aix.] 297 impossible la réunion des fidèles autour d’un seul pasteur. Les habitants des autres quartiers, ayant voulu avoir la consolation d’entendre au moins la messe des dimanches et fêtes, ils ont payé, pour cela, chacun la somme de 150 livres. Mais ils ont seulement pu se procurer la présence d’un prêtre pendant le temps qu’il lui fallait pour dire la messe, ce prêtre ne venant que pour cet objet, et ayant toujours à remplir le même ministère dans une autre paroisse. La communauté de Gignac a fait, de tous les temps, des réclamations inutiles sur la disette des secours spirituels dont elle s’est trouvée affligée, quoique son terroir produise en dîmes le double de ce qu’il faudrait pour que son église fut bien servie. Elle a eu à lutter contre la puissance des jésuites, et après, soit contre le crédit de la direction des économats, soit contre le projet que Mgr l’archevêque d’Arles a de réunir ce bénéfice à son collège. Ainsi, le premier pasteur, les tribunaux et la direction ne laissent aux infortunés habitants de Gignac d’autre ressource que celle d’avoir recours à la justice du Roi. Iis espèrent que la triste situation dans laquelle ils sont pour le manque de secours spirituels, percera son âme très-chrétienne, et qu’il daignera favorablement écouter leurs justes réclamations, A ces causes, la communauté de Gignac réclame de la justice du meilleur des rois, que, puisque les dîmes que ses habitants payent sont plus que suffisantes pour entretenir les prêtres nécessaires à la desserte de sa paroisse, le produit d’icelles soit consacré : 1° A l’établissement d’un curé fixe; 2° A l’établissement d’un prêtre au quartier Denzué seulement, vu que celui du Plan en a un depuis une année; 3° A la dotation de la sacristie de la paroisse, pour ladite somme être employée à la fourniture des ornements, vases sacrés et autres choses nécessaires, ainsi qu’à celle pour les sacristies des églises des autres deux quartiers, pour être employée au même usage ; 4° A la contribution pour la partie qui compète au décimateur dans la réparation et agrandissement de l’église principale; laquelle, vu sa petitesse, ne peut contenir que les deux tiers des fidèles, et est, religieusement parlant, indigne de son mérite. Cette contribution ayant été totalement supprimée depuis plus d’un siècle, cela a été cause que les habitants (en sus des dîmes) ont, non-seulement fourni jusqu’aujourd’hui tous les ornements, vases sacrés et autres fournitures, mais encore ils ont contribué à toute réparation et construction; parce que ceux qui ont, de tout temps, retiré le produit de leurs dîmes, leur ont toujours refusé toute contribution et fournitures. Malgré cela, les pauvres paroissiens ont toujours payé leurs dîmes avec la plus grande justice, qui, accusant encore plus les décimateurs, rendent le bon peuple de Gignac plus intéressant dans l’injustice qu’il supporte depuis trop longtemps. Mais, comme on pourrait objecter à ladite communauté que le produit effectif de ses dîmes n’est pas à même de faire face à ses demandes, en ce cas elle s’oblige volontiers de parfournir à tout moyennant qu’on veuille se départir en sa faveur du produit dudit bénéfice. La justice de sa demande lui fait espérer d’être favorablement écoutée par le meilleur des rois, père de tous ses sujets, qui ne désire rien tant que leur bonheur, et surtout pour ce qui regarde le bonheur de leurs âmes. Art. 2. La commune de Gignac a encore de très-justes plaintes à fournir sur les redevances qu’elle fait à son seigneur, savoir ; droit de banalité des fours et moulins situés hors son fief, et notoirement reconnus insuffisans, droit de lods, d’indemnité, de reconnaissance, et cens. Banalité. Par arrêt du parlement de cette province, tous les habitants de Gignac ont été soumis d’aller moudre leur blé, et cuire leur pain, aux moulins et fours du marquis de Marignane, qui se trouve aussi le seigneur de Gignac, quoique les deux fiefs aient été, de tout temps, distincts et séparés, puisque celui de Gignac, en 1433, était possédé par un autre seigneur que celui de Marignane, et après réuni au domaine du Roi. Les fours et moulins de Marignane sont trop éloignés de Gignac, pour que l’obligation imposée aux habitants de ce dernier soit remplie sans un grand préjudice. Il est même moralement impossible que lesdits habitants puissent la remplir our la cuite du pain. Il faudrait que chaque ha-itant à Marignane se procurât un logement pour y porter son pain, ou qu’il exposât sa pâte à se gâter, s’il était obligé de la porter de chez lui à Marignane pour y aller moudre son blé, les moulins étant notoirement insuffisants la moitié de l’année. Il est vrai de dire qu’il est moralement impossible que les habitants de Gignac soient soumis à cette servitude. Dire le contraire, serait soutenir une tyrannie des plus atroces, en forçant les habitants d’aller moudre leur blé à des moulins par eux reconnus ne pouvoir le faire. Malgré toutes ces bonnes raisons, la communauté de Gignac en a encore une des plus fortes, et qui caractérise encore plus l’injustice de la soumission. Le seigneur avait-il quelques titres ou la possession requise pour soumettre les habitants de Gignac à cette redevance ? Non ; malgré cela, un arrêt les y soumet; et pourquoi? parce que c’était un seigneur haut justicier qui plaidait contre sa communauté. Ladite communauté ayant donc inutilement prouvé, dans le procès, son exemption de banalité auxdits fours et moulins de Marignane, elle vient aujourd’hui profiter du moment favorable, pour réclamer auprès du Roi la liberté pour tous ses habitants d’aller moudre leur blé, et cuire leur pain à leur plus grande commodité; d’être, en conséquence, délivrés de l’obligation indue d’aller, à cet effet, à Mariganne, et de pouvoir construire, dans son terroir, tous les fours et moulins qui leur seront nécessaires; sans que le seigneur puisse y mettre aucun obstacle, ni y imposer aucune servitude. Par ce moyen, lesdits habitants seront, non-seulement délivrés de cette injuste servitude, mais encore ils seront à l’abri des injustices rendues contre eux par les fermiers, meuniers desdits moulins, en gâtant leurs farines, en prenant un droit de mouture sans la farine; et exempts de payer ce même droit à un sept pour cent, qui est un taux des plus forts et des plus illégaux. Elle réclame encore la restitution de toutes les sommes que ledit seigneur a exigées d’elle, en force du susdit arrêt, soit sous le nom de restitution du droit de banalité, soit pour les frais qu’il lui a indûment occasionnés; pour le payement desquelles sommes la communauté a été 298 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée d’Aix.] mise dans la plus grande de tontes les détresses, ayant été obligée, dans sa pauvreté, d’emprunter jusqu’au concurrent de la somme de 25,000 livres, ainsi par vous, Sire, autorisée. Droit de lods. Ce droit, dans son principe, pourrait être incontestable, si, dans le même principe, on l’exigeait avec équité. Mais, comme à ce droit on y en a ajouté un autre, consistant à un treizain qui, joint à l’autre, produit au seigneur le six pour cent, cela est cause que la, communauté réclame la suppression de ce droit, ou du moins la fixation et modération. Droit d'indemnité . Le droit d’indemnité est un droit qui soumet toutes les communautés à payer au seigneur, de dix en dix années, un demi-lods, ou de vingt en vingt années ce droit entier sur la valeur de tous les bénéfices qu’elles possèdent, à l’exception fies églises ayant titre de paroisse. De ce principe, si les édifices qu’une communauté possède sont (d’après le rapport lait à cette occasion, et que la communauté paye) évalués 3,000 livres, elle est obligée de payer au seigneur, pour droit d’indemnité de dix en dix ans, la moitié de ce droit, et de vingt en vingt ans le double; et pourquoi? parce que les possessions des corps et communautés, étant déclarées être en mainmorte, c’est à dire de ne pas se vendre, il faut ue les communautés payent ce droit pour in-emniser Je seigneur. De là s’ensuit que les communautés sont privées d’un droit que les particuliers ont de ne rien payer au seigneur pour les biens qu'ils possèdent, quand même ils les posséderaient des siècles, et obligées de payer comme un intérêt de ses propres fonds. Gomme la perception de ce droit paraît illégale, la communauté de Gignac en réclame la suppression. Reconnaissance. A l’occasion des mutations et nouvelles reconnaissances, les fermiers du seigneur ont l’adresse de rendre les cens plus forts que ceux portés sur les baux emphytéotiques. A cet effet, la communauté de Gignac réclame le droit de faire examiner tous les baux emphytéotiques, pour les comparer avec les reconnaissances. Et là où elle découvrira des usurpations au préjudice, de ses habitants, elle en réclame la restitution avec intérêt (non pour elle, mais en faveur des habitants auxquels l’usurpation aura été faite), ainsi que les frais qu’elle aura faits à cette occasion. Cens. Les cens sont un droit inextinguible en faveur du seigneur. Celui-ci, au moyen de cette redevance," tient tous ses vassaux dans une servitude qui les empêche de réclamer contre lui leurs droits les plus légitimes, parce qu’iceux lui sont annuellement redevables; les cens, tous payables en blé et de la première qualité, augmentent encore à proportion de la cherté de cette denrée et de la fixation haute que les fermiers ne manquent pas d’y mettre. Cette redevance, étant estimable en argent, pourrait être payée beaucoup plus facilement et pins justement m argent. Elle pourrait aussi être rache table., §t çe serait le seul moyen pour préserver les habitants des vexations qu’ils éprouvent à ce sujet, sans porter aucun préjudice au seigneur. La communauté de Gignac a encore deux objets, non moins intéressants, en faveur desquels elle réclame la faveur de son souverain : consistan t aux bois et herbages des terres gastes, et prétendues usurpations des mêmes terres. Bois et herbages. Par les premiers baux emphytéotiques et autres, tous les seigneurs de Gignac ont accordé aux emphytéotes le droit et usage des bois et herbages de toutes les terres gastes avec cette réserve du surplus. Comme on ne peut donner une plus juste signification à ce surplus que celle de dire que le seigneur s’est réservé tous les bois et herbages que les habitants et leurs troupeaux ne pourront consumer, il sera aussi vrai de dire qu’au moment que les habitants manquent de bois et leurs troupeaux d’herbages, le seigneur n’a plus droit de vendre les bois ni les herbes. C’est cependant ce que fait le seigneur de Gignac, toutes les fois qu’il en a l’occasion. Prétendues Usurpations. L’injustice que les habitants souffrent à l’occasion des susdites usurpations est assez reconnue, puisque la cour des comptes de cette province a casse deux transactions par lesquelles la communauté, pour ne pas plaider avec son seigneur (car, en cette province, les communautés, au moins en grande partie celles qui sont sous la domination des hauts et puissants seigneurs, ont toujours tortj, avait défalqué du lo.ds du seigneur 28 livres cadastrales, c’est-à-dire qu’elle avait augmenté ses biens nobles d’autant, en dédommagement des prétendues usurpations que les habitants pouvaient avoir faites sur les gastes. Pour donner une juste connaissance des injustices commises à cette occasion, nous ferons premièrement observer qu’elles ne peuvent avoir lieu que contre les habitants qui possèdent quelque propriété adhérante à la terre gaste, et voici comment : Le seigneur réclame une usurpation contre un de ces particuliers delà propriété Pour quelle ait lieu, il faut que la contenance soit, plus forte que celle portée par son acte de bail, ou plus souvent par la reconnaissance la plus récente. Selon lui, pour lors, l’usurpation existe, � Voyons l’abus. Pour constater une plus grande contenance, des experts sont envoyés de la part du seigneur sur les lieux, munis d’un arpent et pièces justificatives, où étant (le propriétaire présent ou non), commencent ces opérations. Si, en usurpant la propriété cultivée, ils y trouvaient un excédant de la contenance portée par l’acte de bail ou reconnaissance, pour lors, l’usurpatian serait justement réclamée. Mais comme de pareilles usurpations n’avaient jamais lieu, et comme l’intérêt du seigneur est qu’il s’en trouve, voici comment ils opèrent : Il est rare que pareilles propriétés ne soient entourées de quelques rochers, contigus à quel* ques mauvaises langues de terre inculte. Pour lors, ils commencenoent de confondre tout cela dans l’arpentage de la propriété. Si le propriétaire y est, il a beau leur dire : cela ne m’appartient-pas, ils continuent leurs opérations. Par ce moyen, ils trouvent) une usurpation considérable, 299 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES . [Sénéchaussée ou au rocher ou à ce mauvais inculte. Non ; cp n’est pas cela qu'ils veulent, mais le meilleur de la propriété. Et, en force du rapport desdits experts, le propriétaire est condamné à une restitution; et s’il veut son bien, il faut qu’il le repaye, ou qu’il y supporte un fort cens, ou si mieux aime plaider sa cause, la triste ressource pour un vassal ! Dernier objet. Le seigneur de Gignac se prévaut d’un droit que la communauté regarde plutôt comme ridicule qu’injuste. Il y a dans le terroir un quartier vulgairement appellé les Bottes, presque toutes complantées d’oliviers. Dans toutes les propriétés que les particuliers y possèdent, le seigneur prétend avoir le droit exclusif d’y envoyer ses troupeaux pour y manger les herbes, de préférence à ceux du propriétaire. La communauté ne saurait définir d’où dérive ce droit; mais comme elle reconnaît très-bien le tort qu’il porte aux habitants qui possèdent ces propriétés, c’est la cause qu’elle en réclame la suppression. Telles sont les plaintes et doléances particulières à la communauté de Gignac, qu’elle expose au Roi, père de tous ses habitants, comme membres de ses sujets ; de l’amour et justice duquel elle espère être favorablement écoutée. Objets qui intéressent la généralité du royaume. La communauté de Gignac reconnaît dans le royaume deux fléaux qui sont la source de tous ses malheurs, à savoir : le mépris général de la présente religion qui est professée, et le luxe. Religion. Pour qu’un souverain puisse avoir le bonheur d’être père d'enfants fidèles, obéissants, justes et charitables, il faut qu’il n’oublie rien pour leur procurer de bons pasteurs. Pour avpir de bons pasteurs, il faut avoir de bous évêques, et pour avoir de bons évêques, il faut qu’ils soient exclus de la cour et pauvres. Pour lors, iis seront de véritables piinistres rie Jésus-Christ. Et de ce principe, ils auront plus à cœur le salut des ouailles qui leur seront confiées, que les revenus de leurs bénéfices. Pour le bonheur du royaume, il ne faut que de véritables ouvriers évangéliques; par conséquent, tous les possesseurs de bénéfices à simple tonsure, doivent être regardés, comme des membres •inutiles a. la religion et à l’Etat. Notre sainte religion est, si sûre, qu’il n’y a qu’à suivre fidèlement sa morale pour être exempt de tout vice, et posséder toute vertu. Mais sa morale en général est si méprisée que les iburs consacrés au Seigneur sont le théâtre de tous les vipes, Le luxe. Ppur ce qui est du luxe, elle se contente d’ex-posèr que ce vice est un des plus préjudiciables à rEtot, et si général qu’il a pénétré jusque dans les plus, pauvres chaumières. Elle réclame à présent la réformation du code civil et criminel, la .suppression dé tous les tribunaux Inutiles et onéreux ; une attribution; à peux des arrondisseineuls dé souveraineté, jusqu’au çouçuFrool d’URe SQJftnfte déterminée : i’ar brogation de toutes lettres attentatoires à la liberté 4®s Moyens, la faculté à ceux-ci, de quelque ordre qu’ils soient, de concourir pour tous emplois militaires, bénéfices et charges attributives de noblesse, et surtout contre, 1a vénalité de? offices. La communauté de Gignac réclame encore une modération dans le prix du sel rendu uniforme pour tout le royaume. Cet objet lui est des plus intéressants par la grande quantité de troupeaux qu’elle a dans son terroir. Elle réclame encore l’abolition de tous droits de circulation dans l’intérieur du royaume. Objets relatifs et particuliers à la province. La communauté de Gignac expose au plus juste des rois combien la plus grande partie des communautés de la province sont affligées par le despotisme que la plus grande partie des seigneurs possédant fiefs exercent contre tous leurs vassaux, au point qu’ils sont, moralement parlant, plus despotiques dans leurs fiefs, que lui sur son trône : ce qui est cause que lesdites communautés, ainsi que les habitants qui les composent, sont obligés de sacrifier leurs droits les plus justes, pas même se plaindre d’aucun dommage, et surtout celui dont presque tons les provinciaux souffrent, causé par la chasse , dommage si grand qu'il est inappréciable. Elle expose encore les vexations et injustices criantes que ses sujets souffrent de la part des employés des fermes, et surtout les pauvres habitants de la campagne, qui, par leur ignorance, méconnaissent entièrement la perception de tout droit. Elle expose aussi le préjudice que la culture des terres pourra souffrir à l’occasion de l’éta-blissement des matelots pour le service des classes, et l’incongruité d’obliger des cultivateurs à professer un état qui ne peut tendre qu à sa destruction. Elle réclame la convocation des trois ordres pour réformer la constitution du pays; qu’il soit permis aux communes de se nommer un syndic avec entrée aux Etats. Elle pense que la perpétuité de la présidence et la permanence de tout membre non amovible, ayant, en l’état, des choses, entrée auxdits Etais, sont deux objets très-préjudiciables à la piovince; elle requiert l’exclusion des mêmes Etats, de? magistrats et officiers attachés au fisc; la désunion dé la procure du pays du consulat de la ville d’Aix; l’admission des gentilshommes, non possesseurs de fiefs, et du clergé du second ordre ; l’égalité de voix pour l’ordre dp tiers contre celles de? deux premiers ordres réunis, tant dans les Etats que dans la 'commission, intermédiaire ; pt surtout l’égalité de? eqftbrilâutions pour toutes charges royales et locales, sans exemption aucune, et nonobstant toute possession pu, privilèges quelconques; l’irn-pression annuelle des comptes de la province, dont envoi sera fait dans chaque communauté ; et que la répartition des secours que le Roi accorde au pays, ensemble de l'imposition de 15 livres par feu, affectée à la, haute Provence, sera faite dans le sein des Etats, et pV eux arrêtée. Déclarant, au surplus, Rassemblée, que, quant à tous autres objets, soit généraux pour le royaume, Soit particuliers à la province, elle, s’en réfère absolument au cahier que l’ordre du tiers déterminera lors de sa réunion ppur l'élection de ses députés aux États généraux, approuvant dés à présent.» tout ce qui sera fait et. arrêté par ledit oydre,.. Signé : G. Gouirau, viguier ; biPtâUd, consul ; 300 [États gén. 1789. Cahiers.] ARCHIVES PARLEMENTAIRES. [Sénéchaussée d’Aix.] Joseph Gouirau ;P.-F. Gouirau; B. Ricard, député; Seren; J. -P. Gouirau; Gouirau; Joseph Olive; Joseph-Antoine Gouirau ; Germain Livon ; Vincent Gouirau; J.-P. Gouirau; H. Turc; J. -P. Seren; F. Gouirau ; J.-F.-F. Gouirau; J. Gouirau ; P. Chou-quet, député; Jean Jean, député; J. -F. Gouirau. CAHIER Des doléances , plaintes et remontrances de ce lieu deGinasserois,viguerie de Barjoh, sénéchaussée d'Aix, rédigées par nous , maire et consul de ladite communauté , en V assemblée générale de tous les habitants de cedit lieu , convoquée ce jour-d’hui, 29 mars 1789, en conformité des ordres de Sa Majesté, portés par ses lettres du 2 de ce mois, pour la convocation des Etats généraux , règlement y annexé, et de l'ordonnance de M. le lieutenant général de la sénéchaussée d’Aix, du 12 de ce mois (1). Sa Majesté ne pouvait donner à ses peuples une plus grande marque de son amour, qu’en ordonnant la convocation des Etats généraux du royaume, et en autorisant tous ses sujets à concourir à l’élection des députés chargés de lui porter leurs vœux et leurs réclamations, seul et unique moyen de faire parvenir la vérité au pied du trône. C’est pour satisfaire à des invitations aussi paternelles et aussi bienfaisantes, que ses zélés et fidèles sujets de la communauté de Ginasserois ont fait les doléances suivantes, et arrêté que les sieurs députés qu’élira l’ordre du tiers en l’assemblée générale du ressort, pour assister et voter aux Etats généraux de France, seront expressément chargés d’y solliciter : Art. 1er. Qu’aucuneloi, de quelque nature qu’elle soit, ne puisse être établie et exécutée sans l’acceptation préalable et libre des Etats généraux. Art. 2. Qu’aucun impôt ne sera levé sans la même acceptation ; et que lesdits Etats ne pourront le consentir que pour une somme déterminée et pour un temps limité, qui ne pourra être plus long que celui fixé pour la prochaine tenue des Etats généraux, en sorte que cette prochaine tenue, venant à ne pas avoir lieu, tout impôt cesserait. Art. 3. Qu’on s’occupera à connaître l’étendue de la dette nationale, et à la consolider ensuite, en hypothéquant aux créanciers de l’Etat des impôts déterminés. Art. 4. Que les impôts consentis, après avoir reconnu la dette et vérifié et réglé les dépenses de l’Etat, seront également et généralement répartis, sans distinction de personnes et de biens, entre tous les ordres, en sorte qu’il ne sera plus question d’impôts distinctifs, et d’exemption personnelle ou réelle. Art. 5. Que les Etats généraux s’occuperont de simplifier les impôts, et examineront si l’impôt territorial ne pourrait pas suppléer à beaucoup d’autres. Art. 6. Que les Etats généraux seront assemblés de trois en trois�ms, et que dans l’intervalle, les règlements provisoires et les choses instantes ne pourront être faites qu’avec le consentement de nos Etats provinciaux. Art. 7. Que les délibérations des Etats généraux seront prises par les trois ordres en commun, et les suffrages comptés par tête et non par ordre. Art. 8. Que, dans les Etats généraux, les députés (1) Nous publions ce cahier d’après un manuscrit des Archives de l’Empire. < du tiers ne seront soumis à aucune cérémonie, à aucun devoir qui puisse être incompatible avec la dignité de l’ordre qui représente la nation. Art. 9. Que les Etats généraux fixeront et assigneront librement, sur les demandes de Sa Majesté, les fonds de chaque département. Art. 10. Que les ministres seront personnellement comptables de l’emploi des fonds qui leur seront confiés, et deviendront justiciables des Etats généraux, qui seuls pourront prononcer sur leur conduite en tout ce qui sera relatif aux lois du royaume. Art. 1 1. Que les comptes rendus aux Etats généraux seront publiés. Art. 12. Que la corvée en nature sera supprimée, et suppléée par une imposition également répartie sur les propriétés des trois ordres. Art. 13. Que la levée et les frais des milices ne seront plus une charge qui retombe uniquement sur le peuple; que si cette forme d’avoir des troupes est conservée, la noblesse et le clergé seront soumis également à fournir des hommes, à les équiper et à tous les frais qu’entraînera la levée. Art. 14. Que l’on s’occupera de la réforme des lois civiles et criminelles, à l’effet de rendre les premières moins onéreuses, et les secondes plus humaines et plus douces. Art. 15. Que l’on cherchera les moyens d’as-. surer l’exécution des lois, en sorte que personne ne puisse les enfreindre impunément. Art, 16. Que la liberté individuelle sera garantie à tous les Français; qu’en conséquence, personne ne pourra être arbitrairement emprisonné ;sur des ordres verbaux ou écrits, quelle que soit l’autorité dont ces ordres soient émanés; et que la liberté d’un citoyen ne pourra être compromise que par un décret décerné par les juges ordinaires. Art. 17. Que les juges ordinaires connaîtront de l’infraction à cette loi. Art. 18. Qu’on aura le respect le plus absolu pour toute lettre confiée à la poste, et qu’on prendra les moyens les plus sûrs d’empêcher qu’il y soit porté atteinte. Art. 19. Que la liberté de la presse n’éprouvera plus aucune gène, sauf les réserves qui pourront être faites par les Etats généraux, et sauf à répondre des écrits répréhensibles après Pimpres-sion, suivant l’exigence des cas. Art. 20. Que tous les tribunaux inutiles et onéreux seront supprimés. Art. 21. Que l’administration de la justice se fera au nom du Roi dans tout le royaume. Qu’en conséquence, on réunira toutes les justices sei-* gneunales aux justices royales, auxquelles on formera par ce moyen un arrondissement. Art. 22. Qu’on attribuera à ces tribunaux d’arrondissement la souveraineté jusqu’à une somme déterminée. Art. 23. Qu’on réclamera contre la vénalité des offices de magistrature. Art. 24. Que l’on supprimera tous les offices qui n’ont eu, dans leur origine, aucun principe d'utilité, et qui n’ont été que des expédients de finance : de pareils offices étant des impôts déguisés qui surchargent le peuple, et qui troublent la police de l’Etat. Art. 25. Qu’on n’appliquera plus le mot domaine à la justice, qui est une dette royale, et non un domaine du Roi, et qu’en conséquence, on abolira tous les droits bursaux qui rendent inaccessible l’accès des tribunaux. Art. 26. Que, conformément à nos statuts, on